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2.4. La couverture de la mobilisation

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Une organisation de surveillance de la frontière destinée à protéger la mobilisation de l’armée, organisée dès le temps de paix, a été mise en place avec la publication d’une ordonnance par le Conseil fédéral le 1er mars 1892.179 Jusqu’alors, deux conceptions avaient été envisagées successivement pour remplir cette mission. A partir de 1875, l’Etat-major général voulait employer des troupes de landwehr. Toutefois, aucun travail destiné à mettre en place une organisation quelconque ne fut réalisé. Le système de mobilisation postulait que les troupes allaient occuper directement un dispositif tactique et une protection n’était donc pas nécessaire. Après 1882, les nouvelles modalités de la mobilisation entraînèrent un changement dans le système de surveillance de la frontière. Cette mission fut confiée à des troupes de l’élite que venait renforcer des formations de la landwehr, une fois leur mobilisation terminée.

La nouvelle organisation de 1892, approuvée provisoirement la même année par la Commission de défense nationale, engageait essentiellement des troupes appartenant aux divisions de l’élite. Elles devaient être mises sur pied le premier jour de la mobilisation et être envoyées rapidement sur la frontière. Le Bureau d’état-major instruisit verbalement les commandants des détachements de surveillance sur leurs missions. Ces derniers ont rédigé des ordres qui ont été approuvés par les commandants de corps d’armée. Ces détachements formaient, en quelque sorte, des avant-postes stratégiques pour les divisions en cours de mobilisation. Leurs commandants, les commandants des régiments ou des brigades dont étaient issues les troupes, étaient directement subordonnés aux commandants de division.

L’organisation de surveillance de la frontière comprenait 12 détachements représentant au total 33 bataillons d’infanterie, 16 escadrons de cavalerie et 6 batteries d’artillerie. Le dispositif était le suivant:

– 1er Détachement: St-Gingolph–col de Fenêtre de Bagne

– 2e Détachement: frontières vaudoise et genevoise

– 3e Détachement: frontière neuchâteloise

– 4e Détachement: frontière bernoise

– 5e Détachement: Klösterlein–embouchure de l’Aar

– 6e Détachement: embouchure de l’Aar–Stein am Rhein

– 7e Détachement: Stein am Rhein–Altenrhein

– 8e Détachement: Altenrhein–Trübbach

– 9e Détachement: frontière grisonne

– 10e Détachement: frontière tessinoise

– 10e Détachement bis: région de Bedretto

– 11e Détachement: Cervin–Griespass

Cette organisation présentait un défaut majeur.180 Elle nécessitait l’emploi d’une part non négligeable des troupes de l’élite et les commandants de division craignaient de ne pouvoir reprendre à temps les formations mises à disposition. Aussi le Département militaire fédéral et la Commission de défense nationale demandèrent au Bureau d’état-major de chercher d’autres solutions. Le DMF se demandait s’il serait possible de rassembler et d’organiser une partie des troupes de l’élite sur les places de rassemblement de corps dans les secteurs frontière sans avancer la mobilisation, de manière à pouvoir utiliser immédiatement ces troupes pour assurer la défense tactique de la frontière. De leur côté, les membres de la Commission de défense nationale proposaient d’employer les troupes de la landwehr pour remplir les missions de surveillance de la frontière.

Keller envisagea diverses possibilités: emploi du landsturm armé, remplacement des détachements de surveillance par des troupes de landwehr une fois celle-ci mise sur pied… Ne voulant pas un retour à un système de mobilisation décentralisé, il proposa une solution basée sur le principe de l’économie des forces. Le chef de l’Etat-major général considérait que les douze détachements prévus étaient à la fois trop forts pour assurer une simple surveillance policière et trop faibles pour remplir des missions de défense tactique. Il préconisait de se limiter à la seule mission de surveillance policière, en se concentrant sur les objets d’art routiers et ferroviaires, et de confier la mission de protection tactique aux divisions et aux corps d’armée. Cette redéfinition des missions permettrait d’économiser les deux tiers des troupes employées avec le système en vigueur. Keller prévoyait toutefois la possibilité de renforcer ces détachements en employant les forces du landsturm armé.

Les 26 détachements du nouveau dispositif comportaient 10 bataillons d’infanterie et 14 escadrons de cavalerie. Leur dispositif s’établissait comme suit:

Tableau 4: Détachements de couverture de la mobilisation (début des années 1890)


Cette organisation fut étudiée plus à fond dans les années suivantes par le Bureau d’état-major.181 Les missions furent mieux définies. Les détachements devaient assurer une surveillance policière de la frontière – y compris les gares – et barrer cette dernière dans les deux sens. Ils devaient également remplir des missions de reconnaissance du trafic militaire, surveiller, éventuellement détruire, les ouvrages d’art des lignes de communication internationales et couvrir une éventuelle évacuation de la région frontière. Le choix des troupes composant les détachements reposait sur deux critères: la capacité à être rapidement mises sur pied et la possibilité de les réintégrer ensuite rapidement au sein de leurs grandes unités. Dès lors, l’entrée en service de ces troupes pouvait avoir lieu la veille du premier jour de mobilisation pour l’infanterie et le premier jour pour la cavalerie. Comme il leur faudrait un jour pour se mettre en place, les troupes de surveillance seraient en grande partie installées dans leur dispositif dès le premier jour de la mobilisation et totalement le deuxième jour.

