Читать книгу Procès de la conspiration dite républicaine de décembre 1830 - Émile Babeuf - Страница 6
ОглавлениеTROISIÈME NOTICE.
TRELAT (ULYSSE). président de la société des Amis du Peuple, né à Montargis eu 1795, médecin distingué , qui, à l’époque du procès des ministres de Charles X, était artilleur dans la deuxième batterie d’artillerie de la garde nationale, commandée par MM. Cavaignac et Guinard.
Dès le 30 juillet, les hommes qui avaient dirigé les colonnes du peuple contre le despotisme, se réunirent rue de Richelieu, chez Lointier, pour aviser aux moyens de conserver à ce même peuple le droit qu’il venait de conquérir. M. Trélat y fut naturellement appelé, et devint par la suite un des flambeaux de cette réunion patriotique, connue depuis sous la dénomination de Société des Amis du Peuple.
Les glorieuses journées de juillet 1830 ayant vu s’écrouler l’échafaudage monstrueux du gouvernement absolutiste, sous les efforts valeureux du patriotisme, nombre de sociétés populaires prirent naissance dans le noble but de conserver à la nation entière la libre jouissance de tous ses droits, la plénitude de la liberté que ses héroïques enfans venaient de lui conquérir au prix de leur sang. On distingua entre autres la société des Amis du Peuple. Un médecin habile, M. Ulysse Trélat, l’un de ses fondateurs, en fut nommé président.
Après la dissolution des séances publiques, le 25 septembre 1830, au manége Pellier, où l’accusé Danton fut arrêté par la garde nationale, et immédiatement rendu à la liberté par M. Girod-de-l’Ain, alors préfet de police.
M. Trélat succéda à M. Hubert, qui fut mis en prison, et encourut une condamnation correctionnelle, non comme président de cette société , mais comme ayant contrevenu aux ordonnances de police pour un placard qui ne fut pas même affiché, et qui était sans nom d’imprimerie.
Tandis que, par ses lumières, M. Trélat éclairait le bon sens des membres de la société sur les moyens les plus propres à assurer l’indépendance des Français à l’égard des nations étrangères, et chez eux mêmes, il coopérait au maintien du bon ordre en remplissant les fonctions d’artilleur dans la garde nationale. Tous les hommes aimant sincèrement leur pays, doivent nécessairement se trouver en rapport mutuel, quelles que soient les circonstances qui les rapprochent; ils doivent aussi se réunir spontanément, lorsque les circonstances de chaque jour amènent de nouveaux événemens, qui intéressent la chose publique. C’est ce qui arriva entre MM. Trélat, Cavaignac, Guinard, ses capitaines d’artillerie, et M. Sambuc, jeune étudiant toulousain, etc.
M. Sambuc, plein d’ardeur pour la cause de la liberté , et la tête remplie de projets patriotiques, crut ne pouvoir rencontrer mieux, pour les épancher, que le président de la société des Amis du Peuple. Les estimables qualités du président se trouvèrent correspondre avec celles de l’étudiant, et la liaison s’accrut de cette conformité de caractère. Bientôt M. Sambuc, souhaitant faire partie d’une association dont le but était celui qu’il s’était toujours proposé lui-même; de là de nombreuses visites de l’étudiant chez M. Trélat. des conférences suivies sur la nature, l’utilité et l’organisation des sociétés populaires, dont il résulta, pour ces deux citoyens patriotes, qu’ils pensèrent naturellement que de telles associations sont toujours une bonne chose, en ce qu’elles fécondent et multiplient nécessairement les idées généreuses par le rapprochement.
Cependant il s’en fallait de beaucoup que la révolution de juillet dont ou s’était promis de si heureux résultats, réalisât l’espoir général; il parut que l’on n’avait secoué les chaînes de l’arbitraire que pour porter de nouveaux fers sous des termes nouveaux. Le Président de la Société des Amis du Peuple ne pouvait point admirer une pareille exécution du programme de l’Hôtel-de-Ville. La proposition d’abolir la peine de mort, faite ostensiblement dans un but humain, très-peu politique pour l’époque, mais bien dans l’intention de soustraire de lâches ministres à leur juste châtiment, fit éclater des troubles le 20 octobre: on se porta à Vincennes, près des murs qui renfermaient les traîtres; mais cette expédition n’aboutit qu’à faire parvenir aux oreilles de ces derniers les accens foudroyans d’un peuple outragé. A cette occasion, le Président de la Société des Amis du Peuple prit la résolution de l’organiser en douze bureaux par arrondissement qui devaient être en permanence tous les jours de midi à deux heures, jusqu’à nouvel ordre. Une circulaire adressée à chacun des membres le 20 octobre, les avertit de cette division provisoire. En décembre, le procès des ministres ayant renouvelé les rassemblement, la Société délibéra sur une proposition ayant pour objet d’établir un comité permanent pour suivre les mouvemens, les diriger et en profiter pour replacer le pays dans l’état où il se trouvait le 29 juillet 1830, c’est-à-dire, où la nation pût elle-même choisir son gouvernement, selon l’esprit national.
L’affaire de Duez aîné, qui s’est instruite immédiatement après celle-ci à la deuxième chambre de la Cour d’assise, a révéle des propositions qui furent faites à cette société , de constituer un comité insurrecteur, et qui fut sagement combattu par le bureau, et notamment par son secrétaire, M. Rittiez, avocat, qui en fit sentir toute l’inconvenance.
Les relations de M. Trélat avec M. Sambuc ayant été consignées par ce dernier dans son journal, avec diverses mentions de projets politiques, et ledit journal étant tombé sous les yeux des magistrats par suite de l’arrestation de l’étudiant toulousain, M. Trélat, s’est vu compris dans l’acte d’accusation fulminé contre ce dernier, ainsi que contre MM. les capitaines Cavaignac et Guinard, etc. Le Président de la Société des Amis du Peuple a partagé l’éclatante absolution de ses coaccusés, à la satisfaction générale. Il est singulier qu’un gouvernement qui se prétend sans doute fort éclairé, ait vu les dangers réels dans des utopies éminemment nationales, et dans une société qui, depuis sa formation, ne s’est livrée en masse à aucun acte public, soit de provocation au désordre, soit de désobéissance aux lois; car il n’a pas été démontré clairement que tous les faits attribués à quelques-uns des Amis du Peuple, aient été réellement accomplis par eux. D’ailleurs, un gouvernement se disant national, devait éviter de donner tant d’éclat à des actions faites dans des intentions éminemment nationales, et qui n’avaient pas eu de suites qui lui fussent tant soit peu préjudiciables.
Les débats de ce procès ont servi uniquement à mettre au grand jour les qualités morales des accusés; la conduite de M. Trélat, |en particulier, a paru si évidemment pure, que, déchargé du chef de conspiration, il a été considéré par M. Miller, comme chargé simplement de celui de non révélation de complot, lequel n’a pas été plus démontré que l’autre. M. Roslan, professeur à l’Ecole de Médecine, a déposé honorablement en faveur de M. Trélat, et M. l’Avocat. Général Miller lui-même, a rendu hommage publiquement à l’audience, à la loyauté de son caractère.