Читать книгу Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal, Volume 1 - Charles Walckenaer, Charles Athanase Walckenaer - Страница 10
CHAPITRE X.
1645-1649
ОглавлениеBussy veut se remarier.—Il fait connaissance avec un nommé Le Bocage, qui lui indique une jeune veuve, belle et riche.—Il la voit, elle lui plaît.—On lui persuade que les parents de la veuve s'opposent à son mariage, mais qu'elle lui est favorable.—Il se décide à l'enlever.—Il confie son projet au prince de Condé, qui lui fournit les moyens de l'exécuter.—Abus de la puissance des nobles à cette époque.—Fréquence des enlèvements.—On ignore si Bussy était encore dans l'erreur relativement aux sentiments de cette veuve pour lui.—Quelle était cette veuve et sa famille.—Elle avait perdu sa mère dans un âge tendre.—Tristesse qu'elle en ressent.—Elle épouse M. de Miramion.—Devient veuve à seize ans.—Accouche d'une fille.—Madame de Miramion veut se faire religieuse.—Ses parents s'y opposent.—Ils veulent la marier.—Elle demande du temps pour s'y décider.—Bussy forme le projet de l'enlever et d'en faire sa femme.—Ses motifs.—Mesures qu'il prend.—Accompagné d'une escorte, il arrête sa voiture à Saint-Cloud, et se saisit d'elle et de sa belle-mère.—Efforts qu'elle fait pour lui résister.—Il l'emmène avec sa belle-mère.—Il dépose cette dernière en chemin.—Madame de Miramion, dans la forêt de Livry, s'échappe.—Est reprise.—Bussy la conduit dans le château de Launay.—Fermeté de madame de Miramion à l'égard de ses ravisseurs.—Son frère arrive à Sens pour la délivrer.—Bussy la fait reconduire dans cette ville, et s'évade avec son escorte.—Suite de cette affaire.—La justice informe contre Bussy.—Madame de Miramion, interrogée, refuse de le charger.—Le prince de Condé intervient pour faire suspendre les poursuites.—Mauvaise pensée de Bussy contre le frère de madame de Miramion.—Il y résiste.—On cesse les poursuites.—A quelle condition?—Longtemps après, Bussy demande audience à madame de Miramion.—Elle la lui accorde.—Son entrevue avec elle.—Il la sollicite pour obtenir sa protection dans un procès.—Elle lui accorde sa demande.—Éloge de madame de Miramion.—Nombre de ses bonnes œuvres—Ce qu'en dit madame de Sévigné.—L'action de Bussy ne diminue pas son intimité avec madame de Sévigné.—Elle lui donne occasion d'aller demeurer avec elle sous le même toit.
Bussy, qui n'avait que des filles, désirait contracter un second mariage, espérant par là obtenir un héritier de son nom. Ses parents le pressaient vivement de prendre ce parti. Il cherchait à trouver une femme qui eût de la jeunesse et de la beauté et en même temps de la fortune. Cette dernière condition lui paraissait essentielle pour soutenir dignement son rang à la cour et pour satisfaire ses inclinations pour le plaisir et ses goûts dispendieux. Il s'entretenait fréquemment sur ce sujet avec son oncle le grand prieur du Temple, chez lequel il logeait quand il venait à Paris. Ce fut chez lui qu'il fit connaissance d'un vieux bourgeois nommé Le Bocage, propriétaire d'un domaine considérable, voisin de la commanderie de Launay. Cette commanderie, située dans la commune de Saint-Martin-sur-Oreuse, près de Sens189, servait au grand prieur de maison de campagne pendant la belle saison; son neveu Bussy allait souvent l'y voir, et y séjournait quelquefois plusieurs semaines. C'est par ce voisinage de campagne que s'était formée la liaison entre Le Bocage, Christophe de Rabutin et le comte de Bussy. Instruit du désir que ce dernier avait de trouver une femme riche, Le Bocage lui proposa une veuve jeune, belle, d'une piété et d'une douceur angéliques, et de plus millionnaire190.
