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AMATEURS ESPAGNOLS
CHAPITRE V

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Les arts à Madrid sous Philippe IV. – Éclat des écoles de Tolède, Valence et Séville. – Vincencio Carducho, Eugenio Caxes et Angelo Nardi, peintres ordinaires du roi.

1621 – 1665

Madrid, érigée par Charles-Quint en capitale des Espagnes, n'était pas encore, à l'avénement de Philippe IV, la métropole de l'art dans ce pays. Tolède, Valence, et surtout Séville, avaient conservé leurs anciennes écoles de peinture, et les artistes, nés ou élevés dans ces villes ou aux environs, se faisaient comme un devoir et un honneur d'y continuer les traditions qu'ils avaient reçues de leurs maîtres. De son côté, le clergé, tant séculier que régulier de ces grandes cités, siéges d'archevêchés, de couvents nombreux et d'autres établissements religieux aussi riches que puissants, cherchait à y retenir les peintres, les sculpteurs et les architectes. Il s'était établi entre les corporations religieuses des principales églises et des couvents comme une pieuse rivalité: c'était à qui, de Séville ou de Tolède, aurait la plus magnifique cathédrale; les Dominicains de Tolède opposaient aux Chartreux de Séville les peintures du Greco, tandis que ceux-ci se vantaient de posséder les plus belles œuvres du Becerra, de Pablo de Cespedès, de Luis de Vargas. Valence n'était pas moins fière de son Juanès, auquel elle avait décerné le nom de Divin59. La translation de la cour et son établissement permanent à Madrid avaient bien fait construire, dans cette ville et aux environs, des palais et des églises; mais il est à remarquer que ce furent des artistes étrangers, italiens pour la plupart, qui dirigèrent ces travaux, et en décorèrent l'intérieur de fresques, de tableaux et de sculptures. C'est ainsi que Titien envoya de Venise à Philippe II d'immenses toiles, destinées à garnir les murs du réfectoire et des autres salles de l'Escurial; c'est ainsi que, dans le même couvent, l'Italien Crescenzi fut l'architecte du Panthéon, ou nécropole des rois d'Espagne, et que plus tard, le Napolitain Luca Giordano vint décorer les voûtes de l'église vieille de ses fresques immenses, mais sans caractère religieux.

À l'avénement du jeune Philippe IV, les plus célèbres parmi les peintres qui vivaient ordinairement à Madrid, étaient, avec Mayno: Vicencio Carducho, Eugenio Caxes et Angelo Nardi. Ces trois artistes, peintres ordinaires du roi, étaient Italiens soit de naissance, soit d'origine.

Vicencio Carducho, que Palomino qualifie de gentilhombre Florentino, est le plus connu d'entre eux, non parce qu'il fut le plus habile, mais parce qu'il a composé un traité, sous forme de dialogue entre le maître et ses élèves, De l'excellence de la peinture et du dessin, qu'il publia, in-folio, à Madrid en 1633. Cet ouvrage, écrit en espagnol, donne une opinion favorable de son esprit et de son instruction: il est précieux par les renseignements qu'on y trouve sur les œuvres de beaucoup d'artistes espagnols contemporains. Considéré comme peintre, Vicencio Carducho était élève de son frère Barthélémy. «Dans le temps de l'immense construction de l'Escurial, dit Baldinucci60, on fit, par ordre de Philippe II, les plus beaux ornements de peinture et de sculpture que l'on connaisse, et l'on appela, pour les exécuter, un grand nombre d'excellents maîtres dans l'un et l'autre de ces arts. Parmi ceux-ci, on cite Federigo Zuccheri; indépendamment des autres jeunes gens qui l'avaient aidé à peindre la grande coupole de Florence, il emmena avec lui (en Espagne) Bartolommeo Carducci, encore jeune, mais déjà vieux pour l'art. Sous l'Ammanato, à Florence, il avait étudié la sculpture et l'architecture, et avec Zuccheri, il avait appris à peindre à fresque. Arrivé à Madrid, et voyant les grandes occasions qu'on y rencontrait pour travailler, il fit venir de Florence son frère Vincenzio, fort jeune encore, auquel il enseigna son art, et, en peu de temps, il en fit un peintre tellement distingué, que sous les règnes de Philippe III et Philippe IV, il obtint des commandes très-importantes pour embellir les palais royaux. Vincenzio donne lui-même dans son livre61 la description des peintures, tant à fresque qu'à l'huile, qu'il exécuta au palais du Pardo, et dans les galeries, chapelles, salles et autres lieux du palais de Madrid. Le musée royal d'Espagne a hérité en partie de ses œuvres: bien qu'elles ne manquent pas de mérite, elles n'indiquent cependant qu'un talent de second ordre. Il était meilleur dessinateur que coloriste, et conserva toute sa vie la plus profonde admiration pour le grand62 Michel-Ange, qu'il s'efforçait de prendre pour modèle.

Eugenio Caxes, bien que né à Madrid, était également Florentin d'origine. Son père, Patricio Cacci, était venu en Espagne appelé par Philippe II, au service duquel il entra comme peintre et architecte. Il traduisit en espagnol le traité d'architecture de Vignola, et peignit à fresque, au Pardo, la galerie de la reine, où il exécuta l'histoire de Joseph. Mais, lors de l'incendie de ce palais, sous Philippe III, en 1604, ces ouvrages furent presque entièrement détruits63. Son fils, Eugenio, paraît avoir cultivé seulement la peinture: il jouissait de son temps d'une grande réputation, et Palomino vante, comme l'honneur de l'art espagnol, pouvant rivaliser avec ce que les Italiens ont produit de meilleur, les compositions que Caxes avait peintes dans l'église de Saint-Bernard à Madrid64. Telle était sa réputation, que le comte-duc lui commanda de retracer sur la toile «le débarquement hostile des Anglais sous Cadix en 1625, et leur défaite par Diego Ruiz,» le seul tableau d'Eugenio qui soit au real museo65.

Italien comme les précédents, Angelo Nardi était, dit-on, élève de Paul Véronèse. Ses compositions à Madrid et à Alcala de Henarès, firent l'admiration de son siècle. Palomino66 indique les églises, les chapelles et les couvents dans lesquels cet artiste avait travaillé. On doit supposer qu'il peignit beaucoup à fresque, puisqu'aucun de ses ouvrages ne figure sur le catalogue du real museo de Madrid.

Si le Valencien Giuseppe Ribera eût vécu à la cour d'Espagne, il eût sans doute effacé et fait oublier ces artistes: mais bien qu'on le considère, par sa naissance et par son style, comme un peintre espagnol, on sait qu'il passa presque toute sa vie à Rome, et surtout à Naples; il ne contribua donc que de loin à rehausser l'éclat des arts sous le règne de Philippe IV.

La fortune réservait à ce prince la satisfaction qu'il souhaitait le plus ardemment: Elle lui donna dans Velasquez un peintre comparable aux plus grands artistes de l'Italie, avec une originalité, une perfection de style tout espagnole.

59

Palomino, p. 18-19, nº 30.

60

Notizie de' professori di disegno, decennale III, dal 1600 al 1640. In-4, p. 313, Vº. Vincenzio Carducci, t. V.

61

Dialogo 7.

62

Baldinucci, ut suprà, p. 315.

63

Palomino, p. 36, nº 55, Vº. Patricio Caxes. Le catalogue du real Museo n'indique qu'un seul tableau de cet artiste, sous le nº 162, la Vierge avec l'enfant Jésus.

64

Pag. 53, nº 73, Eugenio Caxes.

65

Catalogo, nº 151.

66

Pag. 74, nº 102.

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