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CHAPITRE PREMIER

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Table des matières

Le soir tombe sur la terre allemande.

Dans le rapide qui lâemporte, Thor de Tornten embrasse de tous ses regards le paysage familier: la Patrie.

Une tiédeur vient du dehors, mais sur lâesprit du jeune officier de marine pèse toujours lâaccablante ardeur des heures quâil vient de vivre.

Sous ses yeux, les couleurs sâestompent, se fondent en un gris monotone que troue, par endroits, lâéclat de signaux lumineux.

Dans son esprit, il fait clair, comme au matin limpide dâun beau jour de printemps.

Depuis quâil a franchi la frontière hollandaise, il se répète les dernières paroles du kaiser déchu, au moment des adieux:

—Et, Tornten, saluez pour moi la Patrie!

Il comprend, maintenant, lâaspiration passionnée que révèle ce cri, il conçoit le frémissement qui a fait trembler cette voix dâempereur jadis si ferme, si sûre dâelle.

Le lieutenant de vaisseau soupire; ses pensées prennent un tour plus profond. Par bonheur, depuis des heures, il est seul dans son coupé et personne nâest venu troubler sa méditation.

Le souvenir dâAmerongen lui fait sentir plus pénibles les tristesses de lâexil.

Après tout, il a femme et enfant et son cÅur dâAllemand bat dâun ardent désir de revoir le pays.

Mais voici que le rapide entre en gare de Hanovre. Câen est fini de la rêverie solitaire.

Comme Thor redressait sa haute taille de géant blond, sâintéressant au mouvement de la gare, un employé ouvrit brusquement la portière, déposa dans un des coins une somptueuse valise de peau claire, tandis que, pénétrant dans le compartiment, un petit personnage barbu prit place en face du jeune marin.

A lâinstant même, comme pour échapper au commencement dâinvolontaire examen auquel allait se livrer son vis-à -vis, le nouveau venu déploya devant ses yeux le dernier numéro du Vorwaerts.

Cependant, avant même que le train ait repris sa marche, il parut se rappeler quâau moins officiellement la révolution nâavait rien modifié aux règles de la bienséance.

Il laissa, en effet, retomber son journal et sâinclina légèrement devant son compagnon de voyage dont les formes minces et raides évoquaient le souvenir récent de lâuniforme impérial. Mais les quelques paroles de politesse dont il allait accompagner son salut ne dépassèrent pas ses lèvres.

Stupéfait, il regarda son voisin, secoua sa tête expressive et fine, puis sâexclama, tout joyeux:

—Tornten!

—Grotthauser! sâécria le lieutenant de vaisseau, répondant à cette soudaine reconnaissance.

Et les deux amis échangeaient avec une chaleureuse poignée de main les congratulations que comportait le hasard heureux auquel ils devaient leur rencontre.

—Quelle surprise de te retrouver, Tornten! opina le petit homme, dont tout le fin visage riait dans sa barbe dâor, tandis quâil repliait et déposait près de lui son journal. Il y a bien six ans que nous nous sommes vus.

—Exactement, fit Thor. Câétait à Berlin. Heureux temps! Et toi, quâes-tu devenu depuis? Que viens-tu faire à Hanovre?

—Que de questions! Mais, sais-tu bien que câest plutôt à moi de me renseigner sur les événements auxquels tu as pris part dans ces dernières années!

«Moi, je suis resté à lâarrière, une vieille blessure à la jambe mâayant fait classer dans les inaptes. Mais toi, tu as acquis un nom glorieux au sein des batailles!...

—Quâimporte, si elles nâont pu éviter le désastre! riposta Thor avec un amer ricanement.

—Ce nâest point ta faute, objecta Jacob, qui parut un peu gêné et haussa légèrement les épaules.

«Nous sommes abattus! cela nâenlève rien au mérite de nos soldats. Au reste, pour que rien ne vienne, par la suite, interrompre le récit de tes exploits, je vais commencer par te mettre brièvement au courant de ma vie.

«Jâai pris la direction de notre usine de Hanovre... Une fabrique de caoutchouc.

«Tu le savais déjà ?

«Mon père est mort subitement, il y a deux ans et jâai dû prendre sa place. Je me suis marié aussi!

Elevant la main gauche, il fit briller son alliance dâor aux yeux de lâami retrouvé. Ce dernier fit le même geste et tous deux se prirent à rire.

—Jâai même un fils de quatre ans, ajouta le lieutenant de vaisseau.

—Moi, une fille qui va en avoir deux.

—Naturellement, tu es très heureux; on voit la joie éclater dans tes yeux.

—Naturellement!... Et toi?

Thor de Tornten eut, avant de répondre, une courte hésitation. Ce ne fut quâun éclair, mais qui nâéchappa point à son sagace interlocuteur, bien que lâofficier se fût aussitôt repris pour répliquer vivement, à son tour:

—Evidemment, moi aussi!

Jacob Grotthauser fit habilement dévier la conversation et nâinsista pas sur ce petit incident.

