Читать книгу Chroniques de J. Froissart, Tome Premier, 1re partie - Froissart Jean - Страница 6
PREMIÈRE PARTIE
DU CLASSEMENT DES DIFFÉRENTES RÉDACTIONS ET DES DIVERS MANUSCRITS DU PREMIER LIVRE
CHAPITRE I.
DE LA PREMIÈRE RÉDACTION
§ 3. Des deux branches de la première rédaction: 1o Première rédaction proprement dite; 2o première rédaction révisée; – caractères distinctifs de ces deux branches
ОглавлениеLa division de la première rédaction en deux branches tire surtout, ainsi qu'on vient de le voir, sa raison d'être de la partie du premier livre postérieure à 1372. En effet, dans un certain nombre de manuscrits de la première rédaction, le récit des événements, depuis 1372 jusqu'en 1377, comme aussi depuis 1350 jusqu'en 135644, est tout autre et plus ample, plus développé que celui qu'on trouve dans la partie correspondante des autres exemplaires de la même rédaction.
Laquelle des deux branches dont il s'agit a précédé l'autre? Évidemment, les manuscrits où la narration a le moins d'originalité et d'ampleur doivent être considérés comme les plus anciens; les exemplaires de cette branche, qui sont de beaucoup les plus nombreux, constituent ce que nous avons appelé déjà dans le paragraphe précédent la première rédaction proprement dite, par opposition aux manuscrits où le récit a reçu plus de développement entre les dates indiquées ci-dessus, qui forment la première rédaction revisée.
Il importe aussi de faire remarquer que le commencement du premier livre diffère dans les deux branches de la première rédaction jusque vers le milieu du paragraphe 11 de ce volume45. Au contraire, le texte de ces dix premiers paragraphes est le même dans la seconde rédaction que dans la première rédaction proprement dite.
La première rédaction revisée et la seconde offrent deux traits communs d'une importance capitale: elles remplacent l'une et l'autre, entre 1350 et 1356, le fragment d'emprunt de la première rédaction proprement dite, par une version originale et plus développée qui, sans être identique dans les deux rédactions, présente du moins beaucoup d'analogie. En outre, le texte plus complet et meilleur que donne la première rédaction revisée pour la partie comprise entre 1372 et 1377, se retrouve intégralement dans la seconde rédaction. Des ressemblances aussi caractéristiques, aussi considérables entre celle des branches de la première rédaction qui a été écrite la dernière, et la seconde rédaction confirment d'une manière frappante la date plus récente que nous avons assignée à la composition de celle-ci. En effet, supposer, comme on l'a fait, que la première rédaction proprement dite est postérieure à la seconde rédaction, c'est supposer que Froissart a substitué de gaieté de cœur, 1o de 1350 à 1356, un fragment emprunté et insipide à une version plus originale dont il était l'auteur; 2o de 1372 à 1377, un texte imparfait à un texte plus complet et meilleur, en un mot, à un texte revisé. Une telle hypothèse n'est-elle pas contraire à la vraisemblance?
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Selon M. Kervyn, cette version plus originale, particulière aux manuscrits de la première rédaction revisée pour les années 1350 à 1356, serait postérieure à 1388, époque du voyage de Froissart en Béarn: «Elle est postérieure à 1388, dit-il, puisque Froissart y raconte les démêlés du sire d'Albret avec les habitants de Capestang, d'après ce que ceux-ci lui dirent. Je la crois écrite vers 1391.» Froissart, t. I, p. 243 en note. Voici le passage sur lequel s'appuie l'argumentation de M. Kervyn: «Depuis me fu dit qu'ils (il s'agit des habitants de Capestang) laissèrent prendre leurs ostages…» Voyez Buchon, éd. du Panthéon, t. I, p. 317. Froissart ne dit nullement dans ce passage qu'il tient les détails qu'il va raconter de la bouche même des habitants de Capestang; par conséquent il n'y a pas lieu d'en conclure avec M. Kervyn que la version des manuscrits revisés pour les années 1350 à 1356 est postérieure au voyage du chroniqueur en Béarn en 1388 et a été écrite vers 1391.
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Voyez p. 26, l. 21. Le texte devient semblable dans les manuscrits des deux branches après ces mots: Si singlèrent par mer.