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INTROSPECTION

Il neigeait très fort. À travers les barreaux du centre de détention d’Ossining, je ne pouvais voir que les gros flocons de neige. J’avais été condamné à une peine de 5 à 15 ans. J’attendais d’être envoyé au Nord dans une autre prison à sécurité maximale.

Toute ma vie, j’ai essayé de jouer au dur. C’est comme ça que j’ai survécu. Mais, au milieu de détenus qui étaient de vrais durs, j’ai compris que je n’étais pas à ma place. Je savais que je devrais survivre. Il faudrait faire beaucoup de pompes et manger beaucoup de pommes de terre. Des années d’alcool et d’errance avaient laissé leur trace.

Assis dans ma cellule, je me demandais où ma vie avait mal tourné. Je ne connaissais rien à l’alcoolisme. Mais, au fond de moi, je savais que l’alcool était la cause de la plupart de mes problèmes.

Un gardien s’est présenté à ma cellule. « Tu as de la visite », a-t-il dit. Impossible. Personne ne viendrait jusqu’ici par ce temps. Pas pour me voir! Je me méprisais, je n’avais aucun respect pour moi. Mais, j’étais prêt à n’importe quoi pour sortir de ma cellule. Je ne l’ai donc pas contredit.

En entrant dans la salle des visiteurs, j’ai vu cet air dans les yeux de ma mère. Le même que j’avais vu des centaines, peut-être des milliers de fois. Pourtant, cette fois-ci, je ne pouvais pas compter sur l’alcool ou la drogue pour apaiser ma douleur. Je voulais ramper sous la table la plus proche. Tout ce que j’ai trouvé à dire ce fut : « Pourquoi as-tu pris la route par ce temps? Je peux très bien m’occuper de moi. » Je voulais encore lui montrer que j’étais un dur.

« J’ai voulu m’assurer que tu ne manquerais pas de cigarettes et de café », a-t-elle dit avec amour, comme seule une mère peut le faire. À ce moment précis, j’ai su qu’il fallait que les choses changent. Si je ne m’aimais pas, je devais cesser de faire du mal aux personnes qui m’aimaient encore. Mais je n’avais aucune idée de la façon de le faire.

On m’a transféré à Clinton Dennamora. Je me suis mis encore une fois dans le pétrin en tentant de faire le dur et de survivre. On m’a éventuellement transféré dans une prison à sécurité moyenne. Un conseiller du nom de Bill L. s’est intéressé à moi. C’était un ami de Bill W. et il était membre des Alcooliques anonymes depuis 12 ans. Il a lu mon casier judiciaire. Il a compris que j’étais un alcoolique qui avait besoin d’aide. Il ne m’a pas parlé de ma maladie. Il m’a toutefois initié au programme des AA. Il a été très prudent. Il ne voulait surtout pas me faire peur.

J’ai commencé à travailler pour lui dans le programme d’abus de substance. Pour réaliser ce projet, j’ai dû accepter d’étudier pour une équivalence d’études secondaires. Plus tard, il m’a convaincu d’aller au collège. J’ai ainsi pu obtenir un diplôme d’associé et un certificat en délinquance juvénile. Pour moi, c’était toute une réussite. J’avais quitté l’école en sixième année. Je commençais à avoir une meilleure opinion de moi.

Un jour, Bill L. m’a fait venir à son bureau et m’a demandé un service. Il voulait savoir si je pouvais préparer la salle pour une réunion des AA avec conférenciers de l’extérieur. Il pourrait y avoir des femmes dans le groupe. « Bien sûr! » ai-je dit sans hésiter.

En réalité, il n’y avait pas de femmes! J’étais déçu, mais je suis resté et j’ai écouté. Cela devait devenir le moment décisif de ma vie et de mon attitude devant la vie. Le conférencier venait de Brooklyn, un noir américain d’âge moyen. J’avais moi aussi grandi à Brooklyn. Je suis latino et j’étais à la fin de la vingtaine à l’époque. J’ai pu m’identifier à chaque mot du conférencier. Il a parlé de son alcoolisme. Il a parlé de cette impression de honte, de culpabilité et de solitude. Mon Dieu, j’avais ressenti cela toute ma vie, mais jamais je n’en avais parlé en ces termes. Je ne pouvais que réagir par la colère et la rage. Pour la première fois de ma vie, j’ai compris mon véritable problème. J’ai senti de l’espoir.

Après ce jour, j’ai assisté à presque toutes les réunions des AA. J’ai été libéré sous condition à ma première audition, mon premier miracle. Je ne m’y attendais pas à cause de mon important casier judiciaire. À l’extérieur, j’ai immédiatement commencé à assister aux réunions. En parrainant les autres, j’ai appris les avantages du service chez les AA. J’ai toujours voulu devenir conseiller en abus de substances. Les AA m’ont permis d’atteindre cet objectif.

Mais d’abord et avant tout, je suis un alcoolique. Je vais bientôt marquer mon seizième anniversaire d’abstinence. Ma vie dépasse toutes mes espérances. Jamais je n’avais imaginé avoir tous ces présents simplement en étant abstinent et en aidant d’autres alcooliques qui souffrent.

– Homme anonyme

Les AA en prison : d’un détenu à l’autre

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