Читать книгу Cymbeline - Уильям Шекспир, William Szekspir, the Simon Studio - Страница 7
ACTE PREMIER
SCÈNE V
ОглавлениеGrande-Bretagne. – Appartement dans le palais de Cymbeline
LA REINE paraît avec ses DAMES ET CORNÉLIUS tenant une fiole
LA REINE, à ses femmes. – Tandis que larosée est encore sur la terre, allez cueillir ces fleurs; hâtez-vous. Qui de vous en a la liste?
UNE DES FEMMES. – Moi, madame.
LA REINE. – Allez. (Les dames sortent.) Maintenant, monsieur le docteur, avez-vous apporté ces drogues?
CORNÉLIUS. – Sous le bon plaisir de Votre Majesté, les voici. (Il présente une petite boîte.) Mais si Votre Majesté me le permet, et j'espère qu'elle ne s'en offensera pas, ma conscience me force à vous demander pour quel usage vous avez exigé de moi ces potions empoisonnées, qui amènent une mort languissante, et sont mortelles quoique lentes.
LA REINE. – Je m'étonne, docteur, que vous me fassiez une pareille question. N'ai-je pas été longtemps votre disciple? Ne m'avez-vous pas enseigné l'art de composer des parfums, de distiller, de conserver les fruits? Si bien que notre grand roi lui-même me fait souvent la cour pour mes confitures? En étant arrivée là, serez-vous étonné, à moins que vous ne me supposiez une âme infernale, que je cherche à perfectionner ma science par de nouvelles expériences? Je veux faire l'essai de ces compositions sur de vils animaux qui ne valent pas la peine d'être pendus; jamais sur aucune créature humaine, afin de connaître leur force, d'opposer des antidotes à leur activité, et par là d'apprendre leurs diverses vertus et leurs effets.
CORNÉLIUS. – Votre Majesté, par ces expériences, ne fera que s'endurcir le coeur; d'ailleurs on ne voit point ces résultats sans dégoût ni sans danger.
LA REINE. – Oh! soyez tranquille. – (Entre Pisanio.) (A part.) Voici un flatteur de valet; c'est sur lui que je ferai mon premier essai; il appartient à son maître, et est l'ennemi de mon fils… Eh bien! Pisanio? (A Cornélius.) Docteur, votre office auprès de moi est fini pour le moment; allez votre chemin.
CORNÉLIUS, s'éloignant et à part. – Vous m'êtes suspecte, madame; mais vous ne ferez aucun mal.
LA REINE, à Pisanio. – Écoute, un mot.
CORNÉLIUS, à part. – Je n'aime point cette femme… Elle croit tenir des poisons lents et étranges; je connais bien son âme, je ne confierai pas à une personne aussi perverse des ingrédients d'une nature aussi infernale; ceux qu'elle possède assoupiront et alourdiront un moment les sens; peut-être ses essais commenceront-ils par des chiens et des chats, pour monter ensuite plus haut; mais il n'y a aucun danger dans la mort apparente qu'elle donnera; elle ne fera que suspendre pour un temps les esprits, qui renaîtront plus actifs. Elle est trompée par ces faux effets; et moi, en la trompant ainsi, je n'en suis que plus fidèle.
LA REINE. – Docteur, je n'ai plus besoin de votre présence jusqu'à ce que je vous fasse rappeler.
CORNÉLIUS. – Je prends humblement congé de vous.
(Il se retire.)
LA REINE. – Elle pleure donc toujours, dis-tu? Penses-tu qu'avec le temps ses larmes ne s'arrêteront pas, pour laisser entrer les conseils de la raison là où règne maintenant la folie? Travaille à cela: et quand tu viendras me dire qu'elle aime mon fils, je te dirai à l'instant même que tu es aussi grand que ton maître; plus grand que lui; car sa fortune est gisante et sans voix, et sa renommée est à l'agonie: il ne peut revenir ici, ni demeurer où il est… En changeant d'existence, il ne fera que changer de misère; et chaque jour en arrivant vient ruiner un jour de sa vie. Quel est ton espoir, en t'appuyant sur une colonne qui penche et qu'il sera impossible de relever? – sur un homme qui n'a pas même assez d'amis pour l'étayer? (La reine laisse tomber une boîte: Pisanio la ramasse.) Tu ne connais pas ce que tu tiens là; reçois-le de moi pour tes services, c'est un élixir de ma composition: il a déjà arraché cinq fois le roi à la mort: je ne connais pas de cordial plus efficace. Non, je te prie, prends-le, comme un gage des faveurs plus grandes que je te destine: – fais sentir à ta maîtresse quelle est sa position; fais-le comme de toi-même: songe quelle chance t'offre la fortune, songe seulement que tu conserves toujours ta maîtresse, et de plus tu gagnes mon fils, qui se souviendra de toi… J'intéresserai le roi à ton avancement, quoi que tu puisses désirer; et moi-même alors, moi surtout qui t'aurai mis sur la voie de mériter les grâces, je m'engage à récompenser richement ton mérite. Appelle mes femmes: songe à mes paroles. (Pisanio sort.) Un valet fin et fidèle qu'on ne peut ébranler: l'agent de son maître auprès d'elle, et qui lui rappelle sans cesse de conserver sa main et sa foi à son seigneur. Je lui ai fait là un don qui, s'il en fait usage, enlèvera à la belle son émissaire auprès de son doux ami; et elle-même, dans la suite, si elle ne plie pas son humeur, peut être sûre d'en goûter aussi. (Pisanio reparaît avec les dames, qui rapportent des paniers de fleurs.) Fort bien, fort bien: portez dans mon cabinet ces violettes, ces primevères, ces pervenches: adieu, Pisanio; songe à ce que je t'ai dit.
(La reine sort suivie de ses femmes.)
PISANIO seul. – J'y songerai, mais quand je deviendrai infidèle à mon bon maître, je m'étoufferai de mes propres mains: c'est là tout ce que je ferai pour toi.
(Il sort.)