Читать книгу Les chats: Histoire; Moeurs; Observations; Anecdotes - Champfleury - Страница 8

LES CHATS DANS L'ÉGYPTE ANCIENNE.

Оглавление

Table des matières

Un naturaliste qui visite une collection de monuments égyptiens se demande tout d'abord, en voyant la grande quantité de chats momifiés ou représentés en bronze, d'où vient l'introduction du chat dans le pays des Pharaons. C'est une question que les études contemporaines ne permettent pas de résoudre, les égyptologues n'ayant pas trouvé de représentation du chat sur les monuments contemporains des pyramides. Le chat paraîtrait avoir été acclimaté en même temps que le cheval, c'est-à-dire au commencement du nouvel empire (vers 1668 avant J.-C.).

La plus ancienne rédaction connue jusqu'ici du Rituel funéraire ne remonte pas au delà de cette époque. C'est à ce moment qu'on voit, dans les peintures murales des hypogées, le chat quelquefois représenté sous le fauteuil de la maîtresse de maison, place qu'occupent aussi les chiens & les singes.

La rareté & l'utilité du chat le firent admettre alors probablement parmi les animaux sacrés, afin que sa race fût propagée sûrement.

Son utilité est attestée par des peintures représentant des scènes de chasse en barque dans les marécages de la vallée du Nil, où des chats se jettent à l'eau pour rapporter le gibier[3].

[3] On sait que les Égyptiens étaient extraordinairement habiles à dresser les animaux, & ce fait le prouve, car aujourd'hui si à la campagne quelque chat affamé plonge avec précaution sa patte dans un étang pour happer un poisson au passage, il a perdu absolument la qualité de pêcher de ses ancêtres; & l'on crierait au miracle si un chat rapportait un canard tué aux marais par des chasseurs.

Les Égyptiens, montés sur de légères barques, étaient suivis habituellement dans ces chasses au marais, par leur famille, leurs domestiques & leurs animaux, entre lesquels se remarquent souvent des chats.


Une peinture de chasse, d'un tombeau à Thèbes, représente une barque dans laquelle un chat se dresse comme un petit chien contre les genoux de son maître qui va lancer le bâton courbé appelé schbot, semblable au boumerang des Australiens. Une autre peinture provenant également d'un tombeau de Thèbes se trouve au British Museum. Wilkinson en a donné la description:

«Un chat favori quelquefois accompagnait les chasseurs égyptiens dans ces occasions, & par l'exactitude avec laquelle il est représenté saisissant le gibier, l'artiste a voulu nous montrer que ces animaux étaient dressés à chasser les oiseaux & à les rapporter[4]

[4] Wilkinson, Manners and Customs of the ancient Egyptians, in-8º, Londres, 1837.

M. Mérimée a bien voulu me communiquer un dessin d'après ce fragment de peinture, où le chat jouant le rôle principal rapporte les oiseaux à son maître, qui attend dans une barque. Ces sortes de représentations où figurent les chats, appartiennent à la XVIIIe & à la XIXe dynastie (vers 1638 & 1440 avant J.-C.).

Un des monuments les plus anciens relatifs à cet animal existe dans la nécropole de Thèbes, renfermant le tombeau de Hana, sur la stèle duquel se tient debout la statue de ce roi, ayant entre ses pieds son chat nommé Bouhaki.

Le roi Hana paraît avoir fait partie de la XIe dynastie; dans tous les cas, il est antérieur à Ramsès VII, de la XXe, qui fit explorer ce tombeau.

Au milieu des figurines égyptiennes en bronze ou en terre émaillée de nos musées, on remarque souvent un chat accroupi portant gravé sur son collier l'œil symbolique, emblème du soleil. Les oreilles percées de l'animal étaient en ce cas ornées de bijoux en or.

Le chat est également représenté sur quelques médailles du nome de Bubastis, où la déesse Bast (la Bubastis des Grecs) était particulièrement révérée. Cette déesse, forme secondaire de Pascht, prend d'habitude la tête d'une chatte & porte dans sa main le sistre, symbole de l'harmonie du monde. Les chats qui, de leur vivant, avaient été honorés dans le temple de Pascht, comme image vivante de cette déesse, étaient, après leur mort, embaumés & ensevelis avec pompe.


Diverses statues funéraires de femmes portent l'inscription TECHAU, la chatte, en signe de patronage de la déesse Bast. Quelques hommes aujourd'hui appellent leur femme ma chatte, sans arrière-idée hiératique.

Certaines momies de chats, trouvées dans des cercueils en bois à Bubastis, à Spéos-Artemidos, à Thèbes & ailleurs, avaient le visage peint.

Curieuses momies qui, dans leur amaigrissement & leur allongement, semblent des bouteilles de vin précieux entourées de tresses de paille (voir dessin, page 12).

