Читать книгу Petit Bob - Sibylle Riqueti de Mirabeau - Страница 6

BOB A L’EXPOSITION

Оглавление

Table des matières

Bob.—Costume de velours écossais. Col «Rembrand», béret de velours écossais. Au côté du béret, la salamandre de François Ier; chaussettes écossaises.

L’abbé.—Il y a de fréquents tiraillements, l’abbé voulant généralement regarder les choses qui ennuient Bob, et réciproquement.

A L’EXPOSITION DES BEAUX-ARTS

APPLIQUÉS A L’INDUSTRIE

Bob.—M’sieu l’abbé, vous êtes un égoïste!

L’abbé.—Bob, vous allez être puni.

Bob.—Qu’est-ce que ça m’fait, puisque j’le suis tout l’temps? ainsi... ça changera pas grand’chose...

L’abbé.—On croirait, à vous entendre, que vous êtes victime...

Bob.—Oui, q’je l’suis victime... Travailler quatre heures par jour... à mon âge...

L’abbé.—Ce n’est rien du tout.

Bob.—Oui, si l’reste du temps j’étais libre... mais j’vous ai, m’sieu l’abbé, l’reste du temps!...

L’abbé.—Eh bien?

Bob.—J’vous promets q’j’aimerais mieux travailler deux heures d’plus, et puis pas vous voir après.

L’abbé.—Enfin, où voulez-vous aller?

Bob.—Pour le moment, m’sieu l’abbé, j’voudrais aller voir les cages où qu’y a des p’tits oiseaux qui chantent.

L’abbé.—«Où qu’y a!» Bob, je vous en prie, parlez au moins convenablement; je ne vous demande pas de parler élégamment, mais...

Bob.—Manquerait plus q’ça, q’vous m’le demandiez, comment que j’parlerais quand j’s’rais grand, donc!

L’abbé.—Je vous défends de raisonner! Répétez: «Des cages dans lesquelles il y a de petits oiseaux qui chantent.» Si vous ne faites rien de ce que je vous dis, alors ma présence près de vous est totalement inutile.

Bob.—C’est c’que je m’dis tout l’temps, m’sieu l’abbé. Pourtant, c’est pas que j’vous aime pas, contraire, j’vous aime bien... mais pas quand c’est pas les leçons...

L’abbé.—Quand «ce ne sont pas» les leçons. Répétez.

Bob.—«Quand ce ne sont pas les leçons.» T’nez, les v’là, les oiseaux! m’sieu l’abbé!

L’abbé.—Bob, vous parlez encore plus mal, on dirait que vous le faites exprès. J’en avertirai madame votre mère, qui est désespérée de votre langage et peut-être plus encore de votre déplorable accent.

Bob.—Lequel trouvez-vous l’plus joli, l’rouge ou l’bleu, dites, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Ça m’est égal.

Bob.—Pourtant vous d’vez avoir une opinion, m’sieu l’abbé, à votre âge?

L’abbé.—Si vous croyez que cela m’amuse, de regarder ces bagatelles...

Bob, avec intérêt.—Ah! c’est des «bagatelles»? J’croyais que c’étaient des mécaniques.

L’abbé.—Naturellement ce sont des mécaniques.

Bob.—Alors pourquoi q’vous dites q’c’est des bagatelles?

L’abbé.—Parce que «bagatelle» signifie une chose de peu d’importance, une babiole.

Bob.—Ça doit pourtant pas être facile, m’sieu l’abbé, hein? d’faire ça?

L’abbé.—Rien n’est plus malhonnête que de dire à chaque instant: «Hein?» comme vous avez l’habitude de le faire.

Bob.—Pardon, m’sieu l’abbé! Oh! regardez celui-là qui r’mue ses ailes... et l’autre sa queue, et ils chantent!... Ah! q’c’est rigolo!

L’abbé.—Bob, je vous défends de parler ainsi.

Bob.—Est-ce qu’y mangent, ces oiseaux-là, est-ce qu’y boivent, est-ce qu’y...?

L’abbé hausse les épaules sans répondre, mais ce mouvement est absolument perdu pour Bob, absorbé dans la contemplation des oiseaux.

