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INTRODUCTION

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Table des matières

«Un vieillard de quatre-vingts ans a plus de chances de vivre un an qu’un bébé qui vient de naître,» a dit le docteur Bergeron.

Cet aphorisme épouvantable ne sonne-t-il pas comme un glas funèbre sur les destinées de notre pays?

Certes, si nous regardons de près ce qui se passe chez nous, c’est avec une légitime terreur qu’il faut envisager l’avenir.

Comment saurait-il en être autrement, puisque non seulement nous ne faisons presque plus d’enfants, mais encore nous laissons mourir le peu que nous avons?

Pourquoi cette faiblesse de la natalité ?

Notre pays a-t-il donc perdu toute son énergie, la source de ses forces vives est-elle donc tarie? Les femmes françaises sont-elles donc devenues stériles ou n’ont-elles plus aucune notion du premier de leurs devoirs?

Hélas! il semble bien qu’on doive répondre par l’affirmative à cette dernière question.

Notre siècle est égoïste. Le culte du «moi», la volonté de «vivre sa vie», font prévaloir des doctrines d’un individualisme outrancier qui nous ramène aux temps de la décadence romaine. L’amour du luxe et des jouissances effrénées, le renchérissement de la vie, le relâchement des mœurs, sont, comme à cette époque, les causes principales d’une dégénérescence qui s’affirme surtout par la diminution de la natalité.

Jamais autant qu’aujourd’hui la sublime fonction de la maternité n’a été méprisée et dédaignée. La secte des malthusiens fait chaque jour de nouveaux prosélytes dans toutes les classes de la société, et, sous le prétexte de «procréation consciente», chacun recherche la limitation de ses dépenses et la satisfaction de ses appétits. On supprime les bouches inutiles, et quoi de plus inutile pour les égoïstes que les enfants?

Il y a même une autre cause. Dans les milieux où règne en maître le féminisme mal compris, certaines femmes croiraient déchoir en acceptant d’être mères. Comment se consacreraient-elles à l’éducation des autres, comment feraient-elles prévaloir leurs idées de l’égalité des sexes, si elles subissaient le joug de l’homme? Marcel Prévost, dans les Vierges fortes, a très bien étudié ce point de vue spécial, et si l’une de ses héroïnes ne peut s’affranchir du joug héréditaire et cède à la toute-puissance de l’amour, les autres du moins continuent leur œuvre, ayant dédaigné ou repoussé la tentation. Je n’ai jamais autant constaté la vérité de cette magnifique étude de l’auteur des Lettres à Françoise que dans une conversation que j’eus il y a deux ans avec une intellectuelle. Celle-ci, de haute intelligence, n’était pas arrivée encore à l’extrême limite des théories féministes. Elle consentait à se marier après plusieurs années de stage, mais posait comme condition de n’avoir pas d’enfant. Comme je m’en étonnais et tentais de lui montrer l’absurdité de ses opinions, lorsqu’elle m’eut énuméré les lieux communs que l’on débite en pareil cas, elle conclut en me disant: «Du reste, ces choses-là sont d’ordre inférieur, et il est bien préférable de cultiver son cerveau que d’avoir des enfants à mettre au monde, à nourrir et à élever.»

Voilà les choses douloureuses que l’on entend aujourd’hui. Encore s’agit-il ici, en définitive, d’un but noble à atteindre; mais combien s’affranchissent des lois naturelles par égoïsme, par pure coquetterie, pour conserver leur corps intact ou pour se laisser aller à leurs plus vils instincts?

Où est-il le temps où les vieux Romains se découvraient devant la femme enceinte?

Les législateurs contemporains, aidés en cela par des sociologues éminents, des écrivains de tous les partis, ont bien essayé de réagir contre cette tendance, les uns en facilitant le mariage, les autres en accordant des primes à la natalité ; quelques-uns ont voulu imposer les célibataires, d’autres venir en aide aux filles-mères, etc., toutes mesures insuffisantes si l’on considère leurs résultats et qui du reste, malgré l’enthousiasme de leurs promoteurs, devaient échouer, car elles ne tenaient pas compte des mœurs contemporaines.

