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2. L’évolution historique du système de santé

2.1 D’Hippocrate à la découverte des antibiotiques

Hippocrate, qui est né en 460 av. J.-C. en Grèce et mort en 377 av. J.-C., est considéré comme étant le père de la médecine. Le besoin de soigner les maladies est né avec l’origine même de l’Homme, comme nécessité spontanée du malade de vivre en collectivité sans rester seul devant la maladie. Le « medicus » n’est pas seulement celui qui sert de médiateur entre le patient et la maladie, mais il s’interpose entre la douleur et la mort, jouant souvent au cours des siècles un rôle à la fois magique et sacerdotale. Les premières écoles de médecines se développèrent en Grèce et dans la Grande-Grèce dont faisaient partie la Sicile et la Calabre. A Crotone, dans la région Calabre, l’école de Pythagore (570 av. J.-C. – 495 av. J.-C.)9 était très réputée. Au centre de la conception d’Hippocrate on ne trouvait pas la maladie, mais l’Homme, avec une attention particulière pour l’alimentation et l’environnement, il fut le précurseur de la connaissance des premiers déterminants de maladies liés à l’alimentation et à la salubrité de l’air. Les textes d’Hippocrate (ou supposés comme tels) ont été analysés dans les universités jusqu’en 1700. Ces écrits étaient axés sur la prudence et sur la précaution avant toute intervention, avec une utilisation parcimonieuse des thérapies disponibles, puisqu’à l’époque il n’y avait que très peu de remèdes, la pharmacologie n’étant pas connue et la phytothérapie n’était qu’à ses début et ne s’est développée qu’un siècle plus tard avec Théophraste (371 av. J.-C.), élève d’Aristote (384 av. J.C.) à qui nous devons une évolution considérable des sciences naturelles.

Hippocrate a offert à la médecine une empreinte globale avec à son centre l’Homme et l’environnement, et devint ainsi le précurseur des théories environnementales modernes les plus évoluées, parmi lesquelles nous retrouvons les théories économiques et écologiques de notre économiste de référence, Jeremy Rifkin, qui nous a inspiré cette description du nouveau paradigme de la médecine avec ce livre que nous défendons : Zéro maladie.

Hippocrate introduit les premiers concepts de l’éthique médicale et c’est à son école que nous attribuons le serment du médecin :

 Â« Je jure par Apollon, médecin, par Asclépios, par Hygie et Panacée, par tous les dieux et toutes les déesses, les prenant à témoin que je remplirai, suivant mes forces et ma capacité, le serment et l'engagement suivants :

 Je mettrai mon maître de médecine au même rang que les auteurs de mes jours, je partagerai avec lui mon savoir et, le cas échéant, je pourvoirai à ses besoins ; je tiendrai ses enfants pour des frères, et, s'ils désirent apprendre la médecine, je la leur enseignerai sans salaire ni engagement.

 Je ferai part de mes préceptes, des leçons orales et du reste de l'enseignement à mes fils, à ceux de mon maître et aux disciples liés par engagement et un serment suivant la loi médicale, mais à nul autre.

 Je dirigerai le régime des malades à leur avantage, suivant mes forces et mon jugement, et je m'abstiendrai de tout mal et de toute injustice.

 Je ne remettrai à personne du poison, si on m'en demande, ni ne prendrai l'initiative d'une pareille suggestion ; semblablement, je ne remettrai à aucune femme un pessaire abortif.

 Je passerai ma vie et j'exercerai mon art dans l'innocence et la pureté. Je ne pratiquerai pas l'opération de la taille, je la laisserai aux gens qui s'en occupent.

 Dans quelque maison que j'entre, j'y entrerai pour l'utilité des malades, me préservant de tout méfait volontaire et corrupteur, et surtout de la séduction des femmes et des garçons, libres ou esclaves. Quoi que je voie ou entende dans la société pendant, ou même hors de l'exercice de ma profession, je tairai ce qui n'a jamais besoin d'être divulgué, regardant la discrétion comme un devoir en pareil cas.

 Si je remplis ce serment sans l'enfreindre, qu'il me soit donné de jouir heureusement de la vie et de ma profession, honoré à jamais des hommes ; si je le viole et que je me parjure, puissé-je avoir un sort contraire ! »

L’hygiène, du grec « salutare », est la branche de la médecine qui s’occupe de la santé au sens large, de la conception la plus ancienne qui étudie la salubrité de l’air, du sol et des eaux, jusque sa conception moderne qui étudie l’organisation des services de soins pour la santé publique et privée de la manière la plus efficiente et efficace possible. L’hygiène s’est toujours occupée de la prévention des maladies.

