Читать книгу N'Allez Jamais Chez Le Dentiste Le Lundi - Ana Escudero - Страница 9
ОглавлениеÉpisode 7 — L’entrée dans le parc d’attractions
Cela avait beau être un jour de semaine, le parc d’attractions était plein. Batman et Mickey Mouse avançaient avec difficulté. Mickey Mouse souriait aux enfants qui s’approchaient d’eux, mais Batman aurait plutôt préféré écarter ces morveux d’une claque.
— La montagne russe! s’exclama Alexis en la voyant devant lui. On peut y monter ? Steuplait, steuplait, steuplait!
Batman ouvrit la bouche pour répondre, mais Mickey lui indiqua d’un geste de ne rien dire, ayant deviné que ce qu’il s’apprêtait à dire était malsonnant. Batman respira donc un grand coup et prononça à la place un doux « punaise » qui plut à Mickey et qui ne choqua pas Alexis. L’enfant constata avec peine qu’ils s’éloignaient de la montagne russe, mais vit qu’un peu plus loin se trouvait une grande roue. Alexis la regarda avec les yeux du désir, mais ce souhait n’était pas non plus destiné à être réalisé. A la place, il vit qu’ils se dirigeaient maintenant vers les stands de tir.
— Je dois passer un appel, dit Batman à Mickey, surveille l’enfant.
Mickey Mouse ne semblait pas l’écouter si bien que Batman lui donna un coup à l’épaule. Mickey Mouse répondit en levant et baissant le doigt du coeur à trois reprises. Batman s’éloigna finalement un peu alors que Mickey Mouse et Alexis l’attendaient à côté du stand de tir.
— Oui, tout se déroule comme prévu, commenta Batman au téléphone. Oui, nous suivons le plan comme décidé. On reste en contact.
Juste après avoir raccroché, Batman ouvrit son portable pour en sortir la carte SIM et la substituer par une autre jetable.
— Tu ne lui as pas acheté une barbe-à-papa ? Ou des pralines ? dit-il en revenant. On doit bien s’occuper de l’enfant je te signale.
Les trois se dirigèrent donc vers un stand de friandises : Batman sortit de la monnaie, acheta une barbe-à-papa et la donna à un Alexis très surpris, qui regardait la sucrerie avec une drôle d’expression.
— Prends là, c’est pour toi.
— C’est quoi ? demanda Alexis, regardant cette chose rose. J’ai jamais goûté.
— Prends la barbe-à-papa, elle ne va pas te mordre, dit Batman alors que Mickey Mouse l’encourageait en hochant la tête.
— Ma maman ne veut pas que je mange des sucreries. C’est une sucrerie?
— Et ta mère ne t’a pas dit que c’est laid de refuser un cadeau ? Prend cette maudite barbe-à-papa, je ne vais pas le faire pour toi.
Alexis plissa les lèvres et respira par à-coups tandis que ses yeux se remplissaient de larmes. Il n’était pas habitué à être traité de la sorte.
— Mais que fais-tu ? Ce n’est qu’un enfant! le récrimina Mickey Mouse devant cet accès de colère. Puis, il prit la main d’Alexis, qui rapidement, retrouva son calme.
— Espérons que cette journée passe rapidement pour qu’on puisse rendre cet enfant… déclara Batman.
Les trois avaient semblé marcher sans but apparent, mais pourtant leurs pas les avaient mené jusqu’à un manège dont l’affiche indiquait que se cachait à l’intérieur un monde magique créé grâce à un jeu de miroirs.
Alexis regarda l’édifice avec des yeux gourmands, mais cette fois-ci, ne dit rien. Il ne comprenait pas pourquoi ces bonshommes l’avaient emmené dans ce lieu et ne le laissaient pas monter dans les attractions.
Les trois entrèrent finalement dans l’attraction aux miroirs, mais loin de se laisser divertir par les formes singulières que les miroirs formaient, Mickey et Batman conduisirent directement Alexis jusqu’à un miroir en particulier. Batman le poussa et les gonds tournèrent pour laisser place à un petit couloir.
— Où allons-nous ? demanda Alexis. Il n’obtint aucune réponse.
La porte-miroir se referma derrière eux et Alexis prit peur en se voyant entouré d’obscurité.
— Il fait très noir, dit-il, tout en prenant la main de celui qui se tenait le plus proche de lui, en l’occurrence, Batman.
— Lâche-moi, microbe! ordonna Batman, méchamment.
Mais Alexis, quand il était effrayé, n’obéissait pas aux ordres, si bien qu’il agrippa encore plus la veste de Batman de ses petites mains.
