Читать книгу La Saga de Njal - Anonyme - Страница 8
III
ОглавлениеHarald Grafeld régnait en Norvège. Il était fils d'Eirik Blodöx, fils d'Harald Harfag. Sa mère s'appelait Gunhild. Elle était fille d'Össur Toti. Ils avaient leur habitation dans l'Est, à Konungahella.
Et voici qu'on apprit l'arrivée d'un vaisseau, à Vik. Sitôt que Gunhild sut la nouvelle, elle demanda quelle sorte de gens d'Islande étaient sur ce vaisseau. On lui dit que c'était un homme nommé Hrut, fils du frère d'Össur. «Je sais, dit Gunhild. Il vient chercher son héritage. Mais il y a un homme qui le détient, et qui se nomme Soti.» Elle appela un des hommes de sa maison, qui se nommait Ögmund: «Je vais t'envoyer au Nord, dit-elle, dans le pays de Vik, à la rencontre d'Össur et de Hrut; dis-leur que je les invite tous deux chez moi pour l'hiver, et que je veux être leur amie. Et si Hrut veux faire mes volontés, je l'aiderai dans son affaire d'héritage, et dans tout ce qu'il entreprendra. Et je le servirai auprès du roi.»
Ögmund partit, et vint trouver Össur et Hrut. Quand ils surent qu'il était l'homme de Gunhild, ils le reçurent de leur mieux. Il leur fit son message en secret; après quoi les deux parents se mirent à l'écart pour voir ce qu'ils avaient à faire. Össur dit à Hrut: «Je crois, mon neveu, que notre choix est tout fait, car je sais l'humeur de Gunhild. Sitôt que nous aurons refusé d'aller la trouver, elle nous fera mettre hors du pays, et prendra de force tous nos biens. Si nous y allons, elle nous rendra toutes sortes d'honneurs, comme elle nous l'a promis.» Ögmund s'en retourna, et quand il fut devant Gunhild, il lui dit la réponse à son message, et qu'ils allaient venir. «Je le savais bien, dit Gunhild; Hrut est un homme sage, et qui sait vivre; maintenant, sois vigilant, et quand ils approcheront du domaine, dis-le moi.»
Hrut et Össur se mirent en route vers Konungahella. Quand ils arrivèrent, leurs parents et leurs amis vinrent au devant d'eux avec beaucoup de joie. Ils demandèrent si le roi était dans son domaine. On leur dit qu'il y était. À ce moment, Ögmund vint les trouver. Il leur dit que Gunhild les saluait, et aussi qu'elle ne les ferait pas venir chez elle avant qu'ils n'eussent vu le roi, à cause de ce qu'on pourrait dire: «Il semblerait, ajoutait-elle, que je veux les prendre pour moi. Je ferai cependant pour eux tout ce qu'il me plaira. Que Hrut parle sans crainte au roi, et qu'il lui demande de devenir son homme.»--«Et voici, dit Ögmund, un habit que la reine t'envoie. C'est avec cet habit que tu iras trouver le roi.» Et Ögmund s'en alla.
Le jour suivant, Hrut dit à Össur: «Allons chez le roi.»--«Je veux bien» dit Össur; et ils y allèrent, au nombre de douze. Tous leurs parents et leurs amis étaient là. Ils entrèrent dans la salle où le roi était assis à boire, Hrut s'avança le premier, et salua le roi. Le roi regarda avec attention cet homme bien vêtu qui le saluait, et lui demanda son nom. Hrut se nomma. «Es-tu d'Islande?» dit le roi. Hrut répondit que oui, «Pourquoi es-tu venu chez nous?»--«Pour voir votre seigneurie, ô roi, et aussi, parce que j'ai une grosse affaire d'héritage dans ce pays-ci, et j'aurai besoin de votre aide pour qu'il me soit fait droit.» Le roi dit: «J'ai promis qu'il serait rendu justice à chacun dans mon royaume. Mais avais-tu encore autre chose à me dire en venant me trouver?»--«Seigneur, dit Hrut, j'ai à vous demander une place à votre cour, et de me faire votre homme.» Le roi se taisait, Gunhild lui dit: «Il me semble que cet homme vous fait beaucoup d'honneur; je suis d'avis que s'il y en avait un grand nombre comme lui à votre cour, elle serait bien garnie.»--«Est-ce un homme sage?» demanda le roi. «Sage et hardi» répondit-elle. «Je crois bien, dit le roi, que ma mère veut qu'on te fasse comme tu demandes; cependant, à cause de notre dignité, et de la coutume du royaume, je veux que tu reviennes dans un demi-mois seulement; et je te ferai mon homme. Jusque-là ma mère prendra soin de toi, mais alors viens me trouver.»
Gunhild dit à Ögmund: «Conduis-les dans ma maison, et traite-les bien.» Ögmund sortit et eux avec lui. Et il les mena dans une salle de pierre dont les murs étaient tendus de tapisseries, les plus belles qu'on pût voir, et le siège de Gunhild était là. Ögmund dit à Hrut: «Tu vas voir la vérité de ce que je t'ai dit de la part de Gunhild: voici son siège, et tu vas t'y asseoir; tu y resteras, quand elle viendrait elle-même.» Et il leur servit à manger. Comme ils étaient à table depuis quelques temps, Gunhild entra. Hrut voulut se lever pour aller au devant d'elle. «Reste assis, dit-elle; tu garderas ce siège tant que tu seras dans ma maison.» Elle s'assit auprès de Hrut, et ils se mirent à boire. Le soir, elle lui dit: «Tu dormiras avec moi cette nuit dans la chambre d'en haut.»--«Je ferai ce que vous voulez» répondit-il. Ils allèrent dormir, et elle ferma la porte en dedans; ils dormirent là pendant la nuit, et au matin ils retournèrent boire. Et pendant tout le demi-mois ils couchèrent ensemble dans la chambre d'en haut. Gunhild avait dit aux hommes qui étaient là: «Il y va de votre vie, si vous dites à personne ce qu'il y a entre Hrut et moi.»
Hrut lui donna cent aunes d'étoffes de laine et douze capes de peaux, et elle le remercia de ses présents. Hrut partit, après l'avoir baisée et remerciée. Elle lui souhaita bonne chance. Le jour suivant, Hrut vint devant le roi, avec trente hommes. Il salua le roi, et le roi lui dit: «Tu veux, Hrut, que je fasse pour toi ce que j'ai promis.» Il le fit donc son homme. Hrut demanda: «Quelle place me donnerez-vous?»--«C'est ma mère qui en décidera» dit le roi. Et elle le fit mettre à la place d'honneur.
Hrut passa l'hiver chez le roi, et il y était très considéré.