Le Bocage ne la connaissait point personnellement; mais il avait un ami dans lequel la veuve avait, disait-on, beaucoup de confiance: c'était son confesseur, un père de la Merci, nommé le père Clément, moine corrompu, qui cherchait à séduire sa pénitente, et à la livrer à Bussy pour en tirer de l'argent191. Bussy eut une conférence avec lui, et par son moyen il parvint à voir deux fois à l'église la jeune veuve, dont la figure lui parut ravissante. Il n'avait pu ni s'approcher d'elle ni lui parler. Cependant le père Clément l'assura qu'il lui avait plu; mais en même temps il l'avertit qu'elle n'osait rien résoudre sans le consentement de ses parents; et ils voulaient absolument qu'elle épousât un homme de robe. Il conseilla donc à Bussy de ne risquer aucune démarche, et de le laisser faire. Il devait s'adresser à ses principaux parents pour qu'ils consentissent à ce mariage; et en cas de refus il se chargeait de persuader à la jeune veuve d'user du droit qu'elle avait de disposer d'elle-même. Pour cette négociation il demandait de l'argent à Bussy, sous prétexte de séduire les personnes de service auprès de la veuve; et Bussy, complétement sa dupe, lui remit ainsi successivement une somme de deux mille écus. Comme le temps d'entrer en campagne approchait, le père Clément engagea Bussy à ne pas différer son départ pour l'armée. Bussy partit en effet le 6 mai 1648, mais après avoir obtenu de son négociateur la promesse qu'il l'instruirait de tout. Il reçut de lui, trois semaines après son départ, une lettre qui l'instruisait que les parents de la jeune veuve lui étaient contraires, qu'elle n'avait pas la force de leur résister; mais qu'elle désirait que par une violence apparente Bussy lui arrachât un consentement qui se trouverait conforme au vœu secret de son cœur192. Le moine perfide n'avait pu réussir dans ses projets de séduction. Aussitôt qu'il avait essayé d'entamer sa négociation, madame de Miramion l'avait congédié, et avait pris un autre confesseur. Pour s'en venger, il voulut mettre à profit l'audace et la crédulité de Bussy: il lui persuada qu'il avait toujours comme confesseur la confiance de la jeune veuve; et, quelque invraisemblable que fût la fable qu'il imagina pour engager Bussy à l'enlever, Bussy le crut, et se détermina à suivre le conseil qui lui était donné. L'autorité des intendants et des commissaires du roi avait été créée par Richelieu pour s'opposer aux désordres des nobles, qui regardaient comme un des priviléges de leur caste de pouvoir se mettre au-dessus des lois. Cette autorité nouvelle n'était pas tellement affermie, qu'il lui fût toujours possible de prévenir ou de punir les abus auxquels elle était chargée de s'opposer; et les guerres civiles de la Fronde, en affaiblissant le ressort du gouvernement, permirent à la noblesse de retomber dans la licence des anciens temps, qui lui était d'autant plus chère qu'elle lui semblait un signe certain de son antique indépendance. Durant ces temps de trouble, ou pendant les espèces d'interrègne de la régence, les exemples de violence de la part de personnages puissants envers des femmes de la classe inférieure ou de celles qui dans la classe bourgeoise se trouvaient dépourvues de famille et d'appui, étaient d'autant plus fréquents qu'ils restaient presque toujours impunis193. Comme Bussy avait alors toute la faveur du prince de Condé, il lui fit le récit de son affaire, et ne lui cacha rien de ses projets. Cette aventure plut au jeune prince, qui offrit à Bussy de lui donner une commission pour se rendre à Paris, et même de lui remettre le commandement de Bellegarde, une de ses places en Bourgogne, pour se retirer après l'enlèvement. Bussy lui en témoigna sa reconnaissance, accepta la commission, mais refusa l'offre qui lui était faite de la place de Bellegarde; il dit qu'il lui suffisait d'avoir la faculté de conduire sa belle prisonnière à Launay. Cette commanderie avait en effet une espèce de château fort très-ancien, pourvu de hautes et épaisses murailles: on y pénétrait après avoir passé plusieurs ponts-levis.
Aussitôt que Bussy se fut acquitté de la commission que le prince de Condé lui avait donnée, et qu'il eut terminé toutes ses affaires en cour, il se rendit chez son négociateur, qui lui confirma tout ce qu'il lui avait écrit, et qui l'encouragea dans la résolution qu'il avait prise d'enlever la veuve à sa famille; ne doutant pas, disait-il, que quand elle s'en trouverait séparée, elle ne consentit de son plein gré à épouser Bussy. Rien n'était plus facile à Bussy que de s'assurer avant l'événement des sentiments de la veuve à son égard; et c'est peut-être pour s'excuser de ce que sa présomption ne lui a pas permis le plus léger doute, et par la honte que sa vanité lui faisait éprouver d'avoir été dupe d'une ruse grossière, que, dans ses Mémoires, il affirme que son négociateur n'avait dans cette affaire d'autre intérêt apparent que l'avantage et la satisfaction des parties, et que par cette raison il ne pouvait douter de la sincérité de ses paroles194. Il est vrai que le caractère dont ce négociateur était revêtu et la nature de ses relations avec la jeune veuve devaient écarter de lui toute défiance. Ainsi, tandis que l'innocente beauté n'avait jamais rien su, ni des prétentions de Bussy sur elle, ni du désir qu'il avait de l'épouser; que personne ne l'en avait entretenue; qu'elle n'en avait été instruite ni directement ni indirectement; que jusqu'à l'approche du jour fatal où on attenta à sa liberté elle avait ignoré le danger qui la menaçait, Bussy croyait fermement qu'elle avait donné son consentement à ce projet d'enlèvement, et qu'elle en avait été informée depuis longtemps.
