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LOUIS LE PIEUX—LE TRAITÉ DE VERDUN—CHARLES LE CHAUVE—LES NORMANDS

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Louis le Pieux ou le Débonnaire.—La famille de Charlemagne déclina plus vite encore qu'elle n'avait grandi. L'empire qu'il avait formé était trop vaste et se démembra dès le règne même de son fils, Louis le Débonnaire (814-840). Louis était si faible qu'il ne sut pas même maintenir son autorité dans sa famille. Incapable de porter seul le fardeau que lui avait légué son père, il partagea tout de suite l'empire entre ses trois fils, Lothaire, Pépin et Louis. Un de ses neveux, Bernard d'Italie, protesta contre ce partage, les armes à la main. Vaincu, il eut les yeux crevés par ordre de l'empereur et succomba aux suites de cet horrible supplice (818). Pour expier cette cruauté, Louis se soumit à une pénitence publique à Attigny, s'humilia devant les évêques et commença à avilir aux yeux des peuples la dignité impériale.

Louis le Débonnaire, ayant eu d'un second mariage un quatrième fils, Charles, voulut aussi lui donner un royaume. Les autres fils alors se révoltèrent en 830, et déposèrent l'empereur.

En l'an 833, a si peu de distance de la mort de Charlemagne, l'église de Saint-Médard de Soissons fut le théâtre d'une cérémonie bien différente de celle qui avait eu lieu à Rome en l'an 800. Louis le Débonnaire, détrôné une première fois en 830, venait d'être renversé une seconde fois par ses fils. Lothaire, auquel l'empereur, abandonné de son armée, s'était rendu, se montra sans pitié pour son père. Voulant le rendre incapable de régner, il l'obligea de faire, dans l'église de Saint-Médard de Soissons, une confession publique de ses fautes. On lui enleva tous les insignes de la dignité impériale, même le baudrier et les armes du guerrier. Louis dut revêtir le costume de pénitent et demeurer dans le cloître (833).

Les peuples, encore pleins du souvenir de Charlemagne, protestèrent contre cette humiliation infligée à l'empereur et contre cet outrage fait à un père par ses enfants. Louis le Germanique et Pépin comprirent bientôt qu'ils n'avaient travaillé que pour leur aîné et ne voulurent point reconnaître son autorité. Ils délivrèrent Louis le Débonnaire, le ramenèrent à Saint-Denis, et le revêtirent de nouveau des ornements impériaux (834). Cependant les guerres recommencèrent. L'empereur mourut en combattant son fils Louis le Germanique. «Je lui pardonne, disait-il tristement, mais qu'il sache qu'il me fait mourir.»

Les fils de Louis le Débonnaire (840-843).—Des fils qui avaient outrage l'autorité paternelle ne pouvaient se respecter les uns les autres. Ils luttèrent entre eux comme ils avaient lutté contre leur père.

Pépin était mort, mais Louis le Germanique, Charles et Lothaire se disputèrent les provinces de l'empire. Charles et Louis se liguèrent contre leur aîné, Lothaire, qui seul portait le titre d'empereur. Ils le battirent à la journée de Fontanet (841), près d'Auxerre. Dans chaque camp il y avait des hommes de même nation, et on vit ainsi se battre frères contre frères, Francs contre Francs, Saxons contre Saxons. Charles et Louis demeurèrent vainqueurs.

Les deux frères resserrèrent leur union par un serment mutuel qu'ils prononcèrent devant leurs armées, à Strasbourg, l'un en langue germanique, l'autre en langue romane (ou romaine) (842). Lothaire consentit alors à un partage définitif, à Verdun, en 843. Louis le Germanique conserva tous les pays au delà du Rhin (Saxe et Bavière) et qui devaient former l'Allemagne.

Charles garda les pays qu'il gouvernait, c'est-à-dire la Gaule, mais non dans toute son étendue. Lothaire conservait l’Italie et recevait, en outre, les pays compris entre la Meuse et le Rhin, entre la Saône et le Jura, entre le Rhône et les Alpes (Belgique, Lorraine, Alsace, comté de Bourgogne, Dauphiné et Provence).

Ce partage de famille, semblable à tous ceux qui s'étaient faits jusqu'alors, eut cependant les plus déplorables conséquences. Les pays qui formaient la part de Lothaire n'étant rattachés ni à la Gaule, ni à la Germanie, et trop divers pour devenir eux-mêmes un État, devaient être la cause de guerres sans fin. La Bourgogne, le Dauphiné, la Provence firent plus tard retour à la Gaule comme la nature l'indiquait; mais le territoire entre la Meuse et le Rhin, la riante vallée de la Moselle, la pittoresque et riche vallée du Rhin, restèrent un éternel sujet de discorde entre la France qui réclame et l'Allemagne qui détient aujourd'hui ces pays jadis gaulois, romains et francs.

