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CERCLE MILITAIRE

Table des matières

QUELQUES TYPES

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LE VIEUX COMMANDANT EN RETRAITE.–Vieux jeu, vieux clichés, vieilles gibernes. S’embêtait à mourir dans son quartier du Gros-Caillou; commençait à trouver la vie monotone, malgré la pêche à la ligne en été et la scie à découper en hiver, quand le général Boulanger a eu l’idée géniale du cercle militaire. Au cercle, il a retrouvé deux vieux Labadens de Crimée: c’est un jour, en inscrivant une réclamation au registre, pour signaler la mauvaise qualité du rhum, qu’il a reconnu leurs signatures «Taboureau et Tardemol! du2e léger, comme, moi! Ah! c’est trop fort! nom de...!» Maintenant il ne lâche plus le pétrin, connaît tous les garçons par leurs petits noms, plaisante la lingère dans l’escalier et risque un coup d’œil à la cuisine vers cinq heures.


Passe parfois la journée tout entière au cercle: absinthe à dix heures sur le balcon (quand il fait beau), déjeuner à onze heures, café à midi, sieste à la salle de lecture de deux à quatre heures, absinthe à cinq heures, dîner à six heures et demie. Et vous croyez que ça ne vaut pas mieux que d’aller au café!


LE CAPITAINE INSTRUCTEUR DU ***e HUSSAHDS.–Monocle, bottes Chantilly, élégante calvitie. A laissé un souvenir impérissable à Saumur; monte en course, s’est cassé au moins une fois chaque membre, prépare le concours hippique.

A l’habitude du club, s’effondre et s’incruste dans les fauteuils, fume les yeux mi-clos, la tête renversée, les pieds à hauteur du nez. A toutes ses relations au Jockey et à l’Épatant. Ne vient au pétrin que de temps à autre, quand il pense y rencontrer certains vieux calots auxquels il est bon de faire un doigt de cour. Le reste du temps, il blague l’installation, demande au limonadier où le cercle prend «ces excellents .cigares» et conteste absolument que le kümmel qu’on lui sert soit de l’Eckau, première marque.


LE SOUS-CHEF AU MINISTÈRE DE LA GUERRE.–Le type du bureaucrate travailleur. N’a pas son pareil pour s’atteler à la rédaction d’un rapport urgent que le chef, qui fume des cigarettes, lit le Figaro et reçoit des amis dans le bureau à côté, a exigé «pour demain matin absolument».

Abat son ouvrage consciencieusement, sans faire tort au gouvernement d’une seule minute de ses heures de bureau: tous les jours de neuf à onze et de une à cinq, recta! Le soir, se permet de temps en temps le cercle militaire comme extra. Choisit de préférence les jours de conférences instructives sur l’attaque et la défense des places, la topographie, etc. Apres diner, prend du café sans liqueurs. Ne fume pas: le tabac déprime les facultés cérébrales?... Vingt-trois ans de services! Sera peut-être bien décoré un de ces quatorze juillet, mais n’ira pas loin comme avancement dans le rond de cuir. Travaille trop!


LE CAPITAINE DE TERRITORIALE.–(En temps de paix: Hautes nouveautés et lingerie de luxe; spécialité de trousseaux pour mariages riches; rue de Châteaudun, 437bis.) A eu une belle conduite, paraît-il, pendant la guerre, comme franc-tireur. Médaillé à cette occasion par Gambetta qui l’a embrassé en lui remettant sa médaille devant la compagnie, en armes; il en pleure encore, en le racon tant, les jours de réception après beaucoup de punchs et de marquises au Champagne.


Paraît que sa dame et sa demoiselle ont produit un effet épatant au bal des officiers. Pourquoi pas? Vous avez bien vu, comme moi, de certaines patronnes de magasin, qu’on se représente, sans le moindre déplaisir, décolletées... très bas.

LE CAPITAINE AU ***e DE LIGNE, EN PERMISSION A PARIS.– (En garnison à Guéret). S’est offert une permission de quinze jours à Paris, depuis longtemps projetée et sans cesse ajournée, faute du petit excédent de galette nécessaire.

