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LE VENDEUR

J’ai appris à boire comme un professionnel au moment où les lois du pays disaient que je n’avais pas le droit, et ce qui a d’abord été un caprice de jeune homme est devenu une habitude qui m’a éventuellement collée aux talons et m’a presque coûté ma carrière.

Mon adolescence s’est déroulée sans histoire. J’ai grandi sur une ferme mais je n’entrevoyais pas y passer ma vie. Je voulais être un homme d’affaires, j’ai suivi des cours de gestion au collège, j’ai acheté un camion et un étal au marché de la ville voisine et je me suis lancé en affaires. J’achetais des produits agricoles à la ferme de mes parents et je les vendais aux clients de la ville qui étaient nombreux et avaient beaucoup d’argent.

J’ai connu la vie normale d’un fils de fermier. Mes parents étaient exceptionnellement compréhensifs. Mon père a été un grand ami jusqu’à sa mort. Je mettais en pratique la théorie des affaires que j’avais apprise au collège et j’étais mieux préparé que mes concurrents à réussir matériellement. Rapidement, j’ai pris de l’expansion et j’ai été présent sur tous les marchés de la ville et de la ville voisine. En 1921, nous avons eu un avant-goût de la dépression à venir et mes clients ont disparu. J’ai dû fermer mes étals un à un et j’ai finalement été totalement ruiné. Étant un jeune homme qui avait commencé à faire quelques affaires tout en buvant socialement, j’avais maintenant du temps et je semblais en prendre de plus en plus.

Après un an de travail en usine, au cours de laquelle je me suis marié, j’ai trouvé un travail de commis dans une épicerie. Mon épicier-employeur était un expert fabricant de vin et j’avais libre accès à sa cave. Le travail était extrêmement monotone, confiné derrière un comptoir toute la journée, moi qui avais l’habitude de me promener d’un étal à l’autre surveillant mes affaires, de rencontrer des gens et de préparer ce qui, à mon avis, était un brillant avenir. Je considère également comme événement important la mort de mon père qui m’a beaucoup manqué.

Je buvais du vin, et de l’alcool à l’occasion. J’ai quitté l’épicerie pour retourner au commerce des produits agricoles et de retour dans le monde, j’ai repris de l’alcool et j’ai eu mon premier avertissement qu’il serait préférable que j’arrête avant qu’il ne soit trop tard.

Je cherchais une entreprise qui me permettrait de me refaire financièrement, et j’ai trouvé du travail avec une société nationale de biscuits. On m’a attribué un bon territoire, composé de plusieurs villes importantes et j’ai immédiatement commencé à faire beaucoup d’argent. Rapidement, je suis devenu le vendeur-étoile de la société et j’avais la réputation d’un bon brasseur d’affaires. Évidemment, je buvais avec mes meilleurs clients, car mon territoire comprenait plusieurs endroits favorables aux affaires. Je gardais le contrôle et au début, je rentrais rarement avec des effets visibles de ma consommation.

J’avais une brasserie privée à la maison qui produisait environ 15 gallons par semaine, et je buvais presque tout moi-même. Manifestation typique de mon attitude face à l’alcool, lorsqu’un incendie a menacé de détruire totalement ma maison et mon garage, je me suis précipité à la cave pour sauver mes biens les plus précieux, un tonneau de vin et toute la bière que j’ai pu emporter, et je me suis fâché quand ma femme a suggéré que je devrais plutôt tenter de sauver les biens de la maison avant qu’elle ne soit totalement détruite par le feu.

Je me suis rapidement lassé de ma fabrication de bière domestique et j’ai commencé à ramener à la maison des bouteilles de whiskey de contrebande très fort. J’ai d’abord bu un demi-litre chaque soir avant de me permettre un plein litre après le dîner. Pendant un certain temps, j’espaçais mes consommations sur la route et je ne buvais presque pas en matinée. J’avais hâte de rentrer à la maison pour boire. Rapidement, j’ai commencé à boire toute la journée.

