Читать книгу Mémoire sur la topographie médicale du IVe arrondissement de Paris - Henri Bayard - Страница 3
AVANT-PROPOS.
ОглавлениеJe ne m’étais d’abord proposé que de publier quelques considérations sur la topographie médicale du quatrième arrondissement de Paris; mais les recherches, que je fus amené à faire successivement sur ce sujet, m’offrirent un tel intérêt, que j’agrandis bientôt le cercle que je m’étais tracé.
La formation des quatre quartiers, qui composent aujourd’hui le quatrième arrondissement, remonte à une époque fort ancienne; sur la rive droite de la Seine, ils ont été le centre de la ville, et dès que les enceintes qui les enveloppaient furent détruites, c’est autour d’eux que se sont groupés successivement les autres quartiers. Les faits que je cite dans ce mémoire établissent d’une manière évidente que le quartier des marchés, par exemple, qui, depuis sa création présente encore la même topographie, a toujours été placé dans des conditions d’insalubrité manifeste. Le voisinage du cimetière des Innocens a enfin causé de tels dangers pour la santé publique, que ce foyer d’infection fut éloigné ; mais il n’y a pas soixante ans que cette cause d’insalubrité a été détruite, et presque toutes les autres ont persisté, malgré de très notables améliorations de détails.
L’accroissement de la population, son accumulation derrière les murailles, à des époques où les guerres civiles et étrangères l’obligeaient à se défendre; les inondations, les famines sont autant de circonstances qui ont influé sur la santé publique et fait naître de graves maladies.
Avant d’étudier la topographie médicale du quatrième arrondissement, tel qu’il est actuellement circonscrit, il m’a paru tout à-la-fois curieux et utile d’exposer d’une manière rapide l’histoire de la vieille ville, sous le point de vue de l’hygiène et de la police médicale. Cette étude comparative des conditions diverses de salubrité, dans lesquelles certains quartiers d’une ville ancienne se sont trouvés placés à toutes les époques de leur formation, n’a encore été faite par personne que je sache, et il m’a fallu puiser à des sources bien nombreuses pour remplir, incomplètement encore, le plan que je m’étais tracé.
Les historiens de Paris, en rapportant les maladies qui décimèrent sa population, ont toujours parlé de la ville en général, et les auteurs, qui récemment ont résumé les documens si nombreux qui leur avaient été légués par leurs devanciers, se sont toujours bornés à des généralités sur les questions de salubrité et d’hygiène publique. J’ai donc été forcé de feuilleter ces premiers historiens pour y rechercher des détails confondus ou omis par les auteurs modernes. Je citerai avec exactitude toutes ces sources, afin qu’elles puissent servir à ceux de mes confrères qui désireraient faire, pour l’arrondissement qu’ils habitent, l’essai médical que je tente pour le quatrième arrondissement.
L’intérêt que m’ont toujours présenté les questions de salubrité et d’hygiène s’est singulièrement accru, je dois le dire, depuis que j’ai été placé dans des conditions favorables pour étudier la population indigente, dans ses greniers, ses misères et ses excès. Médecin du bureau de bienfaisance du quatrième arrondissement, je visite ces foyers de maladie qu’une philanthropie éclairée cherche à éteindre tous les jours, et j’ai pu reconnaître, comme tous mes collègues sont à même de le vérifier à Paris, que la salubrité et l’hygiène y laissent encore beaucoup à désirer, et que la police médicale devrait être plus sévère.
Ce mémoire se compose de deux parties:
Dans la première, je trace la topographie des quartiers qui forment le quatrième arrondissement. Les limites, la nature et la disposition du sol, l’exposition aux vents sont successivement étudiées.
Pour faciliter l’examen comparatif, auquel je me livre, de la topographie ancienne de la ville, j’ai accompagné ce travail de plans multipliés et exécutés avec une scrupuleuse exactitude, d’après l’excellent ouvrage de Dalamare. On peut suivre tous les progrès de l’accroissement rapide de ces quartiers qui bordent la Seine, et de ceux qui bientôt les ont enveloppés.
Cette revue topographique, je la fais d’abord jusqu’au dix-huitième siècle; puis, j’examine quelles causes extérieures ou dépendantes du sol ont pu influer d’une manière fâcheuse sur la santé publique. Ainsi, les inondations, l’accumulation des immondices, des boues, les défauts et l’absence de constructions de fosses d’aisances, le pavage, l’éclairage, le voisinage des cimetières, forment autant de chapitres spéciaux; toutes ces causes générales à la ville tout entière agissaient avec plus de gravité encore sur les quartiers primitifs qui ont toujours offert et conservent encore un entassement fâcheux pour la santé publique.
Le quartier des halles a toujours servi d’entrepôt, de magasin à toutes les denrées qui alimentaient la population de Paris; j’ai voulu rendre plus complet ce mémoire en étudiant les questions de police médicale qui ont préoccupé les magistrats chargés du soin de la santé publique; l’ouvrage si précieux de Delamare m’a presque seul fourni les élémens de cet examen, et tout en suivant l’ordre méthodique que je me suis imposé, j’ai fait de nombreux emprunts à l’œuvre peu connue et trop peu lue d’un homme de grand mérite. Les fontaines publiques, l’eau, les grains, le pain, la viande, le poisson, les vins, la bière fournissent le sujet d’une étude rapide qui permet au moins, d’établir quelques probabilités sur l’influence hygiénique que ces alimens ont pu exercer sur la population à diverses époques.
Je termine enfin cette première partie de mon mémoire par la citation des disettes qui ont eu lieu jusqu’au dix-huitième siècle, et par l’énumération des maladies qui ont régné d’une manière épidémique ou endémique plus particulièrement dans les quatre quartiers du Louvre, Saint-Honoré, des Marchés et de la Banque, qui composent aujourd’hui le quatrième arrondissement.
Paris, 10 juin 1842.