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ОглавлениеALEKSEJ
Quarante-huit heures s’étaient écoulées depuis cet épisode defolie qui avait eu lieu chez moi.
Des heures passées à pester contre moi-même pour ne pas m’êtrerendu compte de la duplicité de Danielle Stenton, alias KendraPalmer.
Comment avais-je pu être aussi naïf ?
Comment avais-je pu ne pas m’apercevoir de sa véritable nature?
J’avais bien eu quelques soupçons !
Était-il possible que la beauté de cette femme m’ait ébloui aupoint d’en perdre la tête jusqu’à devenir stupide et aveugle ?
Moi qui m’étais toujours flatté d’avoir un sixième sensinfaillible pour repérer les escrocs et les menteurs.
Mon Dieu, je ne pouvais pas y croire : j’avais eu une tellepersonne à mes côtés pendant huit longs mois sans m’enapercevoir.
En vérité, je m’étais laissé prendre par cette envie furieuse decoucher avec elle et de faire plier son caractère rebelle etarrogant !
J’avais été tellement aveuglé par mon désir et ses manièresfuyantes et provocantes à la fois de rester auprès de moi, que j’enavais perdu la raison.
Je me doutais bien que cette proximité pouvait devenirdangereuse, mais Kendra était toujours si excitante que je nepouvais que la garder à mes côtés.
Je me répétais sans cesse que je n’avais été qu’un idiot car,dès le début, j’avais perçu quelque chose de retors en elle.
Dès notre première rencontre, alors qu’elle s’était jetée devantles roues de ma voiture tandis que le chauffeur sortait lentementdu parking, j’avais compris que cet accident était arrangé.
J’étais descendu du véhicule avec la furieuse envie de fairepayer sa plaisanterie à la victime, prêt à la menacer si elle avaitcommencé à parler de porter plainte.
Quand subitement je l’avais vue.
Elle. Par terre. Le genou endolori, heurté par la voiture, et lebras éraflé pour se protéger le visage en tombant surl’asphalte.
Malgré la situation, j’avais été fasciné par son corps à couperle souffle, enveloppé dans une robe noire et très courte qui nelaissait pas de place à l’imagination.
Mon chauffeur l’avait aidée à se relever pendant qu’ellel’insultait pour l’avoir renversée.
Puis, m’approchant d’elle, je lui avais demandé si elle allaitbien.
En moins d’un instant je m’étais retrouvé prisonnier de ses yeuxgris magnifiques, chargés de menaces comme un ciel couvertannonçant l’orage.
Son visage délicat et ses longs cheveux châtains qui couvraiententièrement son dos découvert avaient attisé mon désir de latoucher, qu’elle fût mienne.
Pour ces raisons, je lui avais proposé de la conduire àl’hôpital ; mais elle s’était aussitôt raidie et effrayée,affirmant qu’elle allait parfaitement bien, même si elle avait dumal à marcher. Je saisis la balle au bond et l’invitai dans l’hôteloù je séjournais.
Elle avait accepté, mais ce que je croyais être le prélude d’unenuit de folies au lit, s’était révélé exactement l’opposé.
Elle avait fait quelques difficultés à me donner son nom,Danielle Stenton, et lorsque je m’étais aventuré un peu, ellem’avait arrêté immédiatement, disant qu’elle n’avait pas accepté deme suivre pour se faire conduire au lit mais simplement pour avoirdes soins, mettre de la glace sur son genou endolori et bénéficierd’un lit chaud où passer la nuit, seule.
Je n’étais pas parvenu à obtenir d’elle la raison pour laquelleune femme aussi avenante pouvait avoir besoin d’un endroit oùpasser la nuit, mais j’avais compris tout de suite que cet accidentn’était qu’un prétexte pour me soutirer de l’argent.
Le lendemain, le fait qu’elle me demandât un prêt ne m’avait passurpris.
J’avais naturellement refusé, mais elle m’avait surpris enproposant de travailler pour moi.
Ce n’était pas une demande de sa part et, de mon côté, je nepouvais pas refuser.
Une faiblesse que j’allais payer très cher étant donné queKendra avait découvert beaucoup de choses sur mon compte. En plus,l’avoir conduite chez moi était l’apogée de cette histoiredélirante car c’était là où je conservais mes biens et mes affairesles plus importantes.
En cet instant précis je compris que, jouant sur les sentiments,Kendra était parvenue à obtenir ce dont elle avait besoin : entrerdans la villa et profiter de la liberté que je lui accordais pourme trahir et employer tout ce qu’elle pouvait amasser contremoi.
Et tout ça pour tirer un coup !
Quel idiot !
