Читать книгу L'avare - Molière Jean Baptiste Poquelin, Жан-Батист Поклен Мольер, Мольер (Жан-Батист Поклен) - Страница 8
Jean Baptiste Poquelin Molière
L’AVARE
ACTE PREMIER
Scène VI
ОглавлениеHarpagon, Élise.
Harpagon. Voilà de mes damoiseaux flouets[5], qui n’ont non plus de vigueur que des poules. C’est là, ma fille, ce que j’ai résolu pour moi. Quant à ton frère, je lui destine une certaine veuve dont, ce matin, on m’est venu parler ; et, pour toi, je te donne au seigneur Anselme.
Élise. Au seigneur Anselme ?
Harpagon. Oui, Un homme mûr, prudent et sage, qui n’a pas plus de cinquante ans, et dont on vante les grands biens.
Élise (faisant une révérence.) Je ne veux point me marier, mon père, s’il vous plaît.
Harpagon (contrefaisant Élise.) Et moi, ma petite fille, ma mie, je veux que vous vous mariiez, s’il vous plaît.
Élise (faisant encore la révérence.) Je vous demande pardon, mon père.
Harpagon (contrefaisant Élise.) Je vous demande pardon, ma fille.
Élise. Je suis très humble servante au seigneur Anselme ; mais, (Faisant encore la révérence.) avec votre permission, je ne l’épouserai point.
Harpagon. Je suis votre très humble valet ; mais, (Contrefaisant Élise.) avec votre permission, vous l’épouserez dès ce soir.
Élise. Dès ce soir ?
Harpagon. Dès ce soir.
Élise (faisant encore la révérence.) Cela ne sera pas, mon père.
Harpagon (contrefaisant encore Élise.) Cela sera, ma fille.
Élise. Non.
Harpagon. Si.
Élise. Non, vous dis-je.
Harpagon. Si, vous dis-je.
Élise. C’est une chose où vous ne me réduirez point.
Harpagon. C’est une chose où je te réduirai.
Élise. Je me tuerai plutôt que d’épouser un tel mari.
Harpagon. Tu ne te tueras point, et tu l’épouseras. Mais voyez quelle audace ! A-t-on jamais vu une fille parler de la sorte à son père ?
Élise. Mais a-t-on jamais vu un père marier sa fille de la sorte ?
Harpagon. C’est un parti où il n’y a rien à redire ! et je gage que tout le monde approuvera mon choix.
Élise. Et moi, je gage qu’il ne saurait être approuvé d’aucune personne raisonnable.
Harpagon (apercevant Valère de loin.) Voilà Valère. Veux-tu qu’entre nous deux nous le fassions juge de cette affaire ?
Élise. J’y consens.
Harpagon. Te rendras-tu à son jugement ?
Élise. Oui. J’en passerai par ce qu’il dira.
Harpagon. Voilà qui est fait.