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ОглавлениеDroit Civil. — Droit Pénal
TITRE PRÉLIMINAIRE
§ I. — Notions générales sur le droit malgache.
Droit écrit. — Droit coutumier
Le droit est l’ensemble des préceptes réglant la conduite de l’homme envers ses semblables et dont il est juste et utile d’assurer l’observation, au besoin par la force et à l’aide de punitions.
On donne le nom de lois à ces préceptes.
Parmi ces préceptes, les uns règlent les rapports des particuliers entre eux, leur ensemble constitue ce que l’on appelle le droit privé ou droit civil. Les autres règlent le droit de punir et indiquent les châtiments à appliquer aux coupables: leur ensemble constitue ce qu’on appelle le droit pénal.
Parmi les lois, les unes ont été expressément formulées par le législateur: elles sont écrites. Leur ensemble constitue le droit écrit. — D’autres, sans avoir été écrites, sont en vigueur et observées comme s’étant introduites par l’exemple et la coutume: c’est ce qu’on appelle le droit coutumier.
Le droit malgache comprend l’ensemble des lois qui règlent la conduite des Malgaches entre eux. Ces lois sont constituées tant par des lois écrites que par des lois coutumières.
Les lois écrites sont renfermées dans divers textes publiés dans l’ordre suivant: Ranavalona I (1828-1861) promulgua, lors de son avènement au trône, un code comprenant quarante-huit articles; en 1862, Radama II (1861-1863) promulgua un code de soixante et onze articles dont les dispositions atténuaient celles excessives contenues dans le code de 1828; mais, après sa mort, Rasoherina (1863-1868) rétablit les.lois de Ranavalona I.
En 1868, Ranavalona II (1868-1883) édicta un code comprenant cent un articles; en 1878, elle publia les Instructions aux Sakaizambohitra, et, en 1881, le Code des 305 articles, appelé aussi Instructions aux Antily. — Ranavalona III (1883-1897) publia, en 1889, les Instructions aux gouverneurs, sorte de code de procédure comprenant soixante et un articles.
Les lois écrites ci-dessus indiquées se rapportent tant au droit civil qu’au droit pénal; parmi celles de droit civil, ou peut citer toutes les dispositions du Code des 305 articles relatives au mariage (art. 50 et suiv.), celles du même code qui concernent les secours que les parents doivent aux enfants et les enfants aux parents (art. 111 et 112), celles aussi du même code qui règlent l’intérêt de l’argent (art. 161). Les dispositions de droit pénal sont excessivement nombreuses: elles visent les crimes punis de la peine capitale, les lois sur le vol, l’avortement, etc.
Les lois coutumières, manifestation spontanée de l’habitude et des besoins des particuliers, ne sont renfermées dans aucun texte, mais leur existence a été souvent consacrée dans les kabary ou proclamations des souverains. Les kabary d’Andrianampoinimerina (1787-1810) constituent à ce sujet une source très précieuse du droit coutumier; ce fut notamment dans un kabary fait par ce roi que fut consacré le droit pour la femme de réclamer à la dissolution du mariage le tiers des biens acquis par les époux pendant le cours de l’union. — Certaines lois coutumières se rapportent au droit pénal, mais la plupart intéressent le droit civil. On doit ranger parmi les lois coutumières les conventions fanekem-pokonolona que les membres de chaque fokonolona avaient autrefois l’habitude de contracter entre eux.
§ II. — Du droit malgache écrit et du droit malgache coutumier actuellement applicables
Droit écrit. — Le Code des 305 articles, publié en 1881, a abrogé les lois écrites antérieures. Toutefois, les Instructions aux Sakaizambohitra doivent être considérées comme ayant été maintenues dans leurs dispositions qui concordent avec la législation promulguée dans la suite; c’est ainsi que les annulations de contrats d’emprunt par suite de remboursement, annulations ordonnées par l’article 72 de ces instructions, doivent toujours avoir lieu conformément à ce texte qui est conforme à la législation malgache sur l’obligation de l’enregistrement des actes et à la réglementation édictée à ce sujet depuis 1896 (CT. 11 juin 1908).
