Читать книгу Traité complet des haras, et moyens d'améliorer et de multiplier les chevaux en France - Achille Demoussy - Страница 6
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LES HARAS.
ОглавлениеRemplacement des jumens communes par des jumens plus distinguées; mode à suivre.
Les chevaux des premiers croisemens ne doivent point être employés à la reproduction.
Utilité pour les haras du séjour des grands propriétaires dans leurs terres.
Moyens de faire prospérer les haras; primes, etc.
La consommation de nos chevaux indigènes est le moyen le plus puissant de prospérité de nos haras.
Organisation militaire à donner aux haras.
Les haras sont une dépendance nécessaire de l’agriculture. L’amélioration dé toutes nos races chevalines doit exercer la plus grande influence sur le sort des cultivateurs. Les chevaux sont leurs auxiliaires dans la longue série des travaux qui vivifient leurs champs. Dans un grand nombre de nos provinces, le laboureur ne renverse ses guérets qu’avec l’aide de ces utiles compagnons de ses labeurs; le commerçant les emploie pour le transport de ses denrées et de tous les objets de consommation; le guerrier, chargé de défendre le sol sacré de la patrie, communique à son coursier son ardeur belliqueuse, et partage avec lui l’honneur de la victoire et les dangers du combat. Le cheval rend à son possesseur tous les services qu’il a droit d’en attendre; et, comme l’a dit Buffon, le peintre de la nature, l’homme a étendu sa domination sur toutes les espèces d’animaux qui peuplent la terre, dès qu’il est parvenu à mettre sous le joug ce fier et fougueux animal.
La multiplicité des services qu’il nous rend à chaque instant de sa vie doit donc nous engager à nous livrer avec zèle et persévérance à son éducation, et à lui communiquer, par des croisemens bien calculés et suivis avec constance, les qualités qui distinguent si éminemment les races des contrées orientales. Moins favorisée sous ce rapport que l’Asie, l’Europe ne peut parvenir à posséder des chevaux distingués qu’en appatronnant ses jumens indigènes avec les rapides coursiers que voit naître le berceau du genre humain.
Le cultivateur qui nourrît une jument commune et qui n’en obtient qu’un service de peu de durée, lui accorde les mêmes soins, lui prodigue les mêmes alimens qu’à celle dont l’amélioration a déjà fait des progrès. Il a donc tout à gagner en augmentant la somme de ses qualités et en perfectionnant ses formes, puisqu’il acquiert le double avantage de la vendre à un prix plus élevé et d’en obtenir un travail plus agréable, plus prolongé et plus actif. C’est aux riches propriétaires à donner l’impulsion aux autres agriculteurs, et à leur tracer la marche qu’ils doivent suivre pour améliorer leurs races.
On ne parvient à d’utiles résultats que par des croisemens gradués. Celui qui possède des poulinières qui n’ont point de sang, pour me servir de l’expression consacrée, n’atteindra pas le but qu’il se propose, s’il veut de suite les appatronner avec des chevaux arabes: il y a trop d’inégalité dans leurs formes, dans leur tempérament, dans leur organisation intime, pour qu’il puisse se flatter du succès. Pour fonder un édifice qui puisse résister pendant des siècles à la main destructive du temps, il faut l’établir sur de larges bases et le consolider par tous les moyens que l’art indique.
Il en est de même en haras: avant de songer à perfectionner nos races, il faut augmenter la taille, le volume, la largeur des membres des jumens que nous voulons consacrer à la reproduction. Nous ne pouvons accroître leurs dimensions qu’en les appareillant avec des fils ou des petits-fils d’arabes qui ont déjà reçu de leurs pères une portion du sang généreux qu’ils doivent transmettre à leurs enfans, et qui ont conservé l’étoffe, la taille et la force des membres que leur ont léguées les mères déjà distinguées auxquelles ils doivent la naissance. Ces chevaux sont bien plus propres à jeter les fondemens d’une bonne et constante amélioration, que les chevaux fins, légers, nerveux, auxquels les cultivateurs donnent toujours la préférence.
Il en est des chevaux comme de l’homme: l’individu dont les muscles sont prononcés, la poitrine ouverte, les épaules larges, est bien plus propre à résister à la fatigue que celui dont la charpente étroite, allongée, couverte de bandes musculeuses peu saillantes, lui permet bien de se livrer momentanément à quelques contractions énergiques, mais qui ne peuvent être de durée, parce que son organisation se refuse à un travail soutenu.
L’établissement des courses prouve cette assertion d’une manière indubitable. Presque tous les chevaux qui ont brillé dans l’arène, ont une construction forte et robuste; et si, dans leurs premiers élans, ils étaient dépassés dans la carrière par des chevaux plus sveltes, ils regagnaient bientôt l’avantage qu’ils avaient perdu, parce que la somme de leurs forces était infiniment supérieure, et qu’ils pouvaient fournir, pendant toute la durée de la course, à la déperdition énorme du fluide nerveux qui est si nécessaire à des contractions musculaires aussi violentés.
S’il fallait remonter aux temps reculés pour appuyer les faits qui se sont passés sous nos yeux, je pourrais citer Homère et parler d’Ulysse aux larges épaules qui remporta le prix de la course aux funérailles de Patrocle. Mais pourquoi irais-je consulter la docte antiquité, pendant que des exemples annuels nous démontrent cette proposition jusqu’à l’évidence?
Les propriétaires doivent donc remplacer successivement leurs jumens fines et élancées par des poulinières à formes carrées et robustes, qu’ils procréeront par degrés à la faveur d’appareillemens bien calculés.
Dans les pays de petite culture, le morcellement des propriétés permet difficilement aux agriculteurs de conserver leurs poulains aussitôt qu’ils ont un an révolu. Si leurs races sont exclusivement destinées à la selle, ils ne mettent leurs poulinières qu’en dernière ligne. Leur meilleur fourrage est réservé pour leurs bœufs d’engrais; le foin de seconde qualité est destiné aux vaches, et la jument profite pour s’alimenter de ce qui a été dédaigné par les bêtes à cornes sur lesquelles repose le travail de la ferme.
Ce régime est basé sur l’importance relative que les cultivateurs attachent à chaque espèce d’animal, importance qui est fondée sur les bénéfices qu’ils en retirent et sur le genre de service qu’ils en exigent.
Les jumens qui ne sont pas utiles à la culture ne sont nourries dans les fermes que pour consommer l’excédant du fourrage; si les prairies sont en petite quantité, elles sont impitoyablement proscrites: aussi le nombre des poulinières est-il toujours très-restreint; elles ne pourront s’accroître qu’autant que les cultivateurs abandonneront l’ornière de la routine tracée par leurs pères, pour augmenter la masse de leurs fourrages par la création des prairies artificielles dont les produits seront spécialement destinés à leurs espèces bovines. En augmentant les ressources alimentaires de leurs animaux domestiques, ils obtiendront l’avantage de conserver une jument poulinière dans chaque domaine.
