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1. Nouvelle Tentative

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Jake Vickers, Alex Tuck et Nicola Orsini étaient perchés sur le toit d'un immeuble abandonné à Kobuleti, une station balnéaire sur la côte orientale de la mer Noire en ex-République Soviétique de Géorgie. Ils attendaient qu'un homme se montre.

« Comment vont les choses en Ukraine? demanda Jake.

— La routine. Livraison d'armes aux Ukrainiens et formation des pilotes, dit Nicola. Ils semblent compétents, dans l'ensemble.»

Nicola et Alex terminaient une mission de formation sur équipement pour SRD — Strategic Resources Development, la compagnie de contrats de services militaires de Jake et Tess.

« On a été surpris que tu nous demandes de nous rendre ici précipitamment, ajouta Alex. Je croyais que c'était fini de travailler pour la CIA.

— Je le croyais aussi, répondit Jake en regardant à travers les jumelles. Le problème, c'est que Paul Saunders, mon ancien patron à la CIA, est une vraie tête de mule. Il pense que je lui suis redevable pour avoir manqué d'orchestrer l'assassinat de Kim Jung-un.

— Au fait, qu'est-ce qui s'est passé en Corée du Nord ?

— Park Tan-Gyong, un célèbre violoncelliste, avait juré de se venger après que Kim Jung-un ait ordonné l'assassinat de plusieurs de ses proches. Il a lancé une attaque suicidaire contre Kim et sa famille. Je n'ai pas pu l'en dissuader et donc, après en avoir parlé à la CIA, j'ai accepté à contrecœur de l'aider. J'ai financé la construction d'un violoncelle qui comportait un compartiment secret pour y cacher un paquet de poudre mortelle de cadmium. Puis Park s'est rendu à un concert privé au palais de Kim et a lancé en direction du public. Le sachet s'est déchiré, répandant le poison en quelques secondes et les gens ont succombé. Malheureusement, Kim avait eu des soupçons, aussi avait-il envoyé quelqu'un qui lui ressemblait pour assister au concert à sa place. Par la suite, un général nord-coréen avait essayé d'organiser un coup d'état, mais Kim l'a écarté sans pitié. Aujourd'hui, il est plus paranoïaque que jamais et il ne cesse de tester des ogives nucléaires et de lancer des missiles dans la mer du Japon, menaçant les bons vieux États-Unis et leurs alliés d'anéantissement. »

Alex haussa les épaules.

« Parfois, les choses tournent mal. Ça fait partie du métier. Je n'arrive pas à croire que tu en portes de blâme.

— Ça ne me dérange pas. dit Jake. Ce n'était pas gagné. En tout cas, la CIA m'a offert une carotte : la possibilité d'épingler une de nos vieilles connaissances, Laurent Belcour.

— Encore lui ?

— Eh ouais, rétorqua Jake. Désolé de vous avoir dépêchés si vite. J'ai besoin de gens qui parlent couramment le russe et le turc.

— À ton service, dit Nicola. Mais j'ai dû réviser le turc en chemin. »

Jake avait les yeux rivés à ses jumelles.

« Il arrive. C'est le moment, les gars. »

Alex et Nicola descendirent du bâtiment. Ils coururent vers un petit pont enjambant une rivière en crue pour rencontrer leur contact, Isidore Khujadze. Ils avaient pris contact avec lui par téléphone auparavant. Nicola prétendait être Turc ; quant à Alex, il se faisait passer pour un contrebandier russe. Ils échangèrent des poignées de main puis s'engouffrèrent dans une petite voiture délabrée avant de se rendre vers un petit appartement en ville. Le plan était de se procurer du matériel qui valait son pesant d'or : quelques kilos d'uranium radioactif ainsi que de l'uranium 235 à usage militaire. La provenance du matériel était floue mais Nicola et Alex l’assurèrent que ça ne poserait pas de problème.

Jake filait le petit groupe à distance dans son 4x4 de location avec, assises à l'arrière, Tess Turner et Galina Kutuzova, toutes deux vêtues de tenues militaires de couleur sombre et équipées de fusils de précision. Quand les hommes arrivèrent devant un immeuble délabré, Jake gara la voiture derrière un petit bosquet d'arbres. Il reprit ses jumelles et vit les trois hommes entrer dans le bâtiment. Une minute plus tard, une lumière s'alluma dans un appartement du deuxième étage. Jake s'avança furtivement vers l'avant du bâtiment tandis que les deux femmes restèrent cachées derrière les arbres. Elles ajustèrent le viseur de leurs armes de haute précision.