Le Code des 305 articles de 1881 est toujours applicable, du moins dans ses principales dispositions intéressant le droit civil et le droit pénal. Mais il importe de retenir que, par le fait de diverses modifications apportées à la législation depuis 1896, certaines de ses dispositions de droit civil doivent être tenues pour abrogées: c’est ainsi que l’abolition de l’esclavage (AG. 26 septembre 1896), la suppression des menakely (AG. 17 avril 1897), la suppression des privilèges politiques et d’une partie des privilèges de droit privé des castes (AG. 15 juin 1898), ont rendu inapplicables plusieurs articles de ce code. — Les dispositions de droit pénal sont également inapplicables dans un grand nombre de cas. (V. Droit pénal).
Les Instructions aux gouverneurs de 1889 doivent être appliquées, du moins dans leurs principes, en ce qui concerne les conventions à enregistrer, les adoptions et rejets d’enfants, les testaments, les mariages, le choix des témoins, les emprunts à intérêt, les cohéritiers et les terres vendues ou données à bail. — Mais on doit observer avant tout qu’aux termes de l’arrêté du 25 juin 1904 ce ne sont plus les gouverneurs madinika, mais les gouverneurs qui sont chargés de l’enregistrement des actes et contrats et que les gouverneurs madinika n’ont plus dans leurs attributions que l’enregistrement des actes de l’état civil (Décret du 9 mars 1902).
Droit coutumier. — Le droit coutumier, maintenu dans l’article 263 du Code de 1881, est toujours en vigueur; mais, seule, une coutume générale et non locale et de village à village, réellement établie, larga inveterata consuetudo, peut être considérée comme une véritable loi coutumière (CT. 17 décembre 1903, 27 décembre 1906).
§ III. — Le droit malgache écrit ou coutumier est-il applicable sur tout le territoire de Madagascar
Il n’est pas douteux que dans l’esprit des souverains hova, une seule loi, la loi hova, devait exister dans tout Madagascar. La où est le roi, là est la loi, telle était leur maxime. Le Code de 1881 fut promulgué dans toute l’île, ou du moins sur tous les points de l’île où les Hova exerçaient la souveraineté. On peut en déduire que les dispositions de ce code et du droit coutumier s’y rattachant étaient applicables en Imerina, dans le Betsileo et dans les diverses régions de la côte Est et de la côte Ouest où les Hova étaient installés. C’est ainsi que la coutume relative aux successions tsy hani-maty momba et hani-maty momba, parait avoir toujours été appliquée dans la région de Vohémar (CT. 7 mai 1908); qu’une décision frappe de déchéance, par application de l’article 223 du Code de 1881, un demandeur de cette même région introduisant une instance au sujet d’une revendication de succession (CT. 31 décembre 1903); qu’une autre décision déclare applicable dans les territoires Antanosy la législation hova en matière de forêts et de terres (Tribunal Mananjary 28 septembre 1903) .
Mais de ces exemples, qu’il y a intérêt à voir se généraliser de plus en plus, on ne peut toutefois déduire pour l’instant la possibilité de l’uniformisation de la législation dans toute l’île. — Madagascar est un ensemble de populations très disparates au point de vue des mœurs et des coutumes; il semble bien difficile, sinon impossible, de leur appliquer, du moins sans transition, les mêmes lois. Seules, certaines règles, considérées comme d’ordre public, intéressant plutôt le droit public que le droit privé, peuvent être dès maintenant imposées partout. — Le décret du 9 mai 1909 envisage cette situation lorsqu’il dit dans l’article 116: «En matière civile, les tribunaux indigènes appliquent les lois et coutumes locales et, s’il y a lieu, les lois et les coutumes propres à la qualité des parties». En tout cas, il appartient au juge qui est appelé à statuer en dehors de l’Imerina (car même dans le Betsileo des coutumes particulières, assez générales pour être retenues, peuvent être constatées), de formuler avec soin la coutume retenue par dérogation au droit hova proprement dit, de la préciser, d’en indiquer le caractère général pour la région et de fournir toutes indications de droit et de fait de nature à justifier sa décision.