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Les facteurs perturbateurs de l’esprit

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C’est donc le Karma qui est responsable des causes et des conditions de la souffrance. Mais il ne naît pas de lui-même. Il est un produit issu des facteurs perturbateurs de l’esprit, les Klechas. Ceux-ci sont très divers et donnent lieu à de multiples classifications. Toutefois, les trois principaux sont l’ignorance, le désir-attachement et l’aversion. Tous trois sont à présent existants en nous. Prenons le cas de l’attachement : lorsqu’il est en nous, il devient attachement aux jouissances, à la nourriture, aux possessions, etc. Comment un Karma est-il créé par la force de l’attachement et en particulier par l’attachement à la nourriture ? Imaginons que nous soyons très attachés à la viande. Lorsque nous laissons libre cours à notre désir de manger de la viande, il va croître au point que nous ferons tout pour le satisfaire, soit en tuant un animal, soit en le faisant tuer pour nous. L’attachement à la viande est ici la force qui pousse à agir; il motive l’acte et, sous son impulsion, nous commettons une action, nous tuons ou faisons tuer et créons un Karma de meurtre. A ce moment précis, se dépose sur notre courant de conscience une potentialité qui viendra ultérieurement à maturité en produisant notre souffrance, par exemple en écourtant notre vie.

Celui qui tue lui-même produit un Karma de meurtre. Lorsqu’il ordonne à quelqu’un d’autre de le faire à sa place, deux Karmas de meurtre sont alors accumulés, l’un par celui qui ordonne, même s’il reste immobile et n’intervient pas directement dans l’action, et l’autre par celui qui exécute et tue effectivement. De plus, nous accumulerons autant de Karma de meurtre que nous tuons d’animaux. Ces empreintes déposées sur la conscience ne sont évidemment pas visibles; elles n’ont pas de forme et ne sont pas des objets concrets. Mais cela n’empêchera pas la maturation de leur pouvoir dans la manifestation de nos souffrances. Ce que nous ne voyons pas n’est pas nécessairement inexistant. Nous constatons par exemple le pouvoir de l’électricité qui fait fonctionner de puissantes machines. Et pourtant la force électrique qui les alimente est invisible. Ceci n’est indiqué qu’à titre d’illustration car vos connaissances en électricité dépassent largement les miennes.

Il se peut également que nous soyons fortement attachés à un objet : le désir de le posséder va croître jusqu’au moment où, ne pouvant plus résister à l’envie de nous l’approprier, nous allons le voler, le prendre sans qu’il nous soit donné. C’est ici encore l’attachement qui est la force motivante, en l’occurence l’attachement à un objet, qui pousse à l’accomplissement d’un vol. Et dès que l’action est consommée, sur notre courant de conscience est déposée une potentialité qui révélera plus tard son pouvoir, et nous souffrirons alors de pauvreté, de privations...

La haine envers un ennemi peut également pousser au meurtre. Il arrive en effet qu’elle atteigne un degré tel que nous ne puissions plus supporter cet individu et que nous finissions par le tuer. C’est alors la haine qui constitue la force motivante, qui pousse au meurtre dont l’accomplissement fait se déposer sur notre courant de conscience une potentialité qui engendrera nos souffrances ultérieures. Si une personne très riche est l’objet de notre haine et que ses possessions suscitent notre jalousie, il se peut que, ces sentiments se développant, nous allions jusqu’à la voler ou à ordonner à quelqu’un d’autre de la voler à notre place. Dans ce cas, le Karma de vol sera motivé par l’aversion.

Il est également possible d’accumuler des Karmas par ignorance. C’est ce qui se produit lorsque nous appréhendons de manière erronée la nature des choses, lorsque nous sommes incapables de discerner les actions négatives causes des souffrances, des actions positives qui produisent le bonheur... Par exemple, certains tuent des animaux à la chasse, sans attachement particulier à la viande, ni aversion, mais simplement par jeu ou pour se distraire. Il s’agit alors de Karmas motivés par l’ignorance, dont l’impulsion est donnée par la force de l’ignorance. C’est le cas du meurtre d’animaux commis par ignorance au titre de sacrifices. Certaines traditions ne voient en effet aucun mal à sacrifier des animaux et considèrent ces immolations comme des actes positifs. Pour d’autres encore, le vol est un amusement et n’a rien d’un comportement à bannir. Le vol commis dans un tel état d’esprit est à nouveau induit par l’ignorance. Lorsque nous accomplissons nous-mêmes, physiquement, ces actions, nous accumulons un Karma physique; lorsque, par la parole, nous poussons d’autres à agir à notre place, nous accumulons un Karma oral. Ces exemples vous ont été donnés à titre indicatif. Au cours de votre méditation, il vous suffira d’extrapoler pour les appliquer aux Karmas divers et nombreux que nous accumulons. Les résultats des Karmas négatifs, en d’autres termes des actions non vertueuses, sont nécessairement de même type que la cause, à savoir négatifs, défavorables, et sont obligatoirement souffrance. Lorsque nous sommes malfaisants, que nous nuisons à la vie et aux biens d’autrui, il est impossible que nos actions restent sans conséquences négatives pour nous-mêmes.