Le nom de famille de cette jeune veuve était Marie Bonneau. Elle était fille de Jacques Bonneau, seigneur de Rubelle, riche bourgeois d'Orléans, et de Marie d'Ivry195. Enfant précoce, elle aimait sa mère avec une énergie et une raison au-dessus de son âge, et comptait à peine neuf ans lorsqu'elle la perdit. Cette violence faite à un premier sentiment, cette première idée de la mort et d'une éternelle séparation, firent sur elle une impression si profonde et si durable, qu'elle résista à tous les efforts que l'on fit pour l'effacer. Les plaisirs se pressaient en vain autour d'elle, ils ne pouvaient expulser de son cœur une douleur qui en avait pénétré la substance, ni dissiper une mélancolie qui lui était chère. Une de ses tantes s'était chargée de continuer son éducation: quoique sœur d'un évêque, cette tante trouvait que les idées religieuses prenaient trop d'empire sur sa pupille, et elle la conduisait sans cesse dans le monde, au bal et à la comédie. Partout l'éclat de ses charmes, plus encore que ses grandes richesses, attirait sur ses pas une foule de jeunes gens qui briguaient l'honneur d'obtenir sa main. Elle épousa, dans le mois de mai 1645, Jean-Jacques de Beauharnais, seigneur de Miramion, conseiller au parlement de Paris, dont la fortune égalait la sienne196. Il n'avait pas vingt-sept ans, était beau, bien fait, du caractère le plus heureux. Moins que sa tante, il la gênait pour ses exercices de piété. Une union si bien assortie lui fit éprouver un bonheur qu'elle n'avait connu que dans son enfance: elle aimait, elle était aimée; Dieu s'y trouvait, et sa mère entre elle et Dieu. Elle ne formait plus qu'un seul vœu: c'était de mériter, par l'innocence du cœur et la pureté de l'âme, que les bénédictions versées sur elle dans cette vie ne pussent nuire aux espérances qu'elle avait conçues pour la vie à venir. Six mois (seulement six mois!) s'écoulèrent dans les délices d'une telle existence. Au bout de ce temps, son mari fut atteint d'une fluxion de poitrine, et mourut, la laissant enceinte.
Elle accoucha d'une fille, si languissante et si faible en naissant, que les soins les plus assidus ne pouvaient que faiblement la disputer à la mort. La religion et la tendresse maternelle empêchèrent madame de Miramion de succomber à son désespoir. Elle passa les deux premières années de son veuvage dans la retraite la plus austère, toujours au pied des autels ou du berceau de sa fille. Née le 2 novembre 1629, madame de Miramion n'avait que seize ans et demi lorsqu'elle devint veuve et mère197. Ses parents, dont elle était tendrement aimée, craignaient qu'elle ne se fît religieuse: ils désiraient la conserver au milieu d'eux; et son extrême jeunesse leur fit espérer que le moyen qu'ils avaient employé efficacement une première fois leur réussirait une seconde. Ils laissèrent d'abord un libre cours à sa douleur; et, croyant que le temps y avait apporté quelque diminution, ils la pressèrent de contracter un nouveau mariage. Des partis brillants se présentèrent, et lui étaient chaque jour proposés. Plusieurs de ceux qui la recherchaient regrettaient, en la voyant si belle, qu'elle fût si riche, et que la fortune fût un obstacle à leurs désirs, ou un motif de suspecter la sincérité de leur amour. Quant à ses résolutions, elles n'étaient pas douteuses: elle ne laissait échapper aucune occasion de les exprimer de manière à faire renoncer ceux qui la recherchaient au projet qu'ils avaient conçu. Elle se reprochait souvent, en leur présence, les passions qu'elle faisait naître involontairement, et en témoignait son chagrin. Attaquée de la petite vérole, elle regretta que cette maladie ne lui eût pas enlevé ses attraits, dont sa piété lui faisait détester le pouvoir. Cependant, vivement touchée de l'attachement et du désintéressement de ses parents, elle n'osait fermer sa porte aux prétendants qu'ils introduisaient auprès d'elle. Son humilité lui faisait penser aussi qu'elle n'était pas encore digne de se consacrer à Dieu: elle semblait hésiter, et suppliait qu'on lui donnât du temps pour se décider. En attendant, elle multipliait les prières et les actes de dévotion, dans l'espérance que Dieu parlerait à son cœur, et lui révélerait sa volonté. Pourtant on se flattait d'obtenir son consentement pour lui faire épouser M. de Caumartin, et ce seul espoir comblait de joie deux familles riches et puissantes qui désiraient vivement cette alliance198.
Telle était celle que Bussy, sans la connaître, se proposait d'enlever pour en faire sa femme, persuadé qu'elle se trouverait honorée de lui appartenir et charmée de paraître à la cour, où sa naissance et le rang de ses parents ne l'appelaient pas. Assuré de la protection du vainqueur de Rocroi, il regardait un enlèvement comme sans conséquence envers une femme qui, malgré sa richesse, n'était à ses yeux qu'une bourgeoise. Rubelle, frère aîné de madame de Miramion, alors âgé de vingt-cinq ans, était seul, dans toute sa famille, capable d'inspirer quelque crainte à Bussy, si Bussy, réputé brave parmi les braves, eût été accessible à une crainte de cette nature. D'ailleurs, il convoitait les richesses de notre jeune veuve, il était épris de ses charmes, il croyait lui plaire; ses motifs étaient purs, son but honorable: il n'y avait donc pas à balancer. Sa résolution fut irrévocablement prise, et il se disposa à l'exécuter.
Les préparatifs ne furent pas tenus tellement secrets qu'il n'en transpirât quelque chose. Madame de Miramion fut avertie par plusieurs personnes qu'on voulait l'enlever; mais comme on ne lui nommait pas celui qui avait le projet de se porter à cet excès d'audace, et que parmi tous ceux qui aspiraient à sa main, et qu'elle connaissait bien, pas un seul ne pouvait être soupçonné de songer à une action aussi coupable, elle n'ajouta aucune foi aux propos qu'on lui tint à ce sujet, et ne prit aucune précaution199.