Les cultivateurs qui nourrissent des jumens poulinières dans les domaines qu’ils exploitent, renoncent souvent à l’éducation des poulains, soit parce que voulant les conserver, ils voient leurs espérances déçues par les accidens nombreux qui sont la suite inévitable de la pétulance de ces jeunes animaux, soit parce qu’ils ne les vendent pas, quand ils ont besoin de s’en défaire. Plus leur âge est avancé, plus les accidens sont à craindre, parce que l’excès de force et de vie qui surabonde dans les poulains de deux et trois ans les porte à se livrer aux mouvemens les plus fougueux et à franchir les haies, les fossés, les ravins, pour aller offrir les prémices de leur amour aux jumens qui paissent dans leur voisinage.
Cette impulsion irrésistible de la nature devient encore plus puissante, lorsqu’ils ont quatre ans révolus. Il est alors bien difficile de les maîtriser, et le cultivateur, habitué à dompter ses taureaux avec lesquels il passe presque toute sa vie, ne redoute pas leurs cornes menaçantes, tandis qu’il craint de faire l’essai de ses forces et de son adresse avec les jeunes chevaux dont les mouvemens vifs et rapides l’étonnent et l’effraient. Il les redoute, parce qu’il ne s’occupe d’eux que d’une manière très-secondaire, et que les soins qu’il leur accorde se bornent à mettre du fourrage dans leur ratelier et à les conduire au pâturage.
Quand les chevaux sont constitués de manière à pouvoir être attelés à la charrue, l’habitude de les toucher, de les panser, de. les maîtriser, dès qu’ils commencent à être soumis au travail, inspire bientôt aux cultivateurs la plus grande sécurité. Il n’en est pas de même dans les provinces où les chevaux ne sont propres qu’à la selle; ils passent les premières années de leur vie à errer dans les pâturages ou à croupir à l’écurie.
Le volume de tous les herbivores est toujours subordonné à l’abondance et à la qualité nutritive des plantes qui servent à leur nourriture. Plus la végétation est active et riche en matériaux alibiles, plus les animaux prennent de taille, de volume et de corpulence. Le développement des chevaux, des bœufs, des brebis, est toujours en rapport avec la fertilité du sol qui les nourrit et la richesse des alimens qui leur sont prodigués dans les premières années de leur existence. J’en citerai un exemple frappant.
Depuis 1794 jusqu’en 1816, on était imbu, au haras de Pompadour, de l’idée que les poulains limousins devaient être nourris avec parcimonie pour leur donner un tempérament robuste et pour les préserver du fléau de la fluxion périodique et de toutes les maladies que la pléthore occasione. On ajoutait seulement une petite ration de son à la botte de fourrage qui leur était donnée.
Cette substance, qui n’est que la pellicule du grain et qui ne contient de matière nutritive que par son union avec la farine qui a échappé à l’action du blutoir, est très-indigestible. Elle fermente avec la plus grande facilité dans le grenier où elle est amoncelée. Cette fermentation donne lieu au développement d’une quantité innombrables de petits insectes que l’on connaît sous le nom d’acares. Ils rendent l’emploi du son plus dangereux, puisque l’estomac chargé de ce lest ne peut en extraire aucune matière alibile, et que l’organisation s’imprègne peu à peu de principes nuisibles qui sont le résultat nécessaire de la décomposition du son et de la dissolution de ces animalcules.
Tant que ce régime vicieux subsista, les poulains du haras faibles, maigres, languissans, se faussaient dans leurs aplombs et ne prenaient de développement qu’à quatre ans révolus, parce qu’ils n’étaient retirés des pâturages qu’à cette époque, et que leur régime se composait de foin et d’avoine qui ne leur était accordée qu’à cet âge.
La débilité dont ils étaient frappés amenait la déviation des colonnes chargées de supporter la masse; ils devenaient panards, et leurs jarrets étaient clos, parce que le poids du corps les forçait à se rapprocher du centre de gravité, à l’instar de l’enfant valétudinaire dont les genoux se dirigent en dedans et le rendent bancal, lorsqu’une maladie de langueur affaiblit peu à peu le ressort des articulations et tarit insensiblement les sources de la vie.
Lorsque les soins hygiéniques furent mieux calculés, et que ce malheureux système de faire souffrir les poulains dans leurs premières années fut abandonné, on reconnut bientôt combien il est nécessaire de leur prodiguer une nourriture saine et abondante pour leur donner les dimensions et la force qu’ils sont susceptibles d’acquérir.
Depuis l’adoption de ce régime basé sur le foin et l’avoine, les poulains à quatre ans ont été plus formés que leurs prédécesseurs ne l’étaient autrefois à six; leurs membres se sont élargis, leur taille s’est accrue, et leurs formes sveltes et déliées sont devenues plus carrées et plus robustes; les maladies du jeune âge sont devenues plus rares et plus curables, parce que la trame de leur organisation a été consolidée par une nourriture saine, abondante et substantielle, et la terrible fluxion périodique, qui est le fléau des haras, a fait parmi eux moins de victimes.
Je peux appuyer ce que je viens de dire sur un exemple pris, chez les étrangers. Lorsque le haras de Neustadt fut établi, il n’en sortait dans les premières années que des chevaux si petits et si fins, qu’ils étaient à peine propres au service de la cavalerie légère. Depuis que les jumens et les poulains ont été abondamment nourris, il s’est formé une race qui est une pepinière de chevaux distingués pour les officiers supérieurs de la Prusse.
L’histoire de nos erreurs nous est souvent plus utile que celle de nos succès: aussi ai-je cru devoir signaler les unes et les autres pour indiquer aux propriétaires qui s’adonnent à l’élève des chevaux les moyens de se créer une race robuste et distinguée par l’élégance, la solidité de ses formes et les qualités qui sont inhérentes à cette constitution.
Les produits des jumens communes et de celles qui n’ont qu’un ou deux degrés d’amélioration ne peuvent être employés à la reproduction. Le gouvernement ne peut donc en faire l’achat pour les divers établissemens qu’il a créés, puisque son seul but est d’obtenir des étalons. Ces poulains sont alors livrés au commerce, qui les arrache à leur terre natale pour les transporter sur divers points de la France. Il n’arrive que trop souvent qu’un grand nombre de ces poulains reste à la charge de leurs propriétaires qui en demandent un prix trop élevé ou qui ne trouvent pas d’acheteurs dans les foires où ils les conduisent; ils sont donc obligés de les conserver et ils en sont embarrassés, parce que faisant saillir leurs jumens chaque année, ils ont à nourrir la mère, le poulain d’un an et celui qui vient de naître. Ils redouteront moins cette accumulation, lorsqu’ils sauront augmenter les ressources alimentaires de leurs animaux domestiques par la création des prairies artificielles et par la culture des plantes tuberculeuses et pivotantes.
Ils ont encore à suivre une marche qui a déjà reçu la sanction du temps en Angleterre. Tous les poulains issus de jumens qui ne sont pas aptes à créer des étalons sont castrés, dès que les organes ont franchi les anneaux spermatiques et sont descendus dans les bourses.
Cette ablation se fait aussitôt qu’il est possible de la pratiquer. Ils en retirent l’avantage de conserver les forces de ces jeunes animaux dont les désirs naissans sont réprimés dès qu’ils commencent à se développer. Privés de ces organes sécréteurs, ils ne se livrent plus à ces mouvemens fougueux qui entraînent à leur suite cette foule d’accidens qui estropient ces jeunes animaux, diminuent considérablement leur valeur et les mettent quelquefois hors d’état de rendre le moindre service.