Avec beaucoup de verve, il raconta sa vie, pendant la tourmente. Mais son regard discrètement interrogateur, se posait sur son ami, quêtant une réponse.

Pourquoi Thor de Tornten resta-t-il insensible à cette muette curiosité, se complaisant à écouter le récit des joies que son interlocuteur avait trouvées dans la possession dâune jolie femme et la venue dâune gracieuse fillette?

Pourquoi demeura-t-il silencieux alors que ses actions dâéclat, publiées par toute lâAllemagne, lui donnaient le droit de les conter.

Lâusinier était un vieil ami du lieutenant de vaisseau. Tout jeunes, dans le Schleswig, où les biens de leurs pères se touchaient, ils avaient vécu ensemble le temps heureux des escapades de jeunesse perpétrées en commun et nâavaient été séparés que beaucoup plus tard, par la vie qui leur assigna des voies différentes.

Thor était entré dans la marine. Riche de la fortune de son père, Grotthauser sâadonna, dâabord aux études historiques pour entrer ensuite dans la firme paternelle dont les importantes fabriques de caoutchouc rayonnaient par tout lâempire, assurant au fils unique de Johann Grotthauser la sécurité durable dâun bien-être matériel.

Le petit homme aux traits rusés et fins nâignorait pas que ce même bien-être nâavait pas dû sâasseoir sans luttes au foyer de son ami, si même...

Les Tornten étaient une vieille famille de hobereaux ruinés. Servant la patrie depuis de nombreuses générations, câest à peine sâils avaient pu glaner dans lâaccomplissement de ce devoir, la maigre pitance dâune très modeste existence.

Le père de Thor était, à cette époque, un tout jeune officier et sâétait battu vaillamment à Königgrätz: blessé dans cette rencontre, il avait été réduit à prendre, comme invalide, une retraite prématurée. Un hasard heureux lui avait fait connaître et aimer, à lâhôpital où on lâavait transporté, la fille dâun propriétaire du Schleswig. Il lâavait épousée, était retourné au pays natal pour sây retirer et finir en campagnard, une existence quâil avait rêvé de consacrer à de plus glorieuses destinées.

Thor naquit au bout de huit années seulement de cette union. Il grandit sur le bien paternel et perdit de bonne heure et son père et sa mère. Ses tuteurs décidèrent de son avenir dans le sens de lâardente vocation que manifestait le jeune orphelin et il entra dans la flotte.

Pendant les années qui précèdent la guerre, Grotthauser ne rencontre quâincidemment son ami dâenfance et nâentend jamais parler de lui.

Mais tout change aussitôt que la grande tourmente sâest déchaînée sur les peuples.

Thor de Tornten devient une célébrité. Dâabord, il est, dans la mer du Nord, le chef anonyme dâun de ces sous-marins qui, désignés par un U et un chiffre font tant parler dâeux.

Et le peuple allemand enthousiasmé dâune fatale confiance dans le succès de la guerre navale, associe le nom du jeune marin à la gloire de leurs exploits.

Lui, les a accomplis avec lâespoir farouche dâassurer la victoire à sa patrie, trompé en cela comme les millions dâAllemands qui lâacclament.

Bientôt, il faut à son ardeur des horizons plus vastes. Soudain il apparaît avec son bâtiment, aux Dardanelles, y signale son passage en coulant de puissantes unités, une française, une anglaise. Mais il ne sâattarde pas dans ces parages. Rappelé par lâamirauté, il promène son invincibilité active dans les eaux irlandaises jusquâau jour où il se classe parmi ces héros qui, par delà lâocéan, sur les côtes dâAmérique, vont ouvrir la guerre contre ce que les puissances alliées appellent le droit des gens.

Pendant tout ce laps de temps, Grotthauser nâa pas trouvé lâoccasion de rencontrer ou de sâentretenir avec son ami dâenfance.

Lâidée lui est venue, parfois, de se mettre en relations avec Thor. Mais lâopinion quâil professe pour les actes que le lieutenant de vaisseau accomplit avec le zèle passif dâun soldat obéissant, la conception personnelle quâil sâest faite de la conduite de la guerre, lâont détourné de rechercher une rencontre avec lâhéroïque marin.

Il souffre de savoir que cet homme dâélite, comme il se plaît à le nommer, joue son existence pour la destruction de richesses qui, dans lâavenir, feront défaut non seulement aux ennemis, mais encore à la patrie.

Aussi a-t-il voulu tout ignorer des événements auxquels Thor sâest trouvé mêlé depuis le cataclysme et nâa-t-il même pas eu connaissance du mariage de son joyeux compagnon de jeunesse.

Cependant ce dernier éprouve le sentiment quâil devait à son ami, sur son existence intime quelques détails, un peu plus dâexpansion que nâen comportait sa courte et réticente réponse de tout à lâheure.

Grotthauser, au surplus, avait marqué par une pause dans son récit quâil attendait à son tour des confidences.