Les Romains, eux aussi, avaient essayé d’enrayer le mal quand l’empereur Auguste, épouvanté de la stérilité des unions conjugales et de la diffusion du célibat, promulgua les célèbres Lois Caducaires; elles aussi restèrent sans effet, puisque rien ne put arrêter la ruée folle de ce peuple vers l’abîme, vers la mort.

Est-ce à dire que nous ne pouvons rien et qu’il nous faut assister impuissants à cette lamentable décadence? Non. Plus que jamais, puisque les mœurs sont en cause, il faut réformer les mœurs. Il faut rééduquer les femmes et les jeunes filles, leur apprendre que la maternité n’est pas, comme elles le croient, un devoir douloureux dont elles peuvent s’affranchir d’un cœur léger, mais qu’elle est la plus noble fonction de la femme, celle qui fait d’elle une divinité ! Créer de la vie, mettre au monde un petit être qui est la chair de votre chair, dont l’âme est faite de votre âme, que vous élèverez suivant l’idéal que vous portez en vous, dont vous formerez l’esprit et le corps et qui toujours demeure votre chose, quoi de plus magnifique, de plus beau, de plus grand?

La maternité, c’est l’épanouissement complet de la femme; elle met autour d’elle un rayonnement qui la complète et la divinise.

L’enfant, dans le ménage, c’est le trait d’union qui relie le père et la mère; c’est sa présence qui consolide le mariage, qui oblige les parents à concentrer leurs efforts vers un but commun, et décuple ainsi leur énergie vitale, et cela pour le plus grand bien non seulement de la famille, mais de la société tout entière.

L’enfant, c’est l’espoir des parents, la consolation des vieux jours, le charme de la vieillesse.

Élever des enfants, en faire des hommes, voilà le rôle de la femme: en est-il un plus beau, un plus sublime?

Mais en attendant que ces notions pénètrent dans les masses, que chacun comprenne où est le devoir, et je dirai plus, en attendant que, mieux éclairés, nous soyons persuadés que l’intérêt général est fait de l’intérêt de chacun, devons-nous assister en spectateurs impassibles à la ruine de notre pays? Certes non; plus que jamais nous devons lutter, et en attendant que notre natalité augmente, nous devons tout faire pour empêcher nos enfants de mourir.

La mortalité infantile est une plaie ouverte au flanc de la France, c’est une blessure par laquelle s’écoule son énergie et sa vie, lentement, mais sans arrêt.

Cette blessure, nous devons la guérir; cette plaie, nous devons la fermer; nous le pouvons, donc nous le devons.

Nos enfants ne meurent pas, on les tue; on les tue par négligence, par ignorance, par apathie.

Qu’un enfant succombe brûlé dans un incendie, noyé dans une rivière, toute la population s’émeut; mais que dix nouveau-nés meurent de la diarrhée, personne n’y prête attention, et cependant, dans le premier cas il s’agissait d’un accident, évitable peut-être, mais rare à coup sûr; dans le second, au contraire, rien n’était plus facile que d’éviter cette hécatombe, et cependant c’est tous les jours que semblable crime se renouvelle!

Tous les ans nous perdons en France 150.000 enfants âgés de moins d’un an; dans ce nombre, plus du tiers (385 p. 1.000) sont emportés par la diarrhée; viennent ensuite les affections pulmonaires (147 p. 1.000), la faiblesse congénitale (171 p. 1.000).

La diarrhée et les affections pulmonaires causent donc à elles seules plus de la moitié des décès, et pourtant ce sont des maladies essentiellement évitables. Quant à la faiblesse congénitale, elle est presque entièrement une conséquence de l’alcoolisme.

Voilà où nous conduisent l’ignorance, la négligence et l’alcool!

Ceci étant connu, nous serions coupables de ne pas y porter remède!

Nous le serions d’autant plus que le succès est certain: partout où on a voulu supprimer ces causes, on a réussi, et cela sans peine, sans difficulté, sans déboire.

Il suffit de faire l’Éducation des mères.

C’est une lacune complète dans l’éducation de nos filles; on leur a tout appris, sauf leur futur métier de mère.

Elles pèchent par ignorance et ne demandent qu’à s’instruire.

C’est ce que nous allons faire dans les pages qui suivent.

L'éducation des mères

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