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CHAPITRE IV.

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Table des matières

L'homme à la faux.

Victor et Dufour ont pris la voiture qui mène à Laon: de là à la propriété où ils se rendent, Armand leur a dit qu'il n'y avait que trois petites lieues, et ils veulent faire ce chemin à pied. Ils laissent à la poste de Laon leurs porte-manteaux, qu'ils comptent envoyer chercher quand ils seront chez le jeune de Bréville, et n'ayant à la main, l'un qu'une légère badine, l'autre que son livre de croquis, ils se mettent gaiement en marche dans le chemin qu'on leur a indiqué.

On est aux premiers jours de juin: le feuillage des arbres commence à s'épaissir, à donner de l'ombrage; les acacias sont dans toute leur beauté, et leur blanche fleur répand au loin un doux parfum, tandis que les chênes plus paresseux n'ont encore que de petites feuilles qui laissent passer les rayons du soleil. Mais la verdure a toute sa fraîcheur, tout le brillant de ses premières couleurs; aucune feuille n'a encore quitté sa tige. Que d'autres admirent les beaux effets, les tons plus opposés de l'automne! le printemps du moins promet de longues jouissances: c'est le présent et l'avenir.

Dufour s'arrête souvent pour contempler un site, un point de vue, et il s'écrie: «C'est charmant!... je suis très-content de connaître ce pays.... Conviens, Victor, qu'on a plus de plaisir sous ces ombrages qu'avec tes Berlibiche, Célanire, et même les demoiselles de Saint-Cloud?...—Je n'ai jamais dit le contraire... mais, sous ces arbres... dans ces petits chemins couverts, conviens aussi qu'il serait bien doux de se promener avec une femme aimable, sensible, et qui nous aimerait véritablement.

C'est possible!... pourtant, moi, je préfère ne pas être amoureux dans un beau pays... ça m'empêcherait de travailler... Oh! le bel arbre! attends que je le croque.»

Dufour prend son crayon, son calepin, et se met à dessiner. Pendant ce temps, Victor s'étend sur le gazon: il pense aux jolies femmes qu'il à laissées à Paris, et, quoiqu'il les ait quittées sans regret, il voudrait bien en tenir une sur ce gazon, sur lequel il se repose; là, elle lui semblerait cent fois plus jolie!... Il est donc vrai que le changement de lieu, de site, peut donner encore du prix aux objets que nous délaissons.

Dufour a croqué son arbre; mais un peu plus loin, c'est une petite fuite de terrain qu'il veut absolument dessiner.

«Mon cher ami, lui dit Victor, si tu veux esquiser tout ce qui te semblera joli sur notre route, il est probable que nous n'arriverons pas avant la nuit, et nous risquons fort de nous égarer dans ce pays que nous ne connaissons pas..... je crois même que tu nous as déjà fait perdre notre chemin.—Tu as raison.... j'ai le temps de faire tout cela; c'est que, lorsqu'on voit un joli effet, on craint toujours de ne plus le trouver.... Allons, en route.... On nous a dit qu'il fallait d'abord passer le village de Samoncey... qu'il était au milieu des bois.... Le vois-tu, le village?—Comment veux-tu que je le voie, s'il est entouré de bois? Marchons toujours...»

Les deux voyageurs marchaient alors sur un terrain fort inégal; à chaque instant il fallait descendre de petits monticules, puis en remonter d'autres; des buissons de genets, des bouquets de chêne, des trembles, des bouleaux donnaient à cette campagne un aspect pittoresque.