Réduits à l’impuissance, ils deviennent doux, dociles, amis de l’homme; ils restent tranquillement avec leurs mères et leurs sœurs dans les pâturages où ils sont conduits chaque jour; leur garde n’est plus une source d’inquiétudes et d’allarmes pour le cultivateur.
Ils ont besoin d’une moins grande quantité d’alimens, parce que leurs déperditions sont moins considérables. L’exercice doux et réglé auxquels ils se livrent favorise leur évolution et augmente leur taille et leur corpulence, parce que leurs fibres privées de leur rigidité native cèdent davantage à l’impulsion des liqueurs qui les arrosent. Leurs articulations se conservent dans leur intégrité primitive, puisque tous les ressorts de la machine n’éprouvent jamais les saccades violentes, cette extension forcée, qui sont la cause de toutes les maladies osseuses et synoviales qui en restreignent et trop souvent en paralysent les mouvemens.
Leur moral éprouve aussi l’influence d’un sang plus doux, plus pur, plus homogène; leur caractère farouche se mitigé ; l’esprit d’indépendance que la nature leur a donné se courbe facilement sous le joug de la servitude; ils ne résistent plus à l’empire de l’homme, parce que les attributs de leur sexe dont ils ont été privés n’exercent plus sur leurs divers organes les irradiations sympathiques qui sont si puissantes à l’époque où leurs désirs reçoivent toute leur exaltation.
Les propriétaires obtiennent un autre avantage en faisant hongrer leurs poulains communs, dès que cette opération est praticable. Ses suites en sont infiniment moins dangereuses; le manuel en est plus facile, et à peine y en a-t-il un sur mille qui périt de cette ablation des organes générateurs; tandis que les chevaux de trois, quatre et cinq ans, qui y sont soumis au moment où la gourme va faire explosion ou après qu’ils ont été rapidement engraissés pour la vente, succombent souvent sous l’influence des douleurs sympathiques que cette opération a provoquées, ou par la détonnation de la phlegmasie qui n’attendait qu’une étincelle pour produire une conflagration générale.
Un autre motif puissant doit engager les propriétaires à faire castrer leurs poulains aussitôt qu’ils peuvent leur faire subir cette opération, parce qu’ils ont la facilité de les conserver alors sans les voir exposés à aucun accident fâcheux. Ils les élèvent sans embarras et presque sans inquiétude jusqu’au moment où leur vente leur offre le plus d’avantages; ils peuvent alors les conserver long-temps pour les besoins de notre cavalerie.
Les amis des haras gémissent de voir notre belle patrie tributaire de l’étranger sous ce rapport. Une grande partie de nos chevaux de remonte vient de l’Allemagne, et nous versons dans un pays allié, mais qui peut devenir ennemi, des sommes énormes qui devraient vivifier notre agriculture et répandre dans tous nos départemens qui élèvent des chevaux des germes féconds de prospérité. L’argent qui sort de France pour ces achats ne peut y revenir que par les canaux divers de l’industrie commerciale; car le cheval transplanté ne retourne pas au lieu qui l’a vu naître; il meurt dans le pays où il a été conduit, et notre sol est privé chaque année des capitaux qui devraient l’enrichir.
Il faut nous affranchir de ce tribut que nous payons volontairement à l’étranger; il faut seconder les intentions paternelles du gouvernement et faire naître assez de chevaux pour que notre cavalerie ne puisse compter dans ses rangs que des chevaux français.
Les haras qui ont été créés pour améliorer nos races ne peuvent opérer le bien qu’on en attend que par le concours des cultivateurs. C’est en vain que le gouvernement fera des sacrifices pour avoir des étalons précieux. Si les propriétaires ne travaillent pas à remplacer leurs jumens petites, chétives, mal construites, par des poulinières plus robustes et d’une taille plus élevée, nous serons toujours pour nos chevaux de remonte sous la dépendance de l’étranger.
La jument de cinq, six et sept pouces, ne coûte pas plus à nourrir que celle dont la taille atteint à peine quatre pieds. Il n’y a pas de domaine où l’on nourrit une petite jument, qui ne puisse fournir à l’entretien d’une bonne poulinière. Pour obtenir des produits satisfaisans et jeter les bases immuables d’une bonne amélioration, les cultivateurs, comme je l’ai déjà dit, doivent appatronner leurs jumens communes avec des étalons forts et membrés, fils et petits-fils d’arabes. Leur intérêt se trouve lié à ce principe que j’émets avec confiance, parce qu’ils vendront toujours plus avantageusement un cheval grand, fort et musculeux, qu’un cheval petit, fin et nerveux.
Il est digne de remarque que les chevaux arabes, barbes, persans, kurdes, qui ont donné dans nos divers établissemens les produits les plus distingués, étaient tous remarquables parla force de leurs articulations et par la largeur et la sécheresse de leurs cordes tendineuses. N’oublions pas que les jumens depuis long-temps améliorées peuvent seules fournir des étalons, et que, par l’influence de leurs croisemens successifs avec les chevaux des contrées orientales, elles donnent des enfans souvent plus utiles que les arabes eux-mêmes à la perfection générale de nos races. Cette vérité a été depuis long-temps reconnue par les Anglais dont l’esprit méditatif et spéculateur sait si bien calculer toutes les chances de succès dans les opérations commerciales et agricoles.
Les haras ont été créés en 1806. Leurs plus grands détracteurs ne peuvent s’empêcher de reconnaître l’amélioration successive de nos races. Nous n’égalons pas encore la nation rivale qui nous dispute tous les genres d’industrie, mais nous sommes au moins sur la voie du succès; nos efforts, qui datent à peine d’un quart de siècle, ont été assez heureux pour nous faire espérer qu’en agissant avec persévérance, nous n’aurons un jour rien à leur envier sous ce rapport.
Un des grands obstacles que nous ayons à vaincre est ce funeste engouement pour les chevaux anglais, qui s’est emparé, depuis quelques années, de presque toutes les classes de la société. Sachons apprécier nos richesses territoriales, et pénétrons-nous bien de l’idée que nous ne pouvons leur donner de la valeur qu’en leur accordant une préférence exclusive.
La multiplication est toujours en raison de la consommation. Ce grand principe d’économie plane sur toutes les puissances productives. Plus nous userons de chevaux français, plus nos cultivateurs en feront naître. Quand les soins auxquels ils se livrent recevront leur récompense, ils apprendront à étudier leurs formes, à comparer leurs qualités et à s’attacher au genre de conformation qui est le signe infaillible de leur bonté.
C’est aux organes de l’opinion publique, c’est aux députés qui sont appelés à faire retentir la tribune nationale de leurs voix éloquentes, à proclamer ces vérités qui doivent donner un grand développement à notre agriculture. Il ne suffit pas de combattre l’anglomanie du haut de la tribune publique; c’est dans les sociétés particulières de la capitale qu’il faut aussi attaquer avec énergie cette funeste opinion qui entraîne un si grand nombre de Français et qui les porte à dédaigner ce qu’ils ont, pour se servir exclusivement de ce que les étrangers leur procurent à si grands frais.
