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II

Table des matières

MISE EN ŒUVRE DU BRONZE. — PROCÉDÉS DIVERS. — LA PRISE DANS LA MASSE. — LE REPOUSSÉ. — L’ÉTAMPAGE. — LA FONTE.

On compte quatre manières de travailler le bronze: la prise dans la masse, le repoussé, l’étampage, la fonte.

La PRISE DANS LA MASSE n’offre rien de très particulier. On opère comme pour l’argent, le fer ou tout autre métal. On choisit un lingot de taille convenable et de forme appropriée, on le dégrossit au ciseau ou au tour; puis, quand la forme est assez approchée, on le taille et on le sculpte à l’aide d’outils tranchants, tels que l’échoppe, le ciseau, le burin, et on l’achève avec des limes douces, des riflards, le reprenant au ciselet pour lui donner les dernières finesses. Ce procédé n’est, du reste, que très rarement usité. La main-d’œuvre en est longue, délicate et coûteuse. Elle ne peut guère s’appliquer qu’à la confection de menues pièces, et dès lors la valeur intrinsèque du métal est si peu importante, relativement à la dépense de temps et d’habileté, que pour l’exécution de ces petits ouvrages on est fatalement amené à donner à l’or ou à l’argent une préférence qu’ils justifient.

Au XVe et au XVIe siècle, cependant, on a fabriqué, en employant un procédé voisin, c’est-à-dire à l’aide du tour, un grand nombre d’objets et d’ustensiles de ménage, tels que chandeliers, pieds de lampe, pommes de chenets, etc. On commençait par fondre un lingot de forme et de dimensions correspondant à celles de l’objet qu’on voulait confectionner, puis, à l’aide du tour armé de ciseaux très tranchants, on détachait en copeaux les parties inutiles, et l’on donnait à la forme tous les détails de profils, moulures, etc., qu’on jugeait convenables.

Cette façon de faire était appréciée pour deux raisons. Elle permettait d’exécuter, sans qu’il fût nécessaire de recourir au montage, des objets usuels d’un seul morceau, et par conséquent plus solides. En outre, le travail du tour resserre les molécules du métal, et, rendant son épiderme plus dense et plus ferme, fait qu’il s’use moins au service journalier. Aujourd’hui le tour, encore employé pour la fabrication de quelques ustensiles de ménage, en cuivre ou en laiton, n’est que très rarement usité pour le bronze.

Le REPOUSSÉ s’exécute au marteau, et n’a jamais cessé d’être un travail courant, parce qu’il répond à des besoins spéciaux, à des applications particulières. Il permet, en effet, de confectionner, avec une très mince épaisseur, une quantité d’objets d’ameublement tels que bassins, chaudrons, plateaux, bouilloires, aiguières, qu’on obtiendrait difficilement à la fonte, et qui, par cet autre procédé, seraient d’un poids beaucoup plus considérable, par conséquent moins maniables et plus dispendieux. En outre, le travail du marteau, nous l’avons expliqué autre part , corroie le métal, augmente sa résistance, lui donne une sorte de trempe et le durcit au point qu’au cours de l’exécution, on est obligé de lui faire subir de temps en temps une chauffe, pour le rendre de nouveau ductile. C’est surtout la vaisselle de table et les ustensiles de cuisine que l’on exécute au repoussé. Argentée par la galvanoplastie, la vaisselle de table est devenue, depuis un demi-siècle, l’objet d’un commerce considérable; aussi a-t-on recours, pour sa fabrication, aux procédés mécaniques rapides et par conséquent peu coûteux. On les trouvera décrits dans notre manuel de l’Orfèvrerie.

Fig. 5. — Aiguiere eu bronze repoussé

(XVIe siècle).


Ces procédés économiques sont également employés pour les ouvrages dits de chaudronnerie. Lorsque le fabricant se propose de donner simplement à sa feuille de métal une forme convexe à l’extérieur, concave à l’intérieur, comme celle d’un chaudron ou d’un bassin, son travail, qui prend le nom d’emboutissage, peut être exécuté à l’aide de mandrins ou du mouton. S’il veut orner son ouvrage de reliefs, il peut recourir au balancier. Enfin, grâce au tour, il peut non seulement imprimer à sa feuille une concavité profonde, comme celle d’une bouilloire, mais encore, en recourant à la rétreinte, il surmontera cette concavité d’un goulot plus ou moins étroit. On voit qu’au point de vue de l’utilité, il y a de nombreuses raisons pour que le travail au repoussé ne soit pas abandonné.