«Ça commence à devenir fatigant de ne faire que monter et descendre, dit Dufour.—A coup sûr, nous ne sommes pas sur une grande route.—On nous a dit qu'il n'y en avait pas, et que, pour gagner Samoncey, il fallait traverser les bois.—Oui, mais il y a un chemin tracé que suivent les paysans... Nous y étions tout à l'heure...—Il ne fallait pas aller à droite et à gauche pour dessiner, nous y serions encore... Après tout, nous ne sommes ni dans les déserts de l'Égypte, ni même dans les landes de Bordeaux; nous nous retrouverons toujours.—Mais le jour baisse... et la nuit, il n'est pas facile de se retrouver.... Voyons l'heure....—Tu as donc osé prendre ta montre pour voyager...—Parbleu!... je savais bien que je ne serais pas foulé comme dans le parc de Saint-Cloud..... Ce n'est pas que cela veuille dire que nous n'ayons rien à craindre ici... je ne connais pas ce pays_... j'ignore s'il y a des vagabonds... des voleurs... As-tu des pistolets sur toi?—Non, je les ai laissés dans mon porte-manteau... mais j'ai ma badine.—C'est cela, si on nous attaquait, nous aurions une badine et un crayon pour nous défendre!... Sais-tu que j'ai cent cinquante francs sur moi? je suis fâché à présent d'avoir emporté tant d'argent... mais quand on doit rester quelque temps dans un pays... et qu'on espère s'y amuser un peu.—Oh! parbleu! je te conseille de faire ton embarras avec tes cinquante écus... Et moi qui ai dans ma bourse douze cents francs en or...

»—Douze cents francs!... quelle folie!... avoir emporté douze cents francs....

»—C'est un joli denier!» dit une voix qui partait de derrière un épais buisson; presque au même moment on écarte le feuillage et quelqu'un se trouve tout à coté des deux voyageurs.

C'était un homme d'un âge déjà avancé, mais fort, trapu, vigoureux; ses yeux gris enfoncés sous des sourcils épais, étaient à la fois vifs et hardis; ses lèvres minces semblaient, en se rapprochant, avoir une expression moqueuse; un nez long et crochu; des pommettes saillantes et fortement colorées achevaient de donner à sa physionomie une expression singulière. Il était vêtu d'une blouse grise, portait des sabots, un bonnet de laine de couleur, et tenait sur son épaule une de ces larges faux dont les paysans se servent plutôt pour faucher l'herbe que pour la moisson.

Dufour est resté saisi; Victor lui-même est un moment étonné de la brusque apparition de cet homme, qui semble être sorti du buisson pour se trouver sur leur passage; et celui-ci répète, en les regardant l'un après l'autre d'un œil scrutateur: «Oui... c'est un joli denier.

»—Ah! vous trouvez.....» dit Victor en fixant à son tour l'homme en blouse.—Mais dame!.....—Vous nous écoutiez donc?... Il n'y avait pas besoin d'écouter pour vous entendre..... vous parliez assez haut... et puis quand même, est-ce que ça vous fâche?...

»—Drôle de rencontre! murmure Dufour; cet homme a une tête bien caractérisée... il serait très-bien à peindre... mais pas ici..... Marchons toujours..... il a une polissonne de faux contre laquelle ta badine ne brillerait pas.—C'est un faneur, un faucheur, qui revient de son travail.—J'aime à le croire... mais nous sommes bien sots d'aller crier que nous avons de l'argent, de l'or dans nos poches.... C'est une imprudence que je ne me pardonne pas. Il est vrai que j'aurais juré que nous étions seuls: cet homme a poussé là comme un champignon.»

Les voyageurs continuaient leur marche dans un étroit sentier qu'ils suivaient alors, le paysan marchait derrière eux. Dufour le regardait souvent de côté, en disant à Victor: «J'aimerais mieux qu'il fût devant nous... laissons-le passer.—Tu as tort de te méfier de ce paysan... au contraire, sa rencontre nous sera utile.»

Victor s'arrête et s'adresse à l'homme, qui semble les suivre: «Pourriez-vous nous dire si nous sommes encore loin du village de Samoncey?—Si j'peux vous le dire!... tiens! ça serait bon si je ne connaissais pas le pays..... Non, vous n'êtes pas très-loin de Samoncey... à une demi-lieue approchant...—Et suivons-nous bien la route qui y conduit?—Oh! par les bois ou par les champs, on y va tout de même... D'ailleurs, j'y vais, moi, à Samoncey: ainsi, si vous voulez me tenir compagnie, vous ne vous perdrez pas.—Je ne tiens pas absolument à sa compagnie,» dit tout bas le peintre.—«Pourquoi cela?—C'est à cause de cette diable de faux... S'il allait nous prendre pour de la luzerne...—Tu es fou! avec lui nous ne risquons plus de nous égarer.—Soit... abandonnons-nous à la Providence; mais marchons à côté de lui.