Les membres de la haute société sont tous propriétaires. Ils vont contre leur intérêt direct, lorsqu’ils donnent la préférence aux chevaux anglais, puisqu’ils se privent gratuitement de l’avantage d’élever des poulains précieux dans leurs terres, et qu’ils enlèvent à leurs fermiers la branche la plus productive de leur industrie nationale.
Le désir d’améliorer le sort des cultivateurs qui les entourent, lorsqu’il vont passer quelques mois à la campagne, doit encore exercer une puissante influence sur leur cœur qui s’ouvre à toutes les impressions généreuses. Ils savent que l’habitant des communes rurales, pressé par ses besoins sans cesse renaissans, ne s’adonne qu’à l’éducation des animaux dont le débit assuré lui procure les moyens d’acquitter ses impôts et de pourvoir aux dépenses de son ménage.
Il est digne de leur philantropie de s’imposer une légère privation qui ne peut être momentanée, pour donner à leur pays dont ils occupent les sommités sociales le noble exemple de ne se servir que des produits français.
Ce sont eux qui doivent fixer le goût des chevaux dans leur terre natale, en y mettant le prix qui doit indemniser les propriétaires des frais de leur éducation. Les races limousine, auvergnate, navarrine, poitevine et normande, lenr offrent tous les genres de chevaux qu’ils peuvent désirer pour tous les usages auxquels ils les consacrent. Ils ne craignent pas de mettre deux et trois cents louis et même davantage pour avoir des chevaux anglais; et les chevaux français, qui leur coûteraient à peine le tiers des sommes énormes qu’ils dépensent pour suivre le torrent de la mode, peuvent les remplacer avec le plus grand succès.
Nos chevaux n’ont pas la vélocité des anglais; mais le petit avantage d’aller un peu plus vite est amplement compensé par le liant, par la grâce, par le moëlleux des mouvemens qui sont l’apanage des chevaux français. J’en appelle à tous ceux qui veulent juger sans prévention: trouvent-ils dans les anglais cette souplesse, ces ressorts doux et élastiques, cette liberté d’épaules, qui rendent le cheval français si agréable à monter, et qui font que le cavalier n’éprouve aucune fatigue après une chasse de plusieurs heures ou après une journée de voyage de longue haleine?
Ces qualités essentielles doivent compenser la vitesse qu’ils acquerront bientôt, si les propriétaires, stimulés par les bénéfices de leur vente, sont assurés que les chevaux qu’ils font naître ne leur seront point à charge, et qu’ils trouveront à s’en défaire dès qu’ils pourront les remplacer par d’autres élèves.
Les Français que leur naissance et leur fortune placent à la tête de la société doivent donc consommer nos chevaux de luxe, et c’est en les usant qu’ils pourront se flatter de contribuer puissamment à l’amélioration générale de nos races dont les rejetons, par des croisemens bien entendus, sauront bientôt disputer la palme de la vitesse aux chevaux anglais, tout en conservant la grâce, le liant et la liberté des mouvemens que ne peuvent leur disputer leurs antagonistes.
C’est alors que, par un heureux accord des Français de toutes les classes, nous pourrons nous flatter d’atteindre le but que le gouvernement s’est proposé en créant les haras. Ils ont été organisés de manière à porter des germes précieux sur tous les points de nos départemens. Ils n’ont point été fondés pour augmenter le nombre de nos chevaux: ils sont trop restreints dans leur développement pour en accroître la masse; mais ils sont créés pour perfectionner nos races et pour infuser dans les veines de leurs descendans les principes de force et de vie qu’ils ont reçus en héritage de leurs aïeux.
Quinze ou seize cents étalons entretenus dans les haras ne peuvent opérer aucune augmentation sensible dans le nombre de nos chevaux, puisque nous en possédons des millions; mais presque toutes nos jumens sont fécondées par les poulains communs qu’elles procréent parce que le cultivateur n’a nul intérêt à avoir de meilleures productions, dès que les prix fixés par le commerce se soutiennent toujours au même taux. Il vend aussi bien et souvent mieux le poulain qu’il fait naître sans frais que celui qui provient d’un étalon de choix dont il a payé la saillie très-cher comparativement à ses facultés pécuniaires.
Quelques personnes ont proposé, pourra viver nos haras, de porter leur budget à cinq millions, afin qu’ils pussent entretenir cinq mille étalons d’élite. Quel serait le résultat de cette augmentation des dépenses du trésor public? Le gouvernement la ferait en pure perte, puisque les propriétaires ne trouveraient aucun débouché pour les chevaux qu’ils feraient naître, et que l’encombrement de leurs écuries les forcerait bientôt à renoncer à leur éducation. Ces étalons nourris à grands frais, ne seraient point employés, parce que le succès de la monte de chaque année dépend toujours de la vente des chevaux et des poulains qui proviennent des saillies précédentes.
Le seul et unique moyen de les rendre fructueuses est donc d’user nos chevaux de toute nature. La base fondamentale, la pierre angulaire des haras, est donc la consommation des chevaux. C’est vers ce but que nous devons diriger toutes nos méditations. Tous les autres moyens d’encouragement ne sont que des accessoires qui n’ont de valeur qu’autant que le commerce des chevaux prend de l’extension; ils sont paralysés, dès que les propriétaires se trouvent forcés par sa stagnation a conserver leurs élèves. Les courses même, qui ont donné une si puissante impulsion à l’amélioration des races anglaises, n’auraient point produit l’épuration de tous leurs chevaux, si le goût de l’équitation n’avait point pénétré dans toutes les classes de la société, et si la vente de leurs élèves n’était point assurée par ce goût dominant qui porte les habitans des îles britanniques à monter à cheval le plus souvent possible. Ils en ont même fait un principe du régime hygiénique, pour que l’exercice équestre rendit le commerce des chevaux plus actif et plus avantageux.
L’intérêt personnel est la base de toutes les spéculations; c’est le lévier puissant qui fait mouvoir la société entière, et la classe des habitans de nos campagnes, qui luttent sans cesse contre les premiers besoins de la vie qu’ils ne peuvent satisfaire que par un travail soutenu, ne peut être remuée que par la perspective d’un meilleur avenir. Ils voient naître avec joie leurs veaux, leurs cochons, leurs mulets, parce qu’ils savent qu’ils peuvent les vendre à toutes les foires qu’ils suivent assiduement; mais dans beaucoup de nos provinces, ils regardent leurs poulains comme des bouches inutiles et toujours coûteuses dont ils ne se débarrassent jamais aussi promptement qu’ils le désirent.
Tant que cet état de choses subsistera, c’est en vain que le gouvernement prodiguera les primes, les encouragemens de toute nature qu’il distribue dans sa munificence; c’est en vain qu’il fera les plus grands sacrifices pour placer dans ses haras des étalons précieux qu’il fait venir de toutes les contrées renommées par leurs races chevalines. Ces récompenses décernées d’une manière solennelle, ces sacrifices énormes pour enrichir nos établissemens, seront infructueux, tant que les clauses supérieures de la société repousseront nos chevaux indigènes pour ne se servir que de chevaux anglais; elles doivent consommer nos chevaux de luxe, et notre cavalerie, remontée seulement par des chevaux français, ouvrira un large débouché aux spéculations des cultivateurs.
