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MÉMOIRES DE NAPOLÉON
§ XIII

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Le général Miollis, qui était resté en Toscane, commandait un corps de 5 à 6,000 hommes de toutes armes; la majorité de ces troupes était des troupes italiennes. Les garnisons qu'il était obligé de laisser à Livourne, à Lucques, au château de Florence, et sur divers autres points, ne lui laissaient de disponible qu'un corps de 3,500 à 4,000 hommes. Le général de Damas, avec une force de 16,000 hommes, dont 8,000 Napolitains, était venu prendre position sur les confins de la Toscane, après avoir traversé les états du pape. Il devait combiner ses opérations dans la Romagne et le Ferrarois, avec des troupes d'insurgés, chassés de Toscane par la garde nationale de Bologne, et par une colonne mobile qu'avait envoyée le général Brune, sur la droite du Pô. La retraite de l'armée autrichienne qui, successivement, avait été obligée de passer le Pô, le Mincio, l'Adige, la Brenta, avait déconcerté tous les projets des ennemis sur la rive droite du Pô. Le général Miollis, établi à Florence, maintenait le bon ordre dans l'intérieur; et les batteries élevées à Livourne, tenaient en respect les bâtiments anglais. Les Autrichiens, qui s'étaient montrés en Toscane, s'étaient retirés, partie sur Venise pour en renforcer la garnison, et partie sur Ancône.

Le 14 janvier, le général Miollis, instruit qu'une division de 5 à 6,000 hommes du corps de Damas, s'était portée sur Sienne, dont elle avait insurgé la population, sentit la nécessité de frapper un coup, qui prévînt et arrêtât les insurrections prêtes à éclater sur plusieurs autres points. Il profita de la faute que venait de commettre le général de Damas, officier sans talent ni mérite militaire, de détacher aussi loin de lui une partie de ses forces, et marcha contre ce corps avec 3,000 hommes. Le général Miollis rencontra les Napolitains et les insurgés en avant de Sienne, les culbuta aussitôt sur cette ville, dont il força les portes à coups de canon et de hache, et passa au fil de l'épée tout ce qu'il y rencontra les armes à la main. Il fit poursuivre, plusieurs jours, les restes de ces bandes, et les rejeta au-delà de la Toscane, dont il rétablit ainsi, et maintint la tranquillité.

Cependant de nouvelles forces étaient parties de Naples, pour venir renforcer l'armée de M. de Damas.

Le général Murat, commandant en chef la troisième armée de réserve, qui venait de prendre la dénomination d'armée d'observation d'Italie, et dont le quartier-général était à Genève, dans les premiers jours de janvier, passa le Petit-Saint-Bernard, le mont Genèvre et le mont Cénis, et arriva, le 13 janvier, à Milan. Cette armée continua sa route sur Florence; elle était composée des divisions Tarreau et Mathieu, et d'une division de cavalerie. Un des articles de la convention de Trévise, portait que la place d'Ancône serait remise à l'armée française. Le général Murat, en conséquence, eut ordre de prendre possession de cette place, de chasser les troupes napolitaines des états du pape, et de les menacer même dans l'intérieur du royaume de Naples. Ce général, arrivé à Florence le 20 janvier, expédia le général Paulet, avec une brigade de 3,000 hommes de toutes armes, pour prendre possession d'Ancône et de ses forts. Ce dernier passa à Cézenna, le 23 janvier, et le 27, il prit possession des forts et de la ville d'Ancône. Cependant le premier consul avait ordonné qu'on eût pour le pape les plus grands égards. Le général Murat avait même écrit de Florence, le 24 janvier, au cardinal, premier ministre de S. S., pour l'informer des intentions du premier consul, et de l'entrée de l'armée d'observation dans les états du saint-père, afin d'occuper Ancône, d'après la convention du 16, et de rendre à sa Sainteté le libre gouvernement de ses états, en obligeant les Napolitains à évacuer le château Saint-Ange et le territoire de Rome. Il prévint aussi le cardinal, qu'il avait ordre de ne s'approcher de Rome, que dans le cas où sa sainteté le jugerait nécessaire.

Dès son arrivée en Toscane, le général français avait écrit à M. de Damas, pour lui demander les motifs de son mouvement offensif en Toscane, et lui signifier qu'il eût à évacuer sur-le-champ le territoire romain. M. de Damas lui avait répondu de Viterbe, que les opérations du corps sous ses ordres, avaient toujours dû se combiner avec celles de l'armée de M. de Bellegarde; que, lorsque le général Miollis avait attaqué son avant-garde, à Sienne, à vingt-six milles de son corps d'armée, il allait se retirer sur Rome, imitant le mouvement de l'armée autrichienne, sur la Brenta; mais que, puisqu'un armistice avait été conclu avec les Autrichiens, les troupes qu'il commandait, étant celles d'une cour alliée de l'empereur, se trouvaient aussi en armistice avec les Français.

