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PRÉFACE.

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Ce livre, qui a été, on peut le dire, improvisé, est une revendication en faveur de Bruxelles d’une des plus éclatantes manifestations de l’art associé à l’industrie.

La Belgique n’a pas seulement brillé à presque toutes les époques par ses artistes, elle a produit aussi un grand nombre d’industriels de mérite; mais, en aucun genre de travail, on peut l’affirmer, elle n’a réalisé plus de merveilles que dans la fabrication des tapisseries historiées. Bruxelles surtout a joui sous ce rapport, pendant quatre siècles, du XVe au XVIIIe, d’une renommée exceptionnelle. Cette industrie disparut enfin, non comme un astre qui s’éteint graduellement, mais comme le soleil se couche, dans tout son éclat, dans toute sa magnificence. Il y a cent cinquante ans, Pierre Vanden Hecke; Urbain Leyniers, les Vander Borght se maintenaient, sans défaillance, au rang auquel leurs devanciers s’étaient élevés. Leur habileté ne déclina pas, mais la mode, ce tyran capricieux, changea d’une manière radicale les conditions d’ameublement.

L’œuvre des fabricants bruxellois, étudiée dans son ensemble, constitue un immense poëme qu’alimentent tour à tour l’histoire religieuse et l’histoire profane, la mythologie comme l’Ancien et le Nouveau Testament, les légendes des saints aussi bien que les créations des poëtes et des romanciers, les hauts faits des grands hommes de l’antiquité, du moyen âge et des temps modernes. Non contents de s’adresser sans relâche à ces sources inépuisables, ils ont, en vrais Flamands, essayé de reproduire la nature et y ont réussi. Qui louera dignement la vérité de leurs paysages, le moelleux de leurs lointains, le charme exquis de ces guirlandes de fleurs et de fruits qui composent souvent le motif principal de leurs bordures?

Le grand art, il est vrai, ne dédaignait pas de s’associer à leurs travaux, et l’histoire de la fabrication des tapisseries bruxelloises s’enroule sans cesse autour de celle de la peinture. D’abord on rencontre Vander Weyden, puis Van Orley, Coxie, Jules Romain, et leur maître à tous, Raphaël. Plus tard, Rubens met son immense talent au service de nos tapissiers, Teniers attache son nom à un genre de tentures qui prend de son temps une importance nouvelle, et toute une école, formée surtout de peintres de Bruxelles, s’occupe constamment de composer des cartons.

Et que d’essais tentés, que de sacrifices supportés dans l’intérêt de cette industrie sans égale? Au XVIe siècle, les Dermoyen envoient à leurs frais l’architecte Coecke arracher aux artisans orientaux le secret de leurs procédés de teinture; au XVIIe, quand Daniel Leyniers s’est placé au premier rang des teinturiers de l’Europe, sa famille, pendant plus d’un siècle et tout en continuant à cultiver l’art de la tapisserie, perfectionne de génération en génération les moyens de produire et d’employer les couleurs.

A ces efforts persévérants, le monde occidental répond par une admiration qui ne se lasse pas. Partout on attire nos industriels et on les emploie, comme aux Gobelins, à créer des établissements rivaux. Léon X, François Ier, Mazarin, cent autres personnages illustres, se disputent à prix d’or nos tentures. Quand celles que Raphaël avait dessinées pour le Vatican arrivent à Rome, la cour papale tressaille: «De l’aveu » de tous», dit Paris de Grassis, «rien de plus beau n’existe » dans l’univers.» — «Ce travail,» ajoute de son côté Vasari, «semble l’effet d’un art surnaturel plutôt que de l’industrie » humaine.» Lorsque Mazarin sent ses forces s’épuiser, en voyant arriver son confident Brienne, il jette un regard sur ses galeries ornées de tapisseries et s’écrie: «Il faut » quitter tout cela!»

L’heure est arrivée où les nations, rassasiées de combats, se plaisent à rechercher dans les annales du passé leurs autres titres de gloire. La Belgique aussi marche dans celte voie et rien ne peut mieux stimuler l’ardeur de nos fabricants et de nos ouvriers que le souvenir des belles choses qui sont sorties des mains de leurs ancêtres. Or la place que la plupart des travaux sur les tapisseries, même les plus récents, assignent à Bruxelles, n’est nullement en rapport avec la vérité historique. Notre ville a été pendant près de 400 ans le siège principal de cette industrie, et plus on s’en occupera, mieux on constatera, comme j’ai essayé de le faire, la part immense que nos concitoyens y ont prise.


Les Tapisseries bruxelloises

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