Thor prit donc la parole:

—Je me suis marié aussitôt après notre première rencontre. Ma femme est une baronne Ballendorf. Jâavais fait sa connaissance à Ostende.

«Le début de la guerre marqua, comme pour tant dâautres, le terme de notre bonheur, car je dus laisser derrière moi, à Berlin, ma femme et le fils qui venait de me naître. Depuis, je nâai pu les revoir que pendant de courtes apparitions.

«Ilse est demeurée trop souvent seule et le bambin a parcouru les premières années de son existence sans presque avoir connu son père.

—Triste, opina Grotthauser.

—Dâautant plus triste que mon Otto courait le risque de perdre tout à fait son père. Jâai peut-être été parfois criminel en courant, comme je lâai fait, au-devant des dangers, insoucieux, lâesprit libre, sans une pensée pour mon fils.

—Tu as dû en voir dâeffroyants!

—De sévères, riposta le lieutenant de vaisseau, les yeux brillants. En même temps, il sâanimait, comme sâil éprouvait un soulagement de nâavoir plus à parler de son ménage.

—Oh! tes exploits me sont connus, fit Jacob Grotthauser souriant. Les journaux en ont assez parlé pour forcer mon admiration. Mais où je ne sais plus rien de toi, câest depuis que le malheur sâest abattu sur lâAllemagne.

—Tu veux dire depuis la débâcle?

—Oui.

—Eh bien! quelques semaines avant lâécroulement, je fus mandé au Quartier Général. Le kaiser mâavait connu à lâoccasion dâune revue quâil passa des équipages de sous-marins.

«Je crois pouvoir dire non sans orgueil quâil mâavait en très haute considération et voulait me retenir auprès de lui pour me consulter en certaines occurrences.

«Oh! si cela sâétait produit en dâautres circonstances, jâaurais pu aller loin!

«Mais, en ce temps-là , lâheure était venue pour le seigneur de la guerre dâabandonner son pays, son armée, afin dâéviter le déchaînement de la guerre civile qui, déjà grondait derrière lui.

«Je fus parmi les rares fidèles qui lâaccompagnèrent à Amerongen.

«Jâen arrive aujourdâhui, retournant à Berlin.

—DâAmerongen?

Thor inclina la tête avec un rire silencieux et répéta:

—DâAmerongen!

—Mais alors, mon cher garçon, tu es lâun des personnages les plus intéressants que je puisse rencontrer sur mon chemin.

—Dâaccord! Mais je suis aussi et surtout un des hommes les plus malheureux que tu puisses voir... Retrouver ainsi sa Patrie!...

—Comment lâentends-tu?

—Sans maître! proclama le colosse blond, qui se redressa tout dâune pièce. Oui, sans maître, sans droits, sans espoirs!

—Tu pousses le tableau trop au noir... Nous ne sommes pas sans maître, puisque nous sommes devenus nos propres maîtres. Nous ne resterons pas privés de droits, car bientôt une justice sâétablira que nul nâaura le pouvoir de violer et qui sera le véritable droit des gens; enfin tu ne peux pas dire que nous sommes sans espoirs, car elles vivent encore dans le peuple allemand, cette antique force et cette valeur qui prépareront notre relèvement.

Mais Thor secoua sa tête blonde. Son visage imberbe, aux traits énergiquement taillés, demeura grave:

—Hélas! nous ne sommes pas encore mûrs pour nous gouverner nous-mêmes; il nâexiste point sur cette terre de droit fondé sur lâéquité et, quant à nous relever jamais, on saura bien nous en empêcher.

—Je crains que tu ne reviennes de là -bas lâesprit faussé, hasarda Grotthauser. Tu as beaucoup à apprendre parmi nous, Thor!

«Nous sommes loin, ici, de penser comme toi. Certes, pour le moment, cela ne va pas bien. Nous traversons, aujourdâhui, les humiliations pénibles et les vicissitudes qui, jamais, ne furent épargnées aux vaincus.

«Pense à ce que nous perdons.

«Mais un peuple ne doit pas en arriver à douter ou à tomber dans les moyens extrêmes qui nâont jamais amélioré une situation.

«Nous souffrons de la faim, de la misère, nous attendons les décisions du vainqueur.

«Des faibles peuvent croire quâil existe une solution brutale à cet état de choses. Mais les forts et les avisés savent bien quâil nous reste une seule issue, le travail de tous dans le pouvoir qui est à tous. Et, grâce à Dieu, ce sont ceux-là qui sont au gouvernail.

—Dieu veuille que tu aies raison, douta le lieutenant de vaisseau. Mon plus profond désir est de voir les événements confirmer ta prophétie.

«En tous cas, il eût été plus simple, à mon avis, de ne pas chasser dâabord un gouvernement pour en reconstituer ensuite un nouveau, au prix de quelles peines et de quelles souffrances.»

Grotthauser riait:

—Nous y voilà ! admira-t-il. Naturellement, câest au kaiser que tu penses.

