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Notions préliminaires

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Après l’ordre compressif de Louis XIV vint la réaction de la Régence et de Louis XV. A la gravité succéda la grâce; à l’ordre et à la majesté se substituèrent, dans la vie sociale comme dans l’architecture, le confort et le caprice. Ce fut le règne des femmes.

L’époque de Louis XVI forme la limite de ce mouvement. Le style Louis XVI marque la transition entre l’architecture des Bourbons et celle qui doit suivre. Il est caractérisé par un retour plus général vers l’antiquité qu’explique le penchant accusé chaque jour davantage vers les études sérieuses et les sentiments graves. «Un carrosse de chasse a emporté de Versailles le cadavre de Louis XV. Le trône d’un jeune souverain se lève dans une aurore. Tout est attente, et promesse, et signes favorables. Il semble que la Sagesse se hâte vers la Justice. Rêves, utopies, théories, systèmes, impatiences d’un âge d’or, s’empressent auprès de ce règne qui commence. Les économistes bercent la France d’illusions et d’additions; les philosophes l’enivrent d’éloquence et de phrases: l’imagination nationale s’ébranle vers l’avenir ».

Aussi bien, les fantaisies «rocailles» de l’époque Louis XV s’immolèrent au nom du style Louis XVI sur l’autel de la Sagesse et de la Raison, à la suite d’une période de débauche d’esprit et de goût. Ce fut le régime après l’orgie, l’heure des philosophes et des encyclopédistes après celle du sourire, ce fut la réaction en un mot; cette réaction latente au cœur de l’homme, qui sabre aveuglément suivant ses dispositions ou ses caprices, au mépris de la gratitude du passé et de la beauté cependant éternelle.

Une soif de penser et de voir différemment, trouble l’être à un moment de sa vie, comme les générations au cours des siècles; il faut changer, et voici le goût soudain en contradiction avec l’art, les chefs-d’œuvre opposés aux chefs-d’œuvre sous les yeux amusés de la Nature toujours belle!

L’amour de l’art varie à la vision tout comme la passion humaine bat au cœur inégalement et, la littérature aidant, le mouvement des idées diffère d’un temps à l’autre, autant par pur caprice que sous l’empire des mœurs opposées.

FIG. 2. — Motifs décoratifs Louis XVI.


Maintenant, sous Louis XVI, il s’agit de réagir contre les mœurs dissolues et amollies précédentes, contre la grâce troublante et précieuse du boudoir, et l’image du classique apparaît vertueusement expiatoire.

C’est-à-dire que l’hypocrisie réactive — car les mœurs ne s’imprègnent d’austérité que dans l’ombre de l’éducation — va seulement prendre des ailes sur le flot des belles paroles nouvelles. Le snobisme, aussi éternel que l’ennui, fleurira le bâillement, pour faire échec aux précédentes frivolités, du moins débaptisera-t-on simplement ces frivolités.

De même que le baume endolorit les plaies, on se leurrera de littérature et de sophismes qui couvriront d’autres maux sous d’autres fleurs, et l’art se transformera à ces accents.

«Rien de grand (sous Louis XV) n’agrandissait les âmes; mais toutes sortes de petites et agréables choses meublaient les têtes. La France était pays de comédie, d’opéra, de romans, d’historiettes et de bagatelle ». Tandis que «l’État ne figurait guère plus dans la conversation que l’ennui» à l’époque précédente, l’idée de la révolution, sous les dehors de la politique, allait maintenant «entrer en victorieuse dans les esprits, les envahir, les asservir, chassant brutalement la conversation, comme une femme chasserait une fée» et, «au temps de Louis XVI, cette domination latente, non officielle, mais réellement et quotidiennement agissante (les philosophes, les encyclopédistes) a crû dans la volontaire abdication d’une cour purifiée mais sans éclat comme sans vouloir».

FIG. 3. — Motifs décoratifs Louis XVI


Bref, la vertu, sous Louis XVI, régira la conduite morale comme les styles d’architecture et du mobilier solidaires, par une ligne droite symbolique.

L’antique reviendra d’exil sur un signe des réformateurs, on l’imposera comme un livre de piété.

Et pourtant, ce passé de maniérisme délicat auquel on voulut faire échec, toute cette amabilité frappante sous Louis XV, après la solennité de Louis XIV, ce pénétrant parfum d’amour et de galanterie, méritait-il un tel ostracisme?

