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CHAPITRE III.

Table des matières

L’Eglise de la Visitation rebâtie. — Les saintes Reliques déposées dans une cellule du monastère.

Neuf années s’étaient écoulées dès les événements que nous venons de raconter, et la cause de la canonisation du Saint n’avait pas fait un pas. La Mère de Chantal n’en devait pas voir l’heureux jour ici-bas. Le 13 décembre 1641, elle mourait à Moulins, et, le 31 du même mois, son saint corps fut reçu solennellement dans cette même église de la Visitation d’Annecy, où l’attendait depuis bientôt vingt ans, reposant dans son triomphe, celui de son bienheureux Père. N’était-il pas juste, ne fallait-il pas qu’un tel Père et une telle Mère fussent rendus tous les deux à l’affection de leurs enfants, qu’ils revinssent reposer ensemble et dans la ville et dans l’Eglise qui était pour eux comme le berceau de leur sainte famille?

. Aussi la réunion de ces deux Saints appela bien vite une telle affluence de pèlerins à leurs tombeaux, qu’il fallut se décider à une grande mesure.

En 1614, saint François de Sales, bâtissant le premier monastère de la Visitation, n’avait fait là qu’une petite église ou plutôt une chapelle construite légèrement et à la hâte, ce qui nous explique pourquoi, dès. l’an 1643, «tant pour petitesse que faiblesse des murailles et voûte de leur église présente qui menace ruine, et ne peut contenir le grand nombre de pèlerins qui accourent journellement en grande affluence de toutes parts, à l’occasion du corps du serviteur de Dieu François de Sales et de celui de vénérable sœur Jeanne-Françoise Frémiot, il fut jugé nécessaire de construire une nouvelle église qui fût plus ample et plus solide .»

Ce fut la Mère Marie-Aimée de Blonay qui mit la première main à cette grande entreprise, elle eut pour aide et pour conseiller dans son œuvre le pieux frère du Saint, le comte Louis , qui «en médita le projet, en mesura le plan et luy dit sa pensée judicieuse sur toutes choses.»

Mais, pour rebâtir cette nouvelle église à la même place, il fallut démolir l’ancienne, et ceci nous ramène à nos saintes Reliques qui étaient toute la richesse de cette première église. Pendant les travaux, il fallait à ce cher trésor un asile, une demeure momentanée. Ce fut dans une cellule, au plus haut étage du monastère, que Mgr Charles-Auguste de Sales, évêque préconisé d’Hébron et coadjuteur de Mgr dom Juste Guérin, les transporta solennellement le 26 septembre 1643. Il nous est impossible de croire que cette cellule, bien qu’appartenant au monastère, ne fût pas dès cette heure accessible aux fidèles par quelque escalier extérieur. Les pèlerins si nombreux, les pieux habitants d’Annecy, si habitués à venir prier au tombeau de leur Saint, auraient-ils été pendant si longtemps privés de cette faveur?

Cette cellule, en outre, était attenante à un petit oratoire servant de chapelle aux Sœurs pendant la reconstruction de l’église. Les saintes Reliques, dans cette cellule, furent donc en lieu saint et toujours sous la garde et les yeux des pieuses Filles de la Visitation.

L’année suivante, le pape Urbain VIII étant mort, il y eut, après l’élection de son successeur, Innocent X, dans le clergé de France et dans tout l’Ordre de la Visitation, comme un réveil d’espérance et surtout de zèle pour l’œuvre tant désirée de la canonisation de saint François de Sales. Malheureusement on avait jusque-là, tout en poursuivant ce but, commis de graves omissions et presque des fautes. Quelque grand par ses vertus qu’ait été sur terre un Serviteur de Dieu, dès qu’il s’agit de lui décerner les titres de bienheureux, de saint, et de lui en rendre les honneurs publics, l’Eglise, dans sa prévoyante sagesse, pour empêcher tout abus, ne veut pas que ses enfants la préviennent, la devancent d’eux-mêmes: c’est à elle à permettre, à décider, à commander ce que l’on doit rendre d’honneurs aux saints. Urbain VIII, notamment, avait, en 1625, publié à ce sujet deux décrets célèbres, connus généralement sous le nom de: Décrets sur le non-culte. Ils entrent dans le détail des marques de vénération qu’il est défendu de donner à celui qui n’est encore ni béatisé ni canonifié. La seconde de ces prohibitions regarde son tombeau. Il est défendu d’y suspendre ce que l’on appelle des vœux en cire ou en argent, en peinture ou en sculpture, comme aussi d’y placer des cierges ou des lampes allumés. Or, sur ce dernier point surtout, on était à Annecy en opposition flagrante avec ces décrets. Nous avons vu, dès les premiers jours, le tombeau du Saint littéralement couvert de ces marques de vénération populaire. En 1652, les premiers commissaires apostoliques, tout en les remarquant, n’avaient pas cru nécessaire d’en ordonner le déplacement; ces témoignages de culte public n’avaient donc fait que croître en nombre et en prix, et, en 1645, Mgr Charles-Auguste lui-même, en faisant des saintes Reliques la translation que nous venons de rappeler, n’avait pas manqué «de faire suspendre autour des parois de cette cellule les tableaux en diverses figures d’argent, toile, cire et autres offertes par les peuples.»