Bob.—Est-ce qu’y font des p’tits, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Bob, il est incroyable qu’un enfant de huit ans fasse d’aussi absurdes questions. Comment voulez-vous que des oiseaux empaillés...?

Bob.—Dame! y chantent bien! (Silence.) C’est-y donc plus difficile d’faire un p’tit que d’chanter?

L’abbé.—Je ne sais pas. C’est assez dire de bêtises comme cela.

Bob.—Mais puisque vous d’vez m’apprendre c’que j’sais pas? Puisque vous m’dites toujours d’vous questionner, quand y a quelque chose que j’saisis pas complètement?

L’abbé.—Quand vous me faites des questions sensées et raisonnables, certainement...

Bob.—Alors, m’sieu l’abbé, expliquez-moi, au moins, c’que c’est q’les questions sensées et raisonnables.

L’abbé.—Avez-vous assez vu?

Bob.—D’mandez voir un peu combien q’ça coûte, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Pourquoi?

Bob.—Pour savoir.

L’abbé, s’approchant et parlementant.—Le plus petit est de 120 francs.

Bob.—Eh bien! j’ai 140 francs q’m’a donnés bonne m’man, j’vais l’acheter.

L’abbé.—Je ne vous permettrai pas de faire une dépense comme celle-là sans consulter madame votre mère.

Bob.—Mais puisque c’est pour que j’m’en fasse du plaisir avec, que bonne m’man m’les a donnés, les 140 francs!

L’abbé.—N’importe, vous ne les emploierez pas ainsi. (Il veut entraîner Bob qui résiste.) Venez voir fonctionner les machines, là-bas au bout, c’est beaucoup plus instructif pour vous.

Bob.—J’suis pas ici pour m’instruire, j’y suis pour m’amuser; et les machines ça m’agace, j’y comprends rien, et ça fait un bruit!

L’abbé.—Habituez-vous donc à faire convenablement sentir les liaisons en parlant... On ne dit pas: «Ça fait un bruit» comme si «un» s’écrivait par un «H»; on fait sentir le «T» qui précède, et on dit: «Cela fait T’un bruit.» Comprenez-vous?

Bob.—Oui; alors, faut-y dire, à votre avis, m’sieu l’abbé: «Sept et trois font onze», ou «font T’onze»?

L’abbé.—Il faut dire «sept et trois font T’onze» sans hésiter.

Bob, ricanant.—Vraiment? Eh ben, moi, j’crois, m’sieu l’abbé, qu’y faut dire «sept et trois font dix»!

L’abbé, vexé.—Vous faites les plaisanteries les plus sottes et les plus déplacées.

Bob.—M’sieu l’abbé, c’était seulement pour q’vous voyiez q’ça peut arriver à tout l’monde d’faire une trompe...

L’abbé.—«Faire une trompe!!!» Quel langage, grand Dieu!!!

Bob.—Regardez les beaux meubles, les belles étoffes épaisses et douces qu’ont l’air d’étoffes en fourrure...

L’abbé.—C’est très joli. Et ce beau lit couvert en satin rouge? C’est trop beau, c’est un luxe ridicule; et puis cette estrade doit être très incommode.

Bob.—Oh! ça n’fait rien, l’estrade, pourvu q’ça n’crie pas. Pensez-vous qu’y crie, celui-là, dites, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Comment! qu’il crie? Que voulez-vous dire?...

Bob.—J’sais pas! c’est mon oncle qui disait ça! l’autre jour, quand j’suis venu ici avec lui, nous nous avons promené avec...

L’abbé.—Nous nous «sommes» promenés. Répétez.

Bob.—«Sommes!» avec une jolie dame qui voulait acheter des meubles pour chez elle, à la campagne. Alors, elle cherchait des lits qui crient pas parc’ que...

L’abbé.—C’est bon, c’est bon...

Bob.—Oh! m’sieu l’abbé, là... dans ces petits cadres, où y a des p’tites choses peintes dessus!... Oh!!! la belle danseuse!... R’gardez, m’sieu l’abbé!...

L’abbé.—Oui, oui...