Batman grommela sur l’ennui que lui causait le morveux mais ne tenta pas de le détacher. Il ouvrit une autre porte, et ils entrèrent. Mickey Mouse appuya sur l’interrupteur, provoquant l’illumination de la pièce : devant les yeux d’Alexis apparut alors ce qui à première vue paraissait être une petite salle de jeux, mais qui en vérité était une cellule où cacher Alexis. L’enfant lâcha finalement Batman et courut s’assoir par terre, où il avait reconnu un de ses jeux favoris.
Batman et Mickey Mouse, profitant qu’Alexis soit distrait, sortirent de la pièce, fermant derrière eux la porte, laissant ainsi l’enfant seul, isolé du monde extérieur. Une fois dehors, Batman se rendit compte qu’il avait encore dans la main la barbe-à-papa et la jeta dans la première poubelle qu’il vit. Puis, il sortit son portable de la poche et réalisa un rapide appel, communiquant à son interlocuteur les derniers évènements de la vie d’Alexis.
— Allons-y, dit-il après avoir raccroché.
Pendant ce temps, Alexis, se rendant compte qu’ils l’avaient laissé seul, en profita pour remarquer, peut-être pour la première fois de la journée, que ses parents n’étaient pas là, et surtout que sa maman n’était pas là. Sa mère qui, même si elle était une personne très occupée, trouvait toujours du temps pour être avec lui, jouer avec lui, ou lui faire à manger. Il fut pris d’une peine jusqu’alors inconnue, une peine qui l’obligea à délaisser le jouet qu’il avait dans les mains et, s’asseyant dans un coin de la pièce, il commença à penser à ses parents. Il se souvint du conseil que lui répétait toujours sa mère : ne jamais se séparer d’eux. Mais parfois il ne pouvait pas faire autrement. C’était la curiosité qui l’avait poussé à se séparer de la sécurité que lui offrait son père. Cette même curiosité le poussa à parcourir du regard la pièce dans lequel il se trouvait en ce moment. En plus des différents jeux et jouets qui étaient dispersés dans la pièce, il y avait une chaise et une table sur laquelle se trouvait quelque chose recouvert par un torchon. La curiosité joua une fois de plus avec l’enfant et il écarta le torchon pour découvrir une part de gâteau au chocolat avec un verre de lait. Alexis n’avait pas de montre et ne savait pas combien de temps était passé depuis son rendez-vous chez le dentiste, mais en voyant le gâteau, il eut l’impression que cela faisait des siècles qu’il n’avait pas mangé. Rapidement, il s’assit à la table, prêt à manger cet appétissant gâteau.
Dix minutes après, il avait les mains et le visage tachés de chocolat et une moustache blanche. Il bailla à deux ou trois occasions de manière incontrôlée tout en fermant les yeux, et même s’il ne voulait pas dormir ici, il se rendit vite compte qu’il n’arrivait pas à garder les yeux ouverts. Il descendit de la chaise et se blottit sous la table, les jambes repliées contre lui.
Quelques secondes plus tard, il dormait.
Peu de temps après, entra de nouveau Mickey Mouse, qui repéra la table et s’accroupit pour voir Alexis. Il le tira avec prudence pour ne pas lui faire mal jusqu’à le faire sortir de sous la table. Il le prit entre ses bras et, traversant la pièce, le déposa dans un lit caché à la vue par un paravent. Puis, il le borda et sortit de la pièce, tentant de faire le moins de bruit possible, même s’il savait que l’enfant n’allait pas se réveiller pendant un moment.
Dehors, Batman l’attendait, et, en le voyant, jeta la cigarette qu’il était en train de fumer.
— Maintenant, nous disposons de quelques heures de libres, dit Batman. Je déteste jouer les baby-sitters.
Mickey Mouse se contenta de hausser les épaules, il commençait à connaître son compagnon d’infortune.
— Ne fais pas ça… tu sais que je n’aime pas, dit Batman. Je ne t’aime d’ailleurs pas non plus, l’ami.
Mickey esquissa la moitié d’un sourire derrière son déguisement puis fit mine de quitter son masque. Batman arrêta son mouvement avec violence et regarda autour de lui pour vérifier s’il y avait ou non beaucoup de personnes autour d’eux. Mickey stoppa son mouvement, mais il avait envie de quitter ce masque aussi vite que possible, car cela commençait à l’agacer.
— Attends que l’on soit dans la voiture. Nous sommes trop exposés ici. Quelqu’un pourrait retenir nos visages, commenta Batman tout en commençant à se diriger vers la sortie du parc d’attractions.
Quelques minutes après, ils arrivèrent à la voiture, et en la voyant, Batman jura : une roue était crevée.
— Maudits gamins! cria-t-il tout en frappant avec rage le capot de la voiture.