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III

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Lily se donnait beaucoup de peine pour faire quelque chose de moi; mais, après tout, les talents qu’elle pouvait me donner étaient de pur agrément, et il ne m’était pas permis de consacrer tout mon temps à des choses aussi futiles. Je n’étais pas fait pour être un chien de salon; il était donc important pour moi de recevoir une éducation plus solide. Celle que mon maître me donna développa mes dispositions naturelles et corrigea mes défauts; aussi les juges les plus compétents du pays me déclarèrent-ils le chien de chasse le plus habile des environs. Mon maître était lui-même grand chasseur, et j’étais aussi fier de lui qu’il l’était de moi. Quand je fus assez bien dressé pour l’accompagner à la chasse, nous nous mîmes à faire de longues courses ensemble. Tantôt nous grimpions sur les collines, tantôt nous descendions dans les plaines; rien ne nous arrêtait, chacun de nous remplissait consciencieusement son rôle, et nous rapportions plus de gibier à nous deux que qui que ce fût. Nous n’éprouvions jamais la moindre fatigue; ces excursions avaient pour moi un attrait toujours nouveau, et j’y allais de tout cœur. Tenir un oiseau en arrêt jusqu’à ce que le coup de fusil de mon habile maître me donnât le signal de courir sur la proie pour la déposer à ses pieds, c’était là pour moi la plus grande jouissance de la vie et son principal objet. S’il se trouvait des gens qui pour cela se sentissent portés à me mépriser, je les prie de se souvenir que cette tâche m’était imposée, et que je m’en acquittais avec conscience. Tout le monde ne pourrait peut-être pas en dire autant. J’étais incapable d’y voir rien de mal, et jamais il n’entra dans ma tête la pensée que les oiseaux pussent s’en plaindre. Il me semblait qu’ils étaient là pour être tués; je ne leur voyais point d’autre utilité.

Nous fîmes de longues courses ensemble. (P. 20.)


La seule chose qui me désolât dans nos parties de chasse était que mon maître invitait quelquefois des chasseurs fort peu adroits. Quand je l’entendais engager quelque nigaud qui savait à peine tenir un fusil, je me plaignais, je grognais, je faisais des remontrances à ma manière; mais je n’étais point écouté. Mon maître n’avait qu’un seul tort, c’était de ne pas me consulter en pareille occasion; il se serait épargné bien des journées de mauvaise chasse. Un jour ma patience fut mise à une épreuve difficile à supporter pour un chien doué de quelque discernement. Un jeune homme, ami de mon maître et de ma maîtresse, arriva au château et reçut un accueil beaucoup plus aimable que, sel on moi, il ne le méritait. Je le jugeai, dès le premier coup d’œil, fort peu favorablement, et j’aurais voulu que mon maître grondât, que ma maîtresse aboyât après lui, au lieu de lui dire qu’ils étaient ravis de le voir et qu’ils espéraient que son voyage avait été agréable. A peine fut-il arrivé qu’il commença une kyrielle de plaintes qui n’en finissaient plus. Il avait froid; jamais on n’avait vu un pareil temps à cette époque de l’année. Il était fatigué ; les routes étaient mauvaises, la campagne triste; il avait été obligé, pour faire les vingt derniers milles, de voyager entassé dans l’intérieur d’une diligence.

Il se plaignait et trouvait à redire à tout. (P. 24.)


«C’était vraiment une chose honteuse, disait-il, que le chemin de fer n’allât pas jusqu’au lieu de sa destination! »

Il était enchanté d’être enfin arrivé, mais bien moins, semblait-il, pour le plaisir de voir ses amis que pour jouir du confort que leur maison offrait. Tous les ennuis qu’il avait éprouvés et dont il se plaignait si amèrement n’avaient nui en rien à son appétit, comme je m’en aperçus quand j’allai regarder tout doucement à la porte de la salle à manger, pendant qu’on dînait, pour l’examiner et écouter ce qu’il disait. Il ne faisait que se plaindre et trouvait à redire à tout. Lily elle-même ne put parvenir à le dérider, bien qu’elle fit tout ce qui dépendait d’elle pour amener un sujet de conversation qui lui plût. Voyant que tous ses efforts étaient vains, elle imagina de lui demander s’il avait beaucoup chassé cette année.

«Oui, lui répondit-il, mais les chiens de mon frère sont si mauvais que je n’y ai trouvé aucun plaisir. Il est impossible de rien faire de bon avec de semblables animaux.»

Lily lui dit, en rougissant un peu, qu’elle trouvait les chiens de Rodolphe magnifiques et qu’elle ne pouvait pas croire que rien de ce qui lui appartenait fût mauvais, que c’était tout à fait contraire à ses habitudes.

«Oh! répliqua-t-il, c’est le jeune homme le plus accommodant du monde; il est toujours content. Je vous assure que ses chiens ne valent rien. Je n’ai pas abattu un seul oiseau, chaque fois que je les ai emmenés avec moi.

— J’espère, dit alors mon maître, que nous pourrons vous dédommager de ce malheur. Demain nous irons chasser ensemble avec le meilleur chien qu’il soit possible d’avoir.»

Je me mis à me plaindre, car je savais bien qu’il s’agissait de moi, et je ne goûtais pas du tout l’idée d’accompagner un chasseur qui commençait par trouver des défauts à ses chiens. J’étais bien persuadé que les chiens ne méritaient nul blâmé ; mais à quoi toutes mes réflexions pouvaient-elles servir? Personne ne m’écoutait.....

Chien et chat, ou Mémoires de Capitaine et Minette

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