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1 Chapitre 3

Ryan

— Pourquoi t’es aussi bien habillé ?

Je tourne la tête vers Mike qui est allongé sur son lit avec les mains derrière la tête.

— J’ai un rancard, ce soir, je réponds.

— Tu déconnes ? Avec qui ?

J’hésite une seconde à lui répondre, et puis je me gifle mentalement de l’avoir fait. Je n’ai pas honte de sortir avec Danny, donc il ne devrait pas y avoir la moindre hésitation. Malgré tout, je reste vague en lui répondant.

— Elle s’appelle Danny. Elle est en troisième, ici.

Mike ne dit rien, alors j’imagine que ça ne l’intéresse pas d’en entendre davantage. Je tends la main dans le placard et en sors un veston brun. Je ne sais pas très bien où on ira ce soir, mais puisque j’ai dit à Danny que je l’emmènerai n’importe où, je veux être prêt pour un dîner élégant si c’est ce dont elle a envie. J’hésite à porter une cravate et puis décide que non. Mes parents m’ont obligé à en porter une à tellement de cérémonies que chaque fois que je peux éviter d’en porter une, je saisis l’occasion.

— Et alors, où est-ce que tu as rencontré cette fille ?

Mike est apparemment plus intéressé que je ne le pensais. Mais c’est mon meilleur ami depuis notre entré au lycée et on partage la même chambre à la fac depuis nos débuts à Northeastern. Il n’y a vraiment rien dont je ne puisse pas parler avec lui.

— C’est la serveuse de l’autre soir, au Sally’s.

— La fille sexy avec les cheveux mauves qui a complètement rabaissé le caquet d’Angeline ?

J’ai un rire moqueur.

— Oui. C’est celle-là.

Mike laisse échapper un long et lent sifflement et secoue la tête d’un côté à l’autre comme s’il avait pitié de moi.

— Quoi ? je demande.

— Allez, mec. Elle ne fréquente pas exactement le même cercle social que nous.

Ça m’énerve, même si au fond, je sais que Mike ne veut rien dire de méchant par là.

— Qu’est-ce que ça peut foutre ?

Mes mots sortent avec plus de dureté que je n’en avais l’intention, mais je ne m’excuse pas.

Levant les mains en signe d’apaisement, il répond avec aisance.

— Moi, je m’en fous, mon vieux. Je pensais juste à ce que tes parents diraient. Je vois ta mère d’ici : Oh, chéé-rii… elle a les cheveux mauves. Est-ce qu’elle sort de prison ?

J’éclate de rire, parce que c’est exactement ce que ma mère dirait et Mike l’a imitée à la perfection. Je me renfrogne en y pensant. Mike a raison en disant que Danny serait rejetée par ma famille et mes amis uniquement à cause de son apparence. Et ça m’énerve encore plus. Et ça m’énerve d’être énervé. Je ne connais pas cette fille. Je la trouve seulement intéressante et j’ai envie de passer un peu de temps avec elle. Je n’ai pas à me mettre en colère à propos de ce que mes amis feraient ou ne feraient pas en sa présence, alors qu’ils ne feront peut-être jamais sa connaissance.

— Détends-toi. C’est juste un dîner. Ce n’est pas comme si je la ramenais à la maison chez mes parents.

— C’est ce que je pensais. Tu vas seulement essayer de la sauter, pas vrai ?

Je lance un regard acéré à Mike qui sourit de toutes ses dents.

— Non, ce n’est pas ce que j’essaie de faire. Arrête d’avoir l’esprit mal tourné, mec.

J’attrape mes clés et mon portefeuille et me prépare à sortir.

— Mais si elle décide de se jeter sur moi, je ne vais pas dire non.

Le rire de Mike me suit jusque dehors.

***

En entrant au Sally’s Diner, je me rends compte que je suis un peu nerveux. Le café-resto est plein à craquer d’une foule de dîneurs, mais j’aperçois tout de suite Danny derrière le comptoir, calculant l’addition de quelqu’un.

Elle porte toujours la même chose que tout à l’heure… un jean, un t-shirt, et des baskets. Ses cheveux sont à nouveau relevés en une queue de cheval et je me demande de quoi ils auraient l’air lâchés. Je trouve les mèches lavande, au bout, fascinantes et je mentirais si je n’admettais pas que je trouve ses piercings au visage assez sexy. Et je réalise tout à coup pourquoi elle me fascine autant. C’est parce qu’elle a l’air aussi innocente qu’un agneau, mais que les cheveux colorés et les piercings rajoutent une touche rebelle à cet extérieur si doux.

