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IV

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Table des matières

Records effectués par des cavaliers isolés.

Il ne reste plus qu’à examiner les records de vitesse établis par un cheval sur de longs parcours, pour en déduire l’état de la question au moment de la course Bruxelles-Ostende. Partant de ces données, l’on constatera facilement ce que les concurrents pouvaient espérer réaliser comme «temps», ainsi que les bases qu’ils possédaient sur l’entraînement suivi, et sur les allures adoptées par leurs prédécesseurs.

Une course eut lieu, à Doncaster, le 1er mars 1802, dans laquelle paraît avoir été réalisé le record de la vitesse sur la longue distance. MM. FLETCHER et OSWALD firent courir deux juments leur appartenant, pour une somme de 1,000 guinées (fr. 26,500), jusqu’à ce que l’une des deux se fut arrêtée épuisée. La jument baie de M. Fletcher dut s’arrêter après 60 milles (96 kil. 540 m.). Les 40 premiers milles (64 kil. 360 m.) avaient été couverts sans repos à raison de deux minutes deux secondes le kilomètre.

Le capitaine MULCARTER et M. WALKER avaient parié de couvrir au plus vite la distance de Londres à York (200 milles, soit 322 kil. environ). Ils partirent ensemble de Portland street et marchèrent d’abord à une vitesse excessive, mais ils durent faire reposer toute la nuit leurs montures épuisées. Entre Doncaster et Tadcaster, M. Walker abandonna la lutte, et le capitaine Mulcarter atteignit York en quarante heures trente-cinq minutes. Tous deux montaient des chevaux de pur sang, et la jument du capitaine fournissait un bon galop le surlendemain.

Un remarquable cross-country fut couru en mars 1821 dans le comté de Surrey, entre le capitaine WILLOUGHBY et M. MONTGOMERY. Il s’agissait de faire 22 milles (35 kil. 398 m.) à travers champs. La première moitié du parcours était sur le plat; la seconde, parsemée d’obstacles. Le capitaine Willoughby gagna la course en une heure vingt-sept minutes.

En 1864, le lieutenant MULLER (Allemand) 350 kilomètres en huit jours. En 1867, le lieutenant ZUBOWITZ (Hongrois) 1,250 kilomètres en quinze jours.

En 1878, le baron FINOT avait parié que sa jument JACINTHE battrait un trotteur américain célèbre, nommé ZETHUS, sur la distance de 30 kilomètres. La jument de pur sang gagna de tout ce qu’elle voulut, en cinquante-huit minutes, et si le temps ne fut pas plus court, c’est que le trotteur, complètement fini, avait renoncé à la lutte. Quelques jours après cet exploit, Jacinthe gagnait une course à Auteuil; quant à son malheureux rival, il était irrémédiablement claqué.

Ce match en amena un autre, entre TRIBOULET, au même baron FINOT, et TAMBOUR BATTANT, à M. KHAN. Triboulet était un modeste cheval de steeple-chase, Tambour Battant un très bon trotteur. Les deux concurrents devaient parcourir 40 kilomètres 80 mètres sur le macadam, qui entoure l’hippodrome de Longchamps, au Bois de Boulogne. Les conditions les plus dures étaient imposées au cheval de pur sang; il était monté, son adversaire attelé à une araignée; il devait accomplir le trajet d’un seul temps de galop sans changer d’allure, le trotteur pouvait changer à volonté et même s’arrêter. Triboulet gagna l’épreuve en une heure vingt minutes trois secondes, battant son adversaire d’environ 7 kilomètres. Comme dans le match précédent, le cavalier de Triboulet le ralentit considérablement dans les derniers kilomètres, parce que son cheval était déferré et que, certain de vaincre, il ne voulait pas lui imposer une fatigue inutile.

Pendant la guerre indienne de 1879, le colonel DODGE mentionne dans ses rapports l’exploit d’un courrier, ayant franchi 600 kilomètres en trois jours, ne marchant que la nuit afin d’éviter d’être surpris par les Indiens. Il nous en montre d’autres, parcourant 274 kilomètres en moins de vingt-quatre heures sans que leurs chevaux en éprouvassent de dommage, et deux cavaliers du 8e régiment, porteurs de dépêches, qui ont fait 210 kilomètres en vingt heures. (Il n’est pas douteux que ces courriers trouvaient des relais en route!...)

En 1881, SALVI, passage des Karpathes (565 kilomètres en cinq jours). La même année, Salvi couvre 1,800 kilomètres en quinze jours.

En 1882, DE LA COMBLE, sous-lieutenant au 7e dragons, 168 kilomètres en quinze heures sur LA MASCOTTE. Le 30 avril de la même année, le même, 172 kilomètres en quatorze heures sur BAGUE. En juillet, le capitaine FEERAYER, 40 kilomètres en quatre-vingts minutes sur FALCONIA. Le 14 octobre, DE LA COMBLE, 251 kilomètres sur LA MASCOTTE en vingt et une heures. Le 25 novembre, le même, 147 kilomètres en onze heures quinze minutes sur BAGUE. Le même, 35o kilomètres en soixante-douze heures sur LA MASCOTTE. Le colonel DE BELLEGARDE, de Moulins à Sainçaize (aller et retour), 102 kilomètres en six heures dix minutes sur GRAZIELLA. SALVI, de Bergame à Naples, 1,100 kilomètres en dix jours; le même, de Turin à Cassai, go kilomètres en cinq heures trente minutes.