Les choses étant dans cet état, avant de se remettre activement à solliciter la béatification du Saint, il fut fort sagement décidé, dans une réunion de savants ecclésiastiques, tenue au parloir de la Visitation de Paris en 1646, que la première mesure à prendre était de lever cet obstacle auquel on avait donné trop peu d’attention jusqu’alors. Le conseil fut suivi, et, sur la fin de cette même année, Mgr Charles-Auguste put écrire à tous les monastères de la Visitation les lignes suivantes, qui laissent plus qu’entrevoir ce qu’avait coûté l’obéissance:

«Nous avons ôté de son tombeau les cierges, les flambeaux, les images de vœux, les statues de cire et d’argent, les lampadaires et autres marques de vénération publique, mais particulière des peuples que leur piété nous avait remises en assez grand nombre, depuis le trépas de ce grand Serviteur de Dieu jusqu’à cette heure, et que la simplicité de notre zèle avait suspendues avec la tolérance de Rome. Nous n’y avons laissé que les simples ornements de l’architecture, encore à moitié gâtés, à cause du transport qu’il nous a fallu faire de ce précieux dépôt, en attendant que notre église soit achevée. Et nous conserverons cela, Dieu aidant, jusqu’au temps qu’on nous dira de le remettre. Ce n’est pas que ce pauvre peuple ne soit un peu étonné et affligé de ces dépouillements, dans la peine qu’il a d’en comprendre les raisons que la seule obéissance rend acceptables, et je m’imagine assez, mes très-chères Sœurs, que vos bons cœurs en auront aussi quelque atteinte.»

Bien en prit à l’évêque Charles-Auguste d’avoir fait, à temps, ce douloureux dépouillement du tombeau de son saint oncle; car, dix-huit mois après, le 15 juin 1648, ce fut à lui-même que le Pape adressa les lettres dites rémissoriales, pour faire, au nom du Saint-Siége, ce qu’on-appelle le procès du non-culte. Qui mieux que Mgr Charles-Auguste pouvait témoigner de la parfaite obéissance rendue aux décrets d’Urbain VIII? Pour s’y conformer, nous l’avons vu, déjà il avait, quoiqu’à son grand regret, éloigné du tombeau du Saint cette belle couronne d’ex-voto que lui avait faite la piété des peuples; il y ajouta dans le même temps une autre preuve d’obéissance qui ne dut pas être un moindre sacrifice pour lui et pour les Filles de Saint François.

Dès cette année 1648, la nouvelle église était assez avancée pour qu’il fût possible et même convenable d’y replacer les précieuses Reliques. N’était-ce pas trop déjà pour un si grand trésor que cinq ans passés dans l’obscurité d’une simple cellule? Le 1er juillet de cette année, Monseigneur l’Evêque, assisté de son clergé, fit cette pieuse cérémonie; mais qu’elle fut différente de toutes celles dont le saint Corps avait été l’objet jusqu’à ce jour! Pendant tout l’office, la châsse fut couverte du drap mortuaire, et les prières ne furent autres que celles prescrites pour la sépulture des morts. Après quoi, on choisit la place du tombeau, non plus devant la grille du chœur des Religieuses, mais dans une chapelle latérale dite des Saints-Innocents; et là, pour prévenir tout retour de désobéissance à la bulle d’Urbain VIII, le saint Corps fut déposé, non plus dans un tombeau apparent, élevé au dessus du sol, mais contre le mur, et sous le pavé il fut creusé une fosse ordinaire dans laquelle on le descendit. Le pavé ayant été remis et se trouvant «entièrement semblable à l’autre pavé tant de la chapelle que de l’église,» n’eût été un chapeau d’évêque suspendu, selon l’usage de Rome, à la voûte de la chapelle, directement au dessus du tombeau, il n’eût plus été possible même d’en reconnaître l’emplacement.

Avons-nous besoin d’ajouter que cette condition commune à laquelle, par obéissance, on venait de réduire ces Restes sacrés, n’empêcha point les pèlerins d’accourir, ni les pieux habitants d’Annecy et de la Savoie de venir fatiguer leurs genoux, mais non leur confiance, sur les pierres de ce pavé désormais bien connu. René Favre, entre autres, avait pour habitude d’y aller, chaque jour, implorer pour lui et pour les siens, la douce protection de celui qui avait été si fort l’ami de son illustre père, le président Favre.

Notice historique sur les précieuses reliques de Saint-François de Sales

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