Voyez avec quelle grâce la ligne fut assouplie, après la raideur majestueuse de Louis XIV! Cette ligne intransigeante sous le roi Soleil, image du col hautain, dédaigna les rondeurs en faveur des seules formes carrées. Fortes carrures des fauteuils, tables massives, vastes fenêtres, ampleur partout, généreuses dorures; point de concession à l’amabilité ni même au moelleux et au confort, dans ces sièges où l’on est durement assis.

Le siècle de Louis XIV n’est point celui de la femme, sa galanterie est plus cérémonieuse qu’émue; la splendeur est mâle et l’art n’a pas de sexe, ainsi juge-t-on au grand siècle.

Mais quel changement à la Régence et sous Louis XV!

Le geste s’est arrondi, la solennité a fait place au naturel, et, tout à l’entour, tandis que les hommes s’inclinent gracieusement devant les femmes, la ligne devient souple et caressante, elle s’incline aussi, ondule, tournoie, s’épanouit d’aise, enfin.

Aux pompeuses tentures précédentes, sourient les frais lampas, les damas et les brocatelles semés de bouquets. Partout on ne voit que guirlandes de fleurs, qu’enlacement de feuillages, et les peintures et les sculptures ne chantent que l’amour ingénu, couleur de printemps.

FIG. 4. — Motifs décoratifs Louis XVI.


Le décor où se meuvent ces personnages vêtus de satin aux tons langoureux, ces délicieuses poupées comme saupoudrées de sucre, les veut harmonisés à sa préciosité, et si madame s’asseoit, elle s’enfonce délicieusement dans une bergère. Pour recevoir la souplesse de son dos, la bergère a capitonné le sien, et les deux dos s’épouseront dans la ligne voluptueusement sinueuse.

De même, comme les arêtes vives du bois peuvent irriter la chair, la ligne du meuble en général s’est infléchie; les bras des fauteuils semblent s’être arrondis à l’exemple du bras humain, tandis que les pieds, dans une torsade qui semble une révérence, se déroberont sous le siège.

Évidemment, la précédente majesté a dégénéré, mais quel artiste oserait reprocher aux époques de si parfaites contradictions?

Louis XIV impose la symétrie, l’équilibre, et la Régence chavire les axes et les aplombs; puis, si Louis XV adopte également le désordre charmant de la ligne, Louis XVI. revient à la rigidité, mais combien cette rigidité sera éloignée de celle du roi Soleil!

Louis XIV était aussi lourd que Louis XVI sera léger, le premier était aussi mâle que le second sera efféminé. Tous deux seront graves, mais point de la même gravité. Ainsi les meubles sous Louis XVI seront plutôt menus et portatifs, tandis que sous Louis XIV la pesanteur est effective, et les meubles résistent au déplacement.

FIG. 5. — Motifs décoratifs Louis XVI.


Aussi bien l’esprit antique revit seulement dans le style de Louis XVI, car nous savons en quel mépris le grand Roi tenait les «sauvageries» antérieures, et les beautés esthétiques qui se rattachent à ces deux époques n’ont d’analogue que la rectitude et la correction.

Quant à opposer la vertu du temps de Louis XIV à celle du temps de Louis XV — antithèse que l’idée de la ligne droite adoptée communément par les deux rois soulève — il n’y faut pas songer, et la tendance de l’art seule intéresse selon les diverses orientations de l’intellect.

L’art ne connaît que la morale du beau, et sa vertu est le chef-d’œuvre. Il serait aussi fastidieux d’opposer l’exaltation féconde de l’idéal, sous le long règne de Louis XIV, à l’esprit raisonneur, troublé dans son essor par le pressentiment de la tourmente révolutionnaire, de la courte carrière de Louis XVI.

La beauté ne se juxtapose pas, elle n’est pas non plus d’ordre confessionnel, et les vertus individuelles relèvent d’ailleurs singulièrement de la mode, à travers les siècles.

La vertu a des traditions variables, enfin, qui concernent la conscience et non l’esthétique. Voyez, les chefs-d’œuvre de l’art païen égalent ceux de l’art religieux et les artistes leur concèdent une égale vertu.

FIG. 6. — Motifs décoratifs Louis XVI.