Bussy savait qu'elle s'était retirée à Issy avec sa belle-mère, chez de Choisy, conseiller d'État, grand-père du mari qu'elle avait perdu200. Les affidés dont Bussy l'avait entourée lui apprirent que le 7 août elle devait aller au mont Valérien, pour y faire ses dévotions. Bussy dressa ses plans en conséquence: il disposa d'abord quatre relais de Saint-Cloud au château de Launay, trajet d'environ vingt-cinq lieues. Il assembla une forte escorte, composée de Rabutin son frère, d'un gentil-homme de ses amis, qui avait fait sous ses ordres deux campagnes comme volontaire, et de trois autres gentils-hommes de ses vassaux et dans sa dépendance. Ces cinq cavaliers étaient suivis de deux ou trois serviteurs, comme eux bien montés et bien armés201.
Madame de Miramion, l'esprit uniquement occupé de l'acte pieux qu'elle allait accomplir, partit d'Issy à sept heures du matin, le jour précis qui avait été indiqué à Bussy. Elle avait avec elle sa belle-mère; et de plus, selon l'usage des dames riches et d'un rang distingué de cette époque, de ne jamais se montrer en public sans être suivies d'une partie de leurs familiers, elle était accompagnée d'un écuyer âgé, et de deux demoiselles, pour parler le langage de ce temps, c'est-à-dire de deux femmes attachées à son service. L'une d'elles était une gouvernante entre deux âges, l'autre une jeune femme de chambre, nommée Gabrielle. Un seul domestique se trouvait derrière. L'escadron de Bussy était posté sur la route qui conduit de Saint-Cloud au mont Valérien, vis-à-vis le pont202; lorsque le carrosse de madame de Miramion l'eut passé, il fut arrêté, et en même temps deux cavaliers se présentèrent aux portières pour abaisser ce qu'on nommait alors les mantelets, ou les rideaux de cuir qui les fermaient. Madame de Miramion voulut repousser les agresseurs en les frappant avec son sac, et en criant au secours! de toutes ses forces. Mais ses cris et les faibles armes qu'elle employait étaient également impuissants. Pourtant les cavaliers, ne pouvant parvenir à abaisser les mantelets, tirèrent leur épée pour couper les courroies qui les attachaient aux portières. Madame de Miramion, avec un courage au-dessus de son sexe, chercha à leur arracher leurs armes, et s'ensanglanta les mains. Pendant ce combat si inégal, l'escadron avait forcé le cocher de repasser le pont, et d'entrer dans le bois de Boulogne203. Là les attendait une voiture plus légère, attelée de six chevaux. Bussy voulut y faire entrer madame de Miramion: il ne put y parvenir, ni de gré ni de force. Elle se cramponnait si fortement dans son carrosse, qu'il était impossible de l'en arracher sans lui faire une trop grande violence et sans la blesser. Elle poussait d'ailleurs des cris aigus, et il était urgent, pour le succès de l'entreprise, de mettre promptement fin à cette lutte. Bussy fit alors dételer les deux chevaux du carrosse de madame de Miramion, et ensuite atteler à ce même carrosse les six chevaux de sa voiture. Deux palefreniers s'emparèrent du cocher et des deux chevaux de madame de Miramion, et furent chargés de les conduire à Paris, et de les retenir en captivité jusqu'à nouvel ordre.
L'escadron, divisé en deux, se plaça de chaque côté du carrosse, et l'on se mit à courir au grand galop à travers la plaine Saint-Denis, jusqu'à la forêt de Livry. Madame de Miramion ne cessait de crier à tous les passants qu'on l'enlevait de force: elle disait son nom, et suppliait, les larmes aux yeux, qu'on allât avertir sa famille à Paris. Mais le nuage du poussière produit par tant de chevaux la dérobait en partie aux yeux de ceux à qui elle s'adressait; le vent, le bruit, et la rapidité de la marche, étouffaient ses cris et emportaient ses paroles.
Dans la forêt de Livry, il fut impossible à l'escorte de se tenir sur les côtés du carrosse; une portion courut devant, et l'autre derrière. Madame de Miramion crut qu'en se jetant par la portière dans un taillis épais, elle ne serait pas aperçue, et pourrait peut-être se cacher et se sauver. L'exécution suivit la pensée: elle se précipita dans les ronces et les épines, et se fourra au milieu des plus épais buissons, sans songer qu'elle se mettait le visage tout en sang; mais elle fut bientôt poursuivie par ses ravisseurs; et, s'apercevant qu'elle ne pouvait pas leur échapper, elle voulut au moins éviter qu'ils ne la touchassent. Elle courut donc de toutes ses forces vers son carrosse, et s'élança dedans avant qu'on pût l'atteindre.
Bussy fit faire halte dans la partie la plus solitaire de la forêt de Livry. Tous les hommes de l'escorte prirent à la hâte quelques rafraîchissements, et on en fit prendre également à toutes les personnes qui se trouvaient dans la voiture. Mais ce fut en vain qu'on pressa madame de Miramion d'imiter leur exemple: elle déclara qu'elle était résolue à n'accepter aucune nourriture tant qu'on ne lui aurait pas rendu sa liberté.