En 1885, le maréchal des logis LANGE (Allemand), 114 kilomètres en neuf heures. Le 22 juin 1889, le lieutenant GODEAU (Français), 40 kilomètres en une heure vingt-neuf minutes. La même année, SIR EVELYN (Anglais), 222 kilomètres en trente et une heures. En 1890, le lieutenant PIECHKOO (Cosaque), 4,000 kilomètres en soixante-deux jours. En 1891, le capitaine RATAZZI (Italien), 265 kilomètres en deux jours sur TRISTAN. En août de la même année, CHOMORIN, 182 kilomètres en dix-neuf heures trente minutes. En 1892, le lieutenant VALDER, du 22edragons (Français), 208 kilomètres en vingt-trois heures sur INCARTADE.

C’est le 1er octobre de cette même année que partirent à la fois de Vienne et de Berlin, les 132 officiers allemands, et les 108 officiers austro-hongrois qui devaient disputer la course restée célèbre de BERLIN-VIENNE. Cette course souleva une polémique aussi violente que celle à laquelle a donné lieu l’épreuve Bruxelles-Ostende, mais il fallut reconnaître que les fruits que l’on en a retirés ont été nombreux et sont utilisés encore aujourd’hui. Les officiers austro-hongrois remportèrent un succès éclatant, et à part le lieutenant allemand Baron DE REITZENSTEIN, classé second, ils prirent toutes les premières places. Le raid du Comte Guillaume STAHREMBERG et celui du lieutenant VON REITZENSTEIN, ont été narrés par eux-mêmes et sont des plus intéressants. Le vainqueur mit 71 heures 26 minutes à fournir les 630 kilomètres du parcours sur son cheval ATHOS. Plusieurs chevaux sont morts en cours de route ou après l’arrivée au but.

Une course de fond de 100 verstes (106 kil. 700 m.) a été courue le 27 février 1894 par les officiers de la garde de l’empereur de Russie. Les concurrents partaient par groupe de deux, de quart d’heure en quart d’heure et le gagnant effectua le parcours en sept heures dix-sept minutes. Le dernier arrivé avait mis neuf heures dix-neuf minutes et il est à remarquer que trois chevaux seulement avaient été entraînés huit jours avant l’épreuve, les autres peu ou point. Un seul cheval resta en route, ayant dû être arrêté après go verstes.

Le lieutenant MULLER, du 7e uhlans, parcourut au mois de mars 1894, les 1,350 kilomètres qui séparent Haguenau de Rome en dix-neuf jours. En raison des difficultés du chemin et pour soulager son cheval, Muller a parcouru certains jours jusque 5o kilomètres à pied.

Le 11 août 1895, fut courue en NORVÈGE, une course de fond de 150 kilomètres par les officiers qui se trouvaient au camp de Gardermoen. L’itinéraire formait un circuit, partant du camp et s’y terminant; six officiers prirent part à la course qui fut gagnée par le lieutenant GETTE, en neuf heures vingt minutes douze secondes. Deux concurrents avaient abandonné et un des chevaux mourût le lendemain.

En 1896, le capitaine DEVEDEIX, Lyon-Vienne aller et retour, 2,500 kilomètres en quarante-trois jours sur DÉTONATION. En 1899, COTTU, Vienne-Paris, 1,250 kilomètres en treize jours. Le capitaine SPIELBERG (Allemand), 1,400 kilomètres en treize jours.

Le 11 mai 1896, un military comportant une course de résistance, fut décrété par le ministère de la guerre d’Italie. L’itinéraire formait un circuit partant de Trévise pour y revenir; la route suivie était excellente et le choix des allures était à la disposition des coureurs; les départs avaient lieu à des intervalles de dix minutes. Vingt-deux officiers se présentèrent au poteau de départ et le premier prix revint au lieutenant VITAL, qui avait fait les 156 kilomètres, en douze heures treize minutes dix secondes. Des vingt-deux chevaux qui prirent part à la course, six moururent pendant l’expérience ou peu après.

Le 28 août 1899, une épreuve était organisée entre Paris et Trouville, ouverte aux cavaliers, aux cyclistes et aux coureurs pédestres. M. GÉRIN montant MASCOTTE, gagna la course qui comportait 175 kilomètres, en douze heures vingt minutes. Au mois d’octobre 1900, le prince LUBOMIRSKY se rend de Spa à Nice en vingt-trois jours, effectuant des étapes de 83 kilomètres. En novembre 1901, le lieutenant HEYL, du 9e dragons hanovriens franchit les 2,310 kilomètres qui séparent Metz de Bucharest en vingt-cinq jours; il parvint dans cette dernière ville avec un cheval absolument frais.

