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VII

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La première fois que vous montez en omnibus, si dans votre jeunesse vous n’y avez pas été habitué, vous éprouvez une certaine contrariété d’amour-propre, et, une jambe déjà sur le marchepied, vous jetez un coup d’œil à droite et à gauche, pour bien vous assurer que personne de vos amis, de vos connaissances, ne vous voit pénétrer dans ce long corridor à stalles. Au bout de trois ou quatre courses, vous êtes fait à votre humiliation, bientôt même vous devenez cynique, et, sans rougeur, vous vous placez sur l’impériale, comme un magot-sur une étagère.

Ordinairement, ce n’est pas pour son plaisir qu’on va en omnibus. Je connais cependant des gens qui, ayant une heure à perdre, prennent volontiers à la Madeleine une place en l’air, comme disent les conducteurs, vont jusqu’à la Bastille en fumant leur cigare, et reviennent par le retour du véhicule.

Mais, pour les observateurs, il y a dans les diverses personnes composant la société d’un omnibus une multitude d’études à faire et de types à examiner. L’un reproche à sa voisine d’être trop grosse, la voisine reproche au vis-à-vis d’avoir les jambes trop longues; les femmes d’un certain âge se glissent de préférence entre deux hommes, à l’entrée de la voiture, où les places ne sont pas séparées.

Les jeunes filles de magasin portant généralement une caisse à chapeaux, ont toujours à lire une lettre qui ne ressemble guère à la facture de l’objet qu’elles vont rendre. Malgré l’embarras que causent leurs paquets, soyez sûr que si un homme mûr se présente, il ira directement, y eût-il dix places vacantes, se caser à côté de la modiste à qui il proposera galamment de prendre la moitié du fardeau.

Pour que la scène ne se passe pas ainsi, il faudrait que dans un coin de la voiture il y eût, lisant un rôle, une vraie ou fausse actrice d’un petit théâtre de Paris ou de la banlieue, car alors, comme un âne entre deux boisseaux d’avoine, et ne sachant de quel côté aller, le séducteur aura un moment d’hésitation et ira probablement à la cabotine. Le rôle aura eu plus d’attraction que la caisse.

Par le fait des jupons montés sur acier, et ayant une rotondité réglée d’avance, il arrive que les dames entrant en omnibus ont toute l’ampleur de leurs crinolines rejetée en arrière; comme conséquence, il advient que le caleçon n’a plus de mystère; les femmes installées, de s’empresser alors de rabaisser les jupes indiscrètes, et les hommes, dans la crainte sans doute de voir le bas poussiéreux ou boueux de celles-ci maculer leurs pantalons, de ne pas y mettre la même bonne volonté.

Il est rare qu’une course en omnibus ne vous offre pas un côté comique: un monsieur replet ayant bien déjeuné ou dîné est à peine assis qu’il est pris de sommeil; il cherche aussitôt son point d’appui, et prend pour oreiller, à son choix, l’épaule d’un de ses voisins, jusqu’au moment où, énervé et fatigué, celui-ci se retire subitement et laisse la tête du dormeur aller presque jusqu’à terre. La commotion, le rire de toute la voiture réveillent momentanément l’assoupi; qui, à force de se pincer la peau, de se mordre les lèvres, reste les yeux ouverts jusqu’à destination.

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