Bob.—C’est comme celles que j’ai vues l’autre jour, q’j’étais à l’Opéra! Oh! m’sieu l’abbé, y en avait beaucoup comme ça, et des belles!!... Une surtout qui avait tout l’temps les jambes en l’air, que je m’demandais sur quoi qu’elle posait!!! les jambes en l’air, et les jupons au-dessus... et elle tombait pas; on aurait dit un papillon. Oh! j’voudrais q’vous voyiez ça!

L’abbé.—Je n’en ai nulle envie.

Bob.—Parc’ que vous savez pas c’que c’est! mais c’est admirable! Elles ont des jambes toutes nues! et les bras, et le haut, tout nu aussi! et des costumes qu’ont l’air en nuages et en or! C’est superbe!... La danseuse dont j’vous parlais, surtout! Oh! si vous la voyiez!

L’abbé.—Mais puisque cela m’est égal.

Bob, s’animant.—Parc’ que vous l’avez pas vue, q’vous dites ça? Mais si vous la voyiez, j’vous réponds q’ça vous serait pas égal! C’est si tellement beau!

L’abbé, énervé.—Il suffit.

Bob.—Qui q’c’est c’gros homme en terre rouge?

L’abbé.—On dit «qui est» ce gros homme. Où donc?

Bob.—Là, à côté d’Gambetta.

L’abbé.—C’est Mirabeau.

Bob.—Qui q’c’est Mirabeau?

L’abbé.—Un orateur célèbre; vous apprendrez cela plus tard; il a prononcé des discours qu’on a conservés comme les plus belles pages d’éloquence qui...

Bob.—J’sais! j’les ai vus dans la bibliothèque, ses discours! Un p’tit livre bleu qui s’appelle: Lettres d’amour de Mirabeau à Sophie. C’est-y ça, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Vous ne touchez pas aux livres de la bibliothèque, j’espère?

Bob.—Jamais, m’sieu l’abbé... La clef n’est pas dessus... m’man l’ôte toujours... Vous aviez l’air inquiet... tout d’suite... Qu’avez-vous donc z’eu?

L’abbé.—C’est vraiment désolant! Quand vous faites une liaison, par hasard, vous la faites à faux. On dit: «Qu’avez-vous donc qu’eu», en faisant sentir le c de donc. Répétez.

Bob, répétant rageusement.—«Qu’eu», m’sieu l’abbé, «qu’eu». Vous les avez lus, dites, les discours à Sophie?

L’abbé.—Eh non!

Bob.—Alors, comment q’vous savez q’c’est des si belles pages d’éloquence... q’vous disiez tout à l’heure?

L’abbé.—Je parlais des discours politiques.

Bob.—Et les discours qui sont dans le p’tit livre bleu?

L’abbé.—Je n’en sais rien, je ne les connais pas.

Bob, étonné.—Comment! y a des choses q’vous savez pas, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Sans doute.

Bob.—Et qui, qui vous les apprendra?

L’abbé.—Ce sont des choses inutiles à apprendre.

Bob.—Alors, moi, j’les apprendrai pas non plus?

L’abbé.—On verra ça. (Il veut passer.)

Bob, le retenant.—C’était-y un brave homme, Mirabeau, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Non.

Bob.—Pourquoi, dites?

L’abbé.—Pour des raisons trop longues à vous expliquer.

Bob, vexé.—Ah!!! Et Gambetta?

L’abbé.—Quoi?

Bob.—Eh bien! Gambetta, c’est-y un brave homme?

L’abbé.—Ce sont des questions sans intérêt pour vous, Bob, venez! (Il le tire par la main.)

Bob, se cramponnant à la lustrine verte qui recouvre les gradins.—J’veux regarder, ça m’amuse, moi! Lequel trouvez-vous l’plus joli, m’sieu l’abbé, Mirabeau ou Gambetta?

L’abbé, qui ne veut pas se compromettre.—Ce n’est pas le même genre...

Bob.—Mais lequel q’vous aimez mieux, des genres?

L’abbé.—Je ne sais pas, je crois que Mirabeau...

Bob.—Ben, moi, savez-vous qui que j’trouve l’plus joli? c’est la p’tite femme d’à côté.

L’abbé.—Où donc?