Vous êtes de ce pays, brave homme?—Oui, je suis de Gizy; c'est à une demi-lieue de Samoncey... plus haut.—Il est joli ce pays,... il paraît riche et bien cultivé?—Oh!... comme ça... Il y a des terrains assez bons.—Vous êtes cultivateur?—Non, je suis journalier. Et vous, qu'est-ce que vous êtes?»

Cette question, toute naturelle dans la bouche du paysan, fait pourtant sourire les voyageurs. Mais les gens de la ville trouvent tout simple de questionner les habitants de la campagne, et se formalisent quand ceux-ci usent du droit de réciprocité. Cependant Victor répond au paysan:

«Nous arrivons de Paris... Mon ami est artiste.—Artisse! quoique c'est que ça?—Je suis peintre.... dessinateur, si vous comprenez mieux.—Ah! peintre, oui, je comprends! Vous faites des peintures, des images,... comme celles qui sont sur les complaintes qu'on vend à Laon,.... des Juif-Errant, des Barbe-Bleu!

»—Ah! le Vandale!» s'écrie Dufour; puis il ouvre son calepin et montre au paysan un des points de vue qu'il venait de croquer, en lui disant: «Voilà ce que je fais... Y êtes-vous à présent?»

Le paysan s'arrête pour regarder à son aise le croquis, et Dufour cherche à lire dans ses yeux la surprise et l'admiration; mais le villageois ne s'émeut point, il dit d'un air indifférent: «Ah! oui,... ce sont des arbres..... des gazons, c'est dommage que c'est tout noir.... j'aime mieux les images en couleur, c'est plus gentil.

»—Il n'y a rien à répondre à ces gens-là,» murmure Dufour, en remettant avec humeur son calepin dans sa poche; «cela n'a aucun sentiment des beaux-arts!—Eh! pourquoi vas-tu lui parler peinture, toi!—Pourquoi se permet-il de nous demander ce que nous faisons!—Parle-lui culture, labour, semences, alors il saura te comprendre, te répondre.—Pourvu qu'il ne nous égare pas, c'est tout ce que je demande.... Il nous fait prendre bien des détours, et la nuit approche.... Paysan, sommes-nous bientôt au village?—Nous y arriverons.»

En disant ces mots, l'homme en blouse entre dans un sentier bordé d'épais buissons et recouvert par des branches de chênes qui formaient presque un berceau en se joignant; mais, le jour étant déjà très-bas, on voyait à peine clair dans cette route. Les branches de feuillages touchaient souvent la tête des voyageurs, et on ne pouvait marcher qu'un de front, tant le sentier était étroit.

«Dans quel chemin nous mène-t-il?» dit Dufour à Victor. «Ce sentier doit être fort agréable quand il fait du soleil.—Mais comme il y a long-temps qu'il ne fait plus de soleil, il n'était pas nécessaire de nous mener dans un chemin où à chaque instant les branches peuvent nous aveugler... Hum!... je me méfie de ce gaillard-là... Et dire que nous avons laissé nos armes,... c'est-à-dire tes armes, dans le porte-manteau!.... Eh bien!.... qu'est-ce qu'il fait donc maintenant?...»

Le guide des deux amis venait d'ôter la faux de dessus son épaule gauche pour la prendre dans sa main droite, et il tournait la tête pour regarder les voyageurs; mais Dufour s'était arrêté spontanément à cette action du paysan.

«Eh bien, messieurs,... est-ce que vous n'avancez plus?...—» Si fait, dit Victor, qui marchait le dernier. «Allons, Dufour, avance donc, qu'est-ce que tu fais là?—Mais je..... je m'arrête un peu,.... je suis las... Est-ce que nous ne serons pas bientôt dehors de ce sentier, mon camarade?—Oh! si.....»

