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LA VALLÉE DU GIFFRE

Table des matières

Le Giffre coule en plein Faucigny dans une direction générale à peu près parallèle à celle de l’Arve qu’il rejoint par un brusque crochet.

Il se forme sous le village de Sixt, au pied du Mont-Buet, par la jonction du Grand-Giffre ou Giffre-Haut et du Petit-Giffre ou Giffre-Bas. Le premier sort du glacier du Ruan, cime rattachée à la Dent-du-Midi, se grossit des innombrables torrents et cascades du Fond-de-la-Combe et du Fer-à-Cheval, baigne quelques hameaux et le village même de Sixt. Le second descend du versant occidental du Buet par la vallée des Fonds, et reçoit, entre autres torrents affluents, le ruisseau d’Anterne.

SIXT


Les deux branches se réunissent sous le Benet, montagne sombre, dressée sur la rive gauche, qui semble clore en aval la vallée de Sixt.

Le cours d’eau ainsi formé s’engage tout de suite dans le défilé des Tines, d’où il gagne la vallée élargie, aux riants pâturages, aux jolis hameaux, de Samoëns-Taninges.

Après un étranglement — le Détroit-Denté — il passe dans l’assiette pittoresque de Mieussy, à l’issue de laquelle se présente un second défilé, la gorge de la Serraz.

C’est en sortant de cette gorge étroite que le Giffre, ayant reçu le Risse (rive droite), fait un coude vers le sud-est, longe le versant oriental du Môle et va rejoindre l’Arve au-dessus de Bonneville, à Marignier, en face de Vougy.

Son cours, à partir de Sixt, est d’environ 5o kilomètres.

Les défilés rocheux qu’il traverse en aval de Sixt et de Mieussy n’ont pas encore été rendus accessibles, comme les gorges de la Diozas, sa voisine (affluent de l’Arve à Servoz), et celles du Fier, en aval d’Annecy, pourvues de galeries de bois accrochées aux parois rocheuses, à l’instar du Trient, de la Tamina et des «klamms» du Tyrol. Mais, s’il est impossible de les parcourir, il est facile d’en mesurer la profondeur et d’en apprécier la sauvage beauté.

Entre ces deux fissures, le Giffre a formé autrefois un lac allongé, de Notre-Dame-de-Grâce à Mieussy.

Au-dessus des Tines et de la réunion des deux Giffres, l’intéressante vallée de Sixt est également une cuvette lacustre qui trouva son écoulement par la crevasse, comme le lac inférieur par celle de la Serraz. Tout indique, en ce curieux repli du massif alpin, la présence des eaux à une époque très voisine de la nôtre. Les premières traces d’habitation à Sixt ne remontent point au-delà du Xe siècle. 11 est probable que l’émersion du sol, le long du thalweg, ne fut guère antérieur. Comme révolution naturelle, c’est de la dernière modernité. «La nature qui avait formé ces lacs — dit Elisée Reclus — s’est servie de la même cause pour les détruire: les torrents avaient rempli les bassins; ils les ont vidés plus tard en rongeant les parois inférieures.»

On peut indiquer le cours du Giffre par les hauteurs qui dominent les deux rives, ainsi:

Grand-Giffre, rive droite: Les pics de l’Avoudru et du Criou et leurs épaulements, le Boray et le Salvadon, appelé aussi Chambet ou Sambet; rive gauche: le Sageroux, le Ruan, le Prazon, le Tanneverge, le cirque du Fer-à-Cheval, la Tête Noire, les épaulements nord et ouest du Buet: Cheval-Blanc, Grenairon et Grenier, ce dernier projeté vers Sixt.

Petit-Giffre; rive droite: versant occidental du Grenairon et du Grenier; rive gauche: le massif des Fiz, rattaché à celui du Buet par le col d’Anterne et comprenant les sommets déchiquetés de la Tète-à-l’Ane et de la pointe de Salles, les montagnes de Gers, que domine la Tête-Pelouse, la montagne de la Porte, contrefort des Grands-Vents, projetée au confluent.

A partir de la réunion des deux Giffres; rive droite: le Criou, dont notre vallée contourne la base, et ses contreforts, le Planay auquel Sixt est adossé et la Poya sous lequel se creuse le gouffre des Tines; après Samoëns, la Bourgeoise, les hauteurs de Jouplane, le mont Loex ou Loi et les Têtes-de-Verchaix, la montagne des Gets; au delà du foron de Taninges, le mont Marcelly, qui domine la vallée de Taninges à Mieussy, le Somman, auquel se rattache la Serraz où le Giffre traverse son dernier défilé, enfin, après le coude de la jonction du Risse, le Môle qui domine le confluent; rive gauche: le Benet et, au-dessus, la Tête de Pré des Saix, puis la chaîne du delta allongé entre l’Arve et le Giffre: les monts d’Arâches, la pointe d’Orchex ou d’Orsaix, dont les versants forment le promontoire entre les deux rivières. Ce delta est coupé, de Taninges à Cluses, par le col de Châtillon, où passe la route nationale de Grenoble à Thonon.

La vallée du Giffre a des aspects d’une variété très caractéristique en ses parties haute et basse. Cette dernière, entre les deux gorges susdites, offre le spectacle d’une sorte de Tempé dans un cadre de montagnes sévères, où la vie agricole s’est développée à l’aise, favorisée par la nature et les dispositions du sol, donnant à toute la contrée une expression de bonheur, de paix, de joie souriante.

Dans le Haut-Giffre, le caractère change brusquement, la sauvagerie et la rusticité s’accentuent, en gardant toutefois un singulier cachet de gaîté pittoresque: mille accidents aimables à voir accrochent le regard du passant, et le paysage, malgré ses lignes imposantes, n’a rien qui rappelle l’horreur tragique ou la gravité hautement intéressante, mais peu attractive, de certaines régions alpines.

C’est le domaine des vaux encaissés et tortueux, des torrents aux lits caillouteux, des eaux ruisselantes et des cascades, des roches disloquées, des groupes de chalets jetés sur les cimes, accrochés aux flancs des monts, des alpages qu’on dirait inaccessibles, montrant leurs plaques vertes entre les pics et les crêtes, des sentiers abrupts, en escalade, se hissant vers les cols.

Hors le chemin de la vallée, à l’ouest, ceux-ci forment les issues dans toutes les autres directions pour passer du Giffre au Rhône et à l’Arve. En décrivant du côté de l’est, autour de Sixt, une portion de cercle qui suit les crêtes environnantes, du nord-ouest au sud-ouest, on trouve successivement: La golette de l’Oulaz, les cols de Sageroux, de Tanneverge, du Grenairon, du Genévrier ou du Vieux, de Léchaud, d’Anterne, du Dérochoir, de Platet, de Flaine ou des Grands-Vents. Ce sont les passages qui environnent immédiatement l’entonnoir de Sixt, d’où fluent les sources des deux Giffres et leurs innombrables tributaires.

La vallée du Giffre

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