Читать книгу Tous les Contes et Nouvelles de Maupassant (plus de 320 Contes) - Guy de Maupassant - Страница 6
ОглавлениеII - Ce qu’était, au physique, le docteur Héraclius Gloss
S’il est vrai, comme certains philosophes le prétendent, qu’il y ait une harmonie parfaite entre le moral et le physique d’un homme, et qu’on puisse lire sur les lignes du visage les principaux traits du caractère, le docteur Héraclius n’était pas fait pour donner un démenti à cette assertion. Il était petit, vif et nerveux. Il y avait en lui du rat, de la fouine et du basset, c’est-à-dire qu’il était de la famille des chercheurs, des rongeurs, des chasseurs et des infatigables. A le voir, on ne concevait pas que toutes les doctrines qu’il avait étudiées pussent entrer dans cette petite tête, mais on s’imaginait bien plutôt qu’il devait, lui-même, pénétrer dans la science, et y vivre en la grignotant comme un rat dans un gros livre. Ce qu’il avait surtout de singulier, c’était l’extraordinaire minceur de sa personne; son ami le doyen prétendait, peut-être non sans raison, qu’il avait dû être oublié, pendant plusieurs siècles, entre les feuillets d’un in-folio, à côté d’une rose et d’une violette, car il était toujours très coquet et très parfumé. Sa figure surtout était tellement en lame de rasoir que les branches de ses lunettes d’or, dépassant démesurément ses tempes, faisaient assez l’effet d’une grande vergue sur le mât d’un navire. «S’il n’eût été le savant docteur Héraclius, disait parfois M. Le recteur de la faculté de Balançon, il aurait fait certainement un excellent couteau à papier.» Il portait perruque, s’habillait avec soin, n’était jamais malade, aimait les bêtes, ne détestait pas les hommes et idolâtrait les brochettes de cailles.