Ceci fut un chat alerte, on ne s'en douterait pas; vénéré, les bandelettes & les onguents le prouvent.

Toutefois le symbolisme du chat reste encore entouré de mystères, tant à cause des récits d'Horapollon que de ceux de Plutarque, ces historiens ayant admis des légendes contradictoires.

Suivant Horapollon, le chat était adoré dans le temple d'Héliopolis, consacré au soleil, parce que la pupille de l'animal suit dans ses proportions la hauteur du soleil au-dessus de l'horizon & en cette qualité représente l'astre merveilleux.

Plutarque, dans son Traité d'Isis & d'Osiris, conte que l'image d'une chatte était placée au sommet du sistre comme un emblème de la lune, «à cause, dit Amyot, de la variété de sa peau & parce qu'elle besongne la nuict, & qu'elle porte premièrement un chaton à la première portée, puis à la seconde deux, à la troisième trois, & puis quatre, & puis cinq, jusques à sept fois, tant qu'elle en porte en tout vingt-huict, autant comme il y a de jours de la lune: ce qui à l'adventure est fabuleux, mais bien est véritable que les prunelles de ses yeux se remplissent & s'eslargissent en la pleine lune & au contraire s'estroississent & se diminuent au décours d'icelle.»

Ainsi, tandis qu'Horapollon voit de secrètes analogies entre le jeu de la pupille des chats & le soleil, Plutarque en reporte la relation avec la lune.


La science moderne, laissant aux nécromanciens les influences des astres sur l'homme & les animaux, a expliqué ces phénomènes de la vision par l'optique.


Pour ce qui est des diverses portées des chattes dont parle Plutarque, on peut ranger ces histoires au nombre des fables que les naturalistes anciens se plaisaient à rapporter.

Hérodote n'est guère plus véridique en ses Histoires:

«Quand les femelles ont mis bas, elles ne s'approchent plus des mâles; ceux-ci, cherchant à s'accoupler avec elles, n'y peuvent réussir. Alors ils imaginent d'enlever aux chattes leurs petits; ils les emportent & les tuent; toutefois ils ne les mangent pas après les avoir tués. Les femelles, privées de leurs petits & en désirant d'autres, ne fuient plus les mâles: car cette bête aime à se reproduire.»

Cette opinion, qu'on, retrouvera plus loin, adoptée par Dupont de Nemours, me paraît fausse; mais avant de la réfuter, je termine avec Hérodote:

«Si un incendie éclate, les chats sont victimes d'impulsions surnaturelles; en effet, tandis que les Égyptiens, rangés par intervalles, sont beaucoup moins préoccupés d'éteindre le feu que de sauver leurs chats, ces animaux se glissent par les espaces vides, sautent par-dessus les hommes & se jettent dans les flammes. En de tels accidents, une douleur profonde s'empare des Égyptiens. Lorsque, dans quelque maison, un chat meurt de sa belle mort, les habitants se rasent seulement les sourcils; mais si c'est un chien qui meurt, ils se rasent le corps & la tête[5]

[5] Hérodote, traduction Giguet. In-18, Hachette, 1860.

Le fait des chats se précipitant dans les flammes mériterait confirmation; je préfère le détail rapporté par un écrivain moderne que les Égyptiens donnaient de bonne heure à chaque chatte un époux convenable, ces peuples se préoccupant des rapports de goût, d'humeur & de figure.

Comment s'appelait le chat chez les Égyptiens? Les Rituels antiques du Louvre portent Mau, Maï, Maau: quelques égyptologues ont lu sur certains monuments Chaou; il faut, m'écrit un érudit en ces sortes de matières, lire Maou qui forme une de ces onomatopées si fréquentes dans toutes les langues primitives.

Sans railler les égyptologues, j'ose dire que les traductions de certains hiéroglyphes sont troublantes pour l'esprit & que cette langue cabalistique court grand risque de rester elle-même momifiée à jamais[6].

[6] «Je suis ce grand chat qui était à (l'allée?) du Perséa, dans An (Héliopolis), dans la nuit du grand combat; celui qui a gardé les impies dans le jour où les ennemis du Seigneur universel ont été écrasés.» Ailleurs le même grand chat de (l'allée?) pourrait être pris par des esprits facétieux pour un rat: «Le grand chat de (l'allée?) du Perséa, dans An, c'est Ra lui-même. On l'a nommé chat en paroles allégoriques; c'est d'après ce qu'il a fait qu'on lui a donné le nom de chat; autrement, c'est Schou quand il fait...» M. de Rougé, dans ses Études sur le Rituel funéraire des anciens Égyptiens (Revue arch. 1860), dit à ce propos avec raison: «Le symbolisme du chat n'est pas du tout éclairé par cette glose.»


Les chats: Histoire; Moeurs; Observations; Anecdotes

Подняться наверх