Читать книгу Histoire des traités de 1815 et de leur exécution - Jacques Crétineau-Joly - Страница 3

AVANT-PROPOS.

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Table des matières

L’histoire des traités de 1815 n’a jamais été entreprise. Les publicistes qui se sont occupés des événements par lesquels les Bourbons furent inopinément ramenés sur le trône de leurs ancêtres n’en ont pas su ou n’ont pas voulu en faire connaître les détails diplomatiques et financiers: ces détails sont cependant d’un puissant intérêt pour l’Europe et pour la France.

Après avoir, en quelques pages d’indignation générale, énuméré à leur point de vue politique, mais sans études premières, souvent même sans bonne foi, les charges militaires et les hontes dont nous accablait l’Europe coalisée contre l’empereur Napoléon, les écrivains de toutes les opinions se sont arrêtés à la porte des conférences où se discutaient la fortune et l’avenir de la patrie.

Ils n’ont pénétré dans les conseils des monarques ou dans les assemblées des ministres et des commissaires que pour y copier servilement les actes que le Bulletin des Lois, que l’Histoire des Traités de Schœll et le Recueil des Traités de Martens ont enregistrés; puis tout a été dit pour eux.

Seulement d’autres, encore moins habiles ou se condamnant à une ignorance volontaire, ont, dans de volumineux pamphlets, cherché à dénaturer ce qui, à cette funeste époque, s’était fait de bon,de juste, d’honorable et de national.

Par des accusations sans fondement ou par des déclamations sans portée ils ont essayé de calomnier les actes et les caractères. Attribuant à ces grandes transactions l’esprit d’intrigue ou de lucre que, dans leur corruption d’écrivains aux gages de tous les pouvoirs, ils osaient leur supposer, ils les ont enveloppées de ténèbres dont il nous a semblé utile de percer à jour le mystère.

Homme de parti, de passions politiques peut-être, mais habitué par l’expérience des autres hommes et des choses à ne porter de jugement que d’après les documents ou les témoignages officiels, j’ai voulu être vrai, lorsque jusqu’à ce jour tous les publicistes étaient restés dans l’erreur sur une des phases les plus importantes et cependant les moins connues de notre histoire.

Les traités de 1815 forment à eux seuls un code complet de diplomatie et de finance: c’est sans doute pour cela qu’ils sont si peu étudiés et si mal appréciés. Les discussions qu’ils ont soulevées, les questions qui s’agitèrent dans le secret des conférences, les ardentes colères qu’ils ont laissées si vivaces au fond des cœurs, tout faisait un devoir de les méditer avec soin, de les raconter sur pièces authentiques.

Ce devoir nous l’avons accompli, ne nous laissant écarter de notre route ni par des considérations de parti ou de personnes, ni par quelques-unes de ces injustices calculées auxquelles on cède souvent avec tant de légèreté. Nous avons sous les yeux les documents originaux qui ont servi à ce grand débat de l’Europe entière contre la France isolée, contre la France vaincue après vingt-trois ans de victoires!

Ces documents sont déposés soit dans les archives du royaume, soit dans celles des chancelleries étrangères. Il sera donc aussi impossible d’en nier la teneur que d’en suspecter l’authenticité. Ils ont pour contrôleurs naturels les hommes d’état qui les rédigèrent, les cabinets qui les conseillèrent et les ministres qui les ont signés ou appliqués.

C’est de l’histoire prise dans le vif; histoire pénible à raconter à des Français, mais qui cependant aura pour nous de graves, d’utiles enseignements.

Il nous eût été très facile, avec des réticences que l’esprit de parti aurait acceptées comme un tour de force ou d’adresse, de ne pas nous appesantir sur la masse de vérités évoquées par le récit de ces négociations. Nous n’avons pas tenté d’entrer en composition avec notre conscience. Il vient des jours où être vrai envers et contre tous est une obligation que personne ne doit trahir: nous regardons ces jours comme arrivés pour l’opinion royaliste. Il est donc aussi instructif pour les princes que pour les peuples de montrer les erreurs des uns et les aveugles passions des autres.

Les traités de 1815 sont un désastre pour la France, mais il faut révéler enfin à qui elle est redevable de tant de calamités; il faut apprendre à tous quel fut le rôle que chacun s’assigna dans ce drame de toutes les misères d’un pays occupé jusqu’à deux fois en quinze mois par l’Europe liguée contre lui.

La part de chacun était aisée à faire, car tous ont écrit, ont refusé d’adhérer ou ont consenti.

La France alors fut la victime de l’impéritie de ceux qui s’imposaient à la direction de ses affaires; elle fut surtout victime d’une pensée qui avait son côté national, quoiqu’elle ait coûté bien cher à notre honneur et à notre trésor. Cette pensée c’était l’évacuation la plus prompte du territoire, pensée qui, comme on le verra, était dans les intentions des puissances alliées avant même de germer dans la tête de Louis XVIII et dans celle du duc de Richelieu.

Le temps des adorations chevaleresques est passé. Aujourd’hui les peuples n’aiment que les princes qui savent se faire estimer par de grandes vertus royales, par un dévouement de toutes les heures et par un sentiment profond de la dignité nationale. C’est cette disposition des esprits, plus saillante que jamais, qui nous a fait naître l’idée de coordonner dans un ouvrage spécial ces tristes débats et ce bilan de la France, que d’impardonnables faiblesses ont rendu si onéreux.

Nous avions dans les mains la vérité tout entière: nos mains se sont ouvertes. Nous l’avons dite à nos amis comme à nos ennemis, nous dégageant de toute préoccupation et nous montrant peut-être plus sévère pour notre parti que pour ceux qui le combattent: c’était le seul moyen de convaincre les uns et d’éclairer les autres.

Puisse ce douloureux tableau de nos misères nous réunir tous dans une pensée commune! puisse-t-il enfin nous apprendre les sacrifices de gloire, de dignité et de fortune qu’il faut faire pour débarrasser un royaume de l’intervention étrangère que les divisions et les haines politiques ont appelée sur le sol!

Histoire des traités de 1815 et de leur exécution

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