—Bien entendu!

—Es-tu donc aveugle, Thor, pour ne pas voir que lui et son entourage portent la responsabilité de tous nos malheurs?

—Pas lui, et pas son entourage seulement. En ce qui concerne sa personne, je ne croirai jamais quâil ait quoi que ce soit à se reprocher pouvant le rendre responsable des malheurs du peuple allemand.

«Vois-tu, Jacob—et la voix de Tornten devenait plus âpre, animée de lâardente conviction dâune plaidoirie passionnée—vois-tu, vous tous, ses amis aussi bien que ses ennemis, il vous manque, pour le juger, lui et ses actes, une conception qui a, cependant, la plus grande importance.

«Vous oubliez que câest un homme, celui que vous devez condamner ou acquitter, rien quâun homme seulement!... un surhomme, devrais-je dire.

«Supposez nâimporte qui dâautre à sa place.

«Avant la guerre, pendant la guerre, maintenant même que le dénouement est survenu, nul autre nâaurait agi différemment de lui.

«Câest un homme, dis-je, avec toutes les faiblesses et toutes les supériorités dâun homme. Il a prêté lâoreille aussi volontiers aux bons conseils quâaux mauvais, hélas! Je ne conteste pas que beaucoup de mal ait été commis en son nom, mais en son nom seulement et jamais de par sa volonté.

«Il nâa pas laissé faire le mal consciemment ni dans le dessein de le faire.

«Mais ce que vous ne voulez plus vous rappeler câest quâau nom de ce même kaiser, aujourdâhui malheureux, proscrit, il a été fait aussi beaucoup de bien à ce pays.»

Le petit homme plissa son fin visage et devint pensif.

—Il y a du vrai, un peu de vrai dans tes paroles, accorda-t-il. Il mâest arrivé souvent de me demander comment se serait conduit un autre occupant ce poste suprême où lâavait élevé lâignorance dâun peuple et la sottise dâune tradition séculaire. Mais cette ignorance, cette sottise traditionnelle, ce sont là précisément nos fautes.

«On ne confie pas la décision sur les destinées dâun Etat, pour le mieux et pour le pire, entre les mains dâun seul homme.

«Câest la communauté qui doit y concourir.

—Tu es démocrate?

—Pis encore... Social-démocrate!

—Toi, un industriel?

—Et, quâest-ce que ceci peut bien faire à cela? Dès que les circonstances le permettront ou que lâaccomplissement des événements semblera favorable, mes exploitations seront socialisées aussi bien que les autres entreprises.

«Cela ne mâempêchera pas de vivre.

«Mais ce ne sera pas une catastrophe financière qui mâarrachera mes convictions. Les travailleurs possèdent un droit primordial sur le produit de leur travail.»

Il y avait déjà un moment que le rapide avait quitté Hanovre, poursuivant sa route vers lâest.

Thor de Tornten ne pensait plus maintenant à laisser ses regards errer le long de la campagne prussienne.

Son entretien avec son ami dâenfance lâempoignait à présent. Pendant des heures, les deux hommes auraient échangé leurs vues sur les destinées présentes ou futures de leur nation.

Ils représentaient deux conceptions de lâunivers tout à fait divergentes, rarement appelées à se rencontrer en un semblable tournoi. Dâun côté, lâaîné, élevé dans lâEmpire, mais possédant la supériorité dâun coup dâÅil éclairé de philanthrope, assez dégagé des mesquineries de son éducation pour ne pas borner son ambition à la poursuite de ses avantages personnels et sachant concevoir au delà quelque chose de plus grand, le salut de lâhumanité, Johann Grotthauser, fils de lâindustriel, qui sâattache plus encore au bien-être des masses agissantes quâà son propre intérêt.

De lâautre côté, en contradiction avec ces vues désintéressées, une volonté plus noble encore, à laquelle cependant il manque ce qui fait la force de lâusinier, la liberté de voir et de juger. Grandi dans la croyance à lâinaccessible pouvoir divin dâune Majesté quâil reconnaît encore maintenant bien quâelle ait perdu son éclat et son élévation, Thor sait, à chaque accusation de son ami, visant le solitaire dâAmerongen, opposer une réplique, un argument, une justification.

Et, quand il ne trouve pas dâautre excuse, sa contentant de dire: «Câest un homme», il est conscient de ce que, devant cette objection, son amical contradicteur faiblit et, parfois, doit céder.

Mais, entre eux, aucune conclusion nâest possible, encore moins une entente; le fossé est trop profond qui se creuse entre leurs deux convictions.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

En arrivant à Berlin, ils avaient épuisé dans leur entretien tous les sujets qui, à lâheure présente, passionnent des millions dâAllemands: les causes et les origines de la guerre; la responsabilité des fautes commises dans la conduite de celle-ci; la paix impitoyable que lâAllemagne vient de signer, il y a quelques semaines à peine; lâavenir de lâEmpire et, ce qui touche Thor de Tornten au plus profond de son être, la prétention exprimée par lâennemi de juger le kaiser et ses conseillers responsables.

