Читать книгу N'Allez Jamais Chez Le Dentiste Le Lundi - Ana Escudero - Страница 8

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Épisode 6 — Réunion à trois

Peter s’appuya avec indolence sur un banc tandis qu’il essuyait avec le bord de sa manche la légère sueur qui coulait sur son visage. Il soupira de fatigue : il ne savait plus quoi faire pour retrouver son fils. Il se sentait épuisé autant physiquement que psychologiquement : il faisait plus d’effort qu’à l’accoutumée. Son fils ne pouvait pas s’être perdu puisqu’il savait parfaitement où il habitait.

— Que pouvons-nous faire maintenant, Sultan ? Je ne sais pas quoi penser de tout ça.

Une voiture s’arrêta alors devant lui et le conducteur lui fit signe de s’approcher. Peter obéit tandis que Sultan grognait en soufflant et hérissait ses poils. Il fut surpris de reconnaître le dentiste sans sa blouse blanche et sans son odeur d’antiseptique.

— Montez dans la voiture, lui dit— il, on doit parler.

— Tais-toi, Sultan, ordonna Peter au chien qui grognait, tout en entrant dans la voiture. C’est le docteur Bistouri.

Sultan lui obéit, non pas parce que Peter lui avait demandé, « depuis quand devait-il obéir à ce casse-pieds ? », mais parce qu’il était très curieux de savoir ce que le dentiste avait à dire.

— Je suis désolée que vous soyez en plein dans ce bourbier, vous et votre fils, commença-t-il. J’ai ceci, je crois que c’est de votre fils, ajouta-t-il en lui montrant des dessins de personnages Disney.

— Franchement, ça ne me dit rien. Vous êtes sûr que c’est mon fils qui les a fait ?

— Pourquoi croyez-vous que votre chien grogne ? Prenez-les et faites-les lui sentir.

Peter s’exécuta et Sultan jappa joyeusement deux fois avant de montrer les dents, menaçant.

— Ce n’est pas moi qui détiens votre fils, mais je peux vous aider à le retrouver.

Soudain, et avant que personne ne puisse réagir, le dentiste démarra en trombe la voiture, laissant Sultan sur le trottoir et un Peter surpris par la réaction de son dentiste.

— Pourquoi avez-vous fait ça ? Sultan, Sultan, cours! cria Peter, mais Sultan ne lui prêta pas attention, préférant attendre le Créditeur.

— Vous ne savez pas tout ce qu’il s’est passé. Je n’ai pas pu l’éviter, même si j’avais voulu… commenta le dentiste. Ce n’est pas une excuse. Mais c que vous devez savoir c’est que moi et Xenia, Xenia et moi, avons une mission à réaliser et que cela faisait des mois que nous attendions le signal.

Peter le regarda, bouche bée : il n’était pas capable de penser à une question intelligente, il n’était même pas indigné, ni même ne semblait en colère de la disparition d’Alexis.

Le docteur Bistouri ne dit rien de plus pendant un moment tandis qu’il continuait à conduire vers là où les attendait l’infirmière.

— Si vous voulez, je peux vous aider à retrouver votre fils. D’accord ?

— Je veux bien, répondit Peter malgré sa voix intérieure qui lui susurrait faiblement que ce n’était peut-être pas la meilleure réponse à faire.

— La première chose que vous devez savoir c’est que tout doit rester entre vous et moi. Vous ne pouvez le raconter à personne, ni à la police, ni à votre femme, ni à personne que vous connaissez.

Peter ne crut pas nécessaire de répondre, puisqu’il ne s’approcherait jamais d’un commissariat et qu’il était incapable de dire ce qui lui faisait le plus peur entre tout raconter à sa femme ou au Créditeur, dont il incluait le dernier dans les personnes qu’il connaissait et à qui il ne devait donc rien dire. Mais est-ce que cela incluait Sultan ?

— D’abord, nous allons retrouver Xenia, et à nous trois, nous réfléchirons sur ce que nous pouvons faire, dit le docteur Bistouri sans penser avec qui il était en train de parler.

Peter remua sur son siège, inquiet, tandis que de sa bouche sortait un murmure inintelligible.

Au bout de quelques minutes, le docteur Bistouri arrêta la voiture près de Xenia. Le docteur courut pour l’embrasser.

— Ce n’est pas le moment, murmura-t-elle. Nous avons des choses importantes à faire.

Le docteur la lâcha avec regret et fit signe à Peter de s’approcher, ce que fit immédiatement Peter tout en se passant la main dans les cheveux, tentant de dompter quelques mèches rebelles. En voyant la jeune infirmière, il se souvint du trou qu’il avait encore dans la bouche.

— Ma bouche! cria-t-il, tout en la montrant.

— C’est vrai, je suis désolée. Comme vous le comprendrez, je ne peux pas finir le travail ici, mais je peux vous donner un calmant bien fort qui vous apaisera durant quelques heures.

