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ÉLIE.

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Je voudrais croire avec vous à ces effets merveilleux de la turbulence démocratique. Athènes et Florence en sont des persuasions assez vives. Mais chez nous, sous nos yeux, quel flagrant démenti à votre opinion! Voyez ce qu'elle inspire aux arts, cette démocratie que vous vantez! Regardez les édifices qu'elle se construit! Quelle pauvreté de l'esprit et quelle ostentation de la matière dans ces masses monotones, symétriques et froides, sans caractère et sans vie, dont on ferait indifféremment, à l'occasion, des églises ou des théâtres, des casernes ou des maisons de ville! Que diraient nos reines florentines, si elles étaient condamnées à voir ce que, d'année en année, deviennent, sous la main de nos embellisseurs, les palais du Luxembourg, du Louvre et des Tuileries? Et notre grand Le Nôtre, le plus vraiment français entre les artistes français, par la clarté, la logique, la mesure, par l'art suprême de la composition, qu'aurait-il à répondre, ce Racine des jardins, à vos démocrates affairés qui se plaignent que les magnificences de son architecture végétale sont une gêne à la circulation? Comment obtiendrait-il grâce pour ces solennels ombrages qui annonçaient la demeure des demi-dieux, des héros, auprès de nos spéculateurs de la Bourse qui voudraient là une rue pavée, afin d'arriver plus vite à la grande bataille des cupidités?—Et ce présomptueux palais de l'Industrie qui s'étale sottement, en nous dérobant la vue de la coupole de Mansard, sur un des rares points de Paris où l'on pouvait encore admirer la belle ordonnance d'un massif d'arbres séculaires, ces galeries où la lumière entre à flots contrariés par des ouvertures banales, et qui servent tantôt à l'exposition de l'art étrusque, tantôt à l'exposition des bêtes à cornes, ces statues qui déploient dans le brouillard leurs grands bras stupides, qu'en dirons-nous, je vous prie?

Dante et Goethe: dialogues

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