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CHAPITRE NEUF
Оглавление08:15, heure normale de l’Est
Aile ouest
Maison-Blanche, Washington DC
– C’est une catastrophe, dit Susan. C’est dingue. Je ne vais pas le permettre.
Susan, Kurt et Kat Lopez retournaient à travers l’aile ouest vers le Bureau ovale. Les chaussures de Susan et de Kat claquaient sur le sol en marbre. Trois mastards du Secret Service marchaient dans leur sillage, et deux autres les précédaient.
Ils rejoignirent les doubles portes du Bureau ovale, flaquées de chaque côté d’un massif agent du Secret Service. Susan et la petite troupe qui l’entourait marchaient si vite qu’elle avait l’impression d’être transportée vers le bureau sur un tapis roulant. Elle sentait qu’elle perdait le contrôle. Elle n’avait pas voulu cette réunion. Deux mois plus tôt, envoyer ses meilleurs agents dans une mission potentiellement mortelle ne l’aurait pas autant secouée.
– Susan, on a un autre problème, annonça Kurt.
– Vas-y, achève-moi.
– Les Israéliens ne nous communiquent plus le décompte des victimes, ni ne nous tiennent au courant de leurs plans. Yonatan Stern est furieux. Il veut attaquer l’Iran immédiatement, et nous lui avons demandé de s’en abstenir. Il réduit déjà le Sud-Liban en poussière, mais le Hezbollah continue de lancer des missiles. Il qualifie ces attaques d’humiliation, ainsi que la menace iranienne sans moyen clair de riposter, et il nous en rend responsables. Il est prêt à expulser notre ambassadeur du pays. Il veut te parler en direct.
Susan secoua la tête.
– Cette journée devient de mieux en mieux.
Ils franchirent les doubles portes et entrèrent dans le Bureau ovale.
– Est-ce que tu veux que je planifie un rendez-vous téléphonique ? demanda Kat.
– Bien sûr. Je vais lui parler. Kurt, tu peux demander à quelqu’un de rédiger mes points à discuter ? Que suis-je censée lui dire ? Pourquoi tout le monde ne peut pas être juste ami ? Pourquoi on ne dit pas à ces types avec les missiles d’aller se faire foutre ?
– C’est ça, dit Kurt, qui s’isola dans un coin du bureau, déjà au téléphone.
Kat s’éclipsa par où ils étaient entrés.
Susan parcourut le Bureau ovale du regard. Devant elle, trois hautes fenêtres, dont les rideaux étaient écartés, donnaient sur la Roseraie. Dehors, c’était une journée ensoleillée de début d’hiver. Il y avait plusieurs personnes dans la pièce. Luke Stone était assis dans une chaise à haut dossier dans le coin salon. Sous ses pieds se trouvait le sceau du président des États-Unis. À côté de lui se tenait le gros Haley Lawrence, le secrétaire à la Défense, qui semblait avoir pris du poids – ce volume supplémentaire lui donnait l’apparence d’un bibendum, faisant beaucoup ressembler cet homme de plus d’un mètre quatre-vingt à un petit garçon.
Deux autres hommes étaient restés debout dans la pièce. Ils portaient des uniformes kaki et étaient dans la cinquantaine, estima Susan. Très musclés, coupe en brosse, ils auraient pu être jumeaux – Tweedledum et Tweedledee.
– Madame la présidente, se présenta Tweedledum, tendant la main vers elle. Je suis le général Steven Perkins de la Defense Intelligence Agency.
Elle lui adressa un signe de tête tandis qu’il lui serrait la main d’une ferme poigne militaire.
– Général…
Tweedledee vint également lui serrer la main.
– Madame la présidente, je suis Mike Sobchak de la Naval Intelligence.
– Amiral…
Susan leur adressa un signe de tête.
– Okay, messieurs, où en est-on ? Quel genre de plan avez-vous concocté, l’agent Stone et vous ?
Kurt était de retour, après avoir chuchoté dans son téléphone pendant onze secondes.
– Fermez la porte, s’il vous plaît, intima-t-il aux hommes du Secret Service.
– C’est une mission hautement confidentielle, déclara Haley Lawrence.
Susan haussa les épaules et fit un geste tournoyant de la main.
– J’imagine bien. Alors dites-moi.
– Nous envoyons une petite équipe en Israël dans un avion du département d’État2, expliqua Kurt. Nous avons déjà envoyé trois avions du département d’État depuis hier, donc pour ceux qui y prennent garde, ça peut ressembler à la même chose : des diplomates de crise qui arrivent en avion pour tenter de désamorcer la situation.
– Je suis sûre que nul ne se doutera que nous envoyons des espions là-bas, releva Susan.
– Quand l’équipe arrivera, elle sera informée par les services de renseignements israéliens sur les emplacements possibles des sites nucléaires iraniens. L’équipe se coordonnera avec les Israéliens pour préparer une infiltration, puis sera lâchée en Iran à la faveur de l’obscurité. L’équipe se rendra ensuite, par tous les moyens disponibles, sur les sites les plus probables, et confirmera ou infirmera l’existence d’armes nucléaires sur ces sites. Si des armes sont trouvées, elle appellera des frappes aériennes sur ces coordonnées, qui détruiront les armes dans leurs silos.
– Des frappes aériennes par qui ? Les Américains ou les Israéliens ?
– Les Américains, précisa Tweedledum. Par définition, ces frappes devront être de puissantes bombes antibunkers larguées à haute altitude. Très probablement des MOAB larguées depuis des bombardiers B-52, si nous pouvons détruire les bunkers avec des armes conventionnelles, ce qui n’est pas garanti. Nous ne croyons pas que les Israéliens aient de telles capacités.