Dans les exemples d’accumulation de Karma qui ont été donnés ci-dessus, seules intervenaient des actions du corps et de la parole. Mais le Karma peut être aussi créé uniquement par l’esprit, sans qu’interviennent des actions physiques ou verbales. Que nous soyons ou non en méditation, que nous soyons couchés ou debout, s’il nous arrive de penser : “Je vais tuer cet animal... Il faut que je prenne tel objet qui ne m’appartient pas... Il faut que je nuise à untel”..., nous accumulons un Karma mental. Ou encore, nous pensons parfois : “Je vais mentir; je vais m’arranger pour altérer les bonnes relations entre untel et untel, et faire qu’ils se disputent”... Par cela seul, nous créons des Karmas mentaux avec une grande facilité. C’est en fait le type de Karma que nous produisons le plus car le bref instant d’une pensée suffit à son accomplissement.

Tous les exemples et explications qui précèdent s’appliquent au Karma individuel. Or, comme cela a déjà été mentionné, il existe aussi des Karmas collectifs constitués par une action accomplie conjointement par un groupe d’individus qui en expérimenteront ensemble le résultat. Ces Karmas collectifs peuvent également être des Karmas mentaux. Ce sont par exemple les Karmas mentaux collectifs créés par ceux qui se réjouissent ensemble des catastrophes, famines, inondations, des calamités diverses s’abattant sur un pays ou une région dont ils n’aiment pas les habitants, ou par ceux qui exultent lorsqu’au cours d’une guerre, leurs ennemis sont anéantis sous les bombes dans de terribles souffrances. A ce moment, sur le courant de conscience de tous les membres de cette collectivité est déposée une empreinte qui aura ultérieurement pour résultat une souffrance endurée en commun par ce même groupe d’individus, qu’il s’agisse de famine, d’épidémie ou d’un autre fléau. Nous avons vu ainsi de quelle manière les Karmas non vertueux, individuels ou collectifs, étaient accumulés par la force de l’ignorance, de l’aversion ou de l’attachement.

Qu’en est-il des Karmas vertueux ? Lorsque la compassion que nous éprouvons à la vue de la pauvreté, de la maladie, de la douleur d’autrui... nous pousse à accomplir une action visant à soulager ces souffrances, en donnant un remède ou des biens matériels, ou en protégeant celui dont la vie est menacée, nous produisons un Karma vertueux motivé par la compassion. Que cette assistance soit portée directement par nous-mêmes ou indirectement par ceux dont nous requérons l’intervention, si notre action est motivée par la compassion, par le désir de sauver la vie d’autrui, nous accumulerons un Karma vertueux, favorable, qui sera à l’origine d’un bonheur futur, tel que longue vie, santé, aisance matérielle, intelligence...

Nous avons vu que la souffrance s’impose à nous sans que nous ayons le choix de la refuser parce qu’elle est déterminée par la force du Karma. Or, le Karma est, lui aussi, produit par dépendance; il est soumis au pouvoir des facteurs perturbateurs de l’esprit, des Klechas. Ainsi, pour supprimer la souffrance, il faut éliminer les Karmas négatifs qui en sont la cause et ceci ne peut être réalisé que par le rejet des facteurs perturbateurs de l’esprit, qui sont eux-mêmes à l’origine de la production de ces Karmas. Ces fauteurs de troubles sont des parties de notre propre esprit. Il est donc inutile de les chercher à l’extérieur, chez les autres. C’est sur nous-mêmes que nous devons orienter nos réflexions. Cependant, pour pouvoir reconnaître précisément ces facteurs perturbateurs, il nous faut identifier avec exactitude les diverses composantes de notre esprit et comprendre son fonctionnement. Alors, transformant l’esprit par l’esprit, nous pourrons éliminer ces facteurs mentaux responsables des désordres. Mais ceci ne peut être réalisé que par la méditation. Aucun moyen extérieur, si puissant soit-il, n’est capable de les anéantir, fût-il capable de concentrer le pouvoir destructeur de toutes les bombes du monde. Par conséquent, il est vain de nous exténuer à la recherche de solutions extérieures.

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