J’étais encore en train de ressasser mes erreurs, lorsque Kendraouvrit les yeux.
Après que les médecins m’eussent annoncé son réveil imminent, jem’étais précipité dans la clinique privée pour la confronter et luifaire payer les mensonges et les tromperies qu’elle m’avait faitssubir.
Au point où j’en étais, j’avais pris un revolver avec moi parceque, après la discussion animée avec Ryan concernant la véritableidentité de cette femme, je ne lui faisais plus confiance et jen’allais pas hésiter à me venger.
Je m’assis calmement sur le rebord du lit, à côté d’elle,attendant qu’elle fût totalement éveillée, les médicaments qu’onlui donnait ayant la faculté de l’étourdir.
Malgré l’hématome violet sur la pommette droite et la pâleurmortelle de son visage, elle était toujours très belle, d’unebeauté qui dorénavant m’indifférait, me répugnait même.
J’attendis que ses yeux se posent sur moi.
Son regard argenté paraissait noyé dans le vide à cause desantidouleurs, mais ses yeux s’écarquillèrent en se posant surmoi.
Je lui souris avec satisfaction et m’approchai lentement de sonvisage, savourant cette étincelle de peur et de surprise que jelisais dans ses yeux.
“Eh bien, petite menteuse, es-tu prête à payer les conséquencesde tes mensonges ?”, chuchotai-je à voix basse.
Je la vis entrouvrir se lèvres charnues et parfaitementdécoupées, mais aucun son n’en sortit.
“Je considère que ton silence équivaut à une approbation”,décidai-je, en saisissant le pistolet au fond de ma poche.
“Qui es-tu ?”, me demanda-t-elle faiblement, alors que jem’apprêtais à saisir l’arme.
J’éclatai de rire, un rire guttural et froid, presque unemenace.
J’aurais voulu la prendre par le cou et la jeter au bas du lit,tant j’étais furieux.
“Sérieusement, tu veux encore jouer avec moi ? En es-tu si sûre?”, lançai-je, décidé à ne pas me faire rouler de nouveau.
“Je… Je ne sais pas… Je”, balbutia-t-elle mal à l’aise,regardant autour d’elle d’un air éperdu.
“Fais attention à ce que tu dis Kendra, je ne te donnerai pasune seconde chance. Me suis-je bien fait comprendre ?”, dis-je enl’arrêtant, mais ma menace sembla déclencher la réactioninverse.
“Qui est Kendra ? ", demanda-t-elle, commençant à trembler et às’agiter.
Elle semblait terrorisée.
“Où suis-je ?”, balbutia-t-elle, essayant de se relever pours’asseoir ; mais elle ne fit qu’aggraver la douleur, ce qui la fitgémir. “J’ai mal !”, dit-elle dans un souffle, se portant la main àla poitrine, à l’endroit où la balle l’avait frappée. Dans unmurmure elle demanda : “Que m’est-il arrivé ?”, engourdie etsouffrante, fixant son bras bandé et touchant les bleus sur sonvisage et ceux de ses jambes qu’elle dégagea des couvertures.
Cela ne dura qu’un instant. Subitement, tout ce calme apparentdisparut, laissant la place à la peur de Kendra qui se débattitcomme un animal en cage.
Tremblante et ébranlée, elle arracha la perfusion et essaya dese lever.
“Inutile de s’enfuir. ” La saisissant par les bras, je laplaquai sur le lit au moment où elle tentait de se relever.
Il fut assez difficile de parvenir à l’immobiliser, tant elle sedémenait, de manière frénétique et désordonnée, à cause de ladouleur.
Essayant de se mettre debout, malgré tout, en s’appuyant sur lesjambes, je vis qu’elle titubait.
Elle était pâle comme un linge et je dus la saisir à la taillepour qu’elle ne tombe pas mal au sol.
Kendra se laissa tomber sur moi.
“La tête me tourne”, murmura-t-elle en passant ses bras autourde mon cou.
Je la soulevai et elle se serra fort contre moi, comme si ellecraignait de choir dans le vide.
Je la reconduisis au lit et, lentement, ses mains se détachèrentde mon cou, me glissant sur les épaules et le long de mes bras.
Si elle n’avait pas été aussi bouleversée et tremblante,j’aurais pu croire qu’elle me provoquait afin de me séduire.
Son touche léger et délicat avait quelque chose d’intime et detendre, mais je ne me laissai pas émoustiller.
J’allais me retirer lorsque sa main droite s’empara de lamienne.
Son tremblement cessa instantanément.
Je la fixai.
De son côté elle m’examinait. Son expression était perturbéemais ses yeux me regardaient fixement comme si elle espérait ytrouver une réponse.