Danny lève les yeux et me voit planté là. Elle relève l’index pour me demander de lui accorder une minute, et je hoche la tête en réponse. Pour l’instant, je suis content de simplement l’observer pendant quelques minutes.

Je suis frappé par sa grâce naturelle. Elle rit avec le client qui paie son addition, et son sourire illumine littéralement la pièce. Le cuisinier derrière le comptoir de service lui dit quelque chose et elle grimace, lui jetant un torchon qu’il reçoit en plein visage. Il se moque d’elle en riant et tous les clients au comptoir rigolent et font du bruit. Elle est dans son élément, parce que c’est indiscutablement quelqu’un de sociable.

Danny enlève son tablier et le jette en-dessous du comptoir. Reprenant son sac, elle se dirige vers moi et je sens mon cœur battre plus fort. Comment diable quelqu’un qui vient de finir son service dans un café-resto graisseux peut avoir l’air aussi magnifique ?

— Salut, dit-elle. Désolée, mais j’ai dû travailler plus tard que je ne pensais. Je n’ai pas eu le temps de prendre une douche ou de me changer.

— Pas de problème. Tu veux rentrer chez toi pour pouvoir le faire ?

Elle secoue la tête.

— On ne va pas dans un endroit chic. Décontracté, c’est mieux. Même si je sens probablement la graisse à frites, en ce moment.

Je ne sais pas du tout ce qui me prend, mais je m’approche d’elle et penche la tête pour que mon nez soit juste derrière son oreille. Je prends une grande inspiration, respirant de manière outrancière pour qu’elle m’entende. Puis je lui murmure à l’oreille :

— Tu sens délicieusement bon, à mon avis.

Et c’est le cas. Son shampooing sens l’eucalyptus et la fleur d’oranger. Je suis en train de la regarder quand elle frissonne à ces mots, et je me sens comme ce putain de Tarzan, maintenant.

Reculant d’un pas, je me retourne pour ouvrir la porte et la laisser marcher devant moi. Je sors mes clés et me dirige vers la portière du côté passager de ma Range Rover noire. Mais un coup d’œil par-dessus mon épaule et je la vois marchant dans la direction opposée. Je remets mes clés dans ma poche et cours pour la rattraper.

— Belle nuit pour une promenade, je remarque.

Elle éclate de rire et ce son me réchauffe le sang. Son rire est riche et rauque, et ô combien sexy.

— Nous marchons seulement jusqu’à l’arrêt de bus. Ce soir, tu vas découvrir Boston façon Danny. Même si tu es un peu trop bien habillé pour prendre les transports en commun.

Je lui souris avec nonchalance.

— Pas de souci. Je suis partant.

Elle me sourit en retour.

— Bien. Je serais déçue si tu ne l’étais pas.

Ses mots résonnent comme un défi, mais elle n’a aucune idée de combien je peux être compétitif.

Oh, Danny, Danny. Je sais ce que tu essaies de faire et tu devrais faire un peu plus d’efforts pour être moins transparente. Je suis certain que Danny essaie de me faire peur. Si elle pense qu’un trajet en bus est effrayant, elle n’a clairement jamais eu à esquiver des défenseurs de cent kilos pour éviter qu’ils l’écrasent contre les balustrades.

— Alors, où est-ce qu’on va ? Tu as dit que j’étais trop bien habillé, mais tu vas devoir me donner un meilleur indice que ça.

Elle se contente de sourire d’un air évasif et dit :

— Tu verras.

Je dois reconnaître que maintenant, je suis encore plus curieux à son sujet qu’avant. Je m’attendais vraiment à ce qu’elle veuille que je l’emmène dans un restaurant haut de gamme. Je veux dire, c’est ce que les filles veulent, d’habitude. Et qu’elle nous fasse prendre les transports en commun plutôt que ma voiture fabuleusement belle et ridiculement couteuse me met presque sur des charbons ardents quant à savoir à quoi m’attendre.