Jake était sûr que la matière nucléaire qu'Isidore avait à vendre provenait de Russie. Quand l'Union Soviétique s'était effondrée, de l'équipement avait été volé dans les centrales nucléaires mal gardées, ce qui avait contribué à la formation de réseaux de contrebande qui essayaient de vendre ces matières dangereuses aux plus offrants. La plupart des contrebandiers ont été interceptés par les autorités, grâce à la mise en place de détecteurs nucléaires aux postes frontières. Mais les nombreuses arrestations n'avaient pas dissuadé tout le monde. L'un des lieux de contrebande les plus fréquentés était l'Abkhazie, une parcelle de terre qui s'est détachée de la Géorgie grâce à l'ingérence russe. Des problèmes similaires s'étaient produits en Ukraine, en particulier dans les zones de Donetsk et de Louhansk, aux mains des rebelles. La guerre entre l'Ukraine et les régions frontalières occupées par la Russie avait détruit 29 détecteurs de radiation, ce qui avait rendu la contrebande possible.

Jake attendait devant la porte principale de l'immeuble. La transaction à l'étage se déroula sans incident. Jake le savait grâce au micro électronique que portait Nicola. En peu de temps, Isidore avait produit une petite boîte enrobée de plomb contenant la matière radioactive. Puis il se précipita vers la sortie, la sacoche contenant l'argent à la main, et descendit les escaliers. À la sortie, il tomba sur Jake, pistolet en main.

« Vous feriez mieux de nous suivre calmement, » dit Jake.

Alex descendit en courant et les rejoignit. Il sortit un collier de serrage de sa poche et attacha les poignets d'Isidore. La voix de Nicola se fit entendre dans leur appareil de communication : « Tout se déroule comme prévu. »

Galina fit un signe du pouce à Tess Turner, qui avait observé toute l'opération à l'aide de ses jumelles.

Mais avant que l'équipe n'eut le temps d'informer le véhicule de la police locale garée une rue plus loin, deux hommes surgirent soudainement et pointèrent leurs pistolets sur Jake, Nicola et Alex. Ils les forcèrent à s'agenouiller tout en hurlant des ordres à Isidore qui essayait de récupérer la boîte de plomb qui gisait maintenant au sol. Deux coups de feu déchirèrent la nuit et les deux nouveaux arrivants tombèrent au sol. Jake et Alex éloignèrent les armes des assaillants de quelques coups de pieds et Nicola assomma Isidore avant de remettre la boîte en lieu sûr. Peu après, des agents géorgiens arrivèrent devant le bâtiment dans un crissement de frein et appréhendèrent le trio de trafiquants. Tess et Galina rejoignirent les lieux tout en passant calmement les sangles de leurs armes sur leurs épaules.

« Content de vous voir, mesdames, dit Nicola. Votre timing était parfait et votre adresse au tir, impressionnante.

— Ah, mais de rien, dit Tess. On faisait juste notre travail. »

Galina avança vers Alex et lui planta un gros baiser. Il sourit et l'entoura de ses bras.

« Maintenant tu peux te vanter de m'avoir sauvé la vie.

— C'est rien, répondit Galina. Et puis, ce serait trop compliqué de trouver un autre homme. »

Elle l'embrassa à nouveau. Tess et Jake firent de même, avec toutefois un peu plus de retenue.

Nicola regardait la scène d'un air amusé. Tess le remarqua et lui dit en plaisantant :

« Eh, pas de voyeurs ! Appelle Carmen à New York et dis-lui que tu vas bien. »

Nicola hocha la tête et composa le numéro depuis son portable.

Plus tard, le groupe se retrouva au poste de police. Des agents des renseignements locaux interrogeaient déjà les contrebandiers, dont deux d'entre eux portaient des bandages aux jambes. Jake, Tess et les autres membres de l'équipe se servirent de boissons gazeuses au distributeur et se détendirent autour d'une table dans une pièce attenante.

« Pourquoi pensez-vous que Belcour s'intéresse au marché noir de matières radioactives ? demanda Alex. Après le mauvais tour que lui a joué Daesh en détournant l'une de ses deux bombes nord-coréennes vers l'Iran, au lieu de la faire exploser en Europe, on aurait pu penser qu'il ferait profil bas.