Est descendu au Cercle militaire où l’en est bougrement bien pour dix francs par jour: la table, la chambre, l’ascenseur, les billets de théâtre à prix réduits, et des larbins, et des rideaux, et des journaux, et des sonnettes électriques, et du chic papier chiffré pour correspondre avec les camarades et intimider les bons fournisseurs de province: «Monsieur, en réponse à votre honorée du16courant où vous me demandez l’autorisation de faire traite sur moi pour une somme de quarante-trois francs, à la date du1er juin, j’ai l’honneur de vous faire connaître qu’étant à Paris en ce moment, au cercle militaire, je...»


En rentrant à Guéret, il introduira quelques réformes au cercle militaire du chef-lieu de la Creuse qui, décidément, n’est pas «à hauteur».

LE LIEUTENANT DE RÉSERVE QUI A L’USAGE DU GRAND MONDE.– S’est donné beaucoup de vent comme secrétaire de la commission d’organisation des fêtes. Offrait le bras aux dames, avec un certain je ne sais quoi? pour les placer dans la salle de concert; offrait aussi le bras aux divettes du programme pour les conduire au piano. Voulait persuader à la commission de demander le concours de Paulus, qui aurait chanté En rvenant de la revue au-dessous du portrait (réédition de la séance Munkaczy: peinture et musique); mais la commission n’a pas voulu, préférant d’autres moyens pour fèter, complimenter l’armée françai... ai... se.


Très, très calé sur les usages du monde. Vous cloue le bec avec des «mon cher, cela ne se fait plus!» et des «vous ne verrez jamais cela dans le monde chic!» A mené, du reste, la grande vie pendant trois–ans–de–suite, à Marseille, vous m’entendez bien? C’était après son volontariat, quand il était comptable adjoint dans la maison de son oncle, Barbière, Rupion et Cie.–(Graines oléagineuses).

LE MEMBRE GRINCHEUX.–Lieutenant dans une section de télégraphistes. Grinche depuis l’âge de raison, avec ou sans raison, a toujours grinché, grinchera toujours. Aujourd’hui, il a un sujet de mécontentement réel: espérait les palmes académiques au14juillet dernier pour récompenser un petit ouvrage bien curieux dont il est l’auteur: Télégraphie en campagne; six planches dans le texte. Mais rien n’est venu; on a préféré décorer des cabots, comme M. Antoine!!!

Remplit à lui tout seul le registre des réclamations. On le voit écrire nerveusement, congestionné... et il ne com prend pas que... n’admet pas que... dans un cercle qui se respecte, on...

LE TOUT JEUNE OFFICIER D’ADMINISTRATION.–Sort à l’instant de l’Ecole de Vincennes. Attaché à la manutention du quai de Billy. Fameux! lagarnison de Paris!

Un peu épaté du luxe qui l’environne au cercle et ne peut s’empêcher de re mercier poliment, avec un gracieux sou rire, quand un valet de pied lui présente du feu pour son cigare.


Et puis les fêtes..., les réceptions..., les concerts. Épate Malvina en lui racontant toutes ces choses, le lendemain matin, dans leur petit bocal haut perché del’avenue Rapp, où plonge indiscrètement la tour Eiffel.

LE CAPITAINE D’ARTILLERIE.–Attaché à l’atelier de construction de Puteaux.


Sous le front chauve, l’œil intelligent et vif derrière le lorgnon. Vient au cercle le mercredi soir. On est convenu d’un jour pour se retrouver entre cocons de la même promos. On dîne ensemble à une table à part; on se groupe à part pour le café. Et alors en avant les canons, la. balistique, la poudre B, la mélinite, la résistance des aciers, le tir à grandes distances... et tout le bazar.

LE JOURNALISTE, AMI DU MILITAIRE.–A suivi autrefois l’expédition de Tunisie; va aux manœuvres tous les ans et tartine agréablement sur les règlements et circulaires.


Coupe de barbe boulangiste, pantalon demi-hussarde, cravate flottante. Connaît beaucoup le brav’ général qui ne l’oubliera pas une fois au pouvoir. Il en parle discrètement, tandis que sous le gilet blanc son abdomen se dilate d’aise, comme gavé d’avance. Toutefois les sous-entendus restent assez vagues pour qu’on ne puisse préjuger s’il s’agit d’un portefeuille ou d’un simple bureau de tabac?...


Botte à botte : fantaisies militaires

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