Bob.—Là, où qu’y a avec elle un homme qu’a des jambes en chèvre, et un p’tit enfant qui tient une corbeille. (Il montre un groupe de Clodion.) Est-ce pas qu’elle est jolie, m’sieu l’abbé, la p’tite femme?

L’abbé.—Oui, oui.

Bob.—Vous avez pas l’air d’trouver?

L’abbé, agacé.—Mais si, mais si. (Il l’emmène.)

Bob, s’arrêtant devant un plat émaillé.—Oh! la belle dame! avec cette toque à plumes! Qui c’est, dites, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Je ne sais pas, c’est une tête de fantaisie.

Bob, insistant.—Ça doit être quelqu’un, j’suis sûr.

La marchande, qui s’est approchée.—C’est la «belle Gabrielle», monsieur.

Bob.—Ah! voyez-vous, m’sieu l’abbé! Qui c’était, dites, la belle Gabrielle?

L’abbé.—Je ne sais pas trop...

Bob, incrédule.—Comment! vous savez pas c’que la jolie dame sait, qu’a des ch’veux blancs...

L’abbé.—Quels cheveux blancs?

Bob.—Là, dans la boutique, la jolie dame toute jeune, qu’a des ch’veux blancs...?

L’abbé.—Eh bien? Après?

Bob.—Ben, elle a dit: «C’est la belle Gabrielle.» Qui q’c’est la belle Gabrielle?

L’abbé.—C’était une dame de la cour de Henri IV. Comme vous ne savez pas ce que c’est que Henri IV...

Bob.—Si, q’je l’sais. C’est un roi de France, Henri IV, q’mon oncle a dit qu’aimait tant les femmes, la gloire, et qui buvait si sec qu’il était pas remplaçable! Et la belle Gabrielle était son amie, qu’a aussi dit mon oncle.

L’abbé, vexé.—Si vous avez demandé tous ces renseignements à monsieur votre oncle, il était inutile de me les faire répéter.

Bob.—Si donc! puisque c’était pour voir si vous l’saviez, et si vous m’diriez comme lui, ou bien si, quand vous savez pas, vous inventez quelqu’chose.

L’abbé.—Vraiment? Et ai-je dit comme monsieur votre oncle?

Bob, très digne.—A peu près. Alors, comme ça, elle était l’amie du roi?

L’abbé.—Oui.

Bob.—Il l’aimait bien, le roi?

L’abbé.—Oui.

Bob.—Il avait d’la chance, Henri IV, d’avoir une amie jolie comme ça! J’ai vu son portrait dans des livres, il était bien laid!!! Vous avez p’t-être une amie jolie comme ça aussi, vous, dites, m’sieu l’abbé? J’ai du sable plein mon soulier, m’sieu l’abbé.

L’abbé.—Otez-le.

Bob se déchausse en s’appuyant sur l’abbé incliné; il enlève son soulier et souffle dans les yeux de l’abbé le sable qu’il contient.

L’abbé.—Bob, vous êtes insupportable.

Bob.—C’est pas d’ma faute, m’sieu l’abbé, j’ai pas fait exprès. Si vous en avez aussi, du sable, vous pouvez me l’souffler, j’dirai rien.

L’abbé hausse les épaules sans répondre.

Bob.—C’est drôle, m’sieu l’abbé, vous avez pas des pieds pareils aux miens!

L’abbé.—Naturellement, les miens sont plus grands...

Bob.—C’est pas seulement ça! ça serait naturel, ça! c’est qu’y font des bosses partout. On dirait des sacs d’noix, ou bien des écailles d’tortue, ou...

L’abbé.—C’est bon, c’est bon, occupez-vous de ce qui vous regarde.

Bob.—Si j’les regarde, m’sieu l’abbé, c’est malgré moi... Voyez-vous cette belle p’tite dame qui marche là devant nous... avec une robe en peluche...?

L’abbé.—Oui.

Bob.—Ben, c’est celle à qui q’mon oncle recommande d’choisir des lits qui crient pas...

L’abbé.—Ah!!!

Bob.—Elle est bien jolie, est-ce pas m’sieu l’abbé? Elle a des couleurs comme un hanneton, une belle croupe dorée comme la jument d’papa. C’est-y à elle, cette croupe-là?