Devant la gare, les deux hommes se séparèrent.

Grotthauser était un étranger dans la capitale, un provincial, comme il disait plaisamment. Il était descendu dans un hôtel de lâavenue Sous les Tilleuls, où il se fit conduire immédiatement.

Thor avait, de son côté, la désagréable surprise de constater que ni sa femme, Ilse, ni même son valet de chambre nâétaient venus à sa rencontre et câest sous lâinfluence de cette contrariété quâil serra la main de son ami.

—Nous nous reverrons bientôt, cria lâindustriel en tournant la poignée de la lourde voiture de lâhôtel. Je suis à Berlin pour trois semaines... à ta disposition. Ne mâoublie pas, Thor!

«Nous avons abordé bien des sujets, mais il en reste beaucoup dâautres que nous avons laissé de côté.

—Nous y aviserons, concéda le lieutenant de vaisseau avec un rire embarrassé.

Resté seul, il siffla une auto de place et fit charger sa malle. Il était de mauvaise humeur et assista, sans sây intéresser, à la course par les rues brillamment éclairées de Berlin.

Peu à peu, cependant, il se ressaisit, éprouva plus nettement la sensation du retour au centre même de lâEmpire et se laissa reprendre au charme de la capitale que, malgré toutes les erreurs, toutes les fautes de ces dernières années, il aimait comme on aime une mère. Il conçut le rôle quâelle tenait et comme, en elle, attaquée, injuriée, sâincarnait le reste de puissance qui demeurait à la patrie.

Et ces réflexions lui firent oublier la singulière méconnaissance de ses devoirs, qui avait détourné sa femme de venir à sa rencontre, lui souhaiter la bienvenue après une séparation de plus dâune année, ou, tout au moins, en cas dâempêchement, dây envoyer ce maroufle de Toman, son valet de chambre.

Lâappartement de Thor occupait le rez-de-chaussée dâun élégant immeuble dans lâavenue du Grand-Electeur.

Câétait la demeure dâun homme fortuné, car, ce que le lieutenant de vaisseau avait oublié de dire à son ami, câest quâen conduisant à lâautel Ilse de Ballendorf, il nâavait pas précisément épousé une bergère, mais quâil était devenu le maître envié dâune multimillionnaire. Elle était fille dâun grand propriétaire du nord qui, pouvant faire pour elle tous les sacrifices, considérait comme le moindre de la pourvoir royalement, à lâoccasion de son mariage avec le jeune officier de marine.

Aussi, pendant les séjours quâil faisait à Berlin, auprès de sa femme et de son fils, Thor vivait-il dans une large aisance, à lâabri de tout souci matériel.

En quittant lâautomobile qui lâavait amené pour se diriger vers sa maison, le lieutenant de vaisseau constata que seules deux fenêtres de son appartement étaient éclairées. Il eut tôt fait de sonner le portier et de lui faire prendre sa malle. Lui-même pénétra dans la maison et se trouva bientôt dans lâantichambre de son appartement, où Toman, en bras de chemise, lâaccueillit avec une stupéfaction non déguisée.

—Vous, monsieur le commandant! sâexclama le domestique, avec lâexpression de la plus sincère surprise. Vous ici!

—Nâa-t-on donc pas reçu ma dépêche? interrogea Thor pendant que le valet au large torse enlevait le léger pardessus qui couvrait les épaules de son maître. Jâai cependant télégraphié mon arrivée. Où est madame, ajouta-t-il, tandis que Toman secouait sa tête aux cheveux ras.

—Madame est partie aujourdâhui même à Kolberg.

—A Kolberg? Ah! sans doute pour lâenfant.

—Pardon, monsieur le commandant, lâenfant est resté à la maison.

Thor dressa lâoreille, mais se garda de trahir devant le domestique ses sentiments secrets.

—Quand madame doit-elle rentrer?

—Dans deux ou trois jours.

—Et qui sâoccupe de lâenfant?

—Miss Bolton.

—Ah! oui, lâAnglaise, pensa Thor. Ilse lui avait écrit, en effet, quâelle avait trouvé à engager pour le jeune Otto une institutrice anglaise. Thor désirait que son fils apprît la langue des anciens ennemis de lâAllemagne comme la sienne propre.

Lâofficier franchit la porte que Toman ouvrait devant lui. Le valet de chambre le suivit dans le cabinet de travail où il sâempressa de tourner le commutateur et fit jaillir la lumière sur le bureau.

—Mon commandant désire-t-il souper?

—Inutile, Toman. Dites-moi plutôt ce quâil y a de nouveau.

—Rien de saillant que je sache.

—Madame et M. Otto sont-ils en bonne santé?

—Parfaitement, monsieur le commandant. Toman était le modèle des valets de chambre, à condition de nâexiger ni cet attachement durable, ni cette fidélité qui liaient les anciens domestiques à leurs maîtres. Il était assez négligent; incapable dâailleurs dâune mauvaise action.