Bussy, qui n'était pas encore revenu de l'erreur où l'avaient plongé les rapports du père Clément, étonné et inquiet de la résistance de madame de Miramion, se flattait que ce n'était qu'une feinte: il espéra qu'elle se calmerait s'il la débarrassait de la présence de sa belle-mère et de son vieil écuyer. En conséquence il les força tous deux à mettre pied à terre; il expulsa aussi du carrosse la vieille gouvernante. Il aurait voulu ne laisser auprès de sa captive que la demoiselle Gabrielle; mais il se vit forcé de souffrir que le laquais qui se trouvait derrière, et qu'il voulait renvoyer, continuât à accompagner sa maîtresse, parce qu'il se montra résolu à se faire tuer, plutôt que de la quitter. Bussy fit aussi abaisser les mantelets de la voiture, afin qu'on ne pût ni voir la belle éplorée, ni entendre ses cris, si elle en poussait encore.
Ces arrangements pris, on repartit avec la rapidité de l'éclair. Madame de Miramion, recueillant ses forces et sa présence d'esprit, coupa avec un petit couteau qu'elle avait dans son sac les mantelets de sa voiture, et parvint ainsi à se mettre à découvert et à rétablir sa communication avec le dehors. Elle continuait ses exclamations et ses instances, et jetait de l'argent à tous ceux qu'elle rencontrait. Les marques de son désespoir, ses libéralités et ses prières devenaient surtout inquiétantes et embarrassantes pour ses ravisseurs, toutes les fois qu'ils étaient forcés de s'arrêter et de changer de chevaux; mais alors ils disaient à ceux qu'elle ameutait autour d'elle, que c'était une folle qu'ils allaient renfermer par ordre de la cour. Madame de Miramion, avec ses cheveux épars, sans coiffe, sans mouchoir sur son sein, les habits déchirés, les mains et le visage ensanglantés, ne donnait que trop de vraisemblance à ces assertions.
Bussy en voyant les efforts de sa captive pour lui échapper, et les signes non équivoques de sa profonde douleur, acquit la triste certitude qu'il n'y avait rien de simulé dans sa résistance; et il lui fut démontré que jamais elle n'avait donné son assentiment à un enlèvement. Il affirme dans ses Mémoires qu'il eut dès lors la pensée de la reconduire chez elle, mais qu'il en fut dissuadé par son frère. Celui-ci lui représenta que lorsque l'effroi de cette course rapide serait dissipé, il serait possible, à force de témoignages de respect et de bons traitements envers la belle veuve, d'obtenir quelque changement à ses résolutions; et que dans tous les cas si on se décidait à lui rendre sa liberté, il valait mieux le faire à Launay même, afin qu'il fût bien constaté qu'on avait agi de plein gré. La suite du récit et le témoignage de madame de Miramion, que nous a transmis l'abbé de Choisy, prouveront, au contraire, que ce fut Bussy lui-même qui persista le plus longtemps dans ses projets coupables, et que ses amis et ses complices furent obligés de le forcer à y renoncer204.
Enfin on arriva au château de Launay. Le fracas des chaînes de fer et des ponts-levis en s'abaissant, les sons lugubres et sourds que fit entendre le carrosse en roulant au-dessus des fossés, et sous la voûte obscure qui conduisait à la cour intérieure; le grand nombre de gentils-hommes armés qu'elle y vit rassemblés, et que Bussy avait réunis pour se défendre s'il était attaqué, ou si l'on entreprenait de pénétrer dans le château, tout contribua à accroître la terreur dont madame de Miramion était frappée. Elle ignorait les noms et les projets de ceux qui osaient se permettre envers elle tant de violence. La précaution qu'ils avaient prise de la séparer de sa belle-mère, le peu d'effet qu'avaient produit sur eux ses larmes et ses prières, les lui faisaient considérer comme des hommes féroces, inexorables, capables de tout. Aussi ne voulut-elle pas quitter sa voiture; et quand on eut dételé les chevaux, elle s'obstinait à y rester, et voulait y passer la nuit.
Alors se présenta devant elle un chevalier de Malte, quelle reconnut pour avoir fait partie de l'escorte, et être du nombre de ses ravisseurs205. Il la supplia, dans les termes les plus respectueux, de vouloir bien descendre, et de consentir à entrer dans le château.
Madame de Miramion, sans quitter sa place, demanda d'une voix ferme, à celui qui lui adressait ces paroles, si c'était par ses ordres qu'elle souffrait un pareil traitement. «Non, madame; c'est M. le comte de Bussy-Rabutin, qui nous a assuré avoir votre consentement pour vous conduire ici.»—«Ce qu'il vous a dit est faux!» dit-elle en élevant encore plus la voix.—«Madame, reprit le chevalier, nous sommes ici deux cents gentils-hommes amis de Bussy: s'il nous a trompés, nous vous servirons contre lui, et nous vous mettrons en liberté. Daignez seulement vous expliquer en présence de plusieurs de nous; et, en attendant, ne refusez pas de descendre et de vous reposer de vos fatigues.»