L’abbé.—Voulez-vous vous taire, Bob?

Bob.—Oh! c’est pas du mal, allez, que j’dis, c’est vrai. Miss, que j’avais avant vous, m’sieu l’abbé, elle avait une belle croupe comme ça... tendue... tendue... Ben, ça n’tenait pas. Elle l’ôtait tous les soirs; nous l’avons trouvée dans un coin, avec Fred. Ça avait l’air en caoutchouc... même que nous nous sommes amusés à nous laisser tomber assis dessus, comme les clowns font sur des vessies; mais ça r’bondissait... ça voulait pas crever...

L’abbé.—C’est très mal ce que vous avez fait là.

Bob.—Pourquoi? On m’dit toujours que l’mensonge finit pas être découvert; eh ben! c’était un mensonge qu’elle faisait... Miss... elle parlait pas, c’est vrai, mais elle mentait tout de même...

L’abbé.—C’était un mensonge sans conséquence, on n’l’aurait pas su, si...

Bob.—Ben, pas du tout. Mon oncle disait toujours à p’pa: «La gouvernante d’tes enfants a des rondeurs... qui donnent envie d’les tâter...» Comprenez-vous, m’sieu l’abbé? si l’oncle Jacques avait tâté, il aurait tout découvert.

L’abbé.—Bob, vous vous occupez de choses qui ne vous regardent nullement.

Bob, pensif.—Qui ça regarde-t-y alors?

L’abbé, embarrassé.—Personne.

Bob.—Pas même l’bon Dieu? C’est que, voyez-vous, m’sieu l’abbé, y a des choses que j’peux pas m’expliquer. On m’dit toujours qu’on n’doit se préoccuper d’plaire qu’au bon Dieu?

L’abbé.—Sans doute.

Bob.—Ben, Miss, qui mettait un faux... c’que vous voudrez, m’sieu l’abbé, c’était pas pour plaire au bon Dieu, qui savait bien c’qu’y avait dessous, est-ce pas?

L’abbé.—Mais...

Bob.—Alors c’était pour plaire à qui?

L’abbé.—Mais... je ne sais...

Bob.—Vous répondez pas d’bon cœur; est-ce que vous mettez aussi des choses en caoutchouc, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Vous dites des stupidités.

Bob.—J’sais pas si je m’trompe, mais y m’semble q’l’année dernière, l’exposition d’ici était plus jolie q’maintenant?

L’abbé.—Cela n’a rien d’extraordinaire, on n’est pas très rassuré sur les événements à venir, et...

Bob.—Pourquoi qu’on n’est pas rassuré?

L’abbé.—Je ne puis pas vous expliquer cela, c’est trop compliqué!

Bob.—Mais enfin, vous l’comprenez, vous, m’sieu l’abbé?

L’abbé.—Oui, mais...

Bob.—Alors, pourquoi q’je l’comprendrais pas?

L’abbé.—Je pense que vous avez assez vu, à présent nous allons partir.

Bob.—Si vous voulez, m’sieu l’abbé, mais laissez-moi acheter l’oiseau?

L’abbé.—De 120 francs! jamais de la vie; c’est beaucoup trop cher. Choisissez quelque chose dans des prix plus doux, 20 à 25 francs.

Bob.—M’sieu l’abbé, j’veux la photographie d’la danseuse dans le p’tit cadre où qu’y a des pigeons peints dessus, vous savez, celle qui lève une jambe tout, tout haut?...

L’abbé.—Non, non, prenez autre chose.

Bob.—C’est ça que j’veux! M’man m’a permis d’choisir c’que j’voudrais.

L’abbé.—Mais il y en a d’autres tout aussi jolies, dans les mêmes cadres.

Bob.—C’est celle-là qui m’plaît, elle ressemble à l’autre, la vivante, que j’voudrais tant q’vous voyiez, m’sieu l’abbé.

La marchande rit; elle veut emballer le cadre, mais Bob s’y refuse absolument, et part radieux, emportant sa danseuse. Au bout de quelques pas, il a laissé tomber trois fois le cadre que l’abbé se décide à porter lui-même.

Petit Bob

Подняться наверх