Thor lâavait engagé peu après son mariage et Toman sâétait toujours montré le même. Il faisait son travail mais rien de plus.

—M. Otto est-il encore debout, demanda Thor en sâapprochant au coffret à cigares quâil ouvrit. Je voudrais bien le voir.

—Dois-je prévenir Mlle Bulton?

—Si câest possible, je voudrais bien aussi voir mademoiselle.

Toman sâempressa. Thor choisit un cigare dans le coffret et lâalluma.

Puis, se laissant tomber dans le confortable fauteuil de cuir installé près de son bureau, il se prit à songer, tout en chassant devant lui un nuage de fumée.

Comme il lâavait rêvé différent, ce retour au foyer! Sot quâil était! Arrive-t-il jamais rien dans lâexistence tel quâon lâa espéré?

Mais ce quâil ne comprenait pas, câétait le motif qui avait pu déterminer Ilse à quitter ainsi Berlin précisément le jour fixé par son mari pour rentrer après une si longue absence. Elle avait dû recevoir la dépêche; donc elle était au courant de sa venue.

Thor de Tornten se sentit retomber dans cette mauvaise humeur qui lâavait pris à la gare et quâil avait eu tant de peine à secouer.

Ne trouverait-il jamais dans son ménage ce calme reposant quâil souhaitait si ardemment en épousant Ilse?

Ne rencontrerait-il auprès de cette femme, rien autre, comme pendant les années de guerre, que de tièdes sentiments en surface, sans véritable affection?

Certes, il nâétait pas mari heureux et avait conscience quâIlse nâétait pas heureuse non plus.

La guerre, pensait-il, avait détruit lâharmonie de son ménage. Pendant toute cette longue période, il nâétait venu que cinq fois chez lui, toujours pour de courtes apparitions, avec lâangoissante certitude que rien nâen pouvait prolonger la durée.

Cette hantise et la perspective plus cruelle encore de ne jamais se revoir avaient empêché la tendresse de sâinstaller entre les deux époux.

Le peu dâamour qui avait survécu aux premières années de leur existence commune sâétait promptement consumé dans cette fièvre.

Et si de son côté le mari faisait de louables efforts pour reprendre auprès de sa femme dont il avait chéri la grâce exquise, la place quâil avait conquise naguère, Ilse se montrait récalcitrante. Elle demeurait ironique et froide.

Parfois, des accès de colère prenaient au jeune officier lorsquâau cours de ses permissions, il lâentendait parler, la voyait agir, si indifférente auprès de lui, si changée de ce quâelle était.

Il alla jusquâà se demander si, au moins, elle était bonne mère pour leur enfant.

Quâelle ne lâaimât plus lui-même, quâelle eût réussi à refroidir son propre amour, il nâen doutait plus; mais ce lien restait entre eux, cet enfant que la nature leur avait donné.

Ilse était une femme du monde qui ne voyait rien au delà de ses désirs et de ses soucis.

Jadis, à Ostende, elle avait accueilli la cour de Tornten parce quâil lui plaisait de sâattacher ce prestigieux marin dont toutes les femmes raffolaient, où quâil parût.

Mais elle avait bien vite senti combien il était différent dâelle.

Dès le début, il aurait aimé se retirer dans la solitude de son domaine, y vivre en paysan, loin du monde. Elle, au contraire, nâexistait que pour ce monde, nâaspirait quâà lui.

De même que leurs goûts, leurs sentiments sâétaient heurtés. La guerre faisant le reste avait complètement désuni leurs cÅurs.

Thor en était là de ses tristes pensées lorsquâune porte sâouvrit laissant passer une mince silhouette de jeune femme.

Lâofficier se leva et sâinclina pour un léger salut qui lui fut aussitôt rendu.

—Miss Bolton?

—Oui, monsieur le capitaine.

La blonde gouvernante plaça doucement sa main dans celle que lui tendait le géant. Près de lui, sans être petite, elle paraissait une enfant. Thor observa que lâembarras avait fait monter le rouge là son gracieux visage.

—Asseyez-vous, je vous prie, miss Bolton, insista-t-il poliment.

Mais elle resta debout, attendant pour sâasseoir que lui-même eût pris un siège. Puis, les mains croisées sur les genoux comme une écolière, elle attendit discrètement quâil lui adressât la parole.

Cependant, lâofficier ne se pressait pas de parler et lâexaminait longuement.

La lumière inondait sa figure et Thor remarqua, pour la première fois, combien son visage était attrayant.

Il sut immédiatement gré de sa beauté à la jeune Anglaise, la trouvant ravissante et ne pouvant sâempêcher de lâadmirer.

Carry Bolton, elle, avait tourné ses regards vers le sol, mais non sans avoir dévisagé attentivement, et avec quelque surprise, le maître de la maison et, dans cette attitude modeste, elle attendait quâil commençât à lui parler.

