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CHAPITRE XI.
SUITE DE GIOTTO.

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Table des matières

Giotto, admiré sans réserve par ses contemporains, fut appelé dans toute l'Italie; ses tableaux sont des scènes de l'Évangile, qu'il ne se faisait pas scrupule de répéter, presque de la même manière, en des lieux différents. Une certaine symétrie qui plaît à l'amateur éclairé, et surtout un dessin moins anguleux, et un coloris plus moelleux que chez ses rudes prédécesseurs, les distinguent facilement. Ces mains grêles, ces pieds en pointe, ces visages malheureux, ces yeux effarés, restes de la barbarie apportée de Constantinople, disparaissent peu à peu. Je trouve que ses ouvrages plaisent d'autant plus qu'ils sont de moindre dimension.

Par exemple, les petites figures de la sacristie du Vatican sont des miniatures pleines de grâce; et ce qui manquait surtout aux arts avant lui, c'est la grâce. Quelque sauvages que soient les hommes, on peut leur faire peur, car ils ont éprouvé la souffrance; mais, pour qu'ils fassent attention à ce qui n'est que gracieux, il faut qu'ils connaissent le bonheur d'aimer.

Giotto sut exprimer beaucoup de petites circonstances de la nature peu dignes des scènes graves où il les introduisait; mais c'était la nature.

On peut dire qu'il fut l'inventeur du portrait. On lui doit entre autres ceux du Dante, son ami. Quelques peintres avaient bien cherché la ressemblance avant lui; mais le premier il réussit. Il était architecte. Le fameux clocher de la cathédrale de Florence fut élevé sur ses dessins. C'est réellement une tour très-remarquable. Quoique un peu gothique, elle donne sur-le-champ l'idée de la richesse et de l'élégance. Elle est isolée de l'église, et se trouve dans l'endroit le plus fréquenté de la ville, fortune qui manque à beaucoup de monuments admirables.

Giotto voyagea toute sa vie. A peine de retour d'Assise, Boniface VIII le fit venir à Rome, où il eut une nouvelle occasion de voir l'antique.

Avignon étant devenu la résidence des papes, Clément V l'appela en France. Avant d'y aller, il s'arrêta dans Padoue. De retour en Italie, après huit années d'absence, les princes, ou du moins ceux qui aspiraient à le devenir, semblèrent se le disputer.

Chaque ville avait quelque famille puissante qui ambitionnait le pouvoir suprême, et ces familles, profitant de la sensibilité du peuple, en embellissant leur patrie, cherchaient à l'asservir. C'est cette politique qui rendit si brillante la carrière de Giotto. Les Polentini de Ravenne, les Malatesti de Rimini, les Este de Ferrare, les Castruccio de Lucques, les Visconti de Milan, les Scala de Vérone, firent tout au monde pour l'avoir quelque temps à leur service.

Le roi Robert le fit venir à Naples, et le combla de distinctions. Ce roi, qui était homme d'esprit, encourageait Giotto, qui passait pour avoir la repartie la plus brillante de l'Italie. Mais il faut de l'indulgence pour l'esprit de ce temps-là.

Un jour, par une chaleur accablante,—«Si j'étais à ta place, dit le roi, je me donnerais un peu de relâche.—Et moi aussi, si j'étais roi.

—Puisque rien n'est impossible à tes pinceaux, peins-moi mon royaume.» Quelques instants après, le roi revient à l'atelier, et Giotto lui présente un âne revêtu d'un bât fort usé, et flairant avec l'air de la stupidité et du désir un bât tout neuf qui est à ses pieds. Toute l'Italie rit de cette caricature qui plaisantait les Napolitains sur l'empressement qu'on eut toujours à Naples pour changer de souverain.

Histoire de la peinture en Italie

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