– « Nous ne croyons pas » ? releva Susan. On ne sait pas ?
– Nous avons affaire à Israël, là, rappela Tweedledee. Ils pourraient les avoir, ou pas. Ils ne sont pas toujours disposés à donner des informations de ce genre. Quoi qu’il en soit, si les Israéliens bombardent les silos de missiles iraniens, il y a toujours le risque que ça déclenche la troisième guerre mondiale. Les Russes sont des alliés proches de l’Iran. D’un autre côté, les pays sunnites détestent les chiites iraniens. Du moins jusqu’à ce que les Israéliens les bombardent. Alors ils deviennent tous des compatriotes musulmans et l’agression israélienne doit être vengée. Si c’est nous qui opérons le bombardement… (Il haussa les épaules.) Je pense qu’on peut trouver un moyen de calmer les Russes là-dessus. Et les pays sunnites vivront avec.
– Pourquoi les Israéliens n’envoient-ils pas leurs propres espions chercher ces bombes ? s’étonna Susan.
– On en a parlé avec leurs services d’espionnage. Ils pensent que la mission sera un échec à coup sûr. Ils préféreraient bombarder l’Iran sans discernement et détruire toutes les bases militaires et les infrastructures iraniennes, dans l’espoir d’anéantir les bombes nucléaires qu’ils pourraient posséder. Nous les encourageons – nous les incitons très fortement – à ne pas suivre cette ligne de conduite. De toute évidence, le risque de bombarder l’Iran et de laisser ne serait-ce qu’un seul missile nucléaire opérationnel est trop élevé pour envisager ce que…
– Hello, agent Stone, coupa Susan en regardant Luke.
Il la fixa droit dans les yeux. C’était ce qu’elle détestait, ce qu’elle avait appréhendé. À cet instant, elle aurait voulu arrêter le temps, et qu’il ne prononce plus un seul mot.
– Madame la présidente…
– Avez-vous l’intention d’accepter cette mission ?
– Oui, acquiesça-t-il. Bien sûr. C’était mon idée.
– Ça me paraît être une mission suicide, agent Stone.
– J’ai connu pire, répondit Luke. En tout cas, c’est exactement pour ce genre de mission que la nouvelle Special Response Team a été organisée. J’en ai déjà parlé à mon équipe. Nous pouvons être prêts à partir dans deux heures.
Susan tenta une autre approche :
– Agent Stone, vous êtes le directeur de la Special Response Team. Mes dossiers signalent que vous avez 42 ans. Cette mission ne serait-elle pas mieux assurée par un opérateur subalterne de votre agence ? Quelqu’un d’un peu plus jeune, voyez ? D’un peu plus vigoureux ?
– J’ai prévu d’y aller avec Ed Newsam, rétorqua Luke. Il a 35 ans. Et de toute façon, je suis encore pas mal vigoureux pour un vieux schnock.
– L’agent Stone et l’agent Newsam ont tous deux l’expérience d’opérations importantes au Moyen-Orient, précisa Tweedledum. Tous deux sont des combattants d’élite, ont été profondément infiltrés, et connaissent bien les cultures israélienne, arabe et perse. Tous deux sont capables de parler le farsi.
Susan l’ignora. Elle parcourut la pièce du regard. Tous avaient les yeux fixés sur elle. Elle savait qu’ils voulaient discuter des détails de la mission. Ils voulaient son feu vert immédiat, afin de rassembler les ressources nécessaires, prévoir les éventualités en cas d’échec, élaborer des stratégies pour un démenti plausible au cas où elle serait rendue publique. Dans leur esprit, la question de savoir qui y allait ne se posait même plus – elle était déjà réglée.
– Messieurs, pouvez-vous me laisser seule quelques minutes avec l’agent Stone ?
***
– Luke, tu as perdu la tête ?
Tout le monde était parti, y compris les agents du Secret Service.
– Je n’enverrais pas mon pire ennemi dans cette mission. Tu es censé être parachuté en Iran, puis te balader dans le pays avec des assassins à tes trousses, jusqu’à ce que tu trouves des armes nucléaires, c’est ça ?
Il sourit.
– Eh bien, j’espère qu’elle sera un peu plus réfléchie que ça.
– Tu vas te faire tuer.
Il se leva, s’approcha d’elle, voulut la prendre dans ses bras. Elle se raidit un instant, puis fondit sous son étreinte.
– Tu sais à quel point ça a l’air ridicule que la présidente des États-Unis s’inquiète excessivement de la vie d’un agent spécial, qui a fait précisément ce genre de choses toute sa vie ?
Elle secoua la tête.
– Je m’en fiche. C’est différent. Je ne peux pas approuver une mission où tu risques d’être tué. C’est dingue.
Il baissa les yeux sur elle.
– Est-ce que tu es en train de me dire que pour être avec toi, je devrais lâcher mon boulot ?
– Non. Tu es le chef de ta propre agence. Tu n’as pas à t’en charger. Tu n’as pas à te porter volontaire. Envoie quelqu’un d’autre.
– Tu veux que j’envoie quelqu’un d’autre alors que tu penses que c’est une mission suicide ?
– C’est ça, opina-t-elle. Envoie quelqu’un que je n’aime pas.
– Susan, je ne peux pas faire ça.
Elle se détourna et soudain, se mit à pleurer de chagrin.
– Je sais. Je le sais bien. Mais pour l’amour de Dieu, je t’en prie, ne meurs pas là-bas.
2
Équivalent au ministère des Affaires étrangères aux USA. (NdT)