“Et maintenant, te souviens-tu de moi ?”, demandai-je.
De nouveau confronté à son silence, je me détachai d’elle mais,à peine ma main abandonna la sienne, Kendra, effrayée, sursauta etse souleva brusquement pour la reprendre.
Un geste qui lui engendra une nouvelle douleur à lapoitrine.
La douleur la fit hurler et cela l’empêcha de se pencherdavantage pour m’atteindre.
***
KENDRA
J’avais la tête qui palpitait sourdement et je ne comprenaisrien.
Mon cerveau était vide de tout souvenir et ombre de raison, iln’était plus que douleur et confusion.
Cet homme devant moi m’effrayait mais, en même temps, il merassurait un peu. Était-ce dû au fait qu’il semblait me connaître ?Mais son regard et son attitude, sévères et implacables,résonnaient comme une sirène d’alarme pour moi.
Une partie de moi-même voulait s’enfuir tandis que l’autre mesuppliait de rester et de lui demander de l’aide.
Je ne savais pas quoi faire et, quand une nouvelle vague de peuret de douleur me submergea, ce ne fut qu’entre ses bras que jeperçus quelque chose de vaguement familier.
Peut-être était-ce le parfum de sa peau ? Une essence de bois,fraîche et chargée d’arômes. Intense et virile. Elle me rappelaitconfusément quelque chose… mais quoi ?
Et ce visage…
Je l’avais déjà vu, mais tout était si confus dans mon esprit,du moins jusqu’à ce que mon regard fût attiré par le sien.
Je percevais quelque chose dans ces yeux d’un noir d’ébène. À lafois quelque chose de sauvage et de maîtrisé. Puissant etmagnétique mais également élégant, à l’image des habits qu’ilportait.
Tout de suite, j’avais ressenti une certaine timidité face à ceregard qui me fixait, comme si j’avais l’habitude de reculer pouréviter de déchaîner son côté agressif, qui semblait prêt à jaillirhors de lui pour détruire quiconque se fût trouvé dans lesparages.
Cette voix enfin… Oui, je la connaissais. J’en étais sûre.C’était cette voix qui m’avait tant déconcertée parce que j’étaissûre de l’avoir déjà entendue ; mais c’était ce ton grave, rude etavec un accent étranger, qui m’avait rendue nerveuse.
Même ses paroles m’avaient effrayée.
J’avais recherché leur signification, la raison pour laquelle ilétait autant en colère contre moi, mais je ne l’avais pastrouvée.
Cette pensée m’avait fait perdre mon calme et j’étais prête àfuir ce danger que je sentais planer au-dessus de moi, telle uneépée de Damoclès.
J’étais terrorisée et toujours plus affaiblie, tant et si bienque mes jambes ne me portaient plus, mais, prise de vertige,j’avais pu reprendre mon souffle entre ses bras, rassurée parl’odeur de sa peau.
Toutefois, il m’avait laissée et, tandis que mes mainsparcouraient ses bras jusqu’à la pointe de ses doigts, je sentis àl’improviste la panique me submerger et m’étouffer.
Quand je vis sa main se séparer de la mienne, je fus envahied’une peur inexplicable.
Je me voyais de l’extérieur, comme une spectatrice, pendant quemon corps tendait vers ce qui semblait être la seule issue avant detomber définitivement dans le néant.
Je bondis en avant quand, à l’improviste, une douleur à lapoitrine, un peu en dessous de l’épaule gauche, me transperça commesi on me poignardait.
Cela ne dura qu’un bref moment et, l’instant d’après, le monderéel s’obscurcit autour de moi.
Je me sentis déconnectée de la réalité, comme si j’avais étéparachutée dans un autre univers.
J’étais au sommet d’un grand escalier, ample et élégant.
La main de cet homme était devant moi.
Elle était tendue vers moi et je pouvais sentir mon corps tendrevers elle, mais la douleur dans ma poitrine revint encore plusforte qu’auparavant.
J’eus la respiration bloquée dans la gorge pendant que mon corpstombait en arrière, basculant dans le vide.
En vain je m’efforçai de contraster cette force invisible quim’entraînait dans le gouffre, sans y parvenir.
Devant moi il n’y avait que cet homme penché en avant pour merattraper.
Je vis sa main tendue vers moi mais je ne pus l’effleurer qu’unefraction de seconde.
Je levai brièvement les yeux avant de tomber.
Mon regard croisa celui de cet homme.
J’y perçus une ombre de peur et d’incrédulité.