Démocrite (460 av. J.-C. – 370 av. J.-C.) a développé la théorie es pores qui conditionna le manque de conditions d’hygiène au Moyen Âge. Pour l’école de Démocrite, le fait que les pores soient ouverts ou fermés entrainaient respectivement soit une condition de détente ou de tension. Selon cette théorie, il fallait chercher à maintenir les pores ouverts de façon naturelle, notamment en faisant attention à la manière de se laver et à la température de l’eau. Ce concept fut mal interprété au Moyen Âge et condamna l’eau comme responsable de la fermeture des pores.

Heureusement, les théories erronées de Démocrite ont été révisées seulement quelques siècles après (Moyen-Âge), tandis qu’au cours de l’époque grecque puis de l’époque romaine, l’hygiène a connu une évolution considérable. L’eau représentait un élément crucial dans la société romaine, et l’on vit son développement également grâce à la construction d’imposants aqueducs qui traversaient les rues de l’empire et qui permirent de développer considérablement les thermes et les saunas avec des systèmes avancés pour l’eau et les égouts.

La lutte contre les maladies notamment infectieuses a été menée au cours des siècles surtout grâce aux différentes techniques d’hygiène qui, comme nous le verrons, portèrent au développement de la médecine préventive jusqu’aux deux récents types de médecine, prédictive et personnalisée.

Pour combattre les maladies, au cours des derniers siècles des structures accueillant une haute concentration de médecins et de technologies se sont développées : les hôpitaux. Les origines de l’hôpital moderne peuvent remonter au début du XXe siècle lorsque les grands propriétaires terriens demandèrent dans leur testament des structures qui s’occuperaient des pauvres et malades moribonds. Des structures de charité presque toujours gérées et organisées par les religieux.

Bien que le XIVe et le XVIIe siècles aient connu des épidémies de peste catastrophiques et que la lèpre et la tuberculose aient fait rage, on n’avait pas conscience que la maladie pouvait contaminer d’autres organismes vivants. On ne connaissait pas les modalités de transmission des maladies infectieuses et la théorie la plus enracinée était que les odeurs portaient la contamination, mais personne ne savait de quelle manière. Au Moyen Âge, il n’y avait aucun concept d’hygiène et les malades étaient installés sur des lits avec des draps sales qui étaient réutilisés sans être lavés.

L’hôpital de la première révolution industrielle remonte au XVIIIe siècle, de grande dimension avec de multiples fonctions, entre le social et le sanitaire, où se trouvaient des malades hospitalisés fébriles, des femmes enceintes, des malades psychiatriques, des malades chirurgicaux portant un risque de gangrène nosocomiale, ainsi que des pauvres cherchant un toit et de la nourriture, et il n’était pas rare d’observer des religieuses déplacer des cadavres.

Avec l’augmentation des connaissances en hygiène de l’environnement, les hôpitaux pavillonnaires se développèrent pour lutter contre les maladies infectieuses et étaient constitués de bâtiments bas séparés entre eux afin de réduire au minimum la contamination entre les malades. Vers 1850, commencèrent les premières constructions des hôpitaux pavillonnaires, nous pouvons encore aujourd’hui les observer dans certaines aires métropolitaines anciennes, comme par exemple la polyclinique Umberto et l’hôpital San Camillo de Rome.

Jérôme Fracastor (1478-1553), médecin, mathématicien et poète, enseigna la logique à l’université de Padoue. Il écrivit le poème latin La Syphilis sive de morbo gallico (1530) dans lequel il est question d’un jeune et beau berger qui, après avoir offensé Apollon, se voit souffrir d’une maladie ulcéreuse comme punition. La syphilis, maladie vénérienne dont l’apparition était alors très récente, prend ainsi le nom de ce poème. Il fut parmi les premiers à considérer que les maladies épidémiques étaient transmises par une sorte de semence qui propageait la contamination (De Contagione et Contagiosis Morbis, 1546) 10 .

Carlo Francesco Cogrossi (1682-1769) est le premier à s’être rendu compte que dans la peste bovine étaient présents des organismes vivants qui transmettaient la peste, mais sa théorie est restée lettre morte.

Edward Jenner (1749-1823) était un médecin et naturaliste britannique, connu pour l’introduction du vaccin contre la variole, et est considéré comme le père de l’immunisation.

L’utilisation de moisissures et de plantes particulières pour soigner les infections était déjà reconnue dans de nombreuses cultures anciennes (grecque, égyptienne, chinoise), leur efficacité était due aux substances antibiotiques produites par les espèces végétales ou par les moisissures. Il n’était pas possible de distinguer le composant réellement actif, ni de l’isoler. Vincenzo Tiberio, médecin natif du Molise ayant étudié à l’université de Naples, avait déjà décrit en 1895 le pouvoir bactéricide de certaines moisissures11 .

Les recherches modernes ont débuté avec la découverte, par hasard, de la pénicilline en 1928 par Alexander Fleming. Plus de dix ans plus tard, Ernst Chain et Howard Walter Florey réussirent à obtenir les antibiotiques en forme pure. Ils ont obtenu tous les trois le prix Nobel de médecine en 1945.

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