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AVANT-PROPOS

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L’amélioration de la production de l’espèce chevaline en général a été l’objet de préoccupations constantes de la part des hommes qui s’intéressent au cheval. Moi-même depuis longtemps j’ai mûrement examiné cette question et particulièrement celle si essentielle des accouplements qui, dès ma jeunesse, n’a cessé d’être l’une de mes études les plus suivies.

En disséquant le cheval, sous la direction de Rigot, professeur d’anatomie à l’École vétérinaire d’Alfort, en 1833, je reconnus cette vérité, maintes fois énoncée par ce savant anatomiste, que les fibres musculaires sont différentes selon les types et que la texture particulière à chacun d’eux reçoit du système nerveux une volonté qui lui est propre ainsi qu’une action suffisante pour diriger les fibres dans des rapports proportionnés à leur étendue ou à leur intensité. Au delà de ces principes, les lois de la nature sont méconnues et l’on tombe dans une instabilité tout à fait pernicieuse à l’économie de la production de l’espèce chevaline.

Dans son cours de l’extérieur du cheval, Rigot, en donnant connaissance du mécanisme de chaque région du cheval, prouve péremptoirement que si la fibre musculaire est différente selon le type, la forme de la charpente animale l’est aussi, et que à cette forme doit être attachée une action toute spéciale.

Yvart, inspecteur des Écoles vétérinaires et qui professait alors à l’École d’Alfort les cours d’hygiène et d’éducation, s’attachait toujours à démontrer aux élèves que, dans la même espèce, il était utile de rechercher à quels types on avait affaire, afin de bien appliquer l’hygiène et l’éducation qui conviennent à chacun d’eux.

Renault, directeur de la même École d’Alfort, dans ses leçons de manuel opératoire et de clinique expérimentale, qui étaient toujours très intéressantes, s’appliquait surtout à démontrer les effets différemment sentis sur les sujets de races et de types différents.

De son côté, Delafond, savant professeur, prouvait clairement, dans son cours de pathologie spéciale, que la marche à suivre pour étudier une maladie devait être différente, selon le type et le tempérament du sujet.

Dès ce temps-là je conçus la pensée de prendre bonne note des fructueuses leçons de ces excellents maîtres, non seulement pour les appliquer à la médecine vétérinaire, mais encore pour m’aider à développer mes idées sur la production du cheval, lorsque de nouvelles études et surtout l’expérience qui me manquait alors, me permettraient d’entreprendre un semblable travail.

En 1837, j’entrai au 5e régiment de hussards, commandé alors par le colonel Klein de Clénemberg qui, ayant fait une étude approfondie du cheval, était d’autant plus capable d’en apprécier les ressources. Il me dit un jour en me montrant les différents types de chevaux de son régiment: «Voilà d’anciens chevaux qui «proviennent presque tous de la race ardennaise; je «puis compter sur eux pour supporter le poids du cavalier «et du harnachement; ils résistent, mais ils «sont lents; tandis que mes nouveaux chevaux, qui «proviennent des remontes d’Auch et de Tarbes, sont «plus légers, plus enlevés, moins disposés à porter un «lourd fardeau, mais dans une course rapide, arriveront «les premiers.» Parmi ces remontes, le colonel me fit distinguer quelques chevaux pleins de vigueur, dont les allures étaient désunies, en me disant que ces animaux pouvaient aller vite, mais qu’ils ne pourraient aller longtemps, attendu que leur avant-main était de la race anglaise et que leur arrière-main tenait de la race bretonne.

Dans le cours de mon service en Algérie, je fus souvent consulté par quelques officiers de l’armée pour l’achat de leurs chevaux, circonstances qui me mettaient en relations avec des chefs Kabyles, lesquels se montrèrent fort obligeants pour moi, comme du reste pour tous les vétérinaires en général, qu’ils aiment particulièrement parce qu’ils peuvent guérir leurs chevaux. Aussi, pendant l’essai des chevaux, j’étais souvent entouré de maquignons Arabes qui me disaient:

«Si tu veux aller vite, tu choisiras un cheval ayant un

«garrot mince, une encolure droite, des épaules inclinées,

«plates et hautes, des membres élevés, des reins

«longs et des jarrets droits; mais, ajoutaient-ils, toutes

«ces qualités ne permettent pas toujours au cheval,

«étant monté, de se cabrer sans se renverser. Si, au

«contraire, tu veux aller longtemps, tu choisiras un

«cheval ayant un garrot large, une encolure courbe,

«une épaule inclinée et bien musclée, des membres

«courts également musclés et des jarrets larges. Pour

«connaître la force de ses reins et de ses jarrets, fais

«cabrer ce cheval, lorsqu’il est monté, et quand tu

«parviendras à le faire marcher ainsi sur ses membres

«postérieurs, tu auras la marque certaine de sa vigueur

«et de sa puissance.»