— Il n'en a pas besoin. Il n'y avait pas moyen de lui imputer ce terrible incident. Et quoi qu'il en soit, il a pris la sage précaution de s'installer temporairement en Argentine. Maintenant la CIA le soupçonne d'être le cerveau derrière cette opération de contrebande. Comme il ne peut plus obtenir d'ogives auprès de la Corée du Nord, on a à penser qu'il va chercher à se procurer de l'uranium pour faire une arme nucléaire.

— Pour quelle raison pourrait-il bien vouloir faire ça ? C'est un homme riche.

— Ce n'est pas pour l'argent. Je pense que Belcour cherche à se venger, dit Tess. Il veut se venger du gouvernement français qui l'a accusé de faire l'apologie de la prostitution, ce qui pour lui, ne pose aucun problème. À l'époque, il était à la tête de l'OID, l'Organisation Internationale de Développement, et il avait toutes les chances de s'emparer de la présidence de la France. Comme d'habitude, ses avocats lui ont sauvé la peau, mais ça lui en a coûté.

— Ça me fend le cœur, dit Galina, allongée sur une banquette et confortablement adossée contre Alex, entourée de son bras. Ce qui m'inquiète, c'est que c'est par nous que ses plans ont échoué et il cherchera peut-être à se venger sur nous.

— Tu as raison, Galina. Je ne serais pas surpris s'il venait après nous, dit Jake. C'est pourquoi j'ai accepté de faire un dernier job pour la CIA et nous offrir la possibilité de le coincer pour de bon. »

L'un des agents géorgiens entra dans la pièce, Il avait l'air contrarié. Il essuya ses mains légèrement tâchées de sang et s'assit.

« Les blessures sont superficielles. Nous avons essayé de les faire parler mais il est évident qu'ils ont été recrutés par des tiers qui n'ont pas d'existence officielle. Même si on les battait à mort, je ne crois pas qu'ils peuvent nous en dire plus. Ils font ça pour l'argent, peu leur importe d'où ça vient.

— C'est un peu décevant, dit Jake. On laisse ces imbéciles à vos bons soins. Il nous faut trouver une autre approche. »

L'agent géorgien lui serra la main.

« Merci de votre aide. Et rentrez bien. »

Une fois rentrés à l'hôtel, l'équipe se retrouva au bar pour prendre un verre. Jake n'était pas content.

« C'est frustrant. Chaque fois qu'on essaie de le coincer, Belcour réussit à nous filer entre les doigts. Il y a un proverbe chinois qui dit : 'Si on ne change pas de direction, on finira probablement par se retrouver là où on va.' Ça décrit très bien notre situation. Nous n'avançons pas. Nous devons trouver un autre moyen de l'avoir.

— Belcour est une vraie anguille, dit Tess. Il peut se permettre les meilleurs avocats et il s'en sert sans pitié. Et puis, il a accès à plusieurs résidences dans de nombreux endroits. Quand les choses avaient pris une sale tournure la dernière fois, il s'était envolé pour l'Argentine.

— La CIA m'a dit que Belcour ne traite plus avec les Nord-Coréens, » ajouta Jake. « Apparemment, il s'est brouillé avec eux. Je ne vois qu'une seule manière pour lui de fabriquer cette bombe avec des déchets nucléaires, c'est d'aller voir Daesh et ses vieux amis djihadistes en Syrie.

— Mais Daesh l'a entourloupé la dernière fois, ils ont vendu la bombe nucléaire nord-coréenne à l'Iran au lieu de l'utiliser en Europe comme Belcour le voulait.

— Entre voleurs, point d'honneur, dit Tess. Belcour n'a pas d'autre choix que de fermer les yeux dessus. Daesh est la seule organisation qui peut transformer des déchets nucléaires en bombe.

— Mais Daesh n'a pas de laboratoires pour ça, dit Alex.

— Les terroristes n'ont pas besoin de laboratoires. S'ils fabriquent une bombe comme ça, ils le feront probablement à l'aide de prisonniers. Ils se moquent si ces derniers meurent empoisonnés par les radiations.

— Triste mais vrai, acquiesça Alex.

— Alors qu'est-ce qu'on fait ? demanda Nicola.

— Franchement, je ne sais pas, dit Jake. Il va falloir qu'on surveille et qu'on improvise. Rentrons. »

Tess

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