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ACTE PREMIER
SCENE II

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LES MEMES, BLOUNT.

JOLLIVET.

Je parlais précisément de vous, monsieur Blount!

BLOUNT.

Oh! c'était une grande honneur que vous faisiez…

JOLLIVET.

Mais non, mais non!

BLOUNT.

Que vous faisiez à vous-même!

JOLLIVET, riant. Merci! Il est charmant. Avouez, monsieur Blount, que si vous avez, comme je n'en doute pas, un excellent coeur, l'écorce est furieusement rude!

BLOUNT. Mister Jollivet, quand une bonne reporter anglaise quittait son pétrie, il devait emporter beaucoup de guinées, de bons yeux, de bons oreilles, une bonne estomac, et laisser son coeur dans son fémille!

JOLLIVET.

Et c'est ainsi que vous voyagez, monsieur Blount?

BLOUNT.

Yes!.. si vous permettez…

JOLLIVET.

Sans la moindre sympathie pour un confrère d'outre-Manche?

BLOUNT. Si vous permettez, mister Jollivet!.. Et si vous permettez pas… ce était tout à fait la même chose!

JOLLIVET.

Vous êtes admirable de franchise et de bonhomie!

(Musique au dehors.)

LE GENERAL. Si je ne me trompe, messieurs, ces Tsiganes qui ont demandé à se faire entendre au bal du gouverneur, vont commencer leur concert. Je vous engage à écouter cela! C'est fort curieux!

JOLLIVET.

Certainement, certainement, général…

(Le général se dirige vers le salon et les invités se rapprochent de la porte. Blount et Jollivet restent en scène.)

JOLLIVET, s'asseyant. Ma foi, il fait trop chaud par là, je reste ici. (Blount s'assied de l'autre côté, tire son carnet et se met à écrire.) Permettez-moi, monsieur Blount, de risquer une phrase toute française! "Cette petite fête est vraiment charmante."

BLOUNT, froidement. J'avais déjà télégraphié: "splendide," aux lecteurs du Morning-Post.

JOLLIVET. Très bien. Mais, au milieu de cette splendeur, il y a un point noir. On parle tout bas d'un soulèvement tartare qui menace les provinces sibériennes!.. Aussi ai-je cru devoir écrire à ma cousine…

BLOUNT, froidement. Cousine… Ah!.. c'est avec son cousine… que M. Jollivet correspondait?

JOLLIVET. Oui, monsieur Blount, oui!.. Vous correspondez avec votre journal, moi avec ma cousine Madeleine! C'est plus galant! Or, elle aime à être informée vite et bien, ma cousine! J'ai donc cru devoir lui marquer que, pendant cette fête, une sorte de nuage avait obscurci le front du gouverneur!..

BLOUNT.

Il avait une front rayonnante, au contraire!

JOLLIVET, riant. Et vous l'avez fait rayonner dans les colonnes du Morning-Post?

BLOUNT. Ce que je télégraphie intéresse mon journal et moi, seulement, mister Jollivet.

JOLLIVET. Votre journal et vous seulement, monsieur Blount. Eh bien, mais c'est avouer alors que cela n'intéresse guère vos lecteurs!

BLOUNT, furieux.

Mister Jollivet!

JOLLIVET souriant.

Monsieur Blount!

BLOUNT.

Vous moquez toujours de moi, et je permettais pas, entendez-vous…

Je permettais pas!

JOLLIVET.

Mais non… mais non!..

Michel Strogoff

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