Au point de vue de l’art, il n’en va pas tout à fait de même. Si, à l’aide du marteau, il est possible de couvrir les objets d’usage dont nous venons de parler, d’ornements d’une finesse et d’une élégance indiscutables, par contre on a peu d’exemples d’œuvres d’un caractère d’art élevé qui soient exécutées par ce procédé. Jadis il n’en était pas ainsi. Sans remonter jusqu’au colosse de Rhodes, lequel, d’après les récits les plus véridiques, aurait consisté en un gigantesque ouvrage de chaudronnerie, nous verrons, quand nous aborderons l’histoire du bronze, qu’un grand nombre de sépultures, au Moyen Age, furent recouvertes de «gisants» ou statues couchées, façonnées au repoussé. C’est ce qu’on appelait alors l’æs ductile, «le bronze ductile », par opposition à l’æs fusibile ou «bronze fondu». Enfin, de nos jours c’est encore au repoussé qu’on demande, exceptionnellement, les très grandes statues, ces colosses qui défient le travail de la fonte, et qui à de gigantesques proportions doivent allier une légèreté relative. Les figures d’hommes d’armes qui surmontent le faîte de l’hôtel de ville de Paris, ainsi que la statue de la Liberté éclairant le monde, œuvre de Bartholdy qui décore aujourd’hui l’entrée de la rade de New-York, ont été obtenues par ce procédé.

Les nombreux fragments dont se composent ces œuvres exceptionnelles sont exécutés séparément, à l’aide de mandrins sur lesquels on applique les feuilles de métal. On leur en fait épouser la forme; et elles sont, après cela, rapprochées et réunies par une suite de boulons, qu’un travail de sertissure confond si bien avec la matière générale, qu’on cesse de les apercevoir.

LA FONTE est, de tous les procédés usités pour travailler le bronze, celui qui donne les résultats les plus artistiques, et qu’on emploie, de nos jours, le plus généralement. Il serait en outre des plus simples, si l’on se bornait pour tous les ouvrages, comme on le fait pour les petites pièces, à fondre les objets en massif ou en plein. Il paraît à peu près certain que les premières statues durent être exécutées de la sorte; mais, à une époque si reculée qu’elle se perd dans la nuit des temps, de grands artistes, qui menaient de front l’art et les procédés, et qui étaient non seulement des statuaires d’un rare mérite, mais des métallurgistes de premier ordre, trouvèrent le moyen de ne couler que l’enveloppe de la figure, et de réduire leur fonte à une très faible épaisseur. Dès la plus vénérable antiquité, on arriva, dans ce genre de travail, à une perfection qui n’a pas été dépassée depuis. A Rome, la statue équestre et colossale de Marc-Aurèle en fournit la preuve. Deux étrangers, le peintre allemand Sandrart et le sculpteur flamand François Duquesnoy, mesurèrent, au XVIIe siècle, l’épaisseur de ses diverses parties. Ils les trouvèrent d’une égalité parfaite, et «qui ne surpassoit pas celle d’un écu», soit trois à quatre millimètres au plus.

Cette réduction d’épaisseur est de la plus haute importance, parce qu’elle assure à l’œuvre une grande supériorité d’exécution. Et en effet, lorsque le métal une fois coulé se refroidit dans le moule, il se produit toujours un retrait, et ce retrait est d’autant plus considérable que la quantité du métal employé est plus grande. «Si bien que le rétrécissement est presque nul sur une fonte légère, tandis qu’il peut atteindre à 2 pour 100 et au delà, sur la même figure coulée à une forte épaisseur .» Or le résultat de ce retrait, de ce «rétrécissement», comme écrivait Barbedienne, est de produire des déformations. En outre, ainsi que le remarque l’illustre bronzier, «on ne sait peut-être pas assez que la surface de la fonte est d’autant plus fine de grain d’épiderme, que le métal a moins d’épaisseur».

De cette nécessité de ne fondre que l’enveloppe extérieure des statues, sont nés deux procédés différents de fonte: le premier qui porte le nom de cire perdue, le second, celui de fonte en sable, à noyau et pièces rapportées. Mais comme ces deux méthodes n’ont, somme toute, d’autre but que d’assurer la traduction aussi exacte que possible d’un modèle, il nous faut tout d’abord dire quelques mots des conditions esthétiques que celui-ci doit remplir.

Fig. 6. — Statue antique de Marc-Aurèle, à Rome.


Les arts de l'ameublement. Les bronzes d'art et d'ameublement

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