Les gérants de grandes surfaces et les gros clients étaient à la fois mes invités et mes hôtes et nous faisions de temps à autres de grandes fêtes. Enfin, suivant une réorganisation de l’entreprise, je me suis retrouvé avec un bien mauvais territoire. J’ai donné un avis de deux semaines à l’entreprise et j’ai quitté mon emploi. J’avais acheté une maison, mais au cours de l’année et demie qui a suivi, j’ai eu peu de revenus et je l’ai perdue. Je me suis contenté d’à peine de quoi vivre et acheter mon alcool. Je me suis ensuite retrouvé à l’hôpital quand ma voiture a été démolie par un camion. Cette perte et mes blessures ajoutées aux plaintes de ma femme m’ont en quelque sorte dessaoulé pour un temps. En sortant de l’hôpital, je suis demeuré abstinent pendant six semaines et j’avais décidé d’arrêter de boire.

Je suis retourné dans le domaine où j’avais connu du succès comme vendeur, mais avec une autre entreprise. Au début de ce nouvel emploi, j’ai discuté avec ma femme et je lui ai fait des promesses solennelles. Je ne toucherais plus à une goutte d’alcool.

À cette époque, la Prohibition était chose du passé et les clubs et bars où j’étais connu comme un bon client qui dépensait beaucoup sont devenus mes clients à leur tour. J’ai développé les affaires jusqu’à ce que je redevienne un vendeur-étoile, mais après quatre mois dans ce nouvel emploi j’ai fait une rechute. Il n’est pas inhabituel dans la vie d’un buveur qu’après quelque temps d’abstinence, il se dise qu’il « peut en prendre un peu. » Très rapidement, l’alcool est redevenu la chose la plus importante de ma vie et les jours se ressemblaient, je buvais sans arrêt dans chaque club et bar sur ma route. Chaque soir, je rentrais au bureau très éméché, ayant de la difficulté à garder mon équilibre. J’ai commencé à recevoir des avertissements, on m’a congédié, puis réembauché. À ce moment, les parents de ma femme sont décédés dans des circonstances malheureuses. J’étais accablé de problèmes et l’alcool était le seul refuge que je connaissais.

Certains soirs, je ne rentrais pas à la maison et lorsque je le faisais, j’étais de mauvaise humeur quand ma femme avait préparé le souper et de mauvaise humeur également si elle ne l’avait pas préparé. Je refusais de manger et souvent, lorsque j’avais mal calculé la quantité d’alcool nécessaire à ma consommation, je retournais en ville pour refaire mes provisions. Pour démarrer le matin, il me fallait cinq doubles whiskeys. J’entrais dans un bar tremblant comme une feuille, les traits tirés et malade comme un chien, j’avalais deux doubles whiskeys, je sentais tout de suite l’effet et je me transformais presque aussitôt. Après une demiheure, je pouvais naviguer à peu près correctement et je commençais ma journée. Mes rapports quotidiens étaient illisibles et, après avoir été arrêté pour conduite en état d’ivresse, j’ai eu peur et je suis demeuré abstinent pendant plusieurs jours. Peu de temps après, j’ai été viré pour de bon.

Ma femme m’a suggéré de me retirer dans ma vieille maison de campagne, ce que j’ai fait. Ma consommation incessante a convaincu ma femme que j’étais un cas désespéré et elle a demandé le divorce. Je me suis trouvé du travail, mais je n’ai pas cessé de boire. Je travaillais même si ma condition physique était telle que j’aurais dû être hospitalisé. Pendant des années, je n’ai pas connu une bonne nuit de sommeil et je ne me suis jamais réveillé la tête claire. J’avais perdu ma femme et je m’étais fait à l’idée que je m’endormirais un soir pour ne jamais plus me réveiller.

Chaque ivrogne a un ou deux amis qui ne désespèrent pas de lui, mais dans mon cas, je les ai perdus. Tous, sauf ma mère qui, bonne âme, a tout tenté pour moi. À son initiative, les gens venaient me voir et me parlaient, mais rien de ce qu’ils disaient, qu’ils soient pasteurs ou gens d’église, ne m’aidait. Quand ils étaient là, j’étais d’accord avec eux, mais dès leur départ, je retournais à ma bouteille. On ne m’a rien proposé qui semblait une solution.

J’étais au point où je voulais cesser de boire mais je ne savais pas comment. Ma mère avait entendu parler d’un médecin qui connaissait du succès avec les alcooliques. Elle m’a demandé si j’accepterais de lui parler et j’ai accepté d’y aller avec elle.