Sans compter que certaine fausse vertu est laide, parce qu’elle déconseille la coquetterie qui est le luxe de soi-même, un souci d’art personnel. N’a-t-on pas dit que le visage était le miroir de l’âme, et ne serait-ce pas décourager les nobles sentiments intimes que de leur interdire de s’embellir physiquement?

Au surplus, peut-on affirmer que sous Louis XVI, les femmes — pierre de touche de la morale qu’elles régissent aidées par la littérature — furent plus vertueuses et surtout plus jolies dans le décor du fameux ébéniste Riesener (qui, d’ailleurs, en collaboration avec son maître Oëben, dessina le bureau du roi Louis XV) que dans celui des gracieux peintres Watteau et François Boucher? Non certes, mais c’est un pur effet de la réaction en rupture d’habitude, qui nous vaudra des visions nouvelles et, les régimes plats, les quiétudes de la politique, ont toujours desservi l’essor des artistes. Ce n’est que dans les idéals bouleversés que l’art puise un renouveau et qu’il tâche de raccorder, sinon d’innover, la beauté.

Les querelles esthétiques sont nobles et le luxe a tout à gagner aux controverses pour se renouveler artistiquement, quitte à se réconcilier dans le chef-d’œuvre.

Quant à la vertu, elle est d’acception élastique, les siècles l’ont bien prouvé ; il y eut toujours des mères et des sœurs dans les plus farouches décadences, et La Harpe fait judicieusement remarquer, à propos du grand titre de siècle philosophe dont se para le XVIIIe siècle, que ce sobriquet très ridicule, que cette sorte de contre-vérité, est «comme le nom des Euménides, qui par lui-même désigne la douceur et la bonté, et que les Grecs, peuple frivole et railleur, avaient imaginé pour les furies».

FIG. 7 — Motifs décoratifs Louis XVI.


Au reste, en ce qui concerne notre objet, nous nous en tiendrons à l’art, imperturbable parmi la fantaisie des hommes, non sans toutefois qu’il les flatte et qu’il les reflète, mais sans faillir aux lignes éternelles qui parlent longtemps après que les hommes sont morts.

L’éloquence de l’art, d’ailleurs, se suffit à elle-même, et voilà pourquoi on peut opposer franchement au goût antique, que le style Louis XVI ressuscita, le goût français des styles Régence et Louis XV.

Déjà le style Louis XV avait «maté » les contorsions de la Régence et si, à son tour, le style Louis XVI devait amender, classiquement, le Louis XV, après la Révolution qui brisa tout sans rien inventer, le style Empire s’empara de l’antique, carrément, n’ayant guère le temps que d’embellir, au goût de Napoléon, les indications grecques et romaines. Depuis, le ressassement des beautés antérieures a perdu le droit au nom de style, en attendant une rénovation naissante.

Si l’on remonte maintenant à Louis XIV, on remarque que, parmi les Bourbons, c’est l’époque du grand Roi qui a joui de l’autorité artistique la moins contestée et dont l’architecture offre le plus d’unité, nous ajouterions même: de caractère national, si le Roi et la grande aristocratie pouvaient être considérés comme la nation, à une époque aussi avancée de la civilisation moderne.

FIG. 8. — Motifs décoratifs Louis XVI.


Pas davantage que sous François Ier, l’architecture de Louis XIV ne revêt les formes d’un art national, à l’exemple des conceptions égyptiennes, grecques et gothiques, entre autres, sorties pour ainsi dire des entrailles de la nation elle-mème, sans le concours constant et prolongé du peuple. L’architecture de Louis XIV, comme celles qui suivirent, réalisées sous le patronage des rois et des seigneurs, formées d’emprunts plus ou moins habilement juxtaposés et physiquement harmonisés, représentent plutôt un art royal.

Avec les Bourbons s’accuse l’influence des Flamands, dont le goût pour les formes alourdies (dont leurs femmes donnent l’exemple) est partagé par l’Espagne, alors si puissante, si riche, si dominante, et le style Louis XVI, enfin, marque la transition entre l’architecture des Bourbons et celle qui doit suivre, ou du moins qui aurait dû naître sur ses ruines.