Et le paysan, qui examinait alors sa faux, reprend: «Elle est fameuse c'te faux-là! un bon tranchant.... Si à l'armée on avait de ça, et qu'on sût s'en servir comme moi, ah! bigre! ça vaudrait ben leur sabre!... C'est qu'avec ça on ferait tomber des hommes par demi-douzaines!

»—Voilà de bien mauvaises plaisanteries!...» dit Dufour à demi-voix et en regardant Victor. Celui-ci le pousse pour le faire avancer, en s'écriant: «Allons, brave homme, marchons, s'il vous plaît, car nous n'arriverons jamais avant la nuit. Dam', i' m' semble que c'est vous qui vous arrêtez.»

On se remet en marche, Dufour ayant toujours les yeux fixés sur la terrible faux, est prêt à se jeter dans les broussailles qui bordent le sentier, au premier mouvement qu'il verra faire à leur guide. Celui-ci ne s'arrête plus, et on arrive enfin au bout de l'étroit chemin. Mais on est toujours dans le bois; et quoique l'endroit soit moins touffu, on ne peut voir loin devant soi, parce que le jour est près de finir.

«Ce village de Samoncey est bien difficile à atteindre!» dit Dufour en regardant Victor et en poussant un profond soupir qui fait sourire son compagnon. Le paysan s'avance toujours, marchant à travers le bois et ne suivant plus aucun chemin battu; enfin on arrive dans une clairière où plusieurs sentiers aboutissent. Le paysan s'arrête à cet endroit, posant sa faux à terre et s'appuyant dessus comme un suisse sur sa hallebarde; il regarde autour de lui comme s'il cherchait du monde dans chacun des sentiers qui s'offrent à sa vue.

«Eh bien! mon brave homme, pourquoi restons-nous là? demande Victor.—Ah! c'est que je regardais si je n'apercevrais pas queuque ami.... qui m'aurait évité la peine d'aller à Samoncey.

»—Ce sont ses complices qu'il cherche!...» dit tout bas Dufour; «n'attendons pas le reste de la troupe.... Crois-moi, Victor, prenons un de ces sentiers au hasard et jouons des jambes... Il ne s'agit pas de faire le brave contre une bande de voleurs, surtout quand on n'est pas armé.»

Victor est un moment indécis; il dit enfin au paysan, qui regardait toujours autour de lui: «Si vous ne voulez plus continuer de marcher, dites-nous au moins notre chemin; nous n'avons point de temps à perdre, car, arrivés a Samoncey, nous ne serons pas encore au but de notre voyage, puisque nous allons à la terre de M. de Bréville.

»—Comment! c'est chez M. de Bréville que vous allez?» s'écrie le villageois; puis il laisse échapper quelques éclats de rire moqueur.

«Qu'est-ce qu'il y a donc de comique là-dedans?» dit Dufour avec humeur; et il ajoute, mais de manière à n'être pas entendu: «Ce butor commence à m'échauffer les oreilles!....

»—Excusez si je ris, messieurs; mais, voyez-vous, c'est que si vous m'aviez dit plus tôt que vous alliez chez M. de Bréville, je ne vous aurais pas fait faire un chemin inutile... vous seriez arrivés à présent. Pour aller chez M. le marquis, vous n'aviez pas besoin de passer par Samoncey... ça ne fait que vous alonger....—C'est à Laon qu'on nous a indiqué ce chemin.—Oh! je connais le pays mieux que personne; j'y sommes né!... Il n'y a pas un arbre de ce bois dont je ne pourrais vous dire l'âge!... il n'y a pas un sentier que je n'ai parcouru cent fois chaque année! et quant à la maison de M. de Bréville, pardié, j'y ai été assez pour la reconnaître.... Madame la marquise me faisait travailler... elle m'employait souvent... Mais tenez, puisque vous allez là, v'là vot' chemin; il est inutile que vous veniez avec moi à Samoncey, ça vous retarderait encore. Prenez ce sentier... puis le premier à droite, puis la route qui descend, et vous y êtes... Adieu, messieurs, bon voyage...... et ne vous laissez pas voler en route... ce serait dommage.»