J’avais, bien sûr, entendu parler des différents remèdes et après avoir parlé de ma consommation en détail, le docteur m’a suggéré de me rendre à l’hôpital local pour un court séjour. J’étais sceptique, même après que le médecin m’eut dit que son plan comprenait plus qu’un traitement médical. Il m’a parlé de plusieurs hommes que je connaissais qui avaient été soulagés et il m’a invité à en rencontrer quelques-uns qui se réunissaient chaque semaine. J’ai promis que je serais présent à leur prochaine réunion mais je lui ai dit que je n’avais pas beaucoup d’espoir en ce qui avait trait au traitement à l’hôpital. Le soir de la réunion, fidèle à ma parole, j’ai fait la connaissance du petit groupe. Le médecin était présent, mais je me sentais un peu à l’écart de ce cercle. La réunion était informelle et je n’ai pas été impressionné. C’est vrai qu’ils ne chantaient pas de psaumes, qu’il n’y avait aucun rituel, mais les choses religieuses ne m’intéressaient pas. Si j’avais pensé à Dieu pendant toutes ces années de consommation, c’était surtout pour me dirre qu’au moment de la mort, je pourrais toujours m’arranger avec Lui.

J’ai dit que la réunion ne m’avait pas impressionné. Pourtant, je voyais des hommes que j’avais connus comme de bons ivrognes travailleurs, apparemment sensés, mais j’ignorais comment m’intégrer à eux. Je suis rentré à la maison, je suis demeuré abstinent pendant quelques jours, mais j’ai rapidement repris ma consommation régulière d’alcool chaque jour.

Six mois plus tard, après une superbe cuite, en larmes et totalement démuni, je me suis rendu chez le médecin. Il m’a soigné et m’a fait conduire à la maison d’un de mes parents. Je lui ai dit que j’étais prêt pour le remède, le seul remède. Il m’a envoyé deux membres. Ils ont été gentils avec moi, m’ont raconté ce qu’ils avaient vécu et comment ils avaient gagné leur bataille contre l’alcool. Ils m’ont clairement dit que je devais chercher Dieu que je devais lui exposer mon cas et lui demander de l’aide. J’avais depuis longtemps oublié la prière. Je crois bien que ma première prière sincère a dû sembler bien faible. Je n’ai pas ressenti de changement subit, et je n’ai pas immédiatement cessé d’avoir soif, mais j’ai commencé à apprécier mes rencontres avec ces gens et j’ai commencé à remplacer mon habitude d’alcool par quelque chose qui m’a aidé au plus haut point. Chaque matin, je lisais un chapitre de la Bible et je demandais à Dieu de me protéger du-rant la journée.

Je veux parler d’une autre chose, une chose très importante. Je crois qu’il aurait été bien plus difficile de rentrer dans le droit chemin si je n’avais pas immédiatement été mis à contribution. Je ne parle pas de mon métier de vendeur. Je parle de quelque chose qui est nécessaire à mon bonheur continu. Pendant que je tentais avec difficulté de reprendre mon métier de vendeur, le médecin m’a demandé d’aller voir un autre alcoolique qui était hospitalisé. Le médecin m’a simplement demandé de raconter mon histoire. Je l’ai fait, probablement très mal, mais aussi simplement et aussi sérieusement que je l’ai pu.

Je suis abstinent depuis deux ans, grâce au fait que j’ai confié ma volonté à une Puissance supérieure, et rien d’autre. Cela ne s’est pas fait d’un seul coup. C’est devenu une tâche quotidienne, il le fallait. Chaque jour, j’ai de nouvelles forces et je n’ai jamais atteint le point où j’ai eu envie de dire : « Merci, mon Dieu. Je crois que je suis capable de ramer seul désormais. » J’en suis reconnaissant.

J’ai repris la vie commune avec ma femme, je réussis bien en affaires et je paie mes dettes au meilleur de mes capacités. J’aimerais trouver de meilleurs mots pour raconter mon histoire. Mes anciens amis et employeurs sont étonnés et voient en moi la preuve vivante que la solution que j’ai appliquée donne des résultats. J’ai été privilégié d’être entouré d’amis qui étaient prêts à m’aider, mais je crois fermement que tout homme peut atteindre le même résultat s’il y consacre sincèrement ses efforts et fait la volonté de Dieu.

Expérience, force et espoir

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