Il faut en revenir au plan adopté par nos pères pour les remontes de nos troupes à cheval, proscrire le système désastreux des fournitures qui ne sont utiles qu’aux entrepreneurs, et charger nos régimens de se remonter eux-mêmes, soit en achetant des chevaux de quatre ans et demi, cinq ans, soit encore mieux en établissant des dépôts de poulains dans les provinces les plus abondantes en prairies, pour que les frais de leur éducation soient moins coûteux.
Il faut même adopter ce double plan et le varier suivant les localités, pour que tous nos départemens participent à cet immense bienfait du gouvernement. Il doit être calqué sur le mode de culture généralement suivi. Alors, seulement alors, nos haras prendront toute l’extension qu’ils doivent acquérir, et nous ne verserons plus chez l’étranger des capitaux énormes dont notre agriculture se trouve nécessairement privée.
Il ne faut pas se le dissimuler: le premier de tous les encouragemens pour les cultivateurs est la vente fructueuse et certaine de leurs denrées et des animaux qu’ils font naître dans les domaines qu’ils exploitent Toutes les autres récompenses ne sont à leurs yeux d’aucune valeur, lorsque la première vient à leur manquer. Il est bien facile de le concevoir: le propriétaire qui possède deux ou trois belles poulinières auxquelles il prodigue tous ses soins, voit chaque année augmenter le nombre de leurs produits. Il en est bientôt surchargé, s’il ne trouve pas à se défaire de leurs premiers-nés; et si la vente qu’il parvient à conclure ne compense pas les frais de leur éducation, il renonce bien vite à une spéculation ruineuse, en regrettant amèrement de l’avoir entreprise.
Ce propriétaire, s’il a des jumens distinguées, les voit figurer dans la première classe de son département; il reçoit alors une prime de 50 à 70 francs par tête. Peut-on croire que cette modique indemnité puisse l’engager à se livrer constamment à l’élève des chevaux? Que sera-ce donc pour le simple cultivateur dont la poulinière, issue des premiers croisemens, n’a droit qu’à une prime de 20 à 3o francs? Il maudit le moment où il l’a conduite à l’étalon, parce que le poulain qui la suit n’est pour lui qu’un fardeau incommode que chaque jour rend plus pesant.
Ce mode de distribution des primes, quelque insuffisant qu’il fut, valait cependant bien mieux que celui qui l’a remplacé. L’administration des haras crut devoir supprimer ces faibles primes; et, dans l’intention d’agir spécialement sur les jumens distinguées, elle forma trois classes de poulinières qui recurent, lorsqu’elles étaient suitées d’un poulain, depuis cent francs jusqu’à cent écus, selon leur degré d’admission dans les trois catégories qui avaient été formées.
Quelques propriétaires dont les jumens figuraient dans une de ces classes furent enchantés de cette innovation qui leur était extrêmement avantageuse; mais la masse des cultivateurs, qui se voyait privée de ces récompenses annuelles, renonça bientôt à l’éducation des poulains qui ne lui offrait plus la moindre chance de succès. Ils conduisirent leurs jumens au baudet, et l’élève des chevaux retomba dans l’état de langueur où elle se trouvait à l’époque de la réorganisation des haras en 1806. En haras comme dans tout, il faut agir sur les masses pour obtenir des succès durables. L’ombre même de la partialité excite l’indignation, et le privilége, réel ou supposé, frappe de mort toute industrie agricole ou manufacturière. Si nous participons à toutes les charges, nous voulons être appelés à jouir de tous les bénéfices, et le cultivateur qui ne voit que le fait matériel, sans peser les motifs de la détermination du pouvoir, croit être sacrifié à ceux qui ont une position sociale plus élevée que celle qui lui est assignée.
Toute amélioration n’a de bases larges et durables que par son action sur les masses. C’est le seul moyen d’obtenir, comme je viens de le dire, des résultats satisfaisans. Le privilège, quel que soit le nom dont on le décore, quelque spécieux que soient les motifs sur lesquels on l’appuie, tue toutes les industries particulières; son souffle empoisonné détruit toute émulation et tarit toutes les sources de la prospérité publique, surtout en France où la sensibilité et l’intelligence s’exaltent avec tant de facilité. Nos sympathies comme nos répugnances ont une fougue qui nous entraîne bien au-delà de la borne posée par la sagesse.
Je ne l’ai que trop observé dans mes tournées, lorsque j’étais inspecteur du haras de Pompadour. La stagnation du commerce des poulains dirigeait les vues du cultivateur sur l’éducation des mulets; il abandonnait le bel étalon du haras pour livrer sa jument au baudet. Des poulinières d’élite étaient souillées par cette alliance impure, et le fruit de vingt-cinq années de constance et de soins sera perdu sans retour, si le commerce des chevaux français ne sort pas de l’état de langueur dont il a été frappé.
Nous ne pouvons le raviver qu’en renonçant à l’anglomanie: c’est le plus cruel fléau qui puisse sévir contre nos haras. Tant que les chevaux anglais jouiront à Paris et dans nos villes les plus populeuses d’une préférence exclusive, les propriétaires du Limousin, de l’Auvergne, de la Navarre, de la Normandie, etc., ne pourront vendre qu’à un prix très-modique les chevaux distingués qui naissent dans leurs domaines.
Ils seront forcés de renoncer graduellement à leur éducation, puisque toutes les chances de succès leur seront enlevées. Il en sera de même pour les cultivateurs, si leurs poulinières ne sont pas destinées à créer les chevaux qui doivent fournir aux remontes de notre cavalerie.
Ainsi, par une progression toujours croissante de dégénérations entretenues et fomentées par la même cause, nos belles races françaises s’éteindront insensiblement. Nous serons nous-mêmes les artisans de leur ruine, en dédaignant nos richesses pour exalter celles d’une nation rivale avec laquelle nous devons au contraire lutter de persévérance et d’industrie pour donner à tous nos produits indigènes le développement qu’amène toujours une consommation rapide et soutenue.
Certes nous devons mettre à profit les richesses de nos voisins; mais en en faisant la conquête, nous devons les marquer peu à peu du cachet français, et ce cachet-là est encore le plus noble de l’Europe. Ayons des étalons anglais pour nos jumens des provinces de l’Ouest et du Nord, dont la conformation réclame cet appareillement; mais proscrivons leurs chevaux pour notre usage particulier, et que cette prescription ne soit pas l’effet d’une loi, mais de la force de l’opinion qui doit tendre constamment à l’amélioration de notre agriculture et à accroître le bien-être des habitans de nos campagnes.
Les amateurs des chevaux anglais devraient suivre le noble exemple donné par le gouvernement. Les haras pourraient se suffire à eux-mêmes et trouver dans leur sein les rejetons qui doivent perpétuer nos belles races de selle et de trait. Il lui serait facile d’entretenir dans chaque haras des poulinières d’élite qui lui fourniraient chaque année un nombre suffisant de poulains pour remonter ses écuries et pourvoir aux besoins de chaque circonscription. Il a préféré lier l’intérêt des propriétaires à celui de l’établissement qui est appelé à leur fournir les germes précieux qui doivent faire disparaître graduellement la race commune, pour la remplacer par une race nouvelle, pleine du feu qui couve dans les veines des chevaux des contrées orientales.