Je murmurai : “Aleksej”, à la recherche désespérée d’aide, alorsque sa main s’éloignait de plus en plus et la douleur grandissaitjusqu’à devenir intolérable.
Puis tout disparut dans le néant.
Une obscurité seulement déchirée par mes hurlements mêlés à ceuxde cet homme qui appelait un médecin.
Mon cœur battait à tout rompre et, le corps secoué de peur, jerouvris les yeux pour m’apercevoir que je pleurais.
J’étais totalement recroquevillée sur moi-même, telle unefeuille morte avant qu’elle finisse à la poubelle.
Je clignai les yeux pour me libérer des larmes et je la visenfin : la main de cet homme était entre les miennes.
Je la serrais fort au point de lui enfoncer les ongles dans lapeau.
Cette image fut comme un doux réveil pour moi.
“J’y suis parvenue… Je t’ai attrapé…”, balbutiai-je, secouéeà la fois de pleurs de soulagement et de ce qui paraissait être unehallucination étant donné que j’étais revenue dans la chambreblanche où je m’étais réveillée.
“Que dis-tu ?’, me demanda-t-il confus, la respirationsaccadée.
“Je… J’allais tomber. Aleksej…”, m’efforçai-je d’expliquer,sans toutefois parvenir à l’exprimer. J’étais anéantie au point dene plus être capable de construire une phrase structurée.
“Tu te rappelles de moi maintenant”, siffla-t-il avec une nuancede sarcasme dans la voix qui me perturba.
Aleksej.
Oui, je me souvenais de lui, même s’il ne s’agissait que d’unnom et d’un corps physique sans aucune identité pour le moment.
Une petite lueur d’espoir et les souvenirs d’un passé lointainet encore confus.
J’ébauchai un sourire de soulagement.
A ce moment-là, le médecin arriva, accompagné de deuxinfirmières.
Aussitôt j’entendis l’homme se fâcher et crier quelque chose. Ilme fallut du temps pour comprendre qu’il s’exprimait dans une autrelangue.
Une langue que, petit à petit, je me rappelais avoir connue.
Ils parlaient de choc post-traumatique, d’hémorragie cérébraleen cours de résorption, d’anxiolytiques, tandis que l’homme à moncôté était furieux de n’avoir pas été informé de ce qui venaitd’arriver : il hurlait qu’il les payait suffisamment pour obtenirdes réponses à propos de ma santé et pour me guérir.
“Nous ne savons pas le temps que cela prendra mais,certainement, pas moins d’une semaine”, tenta de dire le médecindans la même langue.
“Une semaine ?!”, se fâcha l’homme.
“La laisser sortir plus tôt serait risqué. Il faut du temps pourque la micro-fracture au crâne cicatrise et l’hémorragie n’est pasencore totalement résorbée. Vu les circonstances, l’hospitalisationne peut être inférieure à deux semaines.”
“Je ne veux pas rester ici !”, dis-je, me mêlant de laconversation, serrant contre moi cette main que je ne voulais plusquitter.
“Tu parles également russe… Comment se fait-il que la chose neme surprenne pas ?”, siffla nerveusement l’homme, et il m’adressaun regard si tranchant que j’en eus le souffle coupé.
Tirant d’un coup sec, il dégagea sa main de mon étreinte.
“Non…”, soufflai-je faiblement, comme s’il n’y avait plusd’air dans mes poumons.
“Gardez-la aussi longtemps que vous voulez, mais je veux quecette mascarade finisse”, gronda l’homme et, se levant de mon lit,il se dirigea vers la porte. “Quant à toi, Kendra, tu as jusqu’àdemain pour… recouvrer la mémoire. Il y a belle lurette que larécréation est terminée.”
“Aleksej”, murmurai-je, angoissée à nouveau. Mais il s’en alla,me laissant livrée à moi-même et à ces médecins qui m’auscultèrentimmédiatement et me noyèrent de questions.
Je m’effrayai parce que, au fil des questions qu’ils meposaient, la conscience d’avoir un gros trou noir dans le cerveause faisait jour.
La question qui me tourmentait était mon identité : qui suis-je?
Aleksej était la dernière chose dont j’avais conservé unsouvenir.
Il était l’unique point d’appui pour m’éviter de retomber dansl’angoisse.
Je me demandai qui j’étais et je me rappelai qu’il m’avaitappelée Kendra, mais ce nom ne me disait rien.
Je demandai plusieurs fois des nouvelles d’Aleksej auxinfirmières, mais elles donnaient l’impression de ne pasm’écouter.
Je sentis la panique monter en moi mais, avant que je puisseréagir et courir vers la seule personne dont je me souvenais, lemédecin me fit une injection et je m’endormis peu après.