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SON ALTESSE MADAME LA DUCHESSE DE CHARTRES

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LA DUCHESSE DE CHARTRES

AVEC S. A. Mme la duchesse de Chartres, nous entrons dans le domaine d’Amphitrite, comme aurait dit, au siècle dernier, quelque poète galant de la cour de son aïeul, le Régent. Fille d’un marin, le prince de Joinville, la duchesse témoigne, en effet, que bon sang ne sait mentir et a hérité des goûts nautiques de son père: la natation est son sport de prédilection.

Françoise-Marie-Amélie d’Orléans avait quatre ans quand la Révolution de 1848 força le prince et la princesse de Joinville, sœur de l’empereur du Brésil, à émigrer en Angleterre, cette terre par excellence de tous les exercices du corps et où les femmes reçoivent, sur ce point, une éducation bien plus complète que chez nous. C’est dans les eaux anglaises, tantôt à Kingston-sur-la-Tamise, tantôt à York-House ou dans les flots de la Manche, que la princesse tira ses premières coupes, en compagnie de son frère, d’un an seulement plus jeune qu’elle, le duc de Penthièvre, un marin de race, lui aussi, et de bonne trempe, je vous assure. Son premier professeur fut le prince de Joinville et il a fait en elle une élève dont il peut être fier.

Si vous voulez en juger, vous n’avez qu’à vous rendre pendant la saison des bains de mer à Dieppe où chaque année, depuis que son mari a été colonel au 5e chasseurs, à Rouen, la duchesse vient se livrer à ses ébats aquatiques. Elle réside alors dans une petite maison de la rue Aguado, en bordure de la plage, et la mer n’a pas de visiteuse plus assidue et plus intrépide qu’elle. Accompagnée de son grand braque noir, la duchesse, vêtue d’un costume de bains d’une extrême simplicité, se livre à son plaisir favori, confondue avec les autres baigneuses de la plage et laissant sa grandeur sur le rivage le plus aimablement du monde. C’est là qu’elle se fait à son tour le professeur de natation de ses deux plus jeunes enfants, la princesse Marguerite et le prince Jean, et il faut voir les jeux, les courses, les passades de cette mère charmante et de ses bébés adorés.

Comme le dit le doyen des maîtres baigneurs de Dieppe, la duchesse nage «en artiste». Elle a la science et elle a le style. Douée d’une force musculaire très grande, elle est insensible à la fatigue et son intrépidité se joue des vagues même les plus mugissantes. Le gros temps, au contraire, est pour elle un attrait de plus et sa hardiesse se plaît à dompter la mauvaise humeur des flots. Ainsi les bons cavaliers aiment mieux monter un cheval un peu ombrageux qu’une bête trop docile ou trop bien dressée.

A la pratique de ce sport hygiénique par excellence, la princesse a gagné une santé de fer et les épreuves cinq fois répétées de la maternité ont passé sur elle sans effleurer la sveltesse de sa taille, les formes suprêmement aristocratiques et juvéniles de sa stature. Sous la monarchie de Juillet, le pied de la princesse Clémentine était justement célèbre parmi les cours de l’Europe: la pantoufle de Cendrillon eût été une savate trop large pour ce pied sans rival. Aujourd’hui, ce sont les bras de la duchesse de Chartres dont la maison d’Orléans peut s’enorgueillir auprès des autres familles souveraines. Je les recommande à quelque sculpteur en quête d’un modèle accompli. La duchesse a retrouvé les bras de la Vénus de Milo et ceux-là sont en chair et en os, ce qui vaut encore mieux que les plus beaux marbres du monde.

Du caractère le plus avenant et le plus aimable, ayant toujours une bonne parole aux lèvres et la main prête à rendre un service, la duchesse est avant tout une femme d’intérieur, préférant la simplicité de son foyer, le soin de ses enfants, au bruit et au mouvement du monde, à tout l’éclat des fêtes. De son père, elle ne tient pas que les goûts nautitiques dont je viens de parler, elle possède aussi un sentiment artistique très prononcé. Comme lui, elle dessine et peint d’une façon remarquable et lei divers séjours des princes d’Orléans sont embellis d’œuvres de sa main qui présentent une réelle valeur.

La duchesse ne se contente pas de la natation, en matière de sport Elle monte également à cheval en écuyère consommée et les heureux élus des rallye-papers que le duc de Chartres offrait, à l’époque de son commandement, au monde militaire et à la haute société de Normandie ont pu apprécier sur ce point ses mérites. Mais, malgré tout, la natation reste son passe-temps favori et si le duc d’Aumale qui, renouvelant la mode des portraits allégoriques du grand siècle, a fait peindre à Chantilly le duc de Chartres en saint Hubert, voulait donner un digne pendant à cette toile, c’est en fée des eaux qu’il devrait faire représenter sa sympathique et charmante nièce.


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