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III

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Abordons maintenant les contrefaçons assyriennes. Je signalerai, d’abord, un spécimen assez bizarre; il appartient à M. DE B*** qui a bien voulu me le communiquer. Ce monument est taillé dans une pierre noire résistante, marbre ou basalte, je crois? Il se compose de deux parallélipipèdes de grandeur inégale, superposés de manière à former les deux degrés d’une petite pyramide à étages de 0m285 de hauteur. Les faces du bloc inférieur sont légèrement trapézoïdales; les quatre côtés principaux sont chargés d’inscriptions en caractères cunéiformes, encadrées par un ornement composé de lignes droites; chaque ligne d’écriture est séparée par un trait. Aux angles du plus grand parallélipipède, un personnage à genoux, portant une longue barbe et les bras croisés sur la poitrine, se présente sur l’angle, de manière que la moitié du corps occupe la face principale et que l’autre se termine sur la face latérale. Nous donnons ici (fig. 3) la face principale qui permet de comprendre les autres.

Fig. 3.


Il est facile de retrouver le monument original qui a inspiré cette composition hybride; l’ensemble rappelle la partie supérieure de l’obélisque de Salman-Asar, qui a été découvert par Layard dans le palais de Nimroud , et qui est précisément en basalte ou en marbre noir. La fabrication ne peut donc remonter à une époque antérieure à la connaissance de ce monument (1842) dont de nombreuses copies ont été publiées. La ressemblance ne s’arrête pas là ; on y retrouve l’intention de disposer les inscriptions dans un encadrement analogue à celui des bas-reliefs sculptés sur l’obélisque; seulement, au lieu d’enlever le sujet dans l’épaisseur de la pierre, on a simulé cet encadrement par un ornement insignifiant.

Si maintenant on jette les yeux sur les inscriptions, la fraude apparaît à chaque trait L’ouvrier était moins instruit et moins habile que celui qui a gravé les intailles dont nous venons de parler; d’ailleurs, la lecture des inscriptions assyriennes était moins avancée à l’époque où il a voulu orner son œuvre d’une inscription.

Pour y arriver, il a copié d’abord le clou assyrien avec sa forme particulière, la tête grosse et la pointe effilée; puis il s’est fatigué et s’est livré à la fantaisie. Il a confondu l’écriture de l’Assyrie avec celle de Persépolis. Le clou élémentaire a bientôt pris la forme aiguë que nous avons déjà indiquée; çà et là apparaissent quelques caractères perses au milieu de signes assyriens incomplets ou estropiés; enfin le clou s’est amoindri et a fini par ne plus présenter que des traits qui ont écorché la pierre. Comme l’écriture assyrienne est plus compliquée que celle de la première colonne de Persépolis, son mécanisme était plus difficile à saisir; aussi on a copié des signes pris au hasard. Le graveur n’avait, en réalité, aucune notion des exigences des écritures cunéiformes; à l’époque où il fabriquait, peu de personnes lisaient les inscriptions assyriennes.

Est-il nécessaire de dire que les caractères du style monumental à Ninive et à Nimroud présentent un aspect aussi décoratif qu’à Persépolis. On ne saurait les confondres avec les signes grossiers tracés sur ce monument et qui échappent à toute tentative de lecture. Nous verrons bientôt que le faussaire suivra les progrès de la science.

J’oubliais de parler du personnage à genoux, souvenir grotesque de ces Génies prosternés devant l’arbre sacré qu’on retrouve si fréquemment sur les bas-reliefs de Nimroud. Dans cet état, l’œuvre n’a pas dû faire fortune; aussi a-t-elle subi une transformation dernière. Pour en faciliter la vente, on en a fait le piédestal d’un magnifique éléphant chinois, en bronze, revêtu de son costume de guerre. Cette partie a sa valeur. Je la crois authentique; elle révèle un travail sérieux et pourrait consoler de la fraude pseudo-assyrienne, si ce n’est qu’une main inexpérimentée, pour relier cet éléphant à la pyramide, a maculé la carapace du bel animal, en gravant sur la bordure des caractères cunéiformes qui ne présentent aucun sens.


Les fausses antiquités de l'Assyrie et de la Chaldée

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