On n’a pas l’occasion de parler beaucoup durant le trajet en bus parce qu’il est rempli de navetteurs. Mon premier trajet en bus n’a rien de déplaisant, cela dit. Le manque de sièges nous oblige à rester debout, et très proches l’un de l’autre, et Danny est collée contre mon flanc. Elle se tient à une barre de métal en face d’elle et je suis assez grand pour me tenir à une poignée au plafond sans avoir le bras tendu. Quand le bus fait une embardée ou secoue ses passagers, les douces courbes de Danny se balancent contre moi. Plusieurs fois, je lui place une main dans le dos pour l’aider à se stabiliser et elle me lance un sourire narquois, que je lui renvoie.

Finalement, Danny me fait signe qu’on a atteint notre destination et on descend avec quelques autres passagers. Il commence à faire sombre et je suis assez consterné qu’on se retrouve dans une partie de la ville plutôt sordide. Les rues sont jonchées de déchets et j’aperçois plus d’une fenêtre brisée à certains immeubles. Je veux poser la question à Danny, mais elle se dépêche de traverser la rue, et je la suis. On marche le long d’un pâté de maison et en tournant à l’angle, on tombe sur une file de gens s’étirant devant une entrée. Il doit bien y avoir une vingtaine de personnes dans la file et je suis un peu confus. Est-ce qu’on est devant une boîte de nuit ?

Danny remarque la tête que je fais et m’attrape la main. Elle me guide vers l’avant de la file, devant la porte d’entrée, tout en saluant quelques personnes. Et puis je vois la pancarte au-dessus de la porte… Helping Hands - Refuge. Je regarde à nouveau les gens formant la file et à présent, je vois clairement ce qu’ils sont… Des sans-abris.

Ils ont des profils variés… noirs, blancs, asiatiques, jeunes, vieux, hommes et femmes. La seule chose qu’ils aient en commun, c’est qu’ils sont tous pauvres… très, très pauvres, apparemment. Certains sont vêtus de haillons tandis que d’autres sont couverts de crasse de la tête aux pieds. J’ai conscience rester bouche bée devant ces gens démoralisés, mais je ne peux pas m’en empêcher. Finalement, je tourne lentement la tête vers Danny, qui m’observe comme si elle s’attendait à me voir détaler.

— Je fais du bénévolat ici, plusieurs fois par semaine. C’est ma soirée, ce soir, et j’ai pensé que tu pourrais donner un coup de main.

Je fronce les sourcils.

— Et c’est là que tu veux que je t’emmène dîner ? Pas très romantique.

Elle ne dit rien, mais continue à m’observer avec attention.

Je soupire et lui prends la main, me dirigeant vers la porte d’entrée.

— Eh bien, au travail, alors.

Je suis ravi quand Danny me récompense avec son éblouissant sourire à fossettes tandis que je l’emmène à l’intérieur.

Elle me guide à travers la réception, puis au bas d’un escalier qui descend vers la cave. Elle m’indique une porte qui mène à une aile du bâtiment dont elle m’explique qu’elle accueille des résidents permanents. Quand je lui pose la question à propos des personnes qui font la file dehors, elle me répond qu’ils viennent uniquement pour manger, mais qu’ils vivent dans les rues.

Danny ouvre une double porte et on se retrouve dans un grand réfectoire. Il y a des tables pliantes pour huit personnes et des chaises en métal autour de chaque table. Je trouve bizarre que chaque table ait un petit vase posé dessus avec un petit bouquet de fleurs en plastique dedans. La plupart des sièges sont occupés et je vois que lorsqu’une personne a fini son repas et s’en va, des bénévoles laissent entrer d’autres personnes.

Je suis Danny autour du périmètre de la pièce jusqu’à l’arrière où se trouve un comptoir de service qui révèle une grande cuisine cachée derrière. Une porte battante sur le côté permet aux gens de rentrer et de sortir entre la cuisine et le réfectoire.

— C’est à cette heure-ci que tu arrives, Danny ? J’en ai plein le cul de préparer la nourriture pour demain.

— Pas de panique, Maverick. Je suis là, maintenant, et j’ai amené de l’aide. Mais nous nous attendons à un bon repas quand nous aurons terminé.

Danny me regarde et je dis silencieusement Maverick ?

Elle se penche et me chuchote :

— Top Gun est son film préféré.

Je regarde en direction de Maverick. Il est asiatique et extrêmement petit. Il porte un tablier par-dessus ses vêtements qui est couvert d’éclaboussures de nourriture, et il mélange quelque chose dans une grande casserole sur la cuisinière. Sur la tête, il porte un chapeau avec l’inscription Honey Badger Don’t Care.