De 1842 à 1850, je fus chargé de donner mes soins aux chevaux de trois postes, à Amboise, la Frillière et Veuves, entre Tours et Blois. Ces établissements occupaient trois cents chevaux, non seulement pour le service des postes, mais encore pour le roulage.

Chaque relais de poste parcourait douze kilomètres de distance; les maîtres de poste avaient eu d’abord 50 minutes pour faire ce trajet avec leurs chevaux; à cette époque les chemins de fer ne venaient de Paris que jusqu’à Orléans; on commença par diminuer le temps accordé et successivement on arriva à demander aux maîtres de postes que la même route se fît en 40 minutes; c’est alors qu’il fallut chercher des chevaux avec plus de sang et plus de hauteur de membres; on croisa pour cela les juments bretonnes avec les étalons anglais, et il se produisit des irrégularités tellement grandes dans la production que ces nouveaux chevaux de poste qui allaient si vite ne pouvaient, malgré leur sang, mais à cause de leurs irrégularités, faire ce service bien longtemps; ils devenaient boiteux, les membres se taraient; les maîtres de postes perdaient beaucoup de chevaux à ce changement subit dans leur service.

Je remarquai cependant que lorsque le hasard avait favorisé la production par des accouplements qui s’éloignaient moins des lois de la nature, en donnant, par exemple, à des juments bretonnes des étalons de sang comme certains chevaux arabes ayant le même type de conformation que les Bretons, les produits de ce dernier accouplement remplissaient parfaitement le but qu’on se proposait, c’est-à-dire qu’on obtenait des chevaux gros et courts, mais ayant assez de sang et d’énergie pour supporter longtemps le service des postes. Après dix ans, j’ai vu de ces chevaux continuer le travail, sans que leurs membres fussent tarés ni usés.

Ces observations et un grand nombre d’autres, recueillis dans une longue pratique, me suggérèrent l’idée d’entrer comme vétérinaire dans l’administration des Haras, afin d’étudier les moyens qui y sont employés pour améliorer l’espèce chevaline.

J’y vis que l’on obtenait une amélioration progressive et incontestable dans l’énergie et la vitesse des produits, par le croisement du pur sang avec les différentes races françaises; mais que cette amélioration était malheureusement trop souvent arrêtée par l’absence d’un système d’accouplement bien raisonné, avec la connaissance duquel tout homme qui s’occupe du cheval pourrait toujours désigner sûrement l’étalon devant s’accoupler avantageusement avec la jument qu’on lui présente.

Il serait urgent de sortir de ce cercle vicieux qui empêche les hommes les plus désireux de bien faire de donner un conseil dans le cas d’accouplement; devant une belle et bonne jument présentée aux étalons de l’État, si vous demandez à quelques-uns des officiers des Haras quel serait l’étalon, parmi cent, qui conviendrait le mieux à la jument, chacun d’eux aura une opinion différente; ils sauront bien vous indiquer un bon et beau cheval, mais souvent d’un type dont la conformation ne devra pas s’accoupler avec celle de la jument présentée.

J’ai parfois entendu dire par des officiers de Haras très capables, lorsqu’on leur présentait une belle jument de gros trait, par exemple, qu’il fallait l’accoupler avec un beau pur sang anglais dont la construction était pourtant diamétralement opposée; j’en ai vu les résultats, ils étaient irréguliers et tarés.

Les nombreux écrits, traitant de la grave question du choix des types améliorateurs, l’ont laissée à l’état de problème; ceux mêmes dans lesquels se trouve exprimée la préférence pour tel type à l’exclusion de tel autre, ne donnent pas, selon moi, de motifs assez plausibles pour en formuler une règle fixe, puisque ces beaux types, suivant eux, sont admissibles pour accoupler avec tous les types de juments indistinctement.

C’est ainsi que je me suis senti porté à chercher par quel moyen je pourrais faire connaître ma façon de penser sur l’amélioration de l’espèce chevaline, en suivant dans les accouplements des règles fixes, sans exclusion d’aucun type, chacun d’eux pouvant par sa spécialité être précieux à conserver.

Mes travaux sur ce sujet, qui sont le résultat de longues études et d’observations, ont été déjà présentés, en 1859, à la Société nationale et centrale d’agriculture de France. Après un examen sérieux de la part du savant Baudement, rapporteur sur cette question, mon manuscrit a été couronné, en obtenant une médaille d’argent.

Aujourd’hui mes nouvelles observations me font un devoir de répandre les principes utiles au développement de la question des accouplements dans la production de l’espèce chevaline dont l’importance, pour l’amélioration rapide et rationnelle, ne saurait être mise en doute.

Amélioration de l'espèce chevaline par des accouplements raisonnés

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