Le directeur de chaque haras était chargé par l’administration d’acheter chaque année vingt à trente poulains des propriétaires qui s’adonnent avec le plus de succès à leur éducation. Ces achats sont faits à présent par les agens généraux des remontes. Je ne me permettrai qu’une seule réflexion: en enlevant aux chefs d’établissemens la faculté d’acheter eux-mêmes les poulains qu’ils étaient à même de bien juger, puisque leur devoir est de connaître tous leurs ascendans paternels et maternels, on les a privés de l’influence qu’exerce toujours celui qui donne de l’argent sur celui qui en reçoit. Il résulte de ces achats annuels que les propriétaires, stimulés par les bénéfices qu’ils en retirent, travaillent sans cesse à améliorer leurs races et à donner à leurs élèves les formes et les qualités qui doivent les rendre dignes un jour d’être consacrés à la reproduction.
Que ces achats annuels n’aient plus lieu, bientôt le découragement succédera à la ferveur, et, malgré la distribution des primes, presque tous renonceront à leur éducation, parce que, privés de tout autre débouché, ils ne pourront conserver dans leurs écuries des animaux dont l’entretien journalier serait pour eux une source de dépenses qui altéreraient leur fortune.
C’est donc aux officiers de nos différens corps de cavalerie, c’est donc à tous ceux que leur position sociale met à portée d’acheter des chevaux de sang, à suivre la marche tracée par le gouvernement et à débarrasser nos provinces les plus favorisées sous ce rapport des élèves que leur âge rend propres à être montés ou à être attelés. Par cet heureux concert, nos haras n’auront bientôt plus rien à envier à l’étranger, et nos départemens se peupleront de chevaux distingués qui fourniront à tous nos besoins civils et militaires.
Nous entourons le trône du monarque de nos hommages et de notre amour. Pouvons-nous lui offrir un tribut plus digne de ses sentimens paternels que d’améliorer le sort de notre population agricole et de lui fournir les moyens de réaliser le vœu de son illustre aïeul qui voulait que chaque paysan de son royaume pût mettre le dimanche la poule au pot. L’intérêt général n’est que la collection des intérêts particuliers. Rendons donc nos compatriotes le plus heureux possible, pour que leur bonheur rejaillisse sur nous et vienne accroître la somme de notre félicité.
La tyrannie de la mode, qui exerce un si grand empire en France, vient encore frapper de réprobation les chevaux de nos provinces méridionales. On ne veut à Paris que des chevaux d’une taille élevée. Nos départemens de l’Est et du Sud n’en fournissent en général que de la taille de 6 à 8 pouces, et ce sont sans contredit les meilleurs. Lorsqu’ils outrepassent ces dimensions, cette élongation est au détriment de leur nerf et de leurs qualités.
Le cheval qui sort des proportions que lui assigne le sol natal perd le liant, la souplesse, la grâce, la force, la légèreté, qui ne peuvent dépendre que de la juste concordance de ses parties. Des appatronnemens mal raisonnés, que l’intérêt seul peut dicter, proviennent des chevaux décousus dont l’encolure longue et charnue, les épaules chargées, le corps étoffé, la croupe arrondie, reposent sur des jambes fines et déliées. Elles ont peine à soutenir la masse dont elles sont surchargées: comment pourraient-elles résister à la fatigue, lorsqu’elles ont encore à supporter le poids du cavalier qui exige des allures brusques et rapides? Ces appareillemens défectueux ne peuvent être attribués qu’au goût dominant pour les chevaux de haute taille, parce que les propriétaires n’ont de chevaux que pour les vendre.
Je ne crains pas de le dire, cette passion pour les grands chevaux ne peut être fondée que pour les hommes d’une haute stature: il faut toujours qu’il y ait concordance entre le cheval et le cavalier. Les hommes d’une taille ordinaire, les femmes, sont plus en harmonie avec un cheval de 4 pieds 6 à 8 pouces qu’avec un cheval d’une hauteur plus considérable.
Il en est des chevaux comme de l’homme. C’est dans la taille moyenne que l’on trouve les individus les plus forts, les plus agiles, dont les mouvemens sont pleins de vigueur et de grâce. Ceux qui outrepassent ces dimensions n’ont ni la même énergie ni la même souplesse; ils ne sont pas susceptibles de se rassembler avec un accord aussi parfait des agens musculaires, et de concentrer leurs forces pour opérer les mouvemens que le cavalier veut leur faire exécuter. Il est bien à désirer pour nos haras du midi, et par conséquent pour les propriétaires qui se livrent à l’élève des chevaux, que cette mode si funeste à notre agriculture soit frappée de réprobation par tous ceux qui exercent quelque influence dans la société.
J’ai signalé la cause la plus puissante de destruction qui menace nos haras. J’ai prouvé jusqu’à l’évidence que le gouvernement ferait en vain des sacrifices énormes pour nos établissemens, si nous repoussons ses bienfaits, en préférant les chevaux anglais à nos chevaux indigènes, et si les remontes de notre cavalerie ne se font pas exclusivement en France. Il me reste à présent à parler de l’organisation actuelle des haras.
J’aborde avec timidité cette question vitale pour la prospérité de nos races; elle mérite de fixer l’attention de tous ceux qui désirent leur amélioration. Loin de moi la pensée de jeter la moindre défaveur sur l’administration qui les régit. J’en ai reçu trop de preuves de bienveillance, pour que ma gratitude ne soit pas aussi vive que durable. Je rends justice au zèle que déploient tous les officiers dans les diverses fonctions qui leur sont confiées, et si leurs efforts réunis n’ont pas eu tout le succès qu’ils se flattaient d’en obtenir, oh peut dire au moins qu’ils ont fait tout ce qu’il était possible de faire dans leur position, pour atteindre le but que le gouvernement s’était proposé en créant les haras. Ils ont à lutter contre des obstacles qu’ils ne surmonteront jamais, tant que le vioe radical qui a entravé leurs efforts et qui est inhérent à l’administration générale ne sera pas extirpé.
Nous ne pouvons nous dissimuler cette vérité : la prospérité de nos haras dépend du concours mutuel du gouvernement et des propriétaires qui s’adonnent à l’élève des chevaux. Toutes les tentatives auxquelles le premier se livrera pour encourager leur éducation seront infructueuses, tant que la vente des poulains sera aussi peu lucrative qu’elle l’est en ce moment, et qu’elle n’aura pas cette fixité qui peut seule engager les cultivateurs à faire succéder les générations aux générations
Je répète encore que la consommation de nos chevaux indigènes est le seul et unique moyen d’améliorer et de multiplier nos races. Quand le goût de l’équitation pénétrera dans toutes les classes supérieures de la société, et que l’exercice à cheval sera préconisé en France comme en Angleterre pour un des plus puissans moyens que l’hygiène puisse indiquer pour conserver une santé robuste et florissante, et pour se mettre à l’abri de toutes les maladies de langueur qui minent lentement la constitution, alors la prospérité de nos haras sera établie sur une base immuable.
La distribution des primes produit d’excellens effets: les courses établies dans plusieurs départemens engagent un assez grand nombre de propriétaires à conserver des chevaux pour les faire briller dans l’hippodrome et obtenir les prix que la munificence royale s’est plue à accorder; mais tous ces encouragemens n’ont qu’une sphère d’activité peu étendue, et c’est sur la masse des cultivateurs qu’il faut agir pour obtenir des résultats aussi larges que durables.