Charles le Chauve (843-877).—Prince faible, Charles le Chauve, qui avait reçu la Gaule mutilée, ne pouvait même y exercer son autorité. Les ducs et les comtes établis dans les provinces s'y déclaraient souverains. La France allait se décomposant en petits États. Pour comble de malheur, arrivaient de nouveaux barbares, les Normands.

Les Normands.—Nommés ainsi parce qu'ils venaient des pays du nord, de la Scandinavie, les Normands étaient d'intrépides marins, habiles à manier la rame et la voile. Leurs chants ordinaires suffisent à les peindre: «Que le pirate dorme sur son bouclier, le ciel bleu lui sert de tente.—Quand le vent souffle avec furie, hisse ta voile jusqu'au haut du mât. Les vagues bouleversées repoussent le pirate; laisse aller; qui amène sa voile est un lâche: mieux vaut mourir.—Si le marchand passe, protège son navire, mais qu'il ne refuse pas le tribut. Tu es le roi sur les vagues, il est l'esclave de son gain.—Les blessures honorent le pirate; elles parent l'homme quand elles se trouvent sur sa poitrine ou sur son front.»

Ces rois de la mer, montés sur leurs barques grossièrement construites et ornées à l'avant de figures de serpents et de chevaux, arrivent à l'embouchure des fleuves: ils se saisissent d'un îlot ou d'un poste de difficile accès qui leur sert de cantonnement, de retraite en cas de besoin. Le jour, ils restent immobiles dans des baies solitaires ou cachés dans les forêts du rivage; la nuit, ils abordent, escaladent couvents et châteaux forts, pillent le pays, organisent une sorte de cavalerie avec les chevaux qu'ils rencontrent et courent en tous sens jusqu'à trente ou quarante lieues de leur flotille. A la vue de ces guerriers couverts d'un tissu de lames de fer disposées en écailles, armés d'une lourde hache, d'une épée à deux tranchants ou d'une longue lance, l'effroi des populations est indicible; les prières de l'époque l'attestent: «De la fureur des Normands délivrez-nous, Seigneur!» s'écriaient-elles dans leur terreur.

Cette faiblesse les enhardissait: Paris, Orléans, Toulouse furent pillés; les Normands perdent même l'habitude de retourner dans leur pays pendant l'hiver. Une seule famille se distingue par son courage contre ces ravageurs, celle de Robert le Fort, comte d'Anjou. Robert acquit une grande renommée en repoussant les pirates, mais il périt au combat de Brissarthe (865) près d'Angers.

L'empereur Charles le Gros (884-888).—Le fils de Charles le Chauve, Louis le Bègue, ses petits-fils Louis III et Carloman ne firent que passer sur le trône. La Gaule tomba sous l'autorité d'un descendant de Louis le Germanique, l'empereur Charles le Gros, qui reconstitua, en 884, l'empire entier de Charlemagne. Mais ce prince qui méritait bien son surnom était aussi faible en Germanie qu'en Gaule.

Dans l'été de 885, une nombreuse flottille normande conduite par deux redoutables chefs, Godefried et Siegfried, remonta le cours de la Seine. Elle comptait plus de trois mille barques longues et plates qu'ornaient de grossières figures de serpents ou de dragons. Instruits par les malheurs précédents, les Parisiens avaient protégé, par des tours, sur chaque rive du fleuve, les deux ponts qui mettaient leur île en communication avec le pays. Deux cents seigneurs, avec leurs hommes, avaient répondu à l'appel du comte de Paris Eudes, digne fils de Robert le Fort, et s'étaient enfermés dans la ville. Aussi le roi des pirates, Siegfried, essaya-t-il de négocier: il ne demandait que le passage pour aller en Bourgogne. Mais l'évêque de Paris, Gozlin, lui répondit: «L'empereur Charles nous a donné Paris à garder; si par hasard la défense de ses murs eût été confiée à ta foi, ferais-tu pour nous ce que tu demandes pour toi?—Si je le faisais, s'écria fièrement le barbare, ma tête devrait tomber sous la hache et être jetée aux chiens.» Les Normands commencèrent le siège (novembre 885).