—Ma femme vous a confié notre fils, débuta enfin le lieutenant de vaisseau, et vous devez penser, miss Bolton, tout ce que cela peut signifier pour moi.

«Un jeune enfant conserve toute sa vie lâempreinte des premières mains qui ont la charge de le modeler. Câest pourquoi je dois vous prier de me dire dâabord qui vous êtes et quel hasard vous a amenée à Berlin, précisément en ce moment, après la guerre.

—Je ne suis, à vraiment dire, pas une pure Anglaise, répliqua-t-elle en souriant.

«Je suis Allemande. Mon père était, au commencement de la guerre, employé à Hoppegarten. Ma mère, qui est morte depuis plusieurs années, était gouvernante allemande. Père vient de quitter Ruhleben, où il est resté si longtemps interné et est allé en Angleterre chercher une place.

«Moi, je ne lâai pas suivi, parce que... parce que je ne voulais pas lui être à charge.

—Câest triste, miss Bolton, dâêtre obligé de quitter ceux quâon aime. Au moins, êtes-vous satisfaite de votre emploi dans ma maison?

—Certes, monsieur le capitaine, je ne pouvais trouver mieux. Et puis... jâaime tellement votre fils que je ne pourrais plus me séparer de cet enfant.

—Cela me fait plaisir de vous entendre parler ainsi. Et le petit vous rend-il cette affection?

—Câest ce dont vous pourriez vous assurer immédiatement, monsieur le capitaine. Otto est encore éveillé. Câest un enfant joueur et vivace, qui nâaime pas le lit et sâendort difficilement.

Elle voulut se lever, mais Thor lui fit signe de rester.

—Voulez-vous me répondre encore à une question? demanda-t-il.

—Comme vous voudrez, monsieur le capitaine, fit-elle modestement.

Tornten hésitait. Câétait pour lui une indicible souffrance de parler à Carry Bolton de choses qui lui poignaient le cÅur. Il ne pouvait oublier quâelle nâétait pour lui quâune inconnue peu de minutes avant cet instant. Cependant, elle était plus à son niveau que Toman.

—Savez-vous si ma femme avait reçu, avant son départ, la dépêche annonçant mon arrivée, miss Bolton? sâinforma-t-il en cherchant à prendre un ton dégagé.

La blonde Anglaise réfléchit un instant.

—Un facteur est certainement venu ce matin apporter un télégramme. Ce quâil y avait dans la dépêche, je ne lâai pas su. Madame ne mâen ayant pas parlé. Mais elle avait déjà projeté hier son voyage à Kolberg et est partie dâici exactement à quatre heures.

Thor se mordit les lèvres. Ainsi, Ilse savait quâil rentrait et cependant elle nâavait pas hésité à quitter sa maison pour aller aux bains de mer rejoindre quelque amie! Les courtes apparitions à Berlin du jeune officier lâavaient accoutumé à bien des mécomptes, mais cette fois, vraiment, lâindifférence de sa femme passait les bornes.

Cela semblait être une offensive voulue.

Et devant la petite institutrice, il se sentit gagner par un mouvement dâhumiliation, car elle avait dû, comme Toman sans doute, remarquer de quelle manière on traitait son maître.

Tout de suite il se leva:

—Voulez-vous me conduire auprès de lâenfant, miss Bolton?

—Avec plaisir!

Carry le précéda dans la chambrette où le garçonnet commençait maintenant à sâassoupir. Mais à lâapproche de lâinstitutrice, le petit sâéveilla, se souleva derrière le rideau de son petit lit et lâappela.

Dans ce mouvement, il reconnut son père et lui fit fête.

Thor sâempressa, tira le rideau de la couchette et, passant le bras autour de ce tendre corps dâenfant, il sâassit sur le bord du lit pour mieux embrasser le petit homme qui tenait tant de place en son cÅur.

Discrètement, miss Bolton était allée à lâune des fenêtres, laissant le père et le fils aux joies de leurs épanchements. Il y avait cependant, dans lâattitude de la jeune Anglaise, tant de grâce aimable et de charme élégant que Thor ne put longtemps se détourner dâelle. Après quelques minutes consacrées à son fils, dont la tendresse et les caresses lui faisaient tant de bien et le consolaient de lâabsence, insolite à ce moment, de celle qui était sa femme, il reprit:

—Il est superbe, miss Bolton!

La jeune fille se détourna de la fenêtre et approcha:

—Mais aussi, câest que nous avons été passer deux mois dans le Riesengebirg, explique-t-elle, souriante dâorgueil aux compliments de Thor.

—Papa, sâécria le petit, viens-tu de chez le kaiser? Mlle Bolton mâa dit que tu habitais avec le kaiser!

Thor posa la main sur la frêle tête aux cheveux blonds, contempla, pensif, le frais visage qui reflétait si exactement ses propres traits:

—Jâai vécu auprès de celui qui fut notre kaiser, mon petit, mais il ne lâest plus.