Au début de l’année 1899, la nouvelle organisation n’avait pas encore été présentée à la Commission de défense nationale, ni sanctionnée par une décision officielle. Elle avait toutefois un caractère officieux et elle aurait été mise en vigueur en cas de mobilisation.182 Un mémoire de la Section géographique, rédigé en 1897, en réglait les modalités. Dès la même année cependant, Keller pensait à un autre système de couverture de la frontière, basé sur l’emploi des bataillons de landwehr de premier ban, auxquels une nouvelle loi venait de donner une organisation concrète. Il ne semble pas qu’il ait poussé plus loin les études dans cette direction. Le problème résidait, en effet, dans le fait que les troupes de la landwehr entraient en service seulement à partir du deuxième jour de mobilisation, soit trop tardivement pour garantir la surveillance de la frontière. En 1903, celle-ci était toujours assurée par vingt-six détachements d’une force variant entre une compagnie et un bataillon, auxquels étaient joints les escadrons de cavalerie nécessaires. De plus, une partie des modalités de mise sur pied et les missions étaient identiques à celles définies quelques années plus tôt.

A cette date, Keller avait toutefois introduit deux nouveautés dans la surveillance de la frontière. La première résidait dans un renforcement du dispositif, par la présence de forces significatives pouvant comprendre, par endroit, des formations de l’importance d’un régiment d’infanterie. La deuxième innovation consistait dans le fait que la mise en place du dispositif de surveillance n’était plus automatique. La mobilisation de l’armée pouvait avoir lieu avec ou sans déploiement des détachements de surveillance, qui étaient organisés dans des dispositifs correspondant aux quatre fronts possibles – nord, est, sud et ouest – selon les dispositions suivantes:

– Front ouest:

Bataillon 11: Martigny et surveillance frontière

Bataillon 18 et Bataillon 24: surveillance frontière

Compagnie de carabiniers III/2: surveillance frontière

Escadrons 1 et 2: surveillance frontière

Escadron 3: Martigny et surveillance frontière

Régiment d’infanterie 17: près de Soleure

Escadron 7: surveillance frontière

Bataillon de carabiniers 4: Langnau

Régiment de cavalerie 4: Zäziwil

– Front nord:

Bataillon 24: surveillance frontière

Bataillon 54: surveillance frontière

Escadrons 7, 14 et 15: surveillance frontière

Bataillon 61: surveillance frontière

Bataillon 82: Emmishofen et surveillance frontière

Escadrons 16, 19 et 20: surveillance frontière

Bataillon 97: Pratteln

Escadron 23: surveillance frontière

– Front est:

Régiment d’infanterie 26 (sans Bataillon 78): près de Walenstadt

Bataillon 82: surveillance frontière

Bataillon 126 de landwehr de 1er ban: près de Walenstadt

Escadrons 19 et 20: surveillance frontière

Batterie 40: Gossau

Compagnies de parc 13 et 14: Rapperswil

Bataillon 91: Thusis

Bataillon 92: Maienfeld et surveillance frontière

Bataillon 93: Zernez et surveillance frontière

Escadron 24: Zernez et surveillance frontière

– Front sud:

Régiment d’infanterie 4 et Bataillon 88: Brigue

Bataillon 11: Martigny et surveillance frontière

Escadron 3: Martigny et surveillance frontière

Régiment d’infanterie 26 (sans Bataillon 78): Ragaz-Maienfeld

Bataillon 126 de landwehr de 1er ban: Mels

Compagnie de parc 13 et 14: Rapperswil

Bataillon 72: Airolo

Bataillon 86: Bedretto et surveillance frontière

Bataillon de carabiniers 8: surveillance frontière

Régiment d’infanterie 30 (sans Bataillon 89): Trimmis-Zizers

Bataillon 89: Brigue et surveillance frontière

Bataillon 91: Thusis et surveillance frontière

Bataillon 92: Bonaduz

Bataillon 93: Samedan et surveillance frontière

Bataillon 130 de landwehr de 1er ban: Naters

Escadron 22: surveillance frontière

Escadron 24: Samedan et surveillance frontière

Batterie 48: Bellinzone

Bataillon 130 de landwehr de 2e ban: près de Brigue

La Suisse entre quatre grandes puissances

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