Sans attendre de réponse, l'homme en blouse remet sa faux sur son épaule, et disparaît en s'enfonçant dans le bois. Les deux voyageurs le regardent aller et se regardent ensuite.

«Prendrons-nous le chemin qu'il nous a indiqué? dit enfin Dufour.—Pourquoi pas?—C'est qu'il avait un drôle d'air en nous quittant..... Tu n'as pas remarqué le ton goguenard de cet homme, en nous disant: Ne vous laissez pas voler?....—Dufour, tu ne connais donc pas le paysan? ces gens-là ont presque toujours un air moqueur en parlant à des habitants de la ville: c'est là où gît tout leur esprit. Je crois que tu avais grand tort de suspecter l'honnêté de cet homme; tu vois qu'il nous a quittés sans nous traiter comme de la luzerne avec sa redoutable faux....—Oui.... je vois qu'il nous a promenés fort long-temps à travers les bois... qu'il semblait toujours attendre la rencontre de quelqu'un, et qu'enfin il nous laisse, à l'entrée de la nuit, dans une espèce de carrefour où nous risquons fort de nous perdre.—En vérité, les gens méfiants sont bien malheureux! Tu n'es cependant pas poltron, Dufour, car je t'ai vu dans l'occasion tenir tête à plus d'un adversaire.—Sans doute, et si nous étions attaqués maintenant, je me défendrais comme un lion; mais je suis persuadé que ce serait inutile... et je trouve que la prudence peut très-bien s'allier à la bravoure.—En attendant, suivons le chemin qu'on nous a indiqué, et au diable la crainte; j'aime mieux ne pas prévoir le danger que de m'inquiéter d'avance.—Et moi, j'aime mieux prévoir les choses, afin de me mettre en mesure de les éviter, s'il est possible.—Nous n'avons pas la même manière de voir, mon cher Dufour; mais je crois que la mienne doit me rendre plus heureux.—Et moi, je pense que la mienne doit me faire vivre plus long-temps.»

Tout en discourant, ces messieurs avançaient dans le chemin qu'on leur avait montré; mais telle diligence qu'ils fissent, la nuit avançait encore plus vite qu'eux. Bientôt il ne leur est plus possible de voir à quatre pas, et ils sont obligés de ralentir leur marche pour ne pas s'exposer à se heurter le visage contre les arbres; alors Dufour recommence à jurer, et Victor prend le parti de rire.

«Je l'avais bien dit! ce coquin nous a égarés!—Ce paysan est-il cause que la nuit nous empêche de trouver notre chemin!... Allons, quand tu prendras de l'humeur, en serons-nous plus vite chez Armand..... Dis-donc, Dufour.... il me semble qu'il pleut?...—Eh! mon Dieu, oui; c'est pour nous achever... Ces grosses gouttes d'eau annoncent un violent orage... et moi qui ai un chapeau neuf!... il sera perdu...—Mets-le sous ta redingote...—C'est ça, et je me promènerai en voisin... Oh! l'infernal bois.... Aie! voilà que je me cogne le nez à présent!... nous n'en sortirons donc jamais?...—Victoire! victoire, mon pauvre Dufour!...—Qu'est-ce que c'est?.....—Une lumière.... Tiens, vois-tu là-bas?....—En effet... Ah! Dieu, comme ça fait plaisir d'apercevoir une lumière quand on est égaré... J'avais souvent lu cela dans les romans,... mais je n'avais jamais été dans cette position... Pourvu que cette lumière ne soit pas produite par un feu follet... ou un ver luisant.—Oh! non, il ne fait pas assez chaud pour cela....... Avançons, car la pluie redouble.»

Les voyageurs se dirigent vers la lumière, qui ne fuit point devant eux, parce que ce n'était pas un esprit malin qui la faisait paraître, mais qu'elle éclairait tout simplement le rez-de-chaussée d'une maison située au milieu du bois.

«C'est une habitation, dit Victor.—Oui... et, autant que je puis voir, cela m'a l'air assez grand.... Pourvu qu'on veuille bien nous recevoir... Si on allait nous prendre pour des voleurs...—Que le diable t'emporte avec tes suppositions!.... Frappons toujours!»

Madeleine

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