Peter la regarda, soupçonneux. Pouvait-il vraiment faire confiance à une dentiste qui laissait un travail à moitié terminé pour je-ne-sais quelle raison ?

— Alors ? Ça sera rapide.

Peter hocha la tête et regarda l’infirmière préparer l’injection. Le docteur s’approcha alors de lui, mais à cet instant, l’imagination fructueuse de Peter s’accéléra : ce qui était une simple injection se convertit en une gigantesque injection, provocant une émotion viscérale en Peter, qui fit marche arrière et, après avoir émis un glapissement, se retourna et se mit à courir en criant :

— Ils veulent m’assassiner!!

Le docteur et l’infirmière le regardèrent s’éloigner.

— On devrait le suivre. Il pourrait tout révéler, commenta le docteur.

Ils se regardèrent, elle, consciente de porter des chaussures à talons hauts, et lui, convaincu qu’il ne convenait pas à sa dignité de courir, pas même pour faire du sport.

— On pourrait se diviser. Un mène à bien la transaction et l’autre porte secours à l’enfant, suggéra-t-elle.

Le docteur la regarda avec peine, la peine de devoir se séparer d’un si beau spécimen, même s’il comprenait bien qu’elle avait raison, elle avait toujours été la plus intelligente des deux.

Pendant ce temps, Peter continuait à courir et à crier jusqu’à ce que, faisant un faux-pas, il essaya de se rattraper à cloche-pied durant quelques mètres, avant de se cogner contre quelqu’un. Il s’arrêta à cause de sa douleur au pied mais aussi à cause de la surprise produite par le coup.

— Regarde où tu vas un peu! s’exclama l’armoire à glace.

— Est-ce que le dentiste fou me suit toujours ? demanda Peter tout en frottant son pied contusionné.

L’homme le regarda comme si c’était lui le fou et s’éloigna rapidement, malgré sa carrure, il ne voulait pas traiter avec un fou.

« Qu’est-ce qu’il se passe ? Pourquoi il s’en va ? » se demanda Peter en le suivant. L’homme ne lui répondit pas et pressa son pas.

— Ne courrez pas, s’il vous plaît. Vous devez m’aider à trouver mon fils. Vous êtes les muscles et moi l’intelligence.

— Ne me suivez pas! Je ne vous connais pas.

— Je ne vous connais pas non plus. Mais vous dégagez de bonnes ondes et il faut bien une première fois à tout, lui dit-il même si l’homme dégageait une odeur de crasse mêlée d’alcool et que son aspect physique état tout sauf rassurant.

— Je ne sais pas où est votre fils. Ce ne serait pas mieux pour vous d’aller voir la police ? Peter ne s’était pas rendu compte que durant toute la conversation, l’homme s’était rapproché de la station de police. Il n’avait pas remarqué non plus que l’homme avait salué d’un bref mouvement de tête le policier en uniforme qui gardait la porte principale du commissariat. Mais une fois face à la station de police, il se rappela l’avertissement du dentiste : il ne comptait pas entrer là-dedans. Il préféra donc s’éloigner discrètement. Mais l’homme, policier en civil, fit signe à l’autre policier d’arrêter Peter. Ce dernier s’approcha rapidement et silencieusement de Peter, et quand il fut à son côté, lui dit :

— Suivez-moi s’il vous plaît.

Peter s’éloigna un peu plus : il n’avait jamais eu de bonnes relations avec le corps de police et il n’avait pas l’intention de s’attarder pour voir si cette fois serait différente. Le policier se mit de nouveau à son côté et lui saisit le bras, tout en lui disant :

— Ne m’obligez pas à utiliser la force.

— Lâchez-moi! cria Peter en remuant comme une anguille. Je vous ai dit de me lâcher!

— Résistance à l’autorité. Vous avez droit à… et le policier lui lut ses droits tout en le menottant.

Peter se vit de nouveau menotté, comme cela lui était déjà arrivé à quelques occasions dans le passé. Il savait que maintenant ils allaient l’obliger à entrer dans le commissariat, et il n’avait aucune idée de quand ils le laisseraient partir. Mais il avait aussi conscience qu’il avait quelque chose à faire : il devait retrouver son fils disparu. Si bien que, ni une, ni deux, il mit un coup de pied dans le tibia du policier et courut aussi vite qu’il le pouvait. Mais il avait toujours les mains menottées, ce qui le déséquilibraient, créant un choc à chaque pas qu’il faisait, jusqu’à ce que, finalement, après un dernier trébuchement, il embrassa le sol.

— Aïe! se plaignit-il avant d’essayer de se relever. Il avait foutrement mal au nez.

Au même instant, une grande ombre se rapprocha de lui et lui mit une main sur l’épaule.

— On dirait que s’est cassé, petit frère, dit l’ombre, et malgré la sobriété du ton, on notait que la situation l’amusait. Allez, nous avons des choses à faire..

N'Allez Jamais Chez Le Dentiste Le Lundi

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