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IV LES DEUX EXORCISTES

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Au temps jadis, il y avait dans un petit village d'Islande un prêtre qui savait autant de latin qu'un poisson. Un jour qu'on lui apportait au baptême un enfant nouveau-né, au lieu de regarder dans son livre, il se mit à réciter de travers la formule de l'exorcisme.

Abi, dit-il, abi, male spirite.

Mais le diable, qui a inventé la grammaire (grammaire et grimoire, c'est tout un), n'était pas d'humeur à se laisser chasser par un solécisme.

Pessime grammatice, s'écria-t-il à la grande terreur des assistants.

Le prêtre, sentant qu'il s'était trompé et prenant son courage à deux mains, dit d'une voix tremblante:

Abi, male spiritu.

A quoi le diable, qu'on ne prend pas en défaut, répondit:

Male prius, nunc pejus.

Le prêtre, furieux, reprit: Abi, male spiritus.

Sic debuisti dicere prius, répondit le diable, et il sortit tranquillement.

L'histoire n'est pas mauvaise; on en conte une autre en Allemagne qui peut-être vaut mieux.

Exi tu ex corpo, dit fièrement le prêtre.

Nolvo, répond le diable.

Cur tu nolvis?

Quia, répond insolemment le diable, quia tu male linguis.

Hoc est aliud rem, dit majestueusement le prêtre, et il se retire avec dignité, laissant tout camus ce pédant solennel.

Que de folies, dira-t-on, et chez un homme que son état et son âge condamnent au sérieux à perpétuité.

—Holà! graves censeurs, laissez-moi rire, avec vos enfants. Vous aussi, vous me faites rire, et souvent, mais ce rire-là attriste mon coeur. Grands hommes d'aujourd'hui, j'ai toute l'année pour admirer votre étonnante sagesse; laissez-moi vous oublier un jour et jouer avec ces âmes innocentes qui, grâce à Dieu, ne savent pas encore ce que vous savez.

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