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II
LES PREMIÈRES BATAILLES ET LES PREMIÈRES VICTOIRES ALLEMANDES.

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Table des matières

Dès1884, le tableau du commerce de la France accuse une dépression générale de991millions sur l’année précédente, et de10% sur la moyenne de la période quinquennale antérieure. Par contre, l’exportation générale de l’Allemagne avait progressé de près d’un milliard de marks, comparativement avec1872: 3,335millions, au lieu de 2,492millions.

La marine marchande allemande, qui, en1870, était au dernier rang de celles des grandes puissances mondiales, conquiert le troisième, immédiatement après l’Angleterre et les États-Unis, et devance la France. Les Anglais, eux-mêmes, constatent avec stupeur que l’Allemagne porte une atteinte sérieuse à la suprématie industrielle et commerciale de l’Angleterre. Dans un discours prononcé à la Chambre de commerce de Manchester, en1885, le ministre du Commerce anglais, M. Goschen, faisait cette nette déclaration: «Bien «que l’on fasse des progrès en Angleterre, on en «fait de plus rapides ailleurs.»

L’invasion allemande en France a commencé. En1881, on compte chez nous plus de80,000immigrés teutons, dont31,300habitent Paris! C’est l’avant-garde!

En1889, l’Allemagne se sent en mesure de nous concurrencer victorieusement à l’Exposition universelle; elle s’était prudemment abstenue de participer à celle de1878!

Tout entière hypnotisée et absorbée par le succès prodigieux de la Tour Eiffel, et de la «Cité bleue» du Champ-de-Mars, qui, pendant six mois, mettent Paris en fête et la France en agitation, la grande presse se garde bien de jeter dans ce brillant concert d’enthousiasme mondain la moindre note d’inquiétude. La consigne générale est la célébration joyeuse du centenaire de la prise de la Bastille!

De1889à1900, les Industries d’art allemandes ne cessent de progresser. Non seulement l’Allemagne nous enlève notre clientèle artistique sur tous les marchés du monde qu’elle envahit et domine de plus en plus, grâce au développement incessant de son immigration, qui lui assure partout des agents actifs de propagande; mais elle nous fait de plus concurrence chez nous et dans nos colonies.

Pendant l’année1898, les importations de l’Allemagne en produits de ses Industries d’art ont augmenté de16millions sur l’année1897, et de 17millions et demi sur l’année1896. Ces différences portent principalement sur la Céramique, la Verrerie, les Cristaux, les Livres, les Estampes, la Bimbeloterie (Articles de Paris!), l’Horlogerie et le Mobilier.

Dans une séance tenue le17décembre1898, la chambre syndicale de l’Ameublement de Paris déclare officiellement que la fabrication du meuble en France, et spécialement à Paris, est depuis quelques années dans une situation difficile, en raison de l’importation étrangère, surtout allemande.

La grande industrie parisienne de l’Orfèvrerie et de la Bijouterie, sans rivale au monde, jusqu’au milieu du XIXe siècle, est profondément atteinte. Les Allemands, en cette même année1898, exportent en France633kilos d’or de plus; et nous leur en envoyons700de moins!

Aussi, de1880à1896, le centre de l’Ameublement, le faubourg Saint-Antoine, à Paris, a-t-il perdu près de10,000ébénistes; le quartier du Marais, le même nombre de bronziers, d’orfèvres et de lapidaires; Belleville, Popincourt et Ménilmontant, plus de10,000ouvriers de la Maroquinerie et de l’Article de Paris.

Relativement à la situation de la Bijouterie, le directeur d’un journal professionnel écrira en ce temps:

«La Bijouterie allemande continue sa marche ascendante. Si elle va de ce train encore quelques années,–et je ne vois pas ce qui l’en empêchera,–les fabricants français auront pour unique et dernière ressource de devenir les dépositaires de leurs collègues d’outre-Rhin. On m’affirme que quelques-uns ont déjà pris ce parti. On m’a cité des noms; mais on comprend que je ne puisse les publier!»

Mais, alors, la France est en pleine agitation du Boulangisme, à laquelle succédera la guerre civile du Dreyfusisme. On ne pense guère à l’Allemagne, à son prodigieux développement artistique, industriel et commercial; on l’oublie complètement. L’activité de la nation semble se résumer dans l’organisation de l’Exposition universelle de1900, la grande Foire du monde, imaginée pour célébrer l’aurore du XXe siècle, et par laquelle il doit être fait surtout la démonstration, suivant le discours grandiloquent, prononcé par le ministre du Commerce, à son inauguration, que: «L’Humanité monte, monte sans cesse vers cette région lumineuse et sereine où doit, un jour, se réaliser l’idéal et parfait accord de la puissance, de la justice et de la bonté»!!??

La guerre artistique avec l'Allemagne : l'organisation de la victoire

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