Danny ouvre un tiroir et en retire deux tabliers, en lançant un vers moi.

— Mav, voici Ryan. C’est mon co-pilote, ce soir.

Je déteste avoir à l’admettre, mais je n’aime pas la référence à Top Gun. Le co-pilote est supposé aider l’autre personne à s’envoyer en l’air, mais plutôt crever que d’aider Danny à faire ça.

Maverick me regarde, remarquant mes vêtements.

— Il est habillé assez chic. Tu es sûre qu’il peut se salir les mains ?

Avant que Danny puisse répondre, je dis :

— Je suis sûr que je peux me salir les mains. Dites-moi quoi faire.

Mav se contente de grogner après moi, mais m’indique une pile de pommes de terre sur le plan de travail. J’enlève ma veste et la pends sur le dossier d’une chaise, retroussant les manches de ma chemise. Après avoir passé un tablier, je prends une patate et commence à l’éplucher. Danny vient se placer à côté de moi pour m’aider. On travaille dans un silence confortable, principalement parce que Maverick est là et parce que je suis sûr qu’il me découperait en rondelles si on n’est pas assez rapide à la tâche.

Quand il quitte la cuisine en emportant la grande casserole qui était sur la cuisinière derrière lui, Danny s’incline vers moi et me donne un petit coup d’épaule.

— Alors, comment tu t’en sors ?

— Fantastique. J’adore éplucher les patates. C’est une des activités que je préfère au monde.

— Première fois, hein ?

Je ris.

— Oui. Mais j’aime toujours essayer de nouvelles choses, comme ça je peux les rayer de ma liste de choses à faire avant de mourir.

On se tait pendant une minute, puis je dis :

— Tu sais, Danny… m’amener ici ne prouvera rien.

Elle me regarde et son visage montre combien elle est surprise que j’aie deviné ses intentions. Elle commence à bégayer quelque chose à propos de ne pas essayer de prouver quoi que ce soit, mais j’essuie mes mains sur un torchon et pose un doigt sur ses lèvres. Je me penche un peu et lui murmure doucement :

— Ne nie pas. Ça n’est pas digne de toi.

Elle a les yeux ronds et confus, pendant environ trois secondes, puis elle éclate de rire.

— Je suppose que je ne vais pas pouvoir te rouler souvent.

— Je vois clair dans ton jeu, je la rassure.

On échange des banalités tout en travaillant, parce qu’il n’y a aucune occasion d’entamer une conversation plus profonde. Je découvre tout de même que Danny est bénévole ici plusieurs fois par semaine depuis qu’elle a seize ans, ce qui l’amène également à confirmer qu’elle est native de Boston, comme moi. Maverick s’affaire entre la cuisine et la salle à manger, ramenant les casseroles sales et les plats de service. Même si les résidents et les dîneurs venant de la rue lavent, en fait, eux-mêmes leurs assiettes et leurs couverts à un poste de lavage dans le réfectoire, l’agréable corvée de récurer les casseroles nous incombe à Danny et à moi.

Après deux heures à éplucher les pommes de terre, récurer les casseroles et à sortir les poubelles, je me rends compte que mon dos est un peu endolori. Ça me surprend parce que je suis plutôt sportif. Vous ne pouvez pas jouer au hockey à la NCAA et ne pas être en top forme. Je ne sais pas comment Danny y parvient deux fois par semaine, et je me surprends à éprouver du respect pour une fille pour quelque chose que je n’avais jamais vraiment rencontrée chez le sexe opposé auparavant.

Le dévouement.

C’est un job pourri et elle, elle est bénévole pour le faire. Ça me donne une leçon d’humilité.

Je passe un dernier coup de torchon sur le plan de travail et jette un œil vers Danny. Elle me tend mon veston.

— Tu t’es bien débrouillé, ce soir. Et si tu me laissais te payer une bière ?

Je pose le chiffon dans l’évier et enlève mon tablier. Lui prenant ma veste, je la pose sur mon bras. Je tends l’autre vers Danny et elle passe son bras au creux de mon coude.

Je penche la tête pour lui sourire, parce qu’elle est sacrément adorable, en ce moment, son bras accroché au mien.

— Je t’ai invitée à sortir, alors la bière est pour moi.

Hors Jeu

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