Le Ministre de la guerre est le grand consommateur de nos chevaux indigènes. C’est principalement pour les chevaux de selle que son intervention jouit de la plus grande efficacité. Ils ne sont point propres à l’agriculture, et leur vente peut seule dédommager les propriétaires des fiais de leur éducation. C’est donc spécialement sur toutes ces races de selle que la sollicitude du gouvernement doit se fixer.
Ces idées mères conduisent nécessairement au désir de voir détacher nos haras du ministère de l’intérieur pour leur donner une organisation militaire. S’ils se trouvaient dans les attributions du ministre de la guerre, ce haut fonctionnaire baserait les remontes des régimens sur nos diverses races départementales. Chaque corps de cavalerie serait réparti de manière à trouver dans la circonscription qui lui serait assignée tous les chevaux nécessaires à ses besoins; et s’il m’est permis d’exprimer un vœu qui influerait, je crois, sur l’amélioration de nos races, c’est que la taille des chevaux désignés pour chaque arme fût diminuée d’un pouce pour leur admission; il en résulterait qu’un plus grand nombre de cultivateurs serait appelé à jouir du bénéfice de concourir à nos remontes, et que l’élan imprimé à nos haras recevrait une plus grande extension.
Notre cavalerie aurait des chevaux moins grands, mais plus nerveux, plus souples, plus légers, plus maniables dans leurs diverses évolutions et bien plus aptes à soutenir toutes les fatigues de la guerre, parce que les appareillemens seraient mieux calculés et que les propriétaires ne chercheraient point, dans tous les départemens du midi, à leur donner cette élongation qui est toujours au détriment de leur vigueur et de leur santé.
Nos guerriers montés sur des chevaux d’une taille un peu moins élevée, mais plus robustes et plus ardens, n’en seraient que plus redoutables à l’ennemi. Leurs coups seraient assénés de moins haut, mais leur force serait accrue par l’impulsion de leurs coursiers, et la facilité avec laquelle ils manœuvreraient rendrait leur choc plus destructeur. Ils imiteraient cette excellente cavalerie mameluke, arabe, turque, kurde, qui, par la précision et la légèreté de ses mouvemens, la vivacité de ses attaques, la facilité de ses retraites, est la plus forte barrière que l’empire du Croissant puisse opposer à ses agresseurs.
Dans tous les combats de cavalerie, à courage égal, l’avantage ne reste pas aux chevaux les plus pesans, mais à ceux qui ont le plus de nerf et de vigueur. Combien de fois nos chasseurs et nos hussards n’ont-ils pas enfoncé les escadrons des cuirassiers autrichiens dont les mouvemens lourds et embarrassés étaient paralysés par la vivacité de nos cavaliers qui voltigeaient autour d’eux?
Les officiers supérieurs de la cavalerie russe se servent des chevaux anglais pour les revues et les parades; mais le jour du combat ils donnent la préférence à leurs chevaux cosaques.
Nos haras, placés sous la direction du ministre de la guerre, devraient recevoir une telle organisation, qu’ils seraient une école d’équitation pour notre cavalerie. Chaque dépôt d’étalons de selle serait destiné à former des jeunes gens qui, imbus des principes qu’ils y auraient puisés, seraient employés ensuite comme sous-officiers dans les corps qui réclameraient leurs services.
Le vétérinaire attaché à chaque établissement aurait assez d’instruction pour donner chaque jour des leçons sur la conformation extérieure du cheval, sur les tares qui le déforment et le rendent incapable de soutenir les fatigues de la guerre et sur toutes les pièces qui composent sa charpente osseuse; car l’ostéologie doit être étudiée, pour que l’extérieur du cheval puisse être convenablement exploré.
Chaque établissement serait commandé par un capitaine qui aurait sous lui un lieutenant et un sous-lieutenant dont l’un serait chargé de la comptabilité et dont l’autre serait préposé au service des écuries et du manège. Chaque cavalier devrait savoir lire et écrire, pour qu’il fût en état de profiter de l’instruction qu’il recevrait et qu’il pût se rendre utile dans les grades qu’il aurait en expectative. Ils vivraient en commun, et la haute paie qu’ils pourraient recevoir ne formerait jamais un article de dépense aussi considérable que celle qu’entraînent à présent l’entretien et la solde des palefreniers.
Les dépôts d’étalons de trait seraient affectés à l’artillerie légère qui utiliserait ces chevaux en les rompant à tous les exercices de cette arme.
Les généraux commandant les départemens seraient les inspecteurs de ces établissemens et rempliraient l’office des inspecteurs généraux actuels. La statistique de chaque département, établie sur les besoins réels de l’agriculture, mettrait à même de connaître les provinces qui peuvent faire naître des chevaux et celles qui peuvent les élever à moins de frais à cause de l’abondance et de la richesse des pâturages.
Au lieu de n’acheter pour les remontes que des chevaux tout formés, on établirait, selon les localités, des dépôts de poulains qui seraient dirigés sur les points les plus favorables à leur développement.
Ces migrations ne pourraient qu’accroître leur vigueur et fortifier leur santé. Ils seraient distribués en deux sections: l’une se composerait des poulains de deuxième et troisième sang qui seraient immédiatement castrés, pour que leur garde fût plus facile, que les accidens inséparables des grandes réunions fussent moins à redouter, et pour qu’ils consacrassent tout leur temps à leur alimentation, au lieu de se livrer des combats multipliés. Chaque âge aurait ses compartimens séparés, pour que les plus forts ne fissent pas la loi aux plus faibles.
La seconde section serait formée par les poulains d’élite, dont les facultés génératrices seraient conservées. Ils formeraient la pépinière des étalons. Ceux qui ne seraient pas jugés dignes de concourir à la reproduction, seraient hongrés à cinq ans et cédés aux officiers de cavalerie pour le prix qui serait fixé par l’administration.
Les poulains hongres de la première section, dont l’évolution n’aurait pas répondu aux espérances qu’on en avait conçues, seraient vendus à l’encan et formeraient d’excellens chevaux de service pour les propriétaires.
Le capitaine commandant chaque dépôt, le général qui serait fixé dans le département, auraient des liaisons multipliées avec les propriétaires qui s’adonneraient à l’élève des chevaux. Ils stimuleraient leur zèle et remplaceraient les officiers actuels des haras dont les admonestations ont peu d’efficacité, parce qu’elles ne sont pas appuyées sur l’intérêt personnel qui est le grand lévier des actions humaines. Achetant un grand nombre de poulains, ils exerceraient une influence immense sur les cultivateurs, et ils les forceraient à étudier le genre de conformation que nous devons rechercher pour avoir de bons chevaux.