Bref, les différents systèmes esthétiques d’architecture (et du meuble, par conséquent) demeurent esclaves des styles de l’antiquité jusqu’au XIIIe siècle, époque où l’originalité du style ogival ou gothique apparut et, sous la Renaissance, on opposa brillamment la beauté de l’architecture païenne, les chefs-d’œuvre de l’antiquité précédemment condamnés par le christianisme, à l’architecture chrétienne de l’Occident.

Bien qu’elle se tournât brusquement vers l’antiquité, au mépris des tendances modernes qui avaient trouvé leur expression dans des œuvres très personnelles, la Renaissance contraignit plutôt qu’elle ne convainquit Bramante et ses émules, vaincus malgré leurs efforts.

FIG. 9. — Motifs décoratifs Louis XVI


Il est vrai que l’imitation de l’antique, à laquelle s’étaient si génialement résignés Bramante et notamment Peruzzi, fut supplantée par un type gréco-romain lourd et dénaturé, tout comme l’indication classique — mais en somme originale — du style Louis XVI devait être écrasée par l’inspiration romaine singulièrement accommodée à la française, sous le premier Empire.

Ainsi s’énoncent les styles; ils vivent d’emprunts plus ou moins habilement dosés, plus ou moins heureusement mêlés, et les génies qui succèdent aux autres génies profitent fatalement de l’expérience de de leurs aînés, sans démériter.

Il arrive même un moment où l’inspiration, malgré la force de ses artistes, est tarie, et cela se produit en architecture principalement, dont l’essor est limité à une logique constructive, à des exigences scientifiques. L’effet artistique d’une façade, par exemple, ne peut s’affranchir de l’utilité, des besoins du bâtiment. Tout dans une construction, doit avoir sa raison d’être, car l’extérieur commande à l’intérieur et réciproquement. Nos architectes modernes, d’ailleurs, partent de ce principe rationnel que dans leur art, l’esthétique et la pratique doivent se rencontrer toujours et ne se combattre jamais.

Ils prétendent, d’autre part, que les besoins sont satisfaits lorsque la forme et la formule esthétiques sont bonnes, non sans faire observer malicieusement, à l’appui de leur thèse, que l’on voit au Louvre des chambres éclairées par le bas, pour uniquement régner dans la façade, but objectif et intransigeant déterminé par le canon des anciens. Aussi bien les architectes d’aujourd’hui ont avant tout affirmé leur supériorité dans l’ingéniosité avec laquelle ils harmonisèrent l’hygiène à la commodité, et il convient de les juger plus tard comme créateurs, lorsque le renouveau dont ils nous bercent déjà agréablement sera au point.

FIG. 10. — Motifs décoratifs Louis XVI.


En matière de meuble, l’exemple hallucinant du passé rend particulièrement malaisée la tâche des novateurs. Si les anciens méconnurent le côté pratique et hygiénique de leurs habitations qu’ils abritèrent d’abord somptueusement, il n’en est pas de même de leurs meubles qui se perfectionnèrent sans cesse.

Où trouver des sièges et des lits plus douillets que sous Louis XV, par exemple?

L’essor inventif dès lors, est des moins aisés et, tout effort d’originalité, en dehors du confort et de l’utilité, est condamné à l’avance.

Tout comme en architecture, l’art du mobilier solidaire est donc borné dans sa fantaisie. Le passé a épuisé l’expérience des formes pour arriver à ce confort, et ce n’est pas en retournant en arrière que le progrès naîtra.

Il semble, d’autre part, que l’individu à travers les âges a modelé à son habitude, à son corps plutôt qu’à ses mœurs, tout ce qui lui appartient. Car les mœurs ne varient guère de siècle en siècle, à partir d’une certaine civilisation, si ce n’est à travers les acceptations contradictoires de la mode (et encore la mode revient-elle éternellement à son point de départ) et selon des usages, des manières, bien vite surannés.

FIG. 11. — Motifs décoratifs Louis XVI.


Mais l’art ne vieillit pas; les chefs-d’œuvre de la littérature, de la peinture, de la sculpture, de l’architecture et du mobilier, de la musique, l’attestent.

Le chef-d’œuvre se doit, après tout, d’être un modèle et, ce n’est pas notre faute si le passé hallucinant rend plus difficile l’essor de notre génie.