L'air doux, compatissant et suppliant du chevalier inspira de la confiance à madame de Miramion; cependant elle ne voulut point monter dans les appartements, mais elle consentit à entrer dans une salle basse et humide, qui n'avait été nullement préparée pour la recevoir. On se hâta d'y faire du feu, on y porta les coussins de son carrosse pour qu'elle pût s'asseoir206. En entrant, elle vit deux pistolets sur une table, s'en saisit, et, remarquant qu'ils étaient chargés, elle les mit auprès d'elle, et parut un instant rassurée: mais sa femme de chambre s'étant levée pour sortir, elle la fit rasseoir, et lui dit: «Non, non, demeurez; vous ne me quitterez point.» On lui servit à manger: elle écarta d'elle les plats sans y toucher. Pour se dérober aux premières explosions de son courroux, Bussy s'était tenu à l'écart. Il était extrêmement surpris de la voir si exaspérée, si inébranlable dans ses résolutions.—«On m'avait assuré, dit-il à ses complices, que c'était un mouton, et c'est une lionne en furie.» Toutefois, comme il présumait beaucoup de lui-même, il ne désespéra pas encore de la fléchir; mais il crut devoir faire préparer les voies par une gouvernante du château et par les personnes les plus notables de son escorte. Toutes vinrent assurer à madame de Miramion que les projets de Bussy n'avaient rien que d'honorable; qu'il était pour elle le plus passionné, le plus soumis des amants; que si elle voulait consentir à l'épouser, elle trouverait en lui un mari aussi tendre que complaisant. On fit l'éloge de Bussy, de son caractère, de son esprit; on n'oublia pas de faire valoir ses richesses, son rang, son crédit à la cour, l'amitié qu'avait pour lui le prince de Condé; on expliqua la cause de l'erreur qui avait donné lieu à l'enlèvement. Aucun de ceux qui l'accompagnaient n'aurait consenti à le suivre si, comme lui, on n'avait pas cru que cet acte apparent de violence n'était qu'une feinte, et qu'il avait lieu de concert avec elle. On ajoutait que Bussy, désespéré de sa méprise et des reproches qu'elle lui attirait, n'osait paraître devant elle. Pourtant c'est à son confesseur tout seul qu'elle devait s'en prendre des violences dont elle était victime; le père Clément seul était coupable, Bussy était innocent.
Ces explications, en faisant connaître à madame de Miramion la noire intrigue du père Clément, calmèrent un peu l'effroi qu'elle avait eu en entrant dans le château; mais elles excitèrent son indignation contre Bussy, qui parce qu'il se croyait puissant voulait la forcer à l'épouser, et employait de tels moyens pour y parvenir. Elle se refusa à toutes les instances qui lui étaient faites, et continua à insister pour que sa liberté lui fût rendue.
Lorsqu'on vit qu'elle était inaccessible à la persuasion, on essaya de la dompter par la crainte. On lui peignit le comte de Bussy, ordinairement si bon, si généreux, dans ce moment méconnaissable aux yeux de ses propres amis, tant son amour était violent, tant l'idée de se voir trompé dans ses espérances lui inspirait de projets sinistres. On cherchait à démontrer à madame de Miramion la nécessité, dans son propre intérêt, de ne pas réduire au dernier degré du désespoir un homme dans l'état où se trouvait Bussy. Tous ces discours ne purent faire fléchir un instant la jeune veuve ni lui arracher la moindre concession.
Bussy alors renvoya auprès d'elle le chevalier de Malte, qui seul était parvenu à la faire consentir à descendre de voiture: il lui dit que M. le comte de Bussy était résolu, puisqu'elle l'exigeait, à la remettre en liberté; mais qu'avant il demandait en grâce qu'elle voulût bien l'écouter un moment.
Aussitôt Bussy parut avec ceux qui l'avaient escorté. Mais avant d'entrer il mit un genou en terre, et se présenta les deux mains jointes, et dans l'attitude d'un suppliant207. A son aspect, et sans lui donner le temps d'articuler un seul mot, madame de Miramion se dressa sur ses pieds, leva une de ses mains vers le ciel, et dit: «Monsieur, je jure devant le Dieu vivant, mon créateur et le vôtre, que je ne vous épouserai jamais.» Puis elle retomba évanouie. Un médecin de Sens, que Bussy avait eu la précaution de faire venir au château, lui prit le pouls, et dit qu'il ne sentait presque aucun battement; il déclara qu'elle était dans un danger imminent. Quarante heures s'étaient, en effet, écoulées sans qu'elle eût pris aucune nourriture, et cette longue abstinence et ces continuelles agitations avait épuisé ses forces.
Tandis que ces choses se passaient, la belle-mère de madame de Miramion, que Bussy avait si inhumainement laissée avec le vieil écuyer au milieu de la forêt de Livry, n'était pas restée oisive. Elle avait marché avec rapidité jusqu'au premier village; elle avait fait monter à cheval le vieil écuyer, pour aller en avant annoncer à sa famille l'événement sinistre qui avait eu lieu, et demander du secours. Elle prit pour elle, faute d'autres, des chevaux de charrue, qui la traînèrent jusqu'au faubourg de Paris. Elle apprit en arrivant que, d'après son message, un bon nombre de cavaliers, ayant M. de Rubelle en tête, étaient déjà partis, et s'étaient dirigés sur Sens208.