Un an entier les Parisiens repoussèrent les assauts des pirates. Une crue subite de la Seine emporta une partie du Petit-Pont, et douze guerriers restèrent isolés dans la tour construite sur la rive gauche: un jour entier ils tinrent tête à l'armée des barbares qui finirent par incendier la tour. Les douze Parisiens se retirèrent sur les débris du pont et continuèrent à combattre: sur la foi qu'ils auraient la vie sauve, ils se rendirent; mais ils furent massacrés, et l'un d'eux, Hérivée, qu'on voulait épargner, refusa noblement de se racheter par une rançon.

Cependant la misère de Paris croissait, car la famine était venue, et la peste. L'évêque Gozlin, qui soutenait les combattants par ses prières et son exemple, mourut. Alors le comte Eudes s'échappa pour aller solliciter le secours de l'empereur Charles le Gros. Eudes parvint ensuite à rentrer dans la ville, malgré les Normands. Enfin, au mois d'octobre (886), sur les hauteurs de Montmartre, parut l'armée de Charles lui-même: les Parisiens s'attendaient à voir exterminer leurs ennemis. Charles, au lieu de combattre, acheta la retraite des Normands au prix de sept cents livres d'argent.

Charles le Gros montrait partout la même lâcheté. Aussi les grands de tous les pays l'abandonnèrent et le déposèrent à la diète de Tribur en Allemagne (887). On ne lui nomma pas de successeur comme empereur, et chaque nation se choisit un chef particulier: l'empire de Charlemagne était à jamais détruit. La Gaule donna la couronne au vaillant défenseur de Paris, le duc des Francs, Eudes. L’Italie se partagea entre plusieurs princes. Tout le monde d'ailleurs voulait devenir roi: il y avait des rois de Bourgogne, de Provence, de Lorraine, de Navarre, etc., mais en réalité trois grandes nations sortirent seules de ce démembrement de l'empire carolingien: la nation française, la nation italienne, la nation allemande.

Eudes, proclamé roi des Francs en 887, régna jusqu'en 898. Mais s'il commençait dans la Gaule devenue la France, une nouvelle famille de rois, les descendants de Charlemagne conservaient encore des partisans: un petit-fils de Charles le Chauve, Charles le Simple, succéda au roi Eudes.

Charles le Simple (898-922).—Ce prince qui méritait bien son surnom, car il était naïf et simple d'esprit, mit fin pourtant, en 912 par le traité de Saint-Clair-sur-Epte, aux incursions des Normands: il concéda à leur chef Rollon, qui se fit baptiser et épousa la fille de Charles, les rives verdoyantes et fertiles de la basse Seine: ce pays forma dès lors le duché de Normandie.

Grâce à la sévérité de Rollon, les Normands perdirent leurs habitudes de pillage, la sécurité revint et les anciennes populations, soumises à leur autorité, travaillèrent avec une telle ardeur que la Normandie devint rapidement une des plus riches provinces.

Charles le Simple, comme ses prédécesseurs, affaiblissait par ses libéralités le domaine royal, sans pour cela empêcher les grands de se révolter contre lui. Il fut renversé du trône en 922 et mourut, au château de Péronne, captif d'Héribert, comte de Vermandois.

La famille d'Eudes; les ducs des Francs.—La famille d'Eudes, au sein de laquelle s'était maintenu le titre de duc des Francs, l'emporta de nouveau jusqu'en 936 avec Robert Ier (922-923), Raoul de Bourgogne (923-936). Mais le petit-fils d'Eudes, Hugues, comte de Paris, duc des Francs, et connu dans l'histoire sous le nom de Hugues le Grand, ne jugea pas encore venu le moment de déposséder tout à fait la famille de Charlemagne. Il rappela lui-même d'Angleterre où on l'avait emmené, le jeune fils de Charles le Simple, Louis IV, surnommé pour cette raison d'Outre-mer (936). Toutefois il entendait bien gouverner comme avaient fait jadis les maires du palais.

A la mort de Louis IV, Hugues ne chercha pas non plus à prendre une couronne qui ne pouvait tarder à échoir à sa famille; il reconnut Lothaire, fils de Louis. Il mourut lui-même en 956, laissant trois fils, dont l'aîné, Hugues Capet, recueillit, avec le comté de Paris, le titre de duc des Francs. Lothaire (954-986) était un prince actif qui ne put cependant secouer la tutelle de Hugues Capet. Il mourut en 986.

Hugues Capet fit reconnaître le jeune Louis V. Mais Louis V mourut, au bout d'un an, à la suite d'un accident de chasse. Les seigneurs alors, rejetant les prétentions de son oncle, Charles de Lorraine, élurent pour roi Hugues Capet comte de Paris et duc des Francs. Ce fut le chef d'une famille qui devait régner durant huit siècles.

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