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LA DERNIÈRE NOBLESSE DE SENTIMENT. — Qu’est-ce qui rend donc « noble » ? Ce n’est certainement pas de faire des sacrifices ; le voluptueux le plus féroce fait des sacrifices. Ce n’est certainement pas d’obéir à une passion ; il y a des passions méprisables. Ce n’est certainement pas de faire quelque chose pour les autres, sans égoïsme ; peut-être la conséquence de l’égoïsme est-elle la plus forte, justement chez les plus nobles. — Mais c’est le fait que la passion qui s’empare de l’homme noble est une passion particulière, sans qu’il le sache ; c’est l’emploi d’une mesure rare et singulière et presque une folie ; c’est la sensation de chaleur dans les choses que d’autres sentent froides au toucher ; c’est la divination de valeurs pour lesquelles une balance n’a pas encore été inventée ; c’est le sacrifice sur des autels voués à des dieux inconnus ; c’est la bravoure sans le désir des honneurs ; c’est un contentement de soi qui déborde et qui prodigue son abondance aux hommes et aux choses. Jusqu’à présent, cela a donc été la rareté et l’ignorance de cette rareté, qui rendait noble. Que l’on considère cependant que, par cette ligne de conduite, tout ce qui était ordinaire, prochain, indispensable, bref tout ce qui servait le plus à conserver l’espèce, en général la règle dans l’humanité de jusqu’à présent, a été jugé avec injustice et calomnié dans son ensemble, en faveur de l’exception. Se faire l’avocat de la règle — cela pourrait peut-être devenir la dernière forme et la dernière finesse, par quoi la noblesse de sentiment se manifeste sur la terre.

Le Gai Savoir

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