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CHAPITRE II

Table des matières

DU VÊTEMENT

Il y a quelque temps, je vantais l’utilité du tricycle pour les rhumatisants, les goutteux et pour d’autres malades du même genre, à un fabricant d’essieux de vélocipèdes. A ma grande surprise, ce consciencieux constructeur me soutenait que le tricycle pouvait, au contraire, faire naître des douleurs chez ceux qui, jusqu’alors, n’en avaient point été atteints; il m’affirmait qu’ayant lui-même fait une promenade par un temps de vent, et s’étant mis en transpiration, il était revenu avec un lombago qui le cloua huit jours au lit. Ce fait n’a rien de surprenant. Loin d’être rare, cet accident facile à éviter est assez commun chez ceux qui ne suivent pas les règles prescrites. Accuserait-on la natation d’accidents qui résulteraient d’un bain pris mal à propos, en pleine digestion? Mettrait-on sur le compte de l’escrime les imprudences des tireurs? Doit-on renoncer à l’équitation, parce que cinq ou six jockeys se rompent le cou tous les ans, dans les steeple-chases? Evidemment, non. De même pour le tricycle. Si la fatigue et l’effort sont des questions personnelles, que chacun peut, jusqu’à un certain point, résoudre pour lui-même, il n’en est pas ainsi du vêtement. Tous les auteurs, en effet, sont unanimes à reconnaître que, pour faire de la vélocipédie, il est nécessaire d’être vêtu d’une manière appropriée et pour peu qu’on entre en transpiration, le moindre écart peut être suivi de conséquences fâcheuses. Il ne faut pas croire que cette question si importante ait été résolue à la légère, ni que l’on ait trouvé de suite et de toutes pièces le costume qui est reconnu maintenant comme le plus convenable. Nous le devons à l’expérience accumulée des milliers de cyclistes qui l’ont discuté depuis une dizaine d’années, et qui ont fini par en arrêter les grandes lignes à la suite d’une séance solennelle.

Lord Bury recommande, pour jouir entièrement du plaisir, de l’agrément et des bienfaits salutaires de la vélocipédie, d’avoir un costume correct et approprié.

«Au point de vue de la distraction et de l’hygiène, dit-il, c’est un point capital à observer. Celui qui s’aventure sur un vélocipède dans un costume mal choisi, proclame ainsi son ignorance dans l’espèce. » Le cycliste doit alors être vêtu d’une manière commode et pratique, la question d’élégance n’étant que secondaire. Les points essentiels, indiqués par lord Bury et M. Hillier, sont les suivants: le vêtement doit être dûment protecteur, c’est-à-dire qu’il devrait fournir une chaleur égale et suffisante à tout le corps, sans restreindre les mouvements; il ne doit pas être trop ample; il devrait être d’une étoffe très solide pouvant supporter l’usure; un drap trop lâche prend la poussière; l’étoffe doit être alors d’un tissu serré, d’une nuance moyenne; la coupe de, bon goût et la façon irréprochable. Tous les vêtements portés par le cycliste doivent être de laine ou de flanelle, sans mélange de coton ou de toile. «L’expérience passée, disent les auteurs que nous citons, a démontré la nécessité absolue de supprimer le moindre fil de coton ou de toile dans le vêtement; car ces étoffes, quand elles ont été mouillées par la transpiration ou la pluie, donnent une sensation de froid humide partout où elles se trouvent. Et cela est surtout apparent, après une longue journée, quand le cycliste peut se sentir refroidi jusqu’à la moelle des os, et prend en conséquence un rhume sérieux.

«On a même rapporté des cas graves d’inflammation des reins due à l’existence dans la ceinture du pantalon d’une bande de toile. Bon nombre de tricyclistes entre les deux âges ne veulent monter qu’avec un pantalon de ville, et comme ils prennent nécessairement de vieux pantalons ordinaires (c’est-à-dire avec des ceintures doublées de toile), ils souffrent souvent des inconvénients auxquels nous faisons allusion, et on met sur le compte de la vélocipédie une maladie, entièrement due à l’imprudence de la victime. Des maux de gorge sont souvent causés par la bande de toile qui, le plus souvent, est appliquée au col de la chemise de flanelle. De plus, il y a souvent un petit carré de toile portant le nom et l’adresse du chemisier, qu’on perçoit très nettement lorsqu’il est mouillé et que le vent souffle dessus.»

Le cycliste doit encore s’assurer que son gilet de flanelle n’est pas garni d’une bande de toile; que la ceinture de son caleçon n’est pas doublée de cette étoffe; ces mêmes recommandations s’appliquent à tout le vêtement, qui ne doit être doublé et renforcé qu’en flanelle. La chemise de flanelle, toute confectionnée, contient souvent une certaine proportion de coton, ce qui fait qu’après une longue course, le cavalier se trouve mal à l’aise et perd l’appétit. «D’un autre côté, disent nos auteurs, le cavalier vêtu de la tête aux pieds, tout en flanelle ou en pure laine, n’a rien à craindre relativement. Il peut se tremper six fois dans la journée, et quoique la situation ne soit pas amusante, elle est sans danger». Par conséquent, celui qui apprécie la santé et désire éviter les suites fâcheuses qui résulteraient d’une imprudence, ferait bien de se conformer au programme ci-dessus indiqué du vêtement «tout laine.»

Pour les questions de détails, je renvoie le lecteur au livre de Lord Bury et aux travaux du Dr Tissié et de M. de Baroncelli. Quant au vêtement des dames, notre compétence risquerait fort d’être récusée, d’autant plus que nous ne voulons pas indisposer à l’avance nos charmantes lectrices, par nos vues sur l’usage du corset. Celles-ci consulteront avec profit les ouvrages déjà cités et en outre le petit traité de miss F.-J. Erskine «Tricycling for Ladies.» En dernier lieu, je donnerai le conseil aux personnes qui ont des montres de prix, de ne point les porter sur elles, quand elles sont en tricycle. Cet exercice, en effet, je ne sais exactement pour quelle raison, les abîme, et il est difficile de les remettre en état dans la suite.

La santé par le tricycle

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