Rappelons pour terminer quelques-uns des raids accomplis par le général DEWET, durant la récente guerre de l’Afrique du Sud.

Chargé de porter un message très important à un commando distant de près de 300 kilomètres, le général se mit en route par une pluie battante qui ne cessa de tomber. Il resta en selle, et presque toujours au trot et au galop, pendant vingt-deux heures. Le cheval mourut en arrivant au but, mais le mouvement dont le général portait l’ordre put s’accomplir. Une autre fois, DEWET eût à parcourir sur un seul cheval, un trajet plus long encore, 200 milles, c’est-à-dire 320 kilomètres. Comme il était moins pressé que dans la première course, il put prendre le temps de soigner son cheval, qui arriva à destination en parfait état.

Courbe des vitesses moyennes à l’heure.

Si, écartant tous les records n’offrant pas l’authenticité voulue, nous établissons un tableau des divers «temps» mis à effectuer sur route des distances variant de 25 kilomètres à un chiffre illimité, nous constatons à priori que la courbe des vitesses moyennes à l’heure, repos compris, bien entendu, tombe très rapidement au début pour fléchir plus légèrement dans la suite et se terminer vers 2,500 kilomètres par une ligne droite.

En estimant cette vitesse moyenne à 25 kilomètres à l’heure pour un parcours n’excédant pas 25 kilomètres, elle tombe de jusqu’au 100e kilomètre; de jusqu’au 150e kilomètre; puis cette ligne ne tombe plus que de jusqu’au 650e kilomètre et de jusqu’au 2500e kilomètre; cette vitesse reste identique alors sur toutes les distances.


Autrement dit et pour bien nous faire comprendre, nous pouvons déduire de ce tableau, que 320 kilomètres seront couverts en 32 heures, soit 1 jour 8 heures; comme 2,500 kilomètres en 1,000 heures, soit 41 jours 16 heures, constituant déjà des étapes journalières très honorables de 60 kilomètres; un cheval bien monté et bien entraîné pourra soutenir indéfiniment cette vitesse.

Voilà quelles étaient les données connues dans les premiers jours de 1902, et pouvant servir de bases aux concurrents du raid Bruxelles-Ostende, quand arriva la nouvelle d’un record établi en Suède, bouleversant complètement les opinions accréditées jusqu’alors.

Record des 100 kilomètres.

Il s’était couru au mois d’avril dans ce pays, une course de vitesse suivant deux itinéraires, convergeant vers le même point et comportant l’un 100 kilomètres, l’autre 110 kilomètres, les cavaliers et les chevaux étant de force à peu près égale. Les 100 kilomètres furent couverts par les trois premiers en 4 h. 19’ 36” — 4 h. 29’ 37” — 4 h. 39’ 36” ; tandis que les 110 kilomètres exigèrent pour les deux premiers 5 h. 15’ 16” — 6 h. 24’ 5”. Le dernier cavalier de ce groupe avait mis 2 h. 30’ du 95e au 110e kilomètre. Le temps était particulièrement favorable le jour de cette épreuve, et les routes suivies présentaient toutes facilités pour l’emploi des allures vives. (Ces détails qui montrent si bien la chute de vitesse après le 100e kilomètre, ne nous sont parvenus que récemment.) Le lieutenant CARL DE SILFVERSWARD, du régiment de la garde, se trouvait donc détenteur du record des 100 kilomètres, et nous verrons dans l’étude du raid du 27 août combien ce record, qui était bien exact, eut d’influence sur les résultats.

3e CONTROLE, COOLSCAMP, 100 kilom. La foule a envahi les abords du contrôle à l’arrivée du Lieutenant LEMERCIER du 4e régiment d’artillerie belge (en 4 h. 59 m. 50 s.)


D’un autre côté, quelle connaissance possédait-on de l’entraînement et des allures à adopter pour effectuer le trajet en un minimum de temps? Il faut bien le reconnaître, on errait dans l’inconnu.

Si cette question de l’entraînement, et des allures avait été abordée et traitée longuement pour des épreuves de fond, comme Berlin-Vienne, et pour des étapes effectuées par des cavaliers isolés, sans esprit de lutte et sans que le facteur vitesse intervînt, d’une façon prépondérante, jamais l’étude approfondie de ces points n’avait été faite, ou du moins, ne nous était parvenue à l’occasion de luttes similaires à celle qui allait être tentée. Ni la course du 27 février 1894 (106 kil.), courue par les officiers de la garde de Russie, ni celle de 150 kilomètres, disputée le 11 août 1895, ni même l’épreuve italienne des officiers du 5e corps d’armée (156 kil.), n’avaient fourni de bases sérieuses pour la résolution de ce problème difficile; seuls le capitaine Smith Kielland, qui avait pris part à la seconde de ces courses et le lieutenant Silfversward, le recordman des 100 kilomètres, possédaient certaines données, acquises d’expérience personnelle.

Jusqu’au 27 août, le trotteur avait toujours été battu par le galopeur, et Bruxelles-Ostende n’a fait que confirmer le triomphe de ce dernier.

A propos du raid Bruxelles-Ostende

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