Quant à l’improvisation d’un modern-style qui fleurit de nos jours, rien que sa floraison instantanée nous est suspecte. Tout au moins sa prétention au style choque-t-elle l’idée logique des éléments séculaires concourant à la formation du style que le recul seul des années a discerné.

La Harpe, à propos encore de l’épithète présomptueuse de siècle philosophe dont se sont parés les écrivains du XVIIIe siècle, depuis Voltaire jusqu’à Mercier, écrit judicieusement: «C’est elle (la postérité) qui caractérise les siècles, en recevant leur héritage, et en jugeant leurs monuments. C’est la France, c’est l’Europe entière qui a reconnu, d’une commune voix, le long règne de Louis XIV comme une époque de supériorité dans tous les arts d’imitation, dans tout ce qui fonde et embellit l’ordre social. Mais nous ne voyons pas que les écrivains qui l’ont illustrée aient pris sur eux de devancer l’âge suivant, en qualifiant le leur de siècle de génie: c’est du nôtre qu’il a reçu ces titres glorieux de grand siècle, de beau siècle, que personne ne lui a constestés. On ne voit pas non plus que celui où fleurirent les Socrate, les Sophocle, les Euripide, les Platon, les Aristote, se soit nommé lui-même philosophe; et c’est aussi l’Europe moderne qui, depuis la renaissance des lettres, a consacré, par son admiration unanime et constante, les siècles de Périclès, d’Auguste et de Léon X...»

FIG. 12. — Espagnolettes Louis XVI.


Or, notre «modern-style», dont on doit encourager les tentatives d’ailleurs ingénieuses et souvent remarquables, est sans doute dans la voie d’une inspiration originale, mais il ne faudrait point d’ores et déjà se reposer sur une base aussi chancelante malgré sa prétention.

FIG. 13.

Chute Louis XVI.


Nous reviendrons ensuite, à notre récapitulation du système des styles — nous en étions resté à la Renaissance.

Donc, après Louis XIII, heure grave où la ligne égarée fut rappelée à la sobriété, le style de Louis XIV aboutit orgueilleusement à la négation des génies précédents. Puis vinrent les époques Régence et Louis XV qui accentuèrent la précédente latitude et se complurent à une morbidesse délicate et charmante, à une fantaisie qui n’était rien moins que française.

Nous voici maintenant de retour, avec le style Louis XVI, à l’exemple antique; l’exposé des manifestalions qui le précédèrent, s’imposait en tête de notre travail.

S’il est agréable d’observer les thèmes savoureux adaptés de l’antique, il n’est pas moins piquant de remarquer que le retour à l’antique, par goût d’austérité — en dehors de la Renaissance, des styles Louis XIII et Louis XVI, supérieurement accommodés par les artistes — marque singulièrement la débâcle de quelques régimes.

FIG. 14. — Motifs décoratifs Louis XVI.


C’est la Révolution décapitant Louis XVI; c’est le premier Empire détrôné par la Restauration, c’est le second Empire renversé par la seconde République. Et, chacun de ces régimes, le premier rénovant l’antique avec talent, le second l’adaptant spirituellement et les autres le dénaturant, par une singulière coïncidence, marchent à leur ruine!

L’exemple des nobles luttes artistiques, en dehors de la politique, celle notamment qui mit aux prises les classiques et les romantiques, sans départager leurs chefs-d’œuvre, interdit de supposer cependant que l’hallucination du glorieux passé antique — symptôme en principe, d’une faiblesse inventive — est en rapport avec d’autres défaillances à la merci des réacteurs.

FIG. 15. — Motifs décoratifs Louis XVI (Chute, Boutons déportés).


D’autre part, pour en revenir à l’antique, synonyme d’austérité dans les styles, il est bien évident que l’art n’a aucun lien avec la vertu, en dehors de sa communion idéale avec le bien, et la Grèce, Rome (pas davantage que l’Orient) ne brillèrent pas par la gravité des mœurs, loin de là. L’art même, autrefois à Byzance fleurit sur une décadence, et pourtant voici les pures sources antiques où s’abreuvèrent les farouches réformateurs!

FIG. 16. — Chutes Louis VXI.


Il est vrai que ces derniers comptaient sur le génie des artistes dont l’indépendance sut assez respecter les illustres exemples pour s’en affranchir; du moins en ce qui concerne, entre autres époques, celle que nous allons examiner.


Le style Louis XVI

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