Chaque année un jury composé de militaires et de propriétaires accorderait des récompenses aux cultivateurs qui obtiennent le plus de succès dans l’élève des poulains. Parce que leurs jumens poulinières sont mieux soignées et qu’elles ont plus de noblesse et plus de distinction que celles de leurs rivaux, quelques personnes se sont élevées contre cette distribution annuelle des primes qu’elles ont regardées comme totalement inutiles. Il faut plaindre le myope dont les regards bornés ne peuvent embrasser qu’une faible partie de l’horizon. Si le gouvernement fait sentir son influence dans la perception des impôts qu’il est obligé de lever pour faire face aux diverses dépenses de l’Etat, ne doit-il pas aussi distribuer des récompenses pour que ses intentions paternelles soient appréciées des cultivateurs? Cette réunion de charges et de bénéfices forme le lien puissant qui maintient l’harmonie entre l’autorité tutélaire et les sujets obéissans. L’émulation excitée par les primes ne doit pas être détruite.
Cette fusion de l’état militaire et civil lierait davantage leurs intérêts et leur apprendrait qu’ils se doivent un mutuel secours pour le bonheur du monarque et la prospérité de la patrie. Elle concourrait à effacer ces divisions odieuses, ces dénominations offensantes, qui élèvent un mur de séparation entre le citoyen et le soldat, comme si l’un ne devait pas voler à la défense du pays au jour du danger, et que l’autre ne dût jamais quitter les insignes militaires pour retourner au foyer de ses pères.
Dans cette mutation de ministère, les haras obtiendraient l’avantage de se trouver plus immédiatement sous les regards de l’héritier du trône qui s’est réservé la surveillance des affaires militaires, et dont le goût prononcé pour les chevaux communiquerait une impulsion vivifiante à tous nos établissemens.
Tous ces changemens s’opéreraient sans secousse, sans innovation brusque et intempestive. Les officiers actuels des haras seraient conservés, tant qu’ils pourraient être utiles, parce que leur zèle et leurs connaissances font une loi de leur conservation. Les extinctions et les retraites à l’âge où le repos est nécessaire donneraient seules le signal de leur remplacement.
Il n’y aurait que la sommité de l’administration de déplacée. L’impulsion viendrait du ministre de la guerre, au lieu d’être donnée par celui de l’intérieur, et peu à peu les haras prendraient l’organisation militaire qui doit contribuer à leur prospérité et leur donner le développement qu’ils n’acquerront jamais, tant que le mode actuel subsistera. Ils sont établis sur une trop petite échelle pour qu’ils exercent une grande influence. Ils ne peuvent s’améliorer qu’en faisant marcher de front le perfectionnement de nos races et leur multiplication. Nous n’obtiendrons ce résultat qu’en liant l’existence de nos dépôts avec les besoins des remontes de notre cavalerie.
Il y a, j’en suis persuadé, concert entre les ministres de l’intérieur et de la guerre pour les remontes de nos régimens; mais cette union ne peut jamais avoir la force d’une volonté seule et unique qui, devant trouver dans ses propres moyens les ressources nécessaires pour faire face au service spécial qu’elle doit remplir, la porte à prendre toutes les mesures qui peuvent en assurer l’exécution. Il y a unité de vues, unanimité de moyens, impulsion directe et continue, et tout marche avec cette activité et cette persévérance qui assurent le succès.
Je crée peut-être une utopie en me livrant à ces réflexions; mais j’ai cru devoir les exprimer pour que l’attention publique se dirigeât sur les moyens de coordonner nos haras avec les remontes de notre cavalerie. Je puis me tromper, mais je crois fermement que leur direction doit être confiée au ministre de la guerre, parce que la multiplication des chevaux étant toujours en raison de leur consommation, plus il en achètera aux propriétaires, plus il en fera naître.
Je crois aussi que le vrai moyen d’imprimer un élan rapide à nos établissemens et de leur donner tout l’essor qu’ils sont susceptibles de recevoir est d’acheter spécialement les poulains à l’âge d’un an, pour que les cultivateurs, assurés de la vente de leurs élèves et s’en débarrassant dans le moment opportun, fassent succéder les générations aux générations et puissent fournir à tous nos besoins civils et militaires.
Il y a déjà bien des années que cette union de nos haras avec le service militaire a été regardée comme la combinaison la plus avantageuse qui pût être effectuée pour rendre nos établissemens prospères. Elle fixa même l’attention des ministres; mais ce projet fut abandonné avant d’avoir été mûri, parce que les nouveaux délégués du pouvoir ne partagèrent pas l’opinion de leurs prédécesseurs, ou dirigèrent leurs vues sur des objets qui leur parurent plus importans.
En donnant à nos haras la direction que je viens d’indiquer, en formant chacun de nos établissemens pour une école d’équitation et pour l’instruction élémentaire des jeunes gens qui, après y avoir passé plusieurs années, iraient porter dans les divers corps de cavalerie les connaissances qu’ils y auraient puisées, nous obtiendrions l’immense avantage de répandre plus généralement le goût des chevaux.
Ces jeunes gens apprendraient à les connaître, à les dompter, à les appareiller convenablement, pour en obtenir des rejetons précieux; ils les suivraient dans toutes les phases de leur existence, depuis le moment de leur naissance jusqu’à leur caducité, et dans les conversations fréquentes avec les militaires de leur corps, ils leur inculqueraient les principes dont ils seraient imbus.
Rentrés sous le toit paternel, ils n’oublieraient point les leçons qu’ils auraient reçues; ils en feraient l’application chaque jour, puisque la jument du domaine et ses nourrissons seraient l’objet constant de leurs soins; ils imiteraient nos familles de palefreniers des haras, dont les enfans, guidés par leur goût héréditaire, s’occupent des chevaux, dès que leurs faibles mains peuvent manier la brosse et l’étrille.
Les étalons les plus fougueux respectent leur faiblesse et se prêtent même avec une sorte de complaisance aux soins qu’ils en reçoivent. Ces enfans, parvenus à l’âge adulte, se distinguent, par leur adresse et leur intelligence, des jeunes gens de leur âge qui ne commencent leur service de palefrenier qu’à l’époque où ils peuvent être réellement utiles.
Tous nos officiers de cavalerie ont fait la même observation sur les conscrits que le sort désigne pour entrer dans les rangs de nos défenseurs. Ceux qui sont nés dans les départemens populeux en chevaux forment en général l’élite de leurs cavaliers. Leurs chevaux sont mieux tenus, mieux pansés, plus gras, plus dociles, que ceux qui sont confiés aux militaires qui n’ont pas reçu les mêmes erremens dans la maison paternelle, parce que leur terre natale est moins propre à l’éducation de ces animaux, et que les affections de leur enfance, qui sont d’une nature indélébile, n’ont point été dirigées sur ces nobles compagnons de leurs travaux guerriers.
J’ai long-temps hésité pour exprimer ces réflexions. Je craignais qu’on ne les regardât comme une attaque directe contre l’administration dans laquelle j’ai servi plus de vingt-six ans; mais rassuré par la pureté de mes motifs qui n’ont d’autre but que la prospérité de nos haras, je me suis décidé à les livrer à l’impression, bien persuadé que mes intentions ne seront pas dénaturées et que mes anciens collègues, comme le public, rendront justice aux sentimens qui ont guidé ma plume.
J’aurais pu, dans ces considérations générales sur les haras, parler de l’influence que l’établissement des courses doit exercer sur l’amélioration de nos races chevalines. C’est à leur toute-puissance qu’il faut attribuer la supériorité des chevaux anglais; j’ai mieux aimé en faire un article séparé qui servira de complément à ce chapitre déjà trop long.