—Cela peut-il donc arriver quâun kaiser ne soit plus un kaiser?

Lâenfant ravivait la blessure encore béante de Thor, qui ne savait comment répondre. Mais Otto continuait son babillage.

—Maman mâa raconté un jour lâhistoire dâun kaiser qui avait été déchu. Mais le nôtre était né sur le trône.

—Ne pense pas à cela, fit Thor en se relevant doucement et en câlinant encore une fois la chevelure courte et drue de son fils.

«Qui sait ce que les peuples penseront à ce sujet quand tu seras devenu plus vieux... si vieux que tu pourras répondre toi-même à de semblables questions?

«Et maintenant, bonsoir, Otto.»

Il embrassa le petit un peu déçu et tendit la main à Carry Bolton.

—Je suppose que votre présence est encore indispensable ici pour un moment, miss Bolton?

—Il faut que je reste auprès dâOtto, répliqua-t-elle, jusquâà ce quâil soit endormi.

—Je vous remercie donc encore une fois de tout ce que vous faites pour mon enfant et vous souhaite une bonne nuit.

—Bonsoir, monsieur le capitaine.

Dans le couloir qui conduisait aux appartements antérieurs, Toman accourait au-devant de son maître.

—Monsieur le commandant, sâécria-t-il on vous demande au téléphone.

—A cette heure de la nuit? Qui donc cela peut-il être?

—Jâai oublié de dire à mon commandant quâon a déjà demandé aujourdâhui trois fois après lui, ajouta Toman tandis que Thor se hâtait vers son cabinet de travail.

Au téléphone, il eut tout de suite lâexplication. Son ami Rittersdorf lui souhaitait la bienvenue à Berlin. Thor reconnut la voix de son camarade dès quâil porta le récepteur à son oreille.

—Bonsoir, Tornten, transmit lâappareil. Quelle joie de vous saluer de nouveau parmi nous!

—Merci, Rittersdorf. Vous avez donc reçu mon télégramme?

—Avant midi. Jâai déjà cherché plusieurs fois à obtenir la communication avec vous, car je ne savais pas exactement par quel train vous arriviez. Je ne voulais dâailleurs pas aller troubler à la gare les embrassements qui doivent rester le privilège de votre femme et de votre fils.

Thor garda le silence, laissant son camarade continuer.

—Avez-vous fait bon voyage, Tornten?

—Merci, excellent! Depuis Hanovre, jâai eu la compagnie dâun ami dâenfance.

—Un officier de marine?

—Non, un civil, tout ce quâil y a de plus civil, et un rouge encore!

—Ah! fit-on à lâautre bout du fil. Vous me raconterez cela. Dommage que vous ne soyez pas arrivé vingt-quatre heures plus tôt.

—Pourquoi?

—Je vous téléphone du restaurant de Schwanbach. Nous sommes réunis ici six camarades de notre arme, qui méditons sur les jours passés et sur des jours meilleurs.

Thor tressaillit. Un désir lui venait.

—Qui y a-t-il avec vous? demanda-t-il en jetant un rapide coup dâÅil à sa montre.

—Kammitz, Rieth, Sellenkamp et les deux Walding, sans parler de votre serviteur. Nous avons décidé de nous rencontrer le premier dimanche de chaque mois, au Schwanbach, chaque fois que nous nous trouverons à Berlin. Nous échangeons des souvenirs, Tornten, et nous voyons aussi comment chacun se comporte sous la pression des événements. Ah! câest vraiment triste!

Pendant un instant le lieutenant de vaisseau hésita; mais le besoin lui venait de faire cesser, ne fût-ce que pendant quelques heures passées au milieu de ses camarades, lâisolement qui lui pesait.

—Ecoutez, Rittersdorf. Je nâai pas prévenu ma femme de mon retour et, par suite, je ne lâai pas trouvée à la maison. Voilà ce que câest que de vouloir faire des surprises. Il nâest quâonze heures. Si je trouve encore une auto je cours vous rejoindre au Schwanbach.

—Parfait! Voilà qui serait chic!

—Et maintenant, allez, je me sauve. Annoncez-moi aux camarades. Dans quelques minutes, jâarrive.

—Avec les dernières nouvelles dâAmerongen?

—Autant quâil y ait là -bas quelque chose de nouveau... La suite de vive voix!...

—Au revoir, Tornten!

—A tout à lâheure.

Thor reposa le récepteur sur lâappareil et, pendant une minute, resta pensif devant son bureau. Il sâen écarta soudain, appela Toman et lui commanda de courir dans la rue arrêter la première auto qui passerait.

Resté seul, le lieutenant de vaisseau se rendit dans sa chambre, échangea rapidement son costume de voyage contre un smoking.

Toman rentrait à ce moment. Tout de suite, suivant les instructions de son maître, il avait trouvé un chauffeur qui consentait à mener Thor à Schwanbach.

La débâcle impériale: Juan Fernandez

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