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V

Table des matières

Naïveté d’un plaideur.

P. 105.

Un villageois de Normandie avoit baillé à un sien voisin une terrinée de lait à garder; quand il lui redemanda son lait, ce voisin, foit qu’il l’eût mangé ou répandu, lui dit que les mouches l’avoient mangé. Sur quoi ce villageois le fait assigner. Etant devant le Juge & ayant fait plaider sa cause, le Juge le condamne à payer la terrinée de lait; le voisin s’en veut excuser, disant que les mouches l’avoient mangé ; à quoi le Juge répondit qu’il les devoit avoir tuées. Quoi! répond le païfan, eft-il donc permis de tuer les mouches? Le Juge lui dit qu’oui. En quelque lieu que je les trouve, monsieur? répond le païfan. Oui, dit le Juge, en quelque lieu que ce foit, je te le permets; lors le païfan voyant une mouche sur la jouë du Juge, s’approche de lui & lui baille un beau soufflet, disant: la voilà la galante de mouche, je gage que c’eft une de celles qui ont mangé mon lait. Le Juge quoiqu’il se sentît frappé, n’osa faire aucune instance, vû la permission qu’il lui en avoit donnée.

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