Le général Murat lui répondit sur-le-champ, que l'armistice conclu avec l'armée autrichienne, ne concernait en rien l'armée napolitaine; qu'il était donc nécessaire qu'elle évacuât le château Saint-Ange et les états du pape; que la considération du premier consul pour l'empereur de Russie, pouvait seule protéger le roi de Naples; mais que ni l'armistice, ni le cabinet de Vienne, ne pouvaient en rien le protéger. En même temps, le général Murat mit sa petite armée en mouvement. Les deux divisions d'infanterie furent dirigées, le 28 janvier, par la route d'Arezzo, sur Foligno et Perruvio, où elles arrivèrent le 4 février. Le général Paulet eut ordre de se rendre d'Ancône, avec deux bataillons, à Foligno, en passant par Macerata et Tolentino. Pendant ces mouvements, l'artillerie, qui se dirigeait sur Florence, par le débouché de Pistoia, eut ordre de continuer sa route par Bologne et Ancône. Ainsi le corps d'observation marchait sans son artillerie; faute qui ne peut jamais être excusée, que lorsque les chemins par où passe l'armée, sont absolument impraticables au canon. Or, celui de Bologne à Florence n'est pas dans ce cas, les voitures peuvent y passer. Aussitôt que l'armée napolitaine fut instruite de la marche du corps d'observation, elle se replia en toute hâte sous les murs de Rome.

Le général Paulet, dès son arrivée à Ancône, y avait fait rétablir les autorités et placer les couleurs du pape; ce qui excita la reconnaissance de ce pontife, qui se hâta de faire écrire au général Murat, par le cardinal Gonsalvi, le 31 janvier, pour lui exprimer le vif sentiment dont il était pénétré pour le premier consul; auquel, dit-il, est attachée la tranquillité de la religion, ainsi que le bonheur de l'Europe.

Le 9 février, l'armée française était placée sur la Neva, jusqu'à son embouchure dans le Tibre, et jusqu'aux confins des états du roi de Naples.

Enfin, après quelques pourparlers, le général Murat consentit, par égard pour la Russie, à signer, le 18 février, à Foligno, un armistice de trente jours, entre son corps d'armée et les troupes napolitaines. D'après cet armistice, elles durent évacuer Rome et les états du pape. Le premier mars, à la suite de l'arrivée à Naples du colonel Beaumont, aide-de-camp du général Murat, l'embargo fut mis sur tous les bâtiments anglais, qui se trouvaient dans les ports de ce royaume. Tous les Anglais en furent expulsés, et l'armée napolitaine rentra sur son territoire. Le 28 mars suivant, un traité de paix fut signé à Florence, entre la république française et la cour de Naples, par le citoyen Alquier et le chevalier Micheroux. D'après l'un des articles, un corps français pouvait, sur la demande du roi de Naples, être mis à sa disposition, pour garantir ce royaume des attaques des Anglais et des Turcs. En vertu de ce même article, le général Soult fut envoyé, le 2 avril, avec un corps de 10 à 12,000 hommes, pour occuper Otrante, Brandisi, Tarente, et tout le bout de la presqu'île, afin d'établir des communications plus faciles avec l'armée d'Égypte. Ce corps arriva à sa destination vers le 25 avril. Dans le courant de ce mois, la Toscane fut remise au roi d'Étrurie, conformément au traité de Lunéville, et à celui conclu entre la France et l'Espagne. Cependant les Anglais occupaient encore l'île d'Elbe. Le premier mai, le colonel Marietty, parti de Bastia avec 600 hommes, débarqua près de Marciana, dans cette île, pour en prendre possession, d'après le traité conclu avec le roi de Naples. Le lendemain, il entra à Porto-Longone, après avoir chassé un rassemblement considérable de paysans insurgés, d'Anglais et de déserteurs. Il fut joint dans cette place, le même jour, par le général de division Tharreau, qui s'était embarqué à Piombino avec un bataillon français et 300 Polonais. Ces troupes réunies, marchèrent aussitôt pour cerner Porto-Ferrajo, qui fut sommé de se rendre. Ainsi toute la partie de l'île cédée par le traité de Florence, fut remise au pouvoir des Français.

Mémoires pour servir à l'Histoire de France sous Napoléon, Tome 2

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