Ils étaient depuis une demi-heure environ dans cette ville, lorsque madame de Miramion, par son serment, par l'évanouissement qui l'avait suivi, avait frappé de stupeur tous ceux qui se trouvaient présents. Ce fut dans cet instant qu'on vint annoncer à Bussy que toute la ville de Sens était en rumeur, et que six cents hommes étaient prêts à en sortir pour venir assiéger le château de Launay. Bussy ne se laissa point effrayer par cette nouvelle; mais voyant que madame de Miramion, par l'effet des secours qui lui avaient été prodigués, avait promptement repris ses sens, il résolut de faire une dernière tentative pour obtenir d'elle qu'elle consentît à rester au moins un jour à Launay.
Les plus humbles prières, les protestations les plus ferventes furent en vain mises en usage par Bussy. Comme il avait débuté par lui dire qu'il était incapable d'attenter à sa liberté209, et que si elle voulait, il la ferait reconduire à Sens; pour toute réponse à ses demandes et à ses instances, elle se contenta de le prier de donner sur-le-champ des ordres pour son départ.
«Mais hélas! madame, dit Bussy avec l'accent de la plus profonde douleur, si vous partez, je ne vous reverrai jamais…! Si encore vous me permettiez de réparer mes torts involontaires, et d'être tant que je vivrai votre serviteur!» Madame de Miramion, craignant qu'il ne rétractât la promesse qu'il avait faite, crut devoir céder à la position critique où elle se trouvait, et dissimuler. «Si vous me laissez partir, dit-elle avec douceur, vous réussirez plutôt par cette voie que par celle que vous avez prise.» Mais Bussy, qui savait lire dans les yeux d'une femme ses véritables sentiments: «Je ne m'y attends pas, madame, dit-il avec tristesse; mais, quoique persuadé du contraire, je suis trop honnête homme pour vous contraindre; et, quelles que soient vos rigueurs, je vous serai toujours dévoué.» Il la supplia ensuite de prendre quelque nourriture. «Quand les chevaux seront à mon carrosse, dit-elle, j'accepterai.»
Les chevaux furent mis, et, sans se faire presser, elle mangea deux œufs frais. Bussy remit en secret cinquante pièces d'or à la demoiselle Gabrielle, pour fournir, dit-il dans ses Mémoires210, à la dépense du voyage, mais évidemment pour se la rendre favorable. Le carrosse partit, escorté par le chevalier de Malte, qui avait inspiré le plus de confiance à madame de Miramion, et deux autres gentils-hommes. Le chevalier se tenait près de la portière de la voiture, et tout le long du voyage il entretint madame de Miramion sur Bussy, protestant que son ami avait été trompé, et que ses intentions étaient pures. Cependant, craignant d'être arrêté par la justice de Sens, le chevalier fit faire halte à cent pas du faubourg de la ville. Le cocher et les postillons dételèrent les chevaux, l'escorte salua madame de Miramion; et maîtres, valets, coursiers disparurent, et s'enfuirent au château de Launay.
Madame de Miramion resta seule avec la femme de chambre, et le fidèle domestique qui n'avait point voulu la quitter. Elle traversa le faubourg de Sens à pied, et trouva la porte de la ville fermée. Elle apprit, dans l'hôtellerie où elle se réfugia, que tout le monde y était en armes par ordre de la reine régente, pour aller au secours d'une dame que l'on avait enlevée de force. «Hélas! c'est moi,» dit-elle. Alors la nouvelle de son arrivée franchit bientôt les murs de la ville; et son frère, sa belle-mère, et l'abbé, depuis vicomte, de Marilly, son parent, vinrent la prendre. La joie qu'elle éprouva de se trouver au milieu des siens fut grande; mais l'ébranlement que cet événement avait produit était trop fort pour qu'elle y résistât. Elle tomba malade; on la transporta à Paris, pour être plus à portée de tous les secours. Le danger augmentant, on lui administra les sacrements, et on désespéra de sa vie. Cependant elle échappa à la mort; mais elle ne revint à la santé qu'après une longue et pénible convalescence.
Rubelle, aussitôt l'arrivée de sa sœur à Sens, avait envoyé au château de Launay le prévôt avec une troupe d'hommes armés, pour se saisir de Bussy; mais Bussy avait déjà disparu, avec tous ses complices.
La justice informa: ce fut contre la volonté de madame de Miramion, qui dans ses dépositions se montra aussi favorable à Bussy qu'elle le pouvait sans trahir la vérité. Elle supplia sa famille de vouloir bien pardonner au coupable repentant. On était d'autant moins disposé à céder à ses instances, que depuis cet événement elle se montra encore plus rebelle à toute proposition de mariage et qu'elle ne voulut en écouter aucune. Elle considérait tout ce qui s'était passé comme un avertissement du ciel. Elle prit avec elle-même l'engagement de rester toujours veuve, et de consacrer sa vie à Dieu et aux bonnes œuvres.
Le caractère qu'elle déploya, si éloigné de l'idée que Bussy s'en était formée, d'après de faux rapports, fit comprendre à celui-ci la gravité de son action. Il pria le prince de Condé d'intervenir. Condé écrivit à la famille une lettre, très-pressante, et demanda grâce pour Bussy. On eut égard aux sollicitations d'un prince qui, par la victoire de Lens, venait encore de sauver une fois la France211.
On suspendit les poursuites; mais on les reprit lorsque Condé et Bussy, tous deux du parti de la cour, faisaient la guerre au parlement et à la Fronde.
Bussy avoue que pendant cette guerre il eut l'idée d'incendier le château de Rubelle près Melun, propriété de madame de Miramion. «J'eusse pu, dit-il, par là mériter du côté de la cour, auprès de laquelle on se rendait recommandable par le mal que l'on faisait aux affaires du parlement.» Bien loin de céder à cette mauvaise pensée, Bussy mit dans ce château une sauvegarde, et empêcha qu'on ne prît rien ni au seigneur du lieu ni aux habitants du village. Il recueillit le fruit de sa bonne conduite. On cessa les poursuites; mais sous la condition que Bussy promettrait de ne jamais paraître devant madame de Miramion, et qu'il quitterait à l'instant tous les lieux où elle se trouverait.
Quelque humiliante que fût cette promesse, il la fit et y fut fidèle. Trente-six ans s'écoulèrent, sans qu'il revît une seule fois madame de Miramion. Au bout de ce temps il eut un procès où se trouvait engagée une partie de sa fortune212. Le gain ou la perte de ce procès dépendait du président de Nesmond, qui avait épousé la fille unique de madame de Miramion. Pour obvier au tort que pouvait lui faire dans l'esprit du gendre le souvenir de l'attentat qu'il avait commis contre la belle-mère, il eut l'idée de s'adresser à elle-même pour intercéder en sa faveur. Il savait que l'abbé de Choisy, son ami, était cousin germain de madame de Miramion. Par lui, il obtint qu'elle lui permettrait d'avoir avec elle un entretien particulier. Bussy fut donc admis en présence de celle qui avait été l'objet d'un des plus étranges événements de sa vie, événement dont la mémoire, malgré le laps des années, n'avait cessé de lui être présente et douloureuse. Au lieu de cette jeune beauté au regard doux et mélancolique, à la taille svelte et légère, revêtue de soie et de dentelles, dont il avait été à Saint-Cloud le ravisseur, il vit une femme forte, grasse, la tête enveloppée d'une grande coiffe, couverte d'une simple robe de laine grise, avec une large collerette de batiste non plissée, tombant sur ses épaules213
189
ROGER DE RABUTIN, comte DE BUSSY, Mémoires, t. I, p. 152 et suiv.—Carte de Cassini, no 48.
190
BUSSY, Discours à ses Enfants, 1694, in-12, p. 232, ou Œuvres mêlées, t. III des Mémoires, p. 289.
191
TALLEMANT DES RÉAUX, Mémoires, t. V, p. 371, édit. in-8o, t. IX, p. 234, édit. in-12.
192
BUSSY, Mém., t. I, p. 155 de l'édit. in-12, et de l'in-4o, t. I, p. 194.
193
CHAVAGNAC, Mémoires, in-12, t. I, p. 100.
194
BUSSY, Mémoires, t. I, p. 155.
195
L'abbé DE CHOISY, Vie de madame de Miramion, 1706, in-4o, p. 6, ou 1707, in-12.
196
L'abbé DE CHOISY, Vie de madame de Miramion, p. 10.—Mémoires complets et authentiques du duc DE SAINT-SIMON, 1829, in-8o, t. I, p. 351.
197
Vie de madame de Miramion, in-4o, p. 11.
198
TALLEMANT, Mém., t. V, p. 372, édit. in-8o t. IX, édit. in-12.
199
Vie de madame de Miramion, p. 12.
200
L'abbé DE CHOISY, Vie de madame de Miramion, p. 10, 12 et 19, édit. in-4o.—BUSSY, Mémoires, t. I, p. 160, de l'édit. in-12; t. I, p. 200, de l'édit. in-4o.
201
CHOISY, Vie de madame de Miramion, p. 13, in-4o.
202
BUSSY, Mémoires, t. I, p. 160.
203
BUSSY, Mémoires, t. I, p. 160 à 200.
204
BUSSY, Mémoires, t. I, p. 161.—CHOISY, Vie de madame de Miramion, p. 13.
205
BUSSY, Mémoires, édit. in-12, t. I, p. 181; de l'édit. in-4o, t. I, p. 227.
206
Vie de madame de Miramion, t. I, p. 16, in-4o, et p. 17 de l'édit. in-12.
207
TALLEMANT DES RÉAUX, Mémoires, t. V, p. 372, édit. in-8o, et t. IX, p. 235, édit. in-12.
208
Vie de madame de Miramion, in-4o, p. 18; et p. 20 de l'édit. in-12.
209
BUSSY, Mémoires, t. I, p. 161, édit. in-12; t. I, p. 201 de l'édit. in-4o.
210
BUSSY, Mém., t. I, p. 162, édit. in-12; et édit. in-4o, t. I, p. 202.
211
BUSSY, Mém., t. I, p. 162 de l'édit. in-12; t. I, p. 203 de l'édit. in-4o.—Vie de madame de Miramion, p. 19, édit. in-4o, p. 20, in-12.
212
BUSSY, Mém., t. I, p. 168 de l'édit. in-12; t. I, p. 219 de l'édit. in-4o.—DE CHOISY, Vie de madame de Miramion, p. 21, édit. in-12.
213
Vie de madame de Miramion, p. 22, et le Portrait de madame